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Critiques de Christophe Naudin (26)
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Journal d’un rescapé du Bataclan : Etre histo..

L'auteur, Christophe Naudin, un enseignant d'histoire, né le 9 décembre 1975, se trouvait le vendredi 13 novembre 2015 au Bataclan pour y assister avec des amis à un concert rock, lorsque à 21 h 40, des commandos de Daesh y ont semé la terreur. Il a réussi à s'échapper du feu en se projetant dans la fosse et en se cachant dans un cagibi à droite de la scène. Il y est resté 2 heures, jusqu'à l'intervention des forces de l'ordre.

Les attentats terroristes à Paris ce jour ont causé la mort de 130 personnes, dont 90 rien qu'au Théâtre du Bataclan. 413 furent blessés, dont 99 graves.



Sérieusement affecté par ces événements violents et sanglants, Christophe Naudin a décidé d'avoir recours à la tenue d'un journal, qui couvre la période allant du 5 décembre 2015 au 16 décembre 2018.

Publié en octobre 2020, ce journal compte en tout 165 pages, avec un bref avant-propos de 2 pages et demie et une postface de 23 pages, dans lequel il dresse une sorte de bilan.



Je signale à tout hasard qu'il ne faut pas confondre l'auteur de ce journal avec son homonyme, Christophe Naudin, né en 1962 à Libourne, spécialiste de la sûreté aérienne et auteur de "Air Cocaïne : Les dessous d'une mystification" en 2021.



Le journal particulier frappe par l'honnête approche de son auteur, qui essaie de se remettre d'un choc virulent tout en évitant de sombrer dans des jugements négatifs sans nuances. Tout au long de ces 3 années de journal, l'auteur suit attentivement les événements liés au terrorisme qu'il essaie de comprendre et de situer dans un contexte historique et géographique authentiques.



Il commente également les prises de position de certains responsables politiques français et de certains soit-disant experts en matière de terrorisme arabe ou islamique en spécifiant qu'il y a aussi des "jihadologues" imposteurs. À ce propos, il accuse notamment le "Printemps républicain" de "surfer sur le 13 novembre pour faire son beurre" (page 47).



Je trouve que Christophe Naudin a raison s'il souligne les méfaits des réseaux sociaux sur le Net qui amplifient faits et événements. J'apprécie son souci, comme enseignant, de l'impact des théories de complot sur les jeunes, ce qu'il a pu voir régulièrement avec ses propres élèves.



J'ai également apprécié que Christophe Naudin admet volontiers que son expérience traumatique lui a causé des nuits blanches, des cauchemars, des phases de tensions intenses et le besoin de l'aide d'une psychologue professionnelle.



Il reconnaît aussi que son journal comporte des passages écrits sous le coup d'une "colère sourde" à propos de la récupération des attentats à des fins politiques et idéologiques. Bien qu'il a effectué des coupes dans son journal, l'auteur a tenu à en conserver l'esprit "avec alternances entre analyses et coups de gueule, récits de ma thérapie ou de quelques-unes de mes échappées..."

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Les historiens de garde

Le très médiatique Lorànt Deutsch et le plus secret Patrick Buisson contribuent à une instrumentalisation du passé, au service de la fabrication politique et idéologique d’un roman national, support d’un patriotisme identitaire et rétrograde. Les historiens William Blanc, Aurore Chéry et Christophe Naudin, en démontrent, par un travail critique méthodique, l’imposture et les approximations délibérées. Ils mettent en lumière ce que cache cette réécriture de l’histoire : apologie de la monarchie, nostalgie d’un passé fantasmé, révolutions réduites à des instants de terrorisme sanglant, etc.

(...)

Fort utile mise au point pour déjouer les sirènes médiatiques.



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Charles Martel et la bataille de Poitiers :..

MAIS OÙ EST CHARL(I)ES...?



«En 732, Charles Martel arrête les arabes à Poitiers.»



Quel élève un peu attentif des programmes de cours élémentaire n'a gardé en mémoire cette phrase, aussi lapidaire que, à bien y regarder, sibylline ? Pourquoi sibylline ? Parce que tellement rarement contextualisée qu'on peut y mettre un peu tout ce que l'on y veut, selon sa sensibilité politique, selon ses connivences, selon ses engagements, ses convictions ou sa retenue (comme si l'histoire devait inévitablement en passer par tout cela...). Alors, reprenons :

- 732 ? Oui, sans doute. Quoi que ! Selon les sources, il pourrait tout aussi bien s'agir de 733 (l'autre année la plus plausible) mais aussi 731 ou 734 !

- Charles Martel : C'est probablement la seule certitude, le "Maire du Palais", fils de Pépin de Herstal, père de Pépin le bref (fondateur de la dynastie des Pippinides et grand père d'un autre Charles bien plus célèbre, à savoir Charlemagne - NB : Carolus Magnus -) fut bel et bien aux commandes de cette bataille mais, a contrario de ce que laisse supposer son "wikipedia" (au passage totalement invraisemblable d'inexactitudes, d'à-peu près historiques et de subjectivité mémorielle. Les "historiens de garde" de l'extrême-droite veillent au grain sur ces pages...), son surnom de "Martel" n'a possiblement pas grand chose à voir avec son arme de prédilection au moment des faits ni sa supposée vivacité à écraser le chef des malheureux Sarrasins qu'il eût à occire alors, mais plus probablement bien plus avec son caractère, y compris belliqueux, prompt qu'il était à briser toute forme de résistance à son pouvoir. Sans omettre de préciser qu'il fallait aussi un moyen de ne pas le confondre avec les autres Charles qui lui succédèrent ("Le Grand", "Le Pieux"). Quoi qu'il en soit ce pseudonyme ne sera généralisé qu'à partir du XIIIème siècle... Ceci n'est qu'un détail mais montre à quel point l'histoire de Charles Martel et de sa victoire sur les Sarrasins est, pour une large part, une construction ultérieure à sa réalité historique, laquelle demeure, toutefois, factuellement incontestable.

- Les "arabes" : Quels ? Ceux qui prirent La Mecque en compagnie de Mohammed un siècle auparavant ? Les conquérants de El-Andalus ? Des berbères, des Maures, des sarrasins ? Des guerriers avec toutes leurs familles, ainsi que certaines sources l'affirment, ou seulement des militaires aguerris sous commandement de l'émir et général omeyyade Abd el-Rahman - qui y perdra d'ailleurs la vie - en quête de razzias, de pillages tels que notoirement pratiqués alors, ainsi qu'il est par ailleurs avéré et certainement bien plus probable que cette idée d'une invasion prévue de longue date de la Gaule sous domination franque ? Sous cette dénomination - "les Arabes" - tellement générale il y a tellement le risque de mettre toute la complexité du monde arabo-musulman de l'époque dans un même fourre-tout tellement aisément réutilisable, sans aucune prévention ni sérieux plus d'un millénaire plus tard, que d'aucuns ne se sont d'ailleurs pas gênés pour le faire, depuis Chateaubriand en passant par l'abject Drumont (même si leurs thèses ne se chevauchent pas forcément exactement) et autre contempteur du fameux, fumeux, "choc des civilisations" théorisé et promu par l'universitaire américain Samuel Huntington, jusqu'aux discours extrême-droitisant de l'influent groupuscule "génération identitaire" de triste réputation, repris plus ou moins en cœur par certains membres du Front National ou du MNR de Bruno Megret. Voire par des "historiens" médiatiques bien en place tel que Dimitri Casali qui intenta un procès en sorcellerie - sans étude solide à l'appui autre que son propre sentiment - à l'encontre des auteurs d'ouvrages pédagogiques ou des concepteurs des programmes scolaires accusés de supprimer toute référence à Charles Martel à des fins strictement idéologiques. L'essai de William Blanc et de Christophe Naudin démontre, entre autre, à quel point ce genre d'assertion ne tient pas au regard de l'historiographie de notre "héros" du moment.

