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Critiques de Côme Martin-Karl (26)
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Les occupations

Le roman raconte en parallèle l'histoire de Pierre, un adolescent puis un jeune homme d'une famille ordinaire, aux parents un peu beaufs, vivant dans les années quatre-vingt, et celle de son grand-père, Marcel, collaborateur sous l'Occupation, employé par la censure pour passer au tamis les oeuvres dramatiques puis poétiques à paraître. Ce mode de narration tend à renforcer leur point commun, qui est l'échec. Le grand-père se croit un talent dramatique mais n'est qu'un sous-fifre fonctionnarisé de la propagande allemande, et le petit-fils a un talent pour le dessin qu'il n'exploite pas du tout faute d'un environnement socio-familial adéquat. ● J'ai commencé à livre l'oeuvre de Côme Martin-Karl par son dernier livre, paru en 2020, La Réaction, qui m'avait enthousiasmé, puis poursuivi avec son deuxième livre publié, Styles, que j'ai également énormément aimé. Les Occupations est son premier roman et je dois avouer qu'il ne m'a pas autant plu. L'humour y occupe une place bien moindre, ou alors je n'y ai pas été aussi sensible. Je trouve aussi que l'auteur n'y a pas suffisamment de tendresse pour ses personnages, contrairement à ce qui se passe dans ses romans postérieurs, où pourtant les personnages sont aussi difficiles à aimer. Le personnage de l'amant de Pierre, Thierry, n'a aucune facette positive, par exemple. Enfin, je ne vois pas trop où l'auteur veut nous emmener en comparant les destins de losers du grand-père et du petit-fils. Je lui trouve quand même déjà un grand talent dans les dialogues et aussi dans l’originalité et la pertinence de ses comparaisons.
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Styles

Je poursuis à rebours la découverte de l'oeuvre de Côme Martin-Karl, commencée avec son dernier ouvrage La Réaction (2020), que j'ai adoré. Il s'agit ici de son deuxième roman paru en 2017. ● Le narrateur est étudiant en sociologie et rédige un mémoire sur le chanteur du boys band One Direction, Harry Styles, dont il est éperdument amoureux. Il se pose beaucoup de questions sur l'orientation théorique à donner à son mémoire, d'autant que son directeur de mémoire lui annonce qu'en raison d'un trop grand nombre d'étudiants suivis, il ne peut pas le garder. Mais au-delà de ces questions d'ordre universitaire, le narrateur nous entraîne dans ses rêveries sur la vie et sur l'amour et nous fait partager ses rencontres (plus ou moins) érotiques, avec un aide-soignant dont nous ne connaîtrons jamais le nom, et avec Julien, un doctorant qui travaille lui aussi sur Harry Styles, en psychanalyse du droit. ● L'intrigue n'occupe pas une place centrale dans ce roman et pourtant il fonctionne, et il fonctionne même très bien : il n'y a aucun temps mort, il se lit avec délectation. Les romans de ce type font souvent d'excellents ouvrages quand l'auteur parvient à les rendre passionnants grâce à d'autres éléments, et c'est sans doute ce qu'il y a de plus difficile à écrire. Ici, la satire des milieux universitaires en sciences humaines, la pédanterie grotesque des pontes, la recherche à tout prix de l'originalité au prix de travaux en définitive ridicules, font merveille. Mais à un niveau plus général, c'est la vacuité de tous les discours que l'auteur dénonce, pas seulement le discours universitaire, mais aussi notamment le discours amoureux, fondant l'irréductible solitude de l'être humain contemporain. Et aussi, quoi de plus vide que les paroles des chansons d'un boys band ? Et l'icône elle-même, Harry Styles (que je ne connaissais même pas de nom !), composée de tous les discours des médias et des fans, n'est-elle pas elle aussi une coquille vide, si bien que quand on rencontre l'être qui se cache derrière, on n'a rien à lui dire ? Harry Styles est en cela la métaphore parfaite de la vacuité moderne. ● Ce qu'il y a de drôle, ce sont les critiques négatives que j'ai lues sur ce livre sur Amazon, qui émanent probablement de fans de Harry Styles et qui croyaient sans doute y trouver une fanfiction. ● A un niveau plus personnel, j'ai eu avec ce livre l'incroyable et rarissime impression de me sentir de plain-pied avec l'auteur, l'impression qu'il écrivait mes propres pensées, qu'il a fait ce livre pour moi seul tant je m'y retrouvais !
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La réaction

