Comment devient-on un grand couturier ? Enfant, au musée des Beaux arts de sa ville natale d'Arles, Christian Lacroix est tombé en arrêt devant un atelier de couture du XVIIIè s. peint par Antoine Raspal.
C'est dans "Traits pour traits" (France Inter, été 2013) l'une des 12 videos exploratoires de tableaux créées par Pascale Lismonde (critique d'art A.I.C.A.)) avec Christine Siméone (France Inter) et le réalisateur Marc Perrin (Strass Productions)
http://www.franceinter.fr/emission-traits-pour-traits-christian-lacroix-est-ne-dans-un-tableau-de-raspal
L'alphabet a introduit, dans nos vies, un ordre qui n'est que de lui. Pas de classement auquel il ne préside peu ou prou, de réalité qui n'en porte le sceau, de société développée, c'est-à-dire à État, à école, avec des bibliothèques et des librairies, qui puissent tenir une seconde sans lui. Il est rationnel dans son principe. Il fut, vers 1400 avant notre ère, une révolution dans la révolution graphique. Des hommes qui vivaient du côté d'Ugarit, dans l'actuelle Syrie, s'avisèrent de noter les sons de la parole, qui sont en très petit nombre, au lieu de s'épuiser à représenter les choses, dont la foule est infinie.
Mais l'ordre dans lequel se présentent les caractères est arbitraire. Pourquoi A, d'abord, aleph, qui figure une tête de taureau à l'envers, puis B, beth, la maison à un étage et toit plat du Moyen-Orient, G, gimel, le cou du chameau, D, daleth, la porte... Les Sémites occidentaux qui ont créé cette merveille ne s'en sont pas expliqué.
Il s'ensuit d'étranges voisinages. Dans le dictionnaire, par exemple, l'enfant cohabite avec l'énergie, l'événement et l'enfer, janvier avec le jansénisme et le Japon et il en résulte des interférences troublantes, infinies. Le rapprochement joue encore aux rayons des librairies où des hommes, c'est-à-dire des vies, des vues que tout sépare, le temps, la géographie, la pensée, cohabitent en silence.
Grande exposition organisée par Christian Lacroix à la BNF en 2005 sur la couleur rouge dans l'histoire du costumes / cf cet interview
http://expositions.bnf.fr/rouge/rencontres/01.htm
Parfois gronde le bruit poignant de la fermeture d'une librairie qui ne s'en sort plus. Entendez et choyez le plus possible celles qui sont encore là. Dans ces lieux de commerce qui ne sont pas comme les autres, les rois, ce sont les livres. Dans la nuit culturelle de plus en plus menaçante, regardez comme brillent ces lucioles que sont vos libraires.
La lettre O est une drôle de lettre. C'est une lettre nomade, qui ressemble plus
à un dessin d'enfant qu'à un signe, c'est une lettre rastaquouère, archaïque, sens dessus dessous, c'est une lettre qui dit le corps, la bouche et le ventre. Quand j'étais adolescente je plaçais mes livres par ordre alphabétique et j'avais remarqué que je lisais beaucoup d'écrivains dont l'initiale était un B, un L ou un M et très peu avec un 0 comme initiale.
Je m'étais dit que c'était une mauvaise initiale pour devenir écrivain.
Et puis un jour j'ai découvert Yoko Ogawa.
Grâce à cet alphabet, vous pourrez vous affranchir du libraire et vous retrouver dans ce que vous cherchez. Notre classement alphabétique est la grande loi de l'hospitalité qui permet d'accueillir les lecteurs désireux de se lancer dans l'inconnu. C'est une boussole qui vous aide à naviguer dans les rayons.
Homère, auteur fameux dont on ignore tout, nous apprend que Personne, c'est quelqu'un. Sait-on jamais qui a écrit les grands livres, qu'ils soient ou non signés ? Ce qui m'intéresse en littérature, ce sont des singularités, jamais ces noms qu'on dit propres et qui sont tellement sales à force de traîner partout. Moi, je me console d'avoir une carte d'identité en écrivant des romans, et j'aime que dans les libraires ils figurent à côté des ouvrages de mon respectable confrère et ami, à vrai dire l'un des plus grands auteurs de tous les temps : Anonyme.
La librairie, je la vois comme une bibliothèque d'un certain genre, ni privée ni publique, mais un peu des deux: on a un accès direct aux rayonnages, c'est un fouillis, et cependant c'est ordonné par le libraire, alphabétiquement et par genre ou thèmes. J'y ressens à la fois avidité et affolement: je suis venu chercher un livre ou les livres d'un auteur, et tous les autres me regardent sans bienveillance. Eux aussi sont candidats à ma lecture. Ils n'ont pas démérité. Pas encore. En laissant mes yeux passer sur leurs titres, sur leurs dos, en les rejetant, je suis coupable d'une injustice.
La librairie, je la vois comme une bibliothèque d'un certain genre, ni privée ni publique, mais un peu des deux : on a un accès direct aux rayonnages, c'est un fouillis, et cependant c'est ordonné par le libraire, alphabétiquement et par genres ou thèmes. J'y ressens à la fois avidité et affolement : je suis venu chercher un livre ou les livres d'un auteur, et tous les autres me regardent sans bienveillance. Eux aussi sont candidats à ma lecture. Ils n'ont pas démérité.Pas encore. En laissant mes yeux passer sur leurs titres, sur leurs dos, en les rejetant, je suis coupable d'injustice.
L'enchanteur qu'est l'écrivain a deux noms comme le roi deux corps [...]: "il ne peut enchanter que tout le monde ne se serve de son nom, mais il peut faire en sorte que son nom ne le désigne plus" ...
Accablé, chacun de son côté recherche l'autre et le ressuscite en manipulant d'infimes traces ou en invoquant des souvenirs gardés au secret des camps ou de l'exil, ou encore en s'abîmant dans les rêves. La détresse due à la séparation est immense, elle remplit la conscience des personnages, elle a envahi leur existence, mais elle oriente leur survie vers des retrouvailles en creux, magiques, permanentes. Nul travail de deuil chez ces amants éternels, nulle acceptation de l'irréparable. Le temps ne joue plus aucun rôle.