- Poitiers : c'est jusqu'au lieu précis de cette bataille qui s'est perdu dans les abîmes du temps. Le site de Moussais-la-Bataille (commune de Vouneuil-sur-Vienne au sud de Châtellerault) est aujourd'hui généralement retenu mais, à être honnête, rien ne permet d’accréditer irréversiblement ce site plus qu'un autre, entre Poitiers et Tours, les sources écrites étant, là encore, bien trop précaires et postérieures aux faits pour permettre la moindre affirmation sérieuse et surtout définitive.

Quant au nombre de victimes et au déroulé de cette bataille - dont tout laisse à penser que les témoins de l'époque ne les retinrent pas comme suffisamment essentiels pour en tenir chronique ou édification par un chant, un lai, etc -, tout laisse ainsi à penser que nous ne connaîtrons jamais ces "détails" et que le chiffre parfois avancé de 375 000 victimes du côté Sarrasin contre seulement 1 500 du côté des francs (rejoignant à la rescousse les aquitains de Eudes d'Aquitaine... qui aurait -rien n'est moins sûr- d'abord conclu des alliances avec ces mêmes Sarrasins), il y a tout lieu de croire que le chroniqueur médiéval, en l'occurrence Paul Diacre, les a confondus avec les pertes subies durant une autre bataille d'importance au moins équivalente bien qu'oubliée aujourd'hui, à savoir la bataille de Toulouse en... 721 (On sait par ailleurs que le chiffre avancé des victimes de ce conflit est déjà très fortement exagéré).



Pourquoi une telle mise en train ? Afin de garder en mémoire que tous les vendeurs de certitudes faciles, de vérités supposément éternelles, que les contempteurs de discours clé en main, les concepteurs de romans nationaux lénifiant ou arrogant usent et abusent de leur subjectivité souvent immédiatement assujettie à leur volonté d'instrumentaliser l'histoire, d'en faire un moyen de propagande dans le but de justifier des thèses éventuellement malsaines - pour ne pas dire mortifères - ou, à tout le moins, sans grand rapport avec une étude sérieuse, passionnante mais dépassionnée de cette matière Ô! combien fragile dès lors qu'il s'agit de remonter le temps long et tout particulièrement en ces époques que les britanniques qualifient "d'âges sombres" ("dark ages"), où les sources olographes sont relativement minces et très souvent sujettes à caution. Certes, cette instrumentalisation de l'histoire n'est en rien nouvelle - c'est par ailleurs ce que nos deux auteurs expliquent avec brio - mais elle n'a peut-être jamais atteint une telle force de frappe, une telle capacité de pénétration des esprits qu'aujourd'hui, entre réseaux sociaux, médias "mainstream" et éditions papier à fort tirages.



Il va sans dire que la recherche scientifique mise en oeuvre ici quant à l'Histoire de cette fameuse bataille et de ses diverses interprétations au fil des siècles répond exactement à ce besoin - urgent, impérieux - de tordre le cou aux idées reçues et de se retourner vers les sources, toutes les sources, du moins celles qui auront échappé au ravages du temps.

Ainsi en apprend-on, dans ce considérable ouvrage, non seulement beaucoup plus sur Charles Martel et sur ce combat lointain entre la cavalerie légère sarrasines et la lourde infanterie franque (la puissante chevalerie franque, trop souvent avancée comme explication de cette victoire, n'apparut véritablement qu'à partir de Charlemagne), mais aussi sur la conquête des arabes après la disparition du "Prophète", sur les rapports internes entre conquérants (Omeyyades, Abbassides, Arabes, Berbères, etc), sur ceux entretenus entre l'Islam et la Chrétienté d'alors, sur la politique menée par l'antique Maire du Palais (bien plus soucieuse d'assurer son pouvoir face aux germains et aux saxons, à l'est, qu'aux arabes au sud-ouest), nul doute que le pépinide eût lui-même considéré cette grosse échauffourée comme un moment parmi bien d'autres de ses innombrables coups de force, etc. Mais les deux auteurs, William Blanc et Christophe Naudin vont beaucoup plus loin. Afin d'expliquer comment, quelque mille trois cents années plus tard, une frange, certes minoritaire mais influente, du spectre politique français (pour aller vite : l'extrême-droite ainsi qu'une frange "dure" de la droite conservatrice) ont pu faire de Charles Martel le héraut de leurs luttes contre les migrations et l'Islam, nos deux historiens montre quelle fut l'influence de l'image du francs à travers l'histoire. Le moins qu'on puisse en dire, c'est qu'avant le dix-neuvième, il ne laissa qu'un souvenir modeste, diffus, très souvent ambigu, n'étant guère plus apprécié de la plupart des rois de France (ne fut-il pas, en quelque sorte, un usurpateur ? Or, comment une monarchie encourageant la stabilité, l'ordre, le droit divin auraient-ils pu glorifier telle attitude chez un prédécesseur, lui préférent, par exemple, l'image beaucoup rassurante et positive de son petit-fils, Charlemagne ?) que de l'église, celle-ci ne lui ayant jamais pardonné sa confiscation de biens séculiers à fin de récompenser ses hommes (pratique qui se faisait pourtant régulièrement en ces temps lointains). Par ailleurs, jamais en ces temps longs de la France monarchique il n'est question de Charles Martel comme du défenseur de la chrétienté contre l'islam conquérant ni de l'affrontement entre deux civilisations que tout aurait opposé. C'est dire si l’interprétation donnée aujourd'hui par d'aucuns est presque strictement contemporaine et répond bien plus à des angoisses politiques, des thématiques culturelles et sociétales, des idéologies actuelles qu'à une quelconque réalité tant historique que mythographique.



Et puis, il y eut le XIXème siècle au cours duquel s'inventa la Nation française puis, après la défaite de Sedan et la montée en puissance de la IIIème République, l'émergence du "sentiment national" ; une période durant laquelle, «alors que se crée dans les années 1880 un nouveau «nous» - le corps civique - s'affirme en parallèle un nouveau «eux», une figure inédite de l'étranger que le personnage du Juif va incarner» nous expliquent les deux historiens. Ainsi, ce siècle débute-t-il avec la remise au goût du jour de Charles Martel par François-René de Chateaubriand dans son célèbre essai "Le Génie du Christianisme" où l'auteur de René «craint une idée, le despotisme, ici incarné par l'Islam et l'Orient» tandis que le second, une cinquantaine d'années plus tard, «Drumont, lui, place le propos sur le terrain racial», et là est la grande "nouveauté" de la fin de ce XIXème siècle, s'agissant, toujours selon William Blanc et Christophe Naudin, de la figure de Charles Martel dans les mémoires et dans les intentions propagandistes. Malgré tout, et a bien regarder l'état de l'édition, tant littéraire que pédagogique de cette période moderne jusqu'à notre contemporanéité, on peut affirmer sans malice que le fameux Charles ne martèle guère son ouvrage auprès des consciences ni des "chères têtes blondes" et demeure un personnage certes important mais toutefois secondaire, Jeanne d'Arc (plus qu'aucun autre personnage du Moyen-Âge), Louis XI, St Louis, les invasions vikings et autre Charlemagne lui damant le pion sans aucun conteste possible, recherches documentaires à l'appui.