Un vrai coup de coeur ! Je ne connaissais pas du tout ce jeune écrivain qui m'a été révélé par la sélection de printemps du Renaudot. ● Dans une France où l'extrême-droite l'a emporté dans les esprits (réalité alternative ou bien récit d'anticipation, on ne le saura pas), Matthieu Richard, jeune trentenaire, après avoir exercé l'activité de « troll » sur le Net, milite dans un groupuscule appelé le « Renouveau Réactionnaire », moins par conviction politique que pour pouvoir approcher Khalid-Enguerrand, un jeune homme de dix ans de moins que lui dont il tombe amoureux. Le roman raconte le parcours erratique de Matthieu, qui adore les paradoxes et tout ce qui lui permet de se singulariser, ce qui offre à l'auteur de faire une satire décapante des milieux de l'extrême-droite et de l'ultra-catholicisme. ● La première moitié du livre est absolument brillante, pleine d'un esprit inventif, primesautier, allègre, scintillant, qui provoque sur le lecteur une véritable jubilation. Les formules choc font mouche à tel point que j'avais envie de tout stabiloter. C'est extrêmement drôle, bien vu et bien envoyé. Souvent à la fin d'un paragraphe ou d'une réplique vient la phrase qui claque et fait mourir de rire. On lit très rarement d'aussi bonne prose. C'est exceptionnel et pour moi cela justifie la note maximale, même si, sur la longueur, l'auteur s'essouffle un peu lorsque l'intrigue l'emporte sur l'esprit. J'ai déjà commandé les deux premiers livres de Côme Martin-Karl qui je l'espère continuera longtemps à nous enchanter. Pourquoi pas le Renaudot ? ou un autre prix. Il faut que quelqu'un qui provoque un tel bonheur de lecture soit plus connu !
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La réaction

« Renouveau Réactionnaire », est un obscur groupuscule d'extrême droite catho, auquel va adhérer le narrateur, un trentenaire désoeuvré, glandeur narcissique, attardé dans une adolescence contestatrice.



La volonté qui l'habite de rejoindre cette organisation ne répond pas à une quelconque aspiration politique ou religieuse. Refusant absolument de penser et d'agir comme le commun des mortel, Matthieu est en fait déterminé par l'obsession de se démarquer, d'être original, et il s'oppose systématiquement aux théories ou principes susceptibles d'être partagés par la masse : « Je voulais être dans le camp des vaincus, il n'y avait que ça de beau, la victoire est toujours laide, elle est pompière, tonitruante, la défaite est déchirante et profonde ».



Cette motivation est de plus renforcée par son désir de se rapprocher de Khalid, alias Enguerrand, un membre du groupe, dont il tombe amoureux. Au fil du récit, ce désir deviendra l'objectif principal de Matthieu.



La prose de Côme Martin-Karl, très second degré, est délectable et hilarante. Pour le plus grand plaisir du lecteur, il use et abuse d'un vocabulaire et d'expressions aussi inventifs que désopilants. Il crée une galerie de personnages névrosés dont les engagements extrémistes sont surtout extrêmement absurdes, extrêmement stupides, extrêmement ridicules.