Il aura cependant fallu l'émergence de ces "historiens de garde" - dénoncés ailleurs dans un excellent essai polémique, lui aussi publié par les excellentes éditions Libertalia par nos deux auteurs, en compagnie d'Aurore Chéry - concomitamment à la montée en puissance de groupuscules d'extrême-droite ("Génération Identitaire") ainsi qu'une espèce de course à l'échalote entre anciens amis politiques (MNR de Bruno Megret et FN du consortium Le Pen), les uns et les autres appuyés par les démonstrations sans fondements historiques critiques sérieux de l'américain Samuel Huntington pour que la vision la plus rance qui soit de notre - malheureux - Charles Martel reprenne du poil de la bête, jusqu'à cet insupportable et nauséeux "Charlie Martel" affiché crânement par quelques poignées d'imbéciles dangereux et haineux aux frontispices de leurs réseaux sociaux, après le massacre que l'on sait dans les locaux de l'hebdomadaire satirique. Fort heureusement, des contre-feux se mettent en place, avec patience, avec sapience et très largement au-delà des polémiques stériles mais à force de documentation, de retour aux sources, d'hypothèses souvent prudentes mais aussi très décapantes. Là réside sans aucun doute l'intérêt second (juste après le simple bonheur d'apprendre, de découvrir, d'approfondir ses propres connaissances) de ce volume foisonnant, riche de documents annexes, de notules bibliographiques, d'illustrations soigneusement sélectionnées et d'un index permettant à tout instant toutes les vérifications possibles et, pour les plus passionnés des lecteurs, d'aller y voir d'encore plus près.



Ainsi est-on en droit d'affirmer que nos deux historiens mettent en pratique ce qu'ils appelaient de leur vœux dans leurs conclusions de "Les historiens de garde", à savoir de se réapproprier l'histoire, à partir d'une méthode scientifique éprouvée, continuer à en faire un objet d'étude et de critique permanent mais devant absolument se faire accessible au plus grand nombre, à mille lieues de cet objet figé, plus passionnel et putassier que passionnant, que d'aucuns voudraient nous vendre (on en a encore un exemple d'actualité que nous ne citerons pas plus précisément, de crainte de faire une réclame que cet ouvrage récent ne mérite pas), ayant pour seule finalité de nous gaver d'une conscience historique utilitaire, nauséabonde et dévoyée.

Objectif rempli haut la main tout au long de cet indispensable "Charles Martel et la bataille de Poitiers : de l'histoire au mythe identitaire" se lit (presque) comme un roman et s'il nécessite un rien d'attention, sa lecture en est toujours passionnante, enrichissante, éclairante et, mieux que tout sans aucun doute, questionnante ! Que demander de plus ?
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Charles Martel et la bataille de Poitiers :..

Les historiens William Blanc et Christophe Naudin reviennent sur l’histoire de la bataille de Poitiers, qui opposa en 732 les troupes arabo-berbères du gouverneur d’Al-Andalus Abd-al-Rahmân aux Francs de Charles Martel, puis analysent les souvenirs qu’elle a laissé du Moyen-Âge jusqu’à nos jours, avant d’être très récemment instrumentalisée par l’extrême droite occidentale.

(...)

Avec cette étude, William Blanc et Christophe Naudin montrent que Charles Martel n’a jamais réellement compté dans le « roman national » et que sa toute récente entrée dans la mythologie des tenants de l’islamophobie en fait plus un sujet de polémique qu’un événement central de l’histoire nationale.



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Les historiens de garde

GARE AUX GORILLES...!



S'inscrivant ouvertement dans la veine du célèbre pamphlet philosophique de Paul Nizan - Les Chiens de garde - mais, plus encore sans doute, dans la lignée de son successeur contemporain, succès de librairie absolument inattendu car répondant vraisemblablement à un besoin de compréhension du monde médiatique, généralement nié par ceux qui le domine quotidiennement, que fut la publication de l'opus de Serge Halimi "Les nouveaux chiens de garde", ce Les historiens de garde est une réponse contradictoire à la fois détaillée, précise, complète et engagée à l'encontre de cet engouement, de cette surexposition de ces intervenants médiatiques (écrits ou audiovisuels, lorsque ce n'est pas sur l'ensemble de ces moyens communicationnels qu'on les retrouve) aussi omniprésents qu'ils s'avèrent, bien plus que des historiens sérieux et solides, de véritables machines à populariser des thèses a minima farfelues mais généralement ouvertement réactionnaires, rétrogrades et, pour tout dire, politiquement très orientées.



Ces personnalités plus ou moins connues du grand public sont généralement reçue avec complaisance par la presse, les radios, la TV mais aussi nombre d'institutions politiques peu regardante sur la qualité pour peu qu'on lui serve un discours prémâché facile à vendre (cf Nicolas Sarkozy et la réflexion nationale tronquée et nauséeuse lancée par lui sur les conseils de Patrick Buisson, un ancien du journal d'extrême-droite "Minute" sur l' "identité nationale"). Une complaisance aussi coupable qu'intéressée parce que ces pseudo-historiens-là proposent une histoire clé en main agréable, faites de grands hommes et de belle continuité chronologique et géographique presque sans faille (hormis un cas d'espèce : les phénomènes révolutionnaires, systématiquement dévalorisés, à commencer par notre Révolution Française, assez systématiquement ramenée à deux faits, pour schématiser : la tête de Louis XVI et la terreur. Une complaisance liée aussi au fait que cette interprétation détournée de l'histoire est très aisément "bankable", pour peu qu'on ait la bonne têt de gondole (le "cas" Lorànt Deutsch est à ce niveau exemplaire) et le "storytelling" impeccablement ciselé, malgré des ficelles énormes. L'ensemble va généralement dans le sens du poil d'une bonne partie du public, avide de récits plus sirupeux et immédiatement accessibles que véritablement sérieux et risquant de remettre bien souvent en question des certitudes acquises dans les années d'apprentissage ou... dispensées à longueur d'antenne ou de papiers par ceux-là même qui font profession de vulgarisation de cette vision tronquée, strictement idéalisée et totalement idéologique de notre histoire pourtant incroyablement chaotique où il est pourtant vain de chercher une continuité qui ne vaut que pour ces adeptes du fameux - et dangereux - "Roman National" dans la continuité de prédécesseur lointains mais encore influent que furent des Ernest Lavisse au XIXème et début XXème ou du royaliste Jacques Bainville dont l'oeuvre et la pensée influent encore sur quelques esprits contre-révolutionnaire à travers un "Cercle Jacques Bainville".



Mais qu'on ne s'y trompe pas : ce ne sont pas les thèses elles-même qui sont la cible première de ces trois historiens en colère contre ceux qu'ils nomment donc "Les Historiens de garde" dans cet ouvrage (même si, bien évidemment, ils en critiquent les bien fondés pour des motifs si nombreux qu'il y aurait fallu plusieurs autres volumes). C'est avant tout la méthode de ces historiens auto-désignés qu'ils remettent, avec intelligence, perspicacité et force exemples, en doute. Car si l'histoire n'est pas, comme les mathématiques, une science "exacte" ou "dure", elle n'en figure pas moins à sa juste place au sein des sciences dites "sociales" (s'appuyant d'ailleurs de plus en plus sur la transversalité avec toutes ces matières connexes) et s'appuient sur des méthodes communes à toutes les études scientifiques : étude approfondie des textes, des sources, des archives, apport de l'archéologie et éventuellement de l'archéologie expérimentale, reconstitutions, etc, sont croisés, recoupés, expertisés afin d'en dégager les lignes de force ou de fracture, d'approcher au plus près (sans se faire non plus d'illusion sur le fait que le moindre moment historique ne peut intégralement être recomposé, d'autant plus si le domaine d'étude est chronologiquement, socialement, culturellement très éloigné du notre), mais de le faire en ayant toujours l'humilité de qui ne détiendra jamais nulle vérité définitive, que le doute scientifique doit encore et toujours être le moteur premier en ce domaine d'étude si complexe. Or, nos "Historiens de garde" n'ont que faire de cette approche de l'histoire. Pire : au lieu de prendre les différentes source et leurs éventuelles analyses comme point de départ à leurs théories, ils renversent en grande partie la démarche. Dès lors, seuls les faits, les moments d'histoires qui abondent dans le sens de leur thèse - cet inévitable "Roman National" - ont droit de cité. De là, leur critique pour ne pas dire leur rejet presque systématique de l'histoire vue par les universitaires mais aussi, à l'autre bout de l'enseignement, celui proposé par l'éducation nationale toujours soupçonné de vouloir mettre à bas les certitudes et autres grands hommes (les femmes n'ont évidemment qu'une place dérisoire dans cette fable nationale), de Clovis à Charles Martel, de Charlemagne à Henri IV, de Louis XIV à Napoléon, supposés révéler une sorte de spécificité immémoriale française, sous entendant que ces personnages éminemment historiques ont toujours eu en visu "une certaine idée de la France" quand bien même celle-ci n'existait pas plus sur la carte que sur le territoire. Ce fatras intellectuel n'a pourtant, à y réfléchir quelques instant, pas grand sens si ce n'est une totale et définitive incongruité conceptuelle ou la volonté de faire passer des messages idéologiques précis, renfermés sur eux-mêmes, empestant le nationalisme - malgré les apparences d'un certain patriotisme "bon teint" -, un certain négationnisme (du fait colonial et de sa cohorte d'erreurs et d'horreurs, en particulier). Quant à ce cher Loràant Deutsch, c'est un pur cas d'école car, non content d'adopter cette non-méthode de recherche, il n'hésite pas à trafiquer et même inventer des faits qui n'ont pas la moindre réalité dans l'histoire qu'il prétend vulgariser ! Un comble puisque son fameux Métronome fut un temps âprement conseillé par la ville de Paris auprès des écoles et des institutions.



Une ultime précision : à aucun moment nos trois historiens polémistes ne réclament que l'étude de l'Histoire soit la seule exclusive des "spécialistes de la spécialité" (chartistes, normaliens, universitaires, etc). Bien au contraire ! Sans même devoir rappeler que l'un d'eux au moins (William Blanc) n'est ni enseignant ni universitaire si ce n'est de formation, les trois auteurs en appellent à l'émergence d'une étude plus citoyenne de notre histoire, entremêlant chercheurs "professionnels" et passionnés amateurs mais qui auraient eux-même intégré cette méthodologie absolument essentielle propre à cette matière. Ils rappellent aussi qu'il est plus que jamais temps que ces doctes enseignants descendent de leurs piédestaux, qu'ils fassent oeuvre de vulgarisation intelligente et abordable au risque de se voir toujours un peu plus confisquer leur domaine d'étude par des marchands de rêves plus que douteux.



Quoi que le lecteur pourra penser à la découverte de cet essai polémique, cette ultime recommandation est parfaitement remplie par nos trois libellistes car ce petit ouvrage, dont la première édition date de 2013 aux éditions Inculte, repris et complété d'une longue et explicite postface dans une édition datant de 2016 en format poche et aux éditions Libertalia, se lit comme une véritable enquête historiographique, très aisément et fort agréablement car d'une verve jamais pompeuse ni présomptueuse de style comme de forme ni de fonds. Un texte revigorant pour tous ceux ayant estime et passion pour ce domaine délicat et jamais définitivement fixé des sciences sociales et qui fait définitivement sien cet utile plagiat du titre du passionnant film documentaire de Pierre Carles : L’histoire est un sport de combat !



Ci après, et en complément de cette humble chronique, la retranscription d'un long entretien aussi passionnant que définitivement éclairant sur les intentions de nos trois jeunes historiens :



Les Historiens de garde : De Lorànt Deutsch à Patrick Buisson, la résurgence du roman national. Dans cet essai d’historiographie et d’histoire critique, les auteurs s’inquiètent du réveil d’une histoire nationaliste dont Lorànt Deutsch est le poste avancé et où l’histoire n’est envisagée que comme support d’un patriotisme rétrograde.



Questions de classe(s) : Pouvez-vous nous expliquer la genèse de ce livre ? Le fait de travailler à trois historiens répond-il seulement à une question de spécialisation ? Avez-vous une "histoire" commune ?



Les auteurs : Nous sommes trois à avoir écrit ce livre. Nous avons certes nos différences, mais une chose nous rassemble, c’est la méthode historique. Pour nous, l’Histoire n’est pas un grand mythe qui sert à fédérer une population autour d’une patrie (le "roman national") ou d’un parti, mais bien une pratique d’interrogation critique du passé qui consiste à trouver des sources, à les interroger, à les comparer.

Nous sommes tributaires des réflexions déjà engagées il y a plus de trente-cinq ans par Suzanne Citron (voir son livre essentiel : Le mythe national : l’histoire de France en question, première parution en 1987) dont il faut saluer le travail ici, et qui ont été reprises par des collectifs comme Aggiornamento Hist-Géo ou le CVUH (Comité de Vigilance face aux Usages publics de l’Histoire) notamment lors du quinquennat Sarkozy qui a constitué le moment du retour en force du roman national.



QdC : Pouvez-vous définir la notion de "roman national" ?



Les auteurs : Il s’agit d’une version mythifiée de l’histoire nationale, qui induit de l’unité et de la continuité là où il y a eu au contraire des ruptures constantes. Beaucoup d’historiens de garde insistent sur le fait que la France a toujours été "déjà là" pour reprendre l’expression de Suzanne Citron. Pour Max Gallo par exemple, dans son livre L’âme de la France (paru peu avant les élections de 2007 et qui est, plus on y pense, le véritable opus programmatique des historiens de garde), c’est le territoire, le terroir même, qui a sans cesse assimilé les hommes qui s’y sont installés pour les changer en des Français qui ont eu, de tout temps, les mêmes caractéristiques culturelles ou mentales.



Cette continuité souffre, pour tous les historiens de garde, d’une rupture récente qui menacerait selon eux l’identité nationale. Stéphane Bern va même jusqu’à parler de "crise identitaire". Pour les plus radicaux, comme Deutsch, cette brisure s’incarnerait dans la Révolution française qui aurait "coupé la tête à nos racines" [sic]. D’autres mettent ça sur le compte de "la pensée 68", notamment ceux qui, comme Dimitri Casali, se sont investis dans la polémique sur les programmes scolaires.



C’est justement cette polémique qui renseigne le plus sur ce que Nicolas Offenstadt (auteur de la préface du livre) a appelé le néo-roman national. En effet, depuis la fin de la décennie 2000, les programmes se sont ouverts (timidement) sur une histoire plus globale, en proposant d’étudier des civilisations extra européennes, comme la Chine des Han ou les empires africains [empires africains dont l’étude a disparu des programmes 2016]. Certains historiens de garde y ont vu une menace identitaire. Pour eux, l’histoire ne doit pas servir à éveiller une curiosité, à interroger des différences pour mieux se forger une opinion, mais bien à créer un sentiment d’adhésion patriotique basé sur une vision glorieuse de la France.



QdC : Votre livre consacre presque la moitié de la pagination au cas Lorànt Deutsch. Pouvez-vous parler de votre travail de critique sur le livre et les émissions de L. Deutsch, ses méthodes, son idéologie, sa vision de l’histoire ?