« La réaction » est une satire grinçante des milieux activistes ultra, centrés sur l'intolérance, pour lesquels le rejet des autres est une raison d'existence.
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La réaction

À droite toute ! Matthieu, le héros de ce roman, est un peu le pendant de Bahia dans le Nom des gens de Michel Leclerc (rappelez vous, elle couchait avec des types de droite pour mieux les convertir au socialisme). Comme elle, il adore les discussions politiques après l'amour. Il aime polémiquer, argumenter. Plus la discussion avec son amant du moment est engagée, mieux c'est. C'est pourquoi il aime les rencontres d'un soir : il y a confrontation, sexe bien sûr et cela lui permet accessoirement de se loger. Car Matthieu n'a pas de domicile fixe. il vivote à droite et à gauche, est hébergé gracieusement par de vagues relations, vit chichement du RSA, évite de travailler s'il le peut, joue le troll sur le net. C'est un homme qui se laisse porter ! Après avoir milité à gauche, il navigue désormais dans les milieux de l'extrême-droite et de l'ultra catholicisme, du côté du mouvement du Renouveau Réactionnaire (davantage pour les beaux yeux de Khalid-Enguerrand que par conviction politique). Mais ce nouvel engagement va l'entraîner bien plus loin qu'il ne l'imaginait...Avec ce court récit, Côme Martin Karl propose une satire incisive des milieux politiques extrémistes et de leurs militants. C'est fin, drôle, sarcastique et particulièrement bien écrit. Les saillies sont nombreuses et percutantes. J'ai ri (et ce n'est pas négligeable en cette période plutôt morose). Un moment de lecture savoureux.
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Les occupations

Avec un grand-père paternel fusillé à la Libération et un grand-père maternel enrichi grâce au marché noir, l'héritage est lourd pour Pierre Miquelon, adolescent des années 80. Mais Pierre n'en sait rien. Dans la famille, le sujet est tabou et jamais on ne parle ni du collabo ni du salaud. Tout au plus sait-il que Marcel Miquelon travaillait à la Propagandastaffel où il était chargé de censurer les oeuvres écrites pour les débarrasser de tout ce qui pouvait déplaire à l'occupant allemand. Bien loin de ce passé honteux, Pierre a été élevé par des gens bien, sans histoires, des français moyens, fiers de leur petit pavillon de banlieue, contents du peu qu'ils possèdent et ne désirant pour leurs enfants qu'un bonheur simple et un bon travail. Et Pierre répond à toutes leurs aspirations. Adolescent paisible, il passe son bac et entre en BTS gestion commerciale. Hélas, une rupture sentimentale va le faire dévier du chemin tout tracé. Il arrête son BTS, entre dans une école commerciale, se découvre homosexuel, s'éprend de Thierry et quitte l'Oise pour le Loiret, un boulot de créateur de mots croisés et la vie de couple. Finalement quitté par Thierry, il s'installe dans l'Aude, dans la maison familiale, et c'est là qu'il trouve les archives de son grand-père Marcel. En fouillant les cartons, il se fait peu à peu une autre idée de ce collabo, le découvrant plus passionné de théâtre et écrivain raté que fervent admirateur d'Hitler et de ses sbires.





En entremêlant les destins d'un obscur gratte-papier mais fervent censeur, sûr de travailler pour le bien des belles lettres, naïf et maladroit pendant l'Occupation et son petit fils qui se cherche dans la France des années 80, Côme MARTIN-KARL pose la question du lien familial par-delà le temps. Et ce qui lie les Miquelon, c'est bel et bien la médiocrité. Leurs destins sont très différents bien sûr mais le ciment en est la petitesse des ambitions, ce désir de s'élever mais sans faire de vagues pour finalement rester à l'écart de la réussite. Si le procédé est intéressant puisqu'il permet de visiter deux époques, la guerre d'abord, avec le climat délétère de l'Occupation et la frénésie de la Libération, et les années 80 ensuite, époque sans réelle ampleur où tous les espoirs de réussites résidaient dans les vertus de l'ascenseur social. Cependant, si on suit les péripéties de ses deux anti-héros avec un certain intérêt, on a tout de même du mal à voir où l'auteur veut en venir. L'échec serait-il héréditaire? Espérons que non et laissons ces deux ratés à leurs petits rêves de gloire. Pas indispensable.
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Les occupations

Dans ce premier roman, Côme Martin-Karl ne rate pas sa cible : une famille ordinaire et aseptisée de province, les Miquelon, menant une vie rangée et sans relief dans l’Oise.