Les auteurs : Lorànt Deutsch est un cas d’école. En guise de méthode, il n’hésite pas à inventer des faits afin d’embellir son roman national rétrograde tout en prétendant agir comme un historien et ne rapporter que des événements authentiques. Cela n’aurait pu avoir l’écho qu’on lui connaît si l’acteur et son éditeur avait usé des méthodes les plus agressives du marketing : packaging attrayant (la figure de l’acteur lui-même, qui est l’argument de vente principal) et un storytelling grossier mais efficace. Les résultats sont là : Métronome s’est vendu à plus de 2 millions d’exemplaires, une adaptation télévisuelle a été produite sur une chaîne du service public (qui a coûté un million d’euros), et l’acteur a été invité dans des classes d’établissement publics afin de faire la promotion de son livre.



QdC : L. Deutsch sert de façade sympathique à un courant d’extrême droite incarné par Patrick Buisson et d’autres intellectuels. Pouvez-vous nous brosser le paysage passé et présent de ce courant réactionnaire ?



Les auteurs : Précisons que L. Deutsch a été soutenu par le Bloc Identitaire. Quant à Patrick Buisson, il s’inspire largement de l’Action française qui fit de l’Histoire, au début du XXe siècle, un de ses chevaux de bataille. Il s’agissait à l’époque pour les monarchistes de remettre en cause l’histoire universitaire majoritairement républicaine en réinventant un récit glorieux célébrant l’action positive des monarques tout en fustigeant les mouvements populaires. Cela va passer par la création d’une véritable contre-université (l’Institut d’Action française), mais aussi par la rédaction de nombreux livres de vulgarisation. Parmi ces auteurs, le plus prolifique d’entre eux était certainement Jacques Bainville (1879-1936), dont les œuvres, - ce n’est pas un hasard -, connaissent depuis une dizaine d’années une nouvelle jeunesse.

Cette radicalité réactionnaire traverse le courant des historiens de garde. Évidemment, la plupart n’assument pas cette filiation. Elle est pourtant bien présente. Jean Sévillia est par exemple un proche des cercles monarchistes du Renouveau français. Dimitri Casali participe au site Boulevard Voltaire et n’hésite pas à en appeler au recours d’un "homme providentiel" à la tête de l’État.



QdC : Vous faites également référence au roman national "de gauche". Quelle analyse en faites-vous ?



Les auteurs : Le roman national, dans sa forme originelle, est une création d’historiens républicains où domine notamment la figure d’Ernest Lavisse (1842-1922). Il s’agissait pour eux de faire de la Troisième République l’aboutissement logique de l’Histoire de France, qui finissait par se résumer à la longue marche d’un peuple pour son émancipation (avec, en point d’orgue, la Révolution française).



D’aucuns tentent aujourd’hui de ressusciter ce type de récit, comme Jean-François Kahn qui nous explique sans rire dans son dernier livre que les droits de l’homme ont été inventés par les Gaulois au Ier siècle de notre ère (voir cette analyse sur le site du livre)...



QdC : Dans le dernier chapitre, "L’histoire est un sport de combat", vous voulez répondre "au double phénomène qui relève à la fois d’un repli sur le roman national à des fins identitaires et par des stratégies marketing dont le but n’est ni plus ni moins que de transformer des citoyens libres en consommateurs d’image d’Épinal." Quelles sont vos propositions ?



Les auteurs : Tout d’abord, réagir et sensibiliser le public. Ensuite, proposer une vulgarisation historique de qualité, qui sorte du carcan de l’histoire nationale. Cela passe par l’écriture de livre grand public, mais aussi par le développement de médias alternatifs, comme la radio.



[La deuxième partie de cet entretien a été réalisée en octobre 2016] Plus de trois ans après cette interview, la situation a-t-elle évolué ?



Les auteurs : Oui, et dans le mauvais sens d’abord. Cette rentrée 2016 a été le théâtre d’une vaste offensive des tenants d’un récit identitaire et nationaliste du passé, comme Dimitri Casali. Pareillement, nombre de politiques, à droite notamment, affirment ouvertement vouloir promouvoir le retour du roman national à l’école, comme François Fillon ou Nicolas Sarkozy, mais aussi Emmanuel Macron. Mais, d’un autre côté, nous remarquons que de plus en plus d’historien-ne-s se préoccupent maintenant de proposer de la vulgarisation de qualité en passant par des médias populaires, comme la télévision, la radio ou la bande dessinée. Il faut que ces interventions se multiplient.



QdC : Votre livre a-t-il ouvert le débat dans les milieux enseignants ? Quelle a été la réception du livre ?



Les auteurs : Difficile de répondre précisément pour les enseignants. Le livre a permis d’ouvrir un débat plus large sur les usages publics de l’histoire et on sait qu’il a pas mal circulé. Nicolas Offenstadt, dans L’Histoire un combat au présent (Textuel, 2014), écrit que notre travail a poussé les journalistes à questionner Lorànt Deutsch sur son rapport à l’histoire, et que l’ouvrage s’est « diffusé par capillarité », notamment dans des émissions comme les Guignols de l’Info et Groland, où le comédien a été moqué. Ce qui n’était pas le cas auparavant. Cela a conduit entre autres Lorànt Deutsch à affirmer plus frontalement ses idées politiques, notamment son adhésion à la théorie du choc des civilisations, dans son livre Hexagone , publié fin 2013.



QdC : Vous avez actualisé votre travail dans une postface qui fait un bilan de l’influence des Historiens de garde, mais surtout propose une réflexion et des idées précises sur le rôle de l’historien dans l’espace public....



Les auteurs : Depuis la sortie du livre, les historiens de garde ont toujours une certaine influence. La polémique autour de Métronome a confirmé ce que nous écrivions sur la connivence entre historiens de garde et chiens de garde de certains médias de masse, comme Canal Plus et, malheureusement, France Télévisions. Malgré la disparition de l’émission de Ferrand, "L’ombre d’un doute", le constat n’est pas très optimiste, surtout dans un contexte qui favorise encore plus les usages publics de l’Histoire, comme on l’a vu récemment avec le "Nos ancêtres les Gaulois" de Sarkozy. Mais, d’un point de vue plus positif, de plus en plus d’historiennes et d’historiens refusent cet état de fait et agissent, notamment sur les réseaux sociaux, comme on l’a vu sur la sortie de Sarkozy, mais aussi celle de Valls à propos de Marianne. Dans cette postface, nous avons justement voulu réfléchir, aussi, aux réponses qu’il faudrait apporter aux historiens de garde, et plus largement au rôle de l’historien dans l’espace public, notamment en interrogeant le fonctionnement de l’Université et son rapport à la vulgarisation."



Propos recueillis en juin 2013 puis en octobre 2016 par François Spinner pour le compte du site Question de Classe(s), ici : https://www.questionsdeclasses.org/?Histoire-critique-Entretien-sur-Les-Historiens-de-garde-avec-les-auteur-e-s
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Journal d’un rescapé du Bataclan : Etre histo..

Lu un peu par hasard, entre deux romans, il m'a attirée pare que je venais de finir de regarder la série "En thérapie", qui se trame juste après les attentats du 13 novembre 2015. Je me disais que cela me replongerait dans cette époque troublée (non pas que notre actualité ne le soit pas suffisamment...)



Effectivement, cela m'a bien remis le nez dedans. Dans les débats sur l'islam, l'islamophobie, "l'islamistophilie" comme le dit l'auteur. Les mois passent, et les réactions nauséabondes et les attaques terroristes s'enchaînent, égrenées et commentée à chaud dans ce journal d'un historien victime et rescapé de la tuerie du Bataclan, qui doit lui-même tenter d'avancer dans sa vie, dans son métier de prof, avec ce lourd bagage.
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Les historiens de garde

Oh le joli pamphlet que voilà ! Comme on les aime : court, vif, efficace, documenté, avec ce qu’il faut de mauvaise foi et d’acidité, mais au service d’une vraie thèse, et qui la défend brillamment.

Au départ, on sent bien qu’ils ont été plus qu’énervés par le succès de librairie et médiatique de Lorant Deutsch et de son « Métronome ». Tellement énervés qu’ils consacrent 4 chapitres (sur les 6 de l’ouvrage) à démonter son argumentaire, son dispositif scientifique, ses présupposés idéologiques, ses liens politiques, ses connections médiatiques…Rien ne trouve grâce à leurs yeux et, il faut bien le dire, ils font souvent mouche. On s’étonne d’ailleurs qu’il ait fallu attendre ce livre pour trouver une vraie charge contre l’acteur « historien », tellement il semble prêter facilement le flanc à la critique.

Echauffés par ces banderilles, les 3 auteurs élargissent leur propos, de manière assez élégante et convaincainte, aux tenants du « roman national » d’une part, y compris Bainville, Jean Sévillia, Sacha Guitry, le Castelot/Decaux de la Caméra explore le temps, ou le Puy du Fou, et d’autre part à la nouvelle garde des historiens médiatiques, à la Franck Ferrand et Stéphane Bern, ou encore Eric Zemmour et Dimitri Casali.

Ils prônent dans une conclusion judicieuse et sensée une histoire qui sache éviter la tentation du « roman national », de droite comme de gauche, voire du « roman européen », mais qui au contraire réhabilité l’histoire comme discipine de savoir, ouverte sur le monde, ouverte à la critique, sans doute plus ouverte à la société, ayant moins peur du débat, de la vulgarisation mais aussi de la pédagogie sur ses méthodes et ses principes. On ne saurait dire mieux.

Cerise sur le gâteau, quelques conseils de lectures dans la bibliographie dont on n’a qu’une hâte : démarrer la lecture.


Lien : http://lespicilege.wordpress..
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Les historiens de garde

Vous adorez les émissions de Stéphane Bern et vous êtes un fan du Métronome de Loran Deutsch ?

Alors ce livre est pour vous ! ;)

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Les historiens de garde

J'ai lu ce livre en réaction de son contraire , de l'acteur Laurent Deutsch : "Métronome " et " Hexagone " et aussi à cet autre ouvrage " le Paris de Céline" qui aurait été écrit conjointement par le mauvais génie de Sarkozy et monsieur Deutsch , ce que nie ce dernier , affirmant qu'il ne serait que présentateur du livre .

C'est peut-être subjectif , mais " les historiens de garde " m'est bien plus sympathique . Toute idéologie mise à part il faut dire qu'il ne saurait exister différentes versions de l'Histoire , qu'il y ait des interprétations différentes , je le constate mais , seuls les faits bruts m'intéressent , pas les interprétations , toujours sujettes à caution en fonction de la doxa de l'auteur .

Kennedy a été assassiné , c'est bien , c'est mal .... il a été assassiné , point barre ! Son assassin était commandité par la mafia , par ses opposants politiques , c'était un assassin , point barre ! les digressions permettent de trafiquer L Histoire à la sauce que l'on veut , chacun ses opinions . Hélas les livres d'Histoire sont bien trop souvent mensongers , tout autant que les discours des médias cherchant à fabriquer l'opinion au profit du clan au pouvoir .

LE LIVRE : Je n'en donnerai pas de critique personnelle , mon appartenance au courant de pensée opposé à celui de Deutsch et Buisson me faisant peut-être mauvais juge . Voici cependant quelques extraits de critiques parus dans la presse :

--Dans la revue" Lectures " : En 2013 , le médiéviste William Blanc épaulé par Aurore Chéry et Christophe Naudin réagissaient avec " Les historiens de garde " aux ouvrages de Laurent Deutsch .....La présente réédition intervient à un moment où l'acteur est mis en cause par les journalistes de " Buzfeed " pour dénoncer des propos injurieux et menaçants tenus par l'acteur sur les réseaux sociaux à l'égard des critiques négatives concernant ses ouvrages .

Les trois auteurs entendent démontrer que les écrits de Deutsch seraient de piètre qualité mais aussi politiquement tendancieux ..... la force des auteurs est de pointer les erreurs factuelles d'interprétation de faits historiques sujets à caution qui sont induits par l'idéologie de Deutsch qui affirme ce qui l'arrange sans en être bien certain et va jusqu'à dire le contraire de ses sources ....Les soutiens de l'acteur confirment son analyse idéologique de l'histoire : Dimitri Casali , Jean Sévilla , Eric Zemmour qui tous reprennent comme références historiques les écrits de Jacques Bainville , historien et journaliste de " L'action française " .....

Critique signée Vincent Bollenot .

--Dans " le combat syndicaliste " de décembre 2016 : Valls , Sarko , Fillon récemment , rameutant Marianne sans voile , les ancêtres les gaulois , le " récit national " dans les programmes scolaires : le mythe du roman national est de retour en force . Le comédien monarchiste Deutsch est un des fers de lance du moment ...... Une soupe trafiquée d'histoire patriotique qui tend à faire croire que la nation est le fil conducteur , héritée de l'épopée des rois qu'il faut présenter comme un temps d'harmonie sociale , en gommant soigneusement l'oppression .......Les identitaires , les " villiéristes " ( De Villiers ) en font leur miel ..... Ce baratin brandi par des politiciens de droites diverses .... où figure Patrick Buisson ; Ce dernier et Deutsch ont collaboré à la publication du " Paris de Céline " en gommant l'antisémitisme de l'auteur de " Bagatelle pour un massacre " .Le paysage n'oublie pas les tsars de la tchatche télévisuelle : Zemmour , Onfray etc... ni les films de Sacha Guitry......

Le bouquin retient aussi d'autres tripatouilleurs de mémoire Jacques Bainville , Alain Decaux etc .........

Critique signée Nicolas Interco Nantes .



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Charles Martel et la bataille de Poitiers :..

Un livre très intéressant dans la démarche avec la volonté de distinguer histoire et mémoire. Les auteurs appliquent également la méthode de Georges Duby pour l'analyse de l'événement, qui est une référence dans l'étude historique.

Enfin, cet ouvrage à le mérite de poser la question sur le contenu des programmes d'histoire : doit on rester sur l'exposition d'événements dans l'optique de perpétuer un roman national (dont les enjeux sont donc mémoriels et non plus historiques) ou doit on utiliser des périodes sans distinctions géographiques ou culturelles comme support pour l'application de méthodes historiques ?

Plus généralement, il confronte différentes visions de l'histoire, notamment celle qui se base sur une opposition continue entre blocs civilisationnels et une autre bien plus nuancée, prenant en compte la complexité des événements et les replaçant dans leur dimension réelle.



Le livre est un bon outil avec des documents visuels reproduits, des références et des cartes. le propos est bien illustré et donc plus vivant.



Ce livre reflète bien les différents questionnements que se posent les historiens dans le domaine universitaire mais fait également la connexion avec l'histoire telle que se la représente le grand publique. Se lit très facilement quel que soit le niveau dans la discipline. Accessible à toutes les personnes intéressées par le sujet.



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Journal d’un rescapé du Bataclan : Etre histo..

Christophe Naudin nous offre ici un témoignage qui n'a rien d'anodin.



Rescapé du Bataclan et prof d'histoire avant tout, nous découvrons avec lui et son journal la reconstruction difficile que vivent les victimes survivant aux actes terroristes.



Dans un premier temps très bavard auprès de son journal, nous suivons son retour au collège et l'accueil des élèves (pas vraiment l'idée que mettent en avant les médias), des collègues. La reconstruction avec la psy de la police et les associations de victimes. La nécessité du témoignage.

Mais également l'omniprésence du besoin d'information sur l'attentat puis sur les attentats en générales... Certaines périodes de transforment en recensement des attentats en Europe, nous laissant imaginer l'ampleur que prends le drame dans la vie d'un rescapé.



Enfin il y a aussi la colère contre les islamophobes et les "islamistophiles" (comme il les appel), les 2 côtés de la même médaille se nourrissant l'un de l'autre (et vis et versa).

Cette question du traitement des actions terroristes par les divers protagonistes médiatiques prend une grande place dans cet ouvrage et interroge notre propre perception sur le sujet... (Ce qui est très intéressant quand on aime s'interroger comme moi).

Enfin progressivement l'auteur se libère de nous et de son journal, mais ça je vous laisse le lire 😋.



On peut être un heurté par la tonalité du journal, brute comme on peut si attendre avec ce type de document. Les quelques pages de la postface permettent à l'auteur de préciser des petites choses fortement utile pour laisser le lecteur digérer tout ça.
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Journal d’un rescapé du Bataclan : Etre histo..

Ce journal est très instructif sur les réflexions de l'auteur face aux événements, aux discours de certaines personnalités ou personnes qui sont médiatisées.

c'est assez émouvant aussi de lire les confidences d'un rescapé du Bataclan, qui restera à jamais dans nos mémoires et dans nos cœurs.

On est heureux de la "reconstruction" de l'auteur, de l'amour qu'il a reçu et reçoit...
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Journal d’un rescapé du Bataclan : Etre histo..

C'est, je pense, un immense cadeau que nous a fait Christophe Naudin en nous livrant le contenu du journal qu'il a tenu de décembre 2015 à décembre 2018, après avoir survécu à l'attentat du Bataclan. Dans un premier temps car il a tenu à le laisser brut, sans réécriture. Il s'agit donc d'un témoignage extrêmement dur, évidemment, écrit par un auteur souvent sous la coupe de troubles du stress post-traumatique, avec toutes les conséquences que cela peut avoir sur la psyché.

Dans un second temps car il l'a complété au moment de son édition par une postface extrêmement éclairante, écrite 2 ans après la fin du journal, 5 ans après l'attentat. D'ailleurs, si je l'ai, pour ma part, lue après le journal, je pense qu'il est intéressant également de la lire avant.

Ces deux revers d'une même médaille forment un ensemble à la fois bouleversant et instructif, un témoignage fort sur l'impact de cet évènement sur la vie d'un survivant. La personnalité de Christophe Naudin contribue, je pense, à l'intérêt du livre : il est historien, a travaillé sur l'Islam médiéval, enseigne l'histoire dans un collège et est clairement engagé politiquement à gauche.



Au fil du récit, nous allons suivre ses réflexions, son besoin de suivre l'actualité, de s'informer encore et encore sur les attentats, sa nécessité dévorante de comprendre.

Sa colère, également.

Face aux médias et à l'affrontement de deux visions aussi caricaturales l'une que l'autre du terrorisme.

Face à sa famille politique, également, et à la complaisance dont elle fait preuve.

En parallèle viendront les phases de reconstruction, son retour au collège, son travail de thérapie, ses amis, ses élèves, ses collègues, la rencontre avec sa compagne...

Il est émouvant de le sentir se détacher quand les entrées de son journal finissent par se faire plus rares, plus courtes et plus posées...



La postface lui permet enfin de remettre les choses en perspective et de dresser le bilan de son parcours pendant ces 5 années. La reconstruction, la nécessité de témoigner, la volonté d'agir.



Journal d'un rescapé du bataclan est un document sans doute unique, fort et juste dans ses réflexions et dans la pertinence des questions que l'auteur pose face à l'islamophobie et à la lutte contre le terrorisme.
Lien : https://unspicilege.org/inde..
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Les historiens de garde

Contre les poncifs du roman national et les légendes contre-révolutionnaires





Dans leur préface, « Les récits rances et l’histoire de plein air », William Blanc, Aurore Chéry, Christophe Naudin parlent des « malins trompeurs », de ceux qui transforment l’histoire en outil d’exclusion « sous l’apparence d’un beau récit national »



Elle et ils expliquent le sens de leur livre, « Il opère un travail critique, aussi approfondi qu’astucieux, pour démonter faussetés, impostures et approximations volontaires, pour faire saillir des intentions à peine masquées, pour situer dans de longues séries des textes qui prétendent à l’actualité ».



Les auteur-es parlent de passé idéalisé fabriqué contre ce qui déplait dans le présent, d’accumulation répétitive de faits choisis, de non mise à distance, « Le passé ne se fixe pas par testament chez le notaire », de l’histoire comme discipline, des mots et des catégories historiques, de démarche critique, du passé dans l’espace public démocratique, de lecture de documents, de l’incertitude des évolutions jamais données d’avance, « il est important de lutter pour que l’étude du passé et les réflexions auxquelles elle conduit demeurent un lieu ouvert »…



Des analyses précieuses sur les « historiens de garde », ces nouveaux « chiens de garde » réactionnaires et faussaires, sur l’enfermement d’un « cadre national et héroïque », le fantasme d’une « identité nationale » transcendant le temps, les petits et grands arrangements avec les réalités, les reconstitutions fantaisistes et les images d’Epinal, les affabulations, les mythes pris comme des faits « sans tenter de comprendre leur signification », des continuités tressées comme des mécanismes au futur déjà contenu…



La Gaule, Paris, un Louvre sur mesure, une cathédrale au fond d’un parking, la haine des révolutions, le mépris du « peuple », la valorisation de la royauté, l’imaginaire « génocide vendéen », l’approche historico-religieuse et le refus de la laïcité, les liens entre « histoire, identité et religion », la détestation de La commune, les traditions réactionnaires…



Je souligne les pages sur les royalistes d’hier et aujourd’hui (sur ce sujet, Jean-Paul Gautier : La restauration nationale), l’idéalisation de la monarchie, la valorisation d’un patrimoine limité (même avant la création de cette notion), la crispation sur le « millénaire capétien », l’histoire comme apologie d’une certaine vision politique… sans oublier l’exaltation de la colonisation, les fictions historiques « centrées sur la glorification des grands hommes », les légendes noires contre-révolutionnaires, les emballages divertissants « aux allures inoffensives », les plongées dans la nostalgie, les discours émotionnels et simplificateurs, la vague anti-intellectuelle…



Les auteur-e-s proposent, contre ces histoires au rabais, les moyens d’une histoire à la fois « scientifique » et chaude des récits, la vulgarisation non réductrice des hypothèses, des méthodes adéquates à leurs objets.



Elles et ils soulignent des « compromissions » d’hommes et de femmes de « gauche », font un retour sur certains historiens et une certaine conception de « l’histoire de France », abordent la fascination pour l’histoire-spectacle et le développement de l’histoire-business…



Les nouveaux « historiens de garde » construisent un néoroman national, figent « dans un même moule l’histoire et l’identité », développent des idées ouvertement réactionnaires et xénophobes, se font passer pour des victimes méthode qu’ils partagent avec la droite extrême, les conspirationnistes et les négationnistes de tout poil.



« Il ne s’agit plus d’aiguiser l’esprit critique, de susciter des découvertes puis des analyses, mais de vendre une forme de bien-être nostalgique », donc, rien qui permette aux citoyen-ne-s de prendre parti.



J’ai volontairement choisis de ne pas citer de noms.



Dans leur postface à l’édition de 2016, William Blanc, Aurore Chéry, Christophe Naudin reviennent sur la réception de leur livre, sur le soutien des médias aux historiens de garde, sur les récupérations de l’histoire à des fins nationalistes par la droite extrême mais aussi par des personnalités se réclamant de la gauche d’émancipation, sur la contestation renforcée d’une partie des enseignements – en particulier ceux autour de l’islam, de la traite négrière, de l’esclavage, de la colonisation ou de l’immigration. Elle et ils abordent l’histoire et l’engagement politique, la fausse neutralité politique, la prise de distance nécessaire pour comprendre le point de vue des femmes et des hommes que l’on étudie, l’histoire comme science qui n’a rien d’une « science froide », l’empathie avec les sujets étudiés, le refus d’un regard égocentrique, l’incomplétude et le caractère imparfait des connaissances, « le récit du passé n’est jamais clos »…



Elle et ils soulignent que face aux blessures mémorielles, « la meilleure réponse à apporter n’est pas d’imposer un récit fermé, venant d’en haut, un roman national, quelle que soit sa couleur politique, mais de présenter les recherches historiques comme un possible outil de mise à distance collective ».



William Blanc, Aurore Chéry, Christophe Naudin proposent de développer une approche plus critique de l’histoire dite nationale, de rompre avec l’idéal de méritocratie républicaine, d’étendre l’histoire publique…
Lien : https://entreleslignesentrel..
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Les historiens de garde

Le capital sympathie d'un homme ou d'une femme, quand il sort de son domaine, peut en influencer le succès. Cependant il ne faut pas qu'un écrivain, ici Lorànt Deutsch, au nom de l'histoire ne la travestisse à son goût. C'est ce que ce collectif d'historiens se sont attelés à démontrer avec efficacité.
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Charles Martel et la bataille de Poitiers :..

Excellent livre nous présentant l'utilisation de la figure de Charles Martel. La première partie a le mérite de remettre la bataille de Poitiers dans son contexte. Parce que c'est bien beau de dire que Charles Martel a arrêté les arabes en 732 à Poitiers, mais où est le contexte ? Gros points positifs donc !

La seconde décortique l'utilisation de la figure de Charles Martel dans l'Histoire et on se rend compte très vite que c'est un sujet très mineurs (voir même on s'en fou) jusqu'à récemment où il est utilisé dans une espèce de "choc des civilisation".

C'était très intéressant et les auteurs se sont donné beaucoup de mal pour rendre ça très abordable et pouvant être lu par tous.
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Journal d’un rescapé du Bataclan : Etre histo..

L’auteur est prof d’histoire et victime du Bataclan. Pour s’en sortir il écrit son journal pendant trois ans, pour s’aider à surmonter le stress post-traumatique. Ce journal montre son besoin envahissant d’information sur l’attentat, sur les attentats en général, au point que par moment son journal donne l’impression qu’il y a attentat sur attentat en Europe. Ce qui domine, en dehors de ses angoisses, c’est la colère contre les experts auto-proclamés de tous bords, contre le traitement des événements par les médias, les récupérations en tous genres et contre la complaisance dont la gauche fait preuve. Ce qui rend son journal particulièrement intéressant c’est qu’il est spécialiste de l’Islam médiéval et que c’est un vieil abonné de Charlie. En tout cas il explique bien, je crois que je n’ai jamais aussi bien compris les histoires de prises de position des uns et des autres. Au fil du temps il éprouve de moins en moins le besoin de recourir à ce journal.

Dans une deuxième partie rédigée ultérieurement (5 ans après les attentats) il précise certains éléments.

C’est intéressant parce que malgré son stress post-traumatique, cet ouvrage ne fait pas appel de façon marquée aux affects et aux émotions. La réflexion est riche, le lecteur est invité à réfléchir lui aussi. Constructif donc, pour l'auteur comme pour le lecteur.
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Charles Martel et la bataille de Poitiers :..

J'avais déjà beaucoup aimé le livre de William Blanc "Les historiens de garde", qu'il a coécrit avec Aurore Chery et Christophe Naudin, qu'on retrouve d'ailleurs ici. Il faut dire que le sujet est à nouveau le même ou presque : la façon dont un évènement historique est détourné de son premier sens historique pour servir un propos politique. Ici, la bataille de Poitiers est décortiqué dans tout ses sens pour montrer à la fois la façon dont celle-ci s'inscrit dans un contexte plus large de conquête des arabes autour de la Méditerranée, mais aussi la façon dont cet évènement est perçu par la suite.



Et le livre est avant tout une réponse aux critiques récentes des programmes d'Histoire, dans lesquels Charles Martel serait "sacrifié" par une gauche qui ne veut plus les voir. Que nenni, mais cela nécessite un long, très long développement de la figure du maire du palais qui arrêta l'avancée Sarrasine. Et il n'est pas si facile que ça de parler de grande figure de l'Histoire. Longtemps cantonné à un rôle mineur, il fut même souvent vu négativement de par sa tendance à exproprier l'Eglise de ses biens pour asseoir une autorité envers ses vassaux, ou même le fait de prendre la tête d'une armée sans que son roi ne le sache. Eh oui, ça fait très usurpateur du trône, tout ça ! Pas étonnant qu'il soit mal aimé de ceux-ci.



Mais le livre est très complet, brossant le portrait de Charles Martel à travers les siècles, devenu instrument politique malgré lui. J'ai adoré la façon dont il devient tour à tour usurpateur, vil hérétique brulant dans les flammes de l'enfer, défenseur de la chrétienté puis défenseur d'une "nation gauloise" face à un choc culturel représenté par les arabes. Vision romancée et fausse, mais inscrite aujourd'hui durablement dans l'espace public. Charles Martel est devenu un sujet de discussion bien trop présent au regard du fait historique, et surtout bien trop instrumentalisé par rapport à sa réalité.

Ce livre est salutaire à l'échange autour de l'Histoire et surtout sur la question bien trop débattue de l'immigration, puisqu'il remet à sa juste place cet évènement qui sert de prétexte historique à bien trop de monde. Charles Martel n'est ni le défenseur d'une France envahi ni un rempart de la chrétienté contre la barbarie, pas plus qu'il n'est une personne ayant contribué à faire du Moyen-Âge une période d'obscurantisme en empêchant l'Islam de s'installer sur le territoire Aquitain. L'Histoire n'est jamais simple, ou plutôt elle est toujours un peu plus complexe que cela. Il est de bon ton de relire ce genre d'ouvrage de temps en temps, afin de se le rappeler.
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Charles Martel et la bataille de Poitiers :..

Le début du livre est vraiment passionnant, très instructif.



En revanche, on sombre rapidement dans des considérations plus rébarbatives, beaucoup moins intéressantes.



C'est aussi à ce stade que l'on ressent l'idéologie d'extrême-gauche très pénible. C'est dommage.
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Les historiens de garde

Lecture obligatoire pour qui aime lire des œuvres et essais historiques. Moi-même il y a quelques années, jeune adulte aimant lire l'Histoire sans en devenir un étudiant, j'avais lu Métronome et apprécié malgré le style plutôt poussif du livre. J'y avais déjà noté quelques étrangetés tel que la place accordée à Saint Denis en comparaison de celle accordée à la Commune.



Historiens de Garde pose des bases. Il explique de manière simple et grâce à la critique de Métronome quel est la complexité de la compréhension et l'étude de l'Histoire. On comprend à quel point la méthode scientifique est primordiale en Histoire et surtout, combien il est facile de mettre un filtre politique dans cette matière pour lui faire dire ce que l'on veut...



C'est une lecture moderne et presque obligatoire que ce livre de nos jours ou les débats sur évènements passés et "héritages" devraient de facto influencer les décisions futures selon ces mêmes historiens de garde....



Les auteurs expliquent qu'analyse historique et faits passés n'ont rien à voir avec l'idéologie de l'historien. Un fait est un fait, c'est la charge émotive qu'on lui donne qui devient politique. Et non l'inverse.



A lire de toute urgence.
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