Mais à partir d’un grand-père collabo, l’auteur tricote un roman très drôle dans lequel il balade un regard plein d’humour sur les déveines de deux générations, le grand-père Marcel et son petit-fils Pierre. Ce qui relie ces deux hommes qui ne se sont pas connus : des destins avortés, celui d’un dramaturge ignoré pour l’un, et d’un dessinateur piétiné pour l’autre. Des hommes sans grande envergure animés par des rêves trop ambitieux, et qui ne parviennent pas à dépasser leur condition de sous-fifre de l’administration ou de doux rêveur.

Ils vivent leurs échecs comme autant de prises de conscience sur le sens de la vie et de leur identité. Pour eux ce sont de nouvelles opportunités à saisir alors que d’autres refuseraient de se bercer d’illusions.





La plume spontanée et nonchalante, les comparaisons efficaces trahissent le regard distancié et narquois qu’on aime bien porter sur les plus faibles ou les plus tendres d’entre nous. L’auteur prend plaisir à railler des français moyens, un peu benêts, dont la vie est aussi épaisse qu’une fiche bristol. Pour Binet ce sont les Bidochon, pour Martin-Karl ce sont les Miquelon.

C’est parfois caricatural, excessif, mesquin et pourtant on sourit du traitement qui est fait du thème du poids des origines, du legs de la honte, de la quête d’identité ou encore de l’affirmation de soi. Là où des auteurs engageraient le récit dans un roman sombre et complexe, Côme Martin-Karl a opté pour une littérature à contrepied, pleine de légèreté et de second degré. On peut parfois regretter la construction un peu rigide mais ce premier roman demeure une lecture distrayante lorsqu’on se concentre sur ces personnages un peu bancals, en marge de la réussite, enfermés dans leur aveuglement face à la réalité. Des personnages « condamné[s] qu’à ramasser des miettes », eh oui « les miettes, en fait, ça peut occuper une existence ».

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La réaction

Le héros se promène tel un dandy désabusé dans le microcosme de l'extrême droite radicale. Plus par posture plus que réelle conviction semble-t-il.

Cela fait un peu froid dans le dos.

La description des différents visages du fanatisme de l'ultra droite ne manque cependant pas de sel.



Il va trouver une raison supplémentaire à cet engagement auquel il ne croit pas lui même en la personne d'Enguerrand qu'il s'agit de conquérir. Cet objectif le conduira plus loin qu'il n'aurait sans doute cru aller.



Peut on se dégager de tout, être indifférent à tous les aspects matériels, être en même temps réactionnaire parce que c'est dans l'air du temps ?



Il faut lire ce livre comme une satire brillante et glaçante et terriblement contemporaine.



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La réaction

« Se distinguer. La distinction. Apparaître distinctement dans l’esprit des gens. Ça a toujours été chez moi une obsession. »



Roman dystopique au vitriol suivant la trajectoire aléatoire d’une brillante tête à claques dont la seule obsession est d’être à contre-courant, provoc, choquant. Naviguant dans les marges sombres, entre une communauté de trolls et les groupuscules extrêmes les plus illuminés, Matthieu se fout allègrement de tout. Anti-héros cynique, il explore le militantisme apocalyptique sans la moindre conviction, entre esthétique de la radicalité paradoxale et recherche de la figure du maudit merveilleux. Figure d’une société passéiste qui a basculé dans le rejet ou narcisse enfermé dans une étroite vision du monde dépourvu de but et de valeurs, le portrait oscille en enchaînant les outrances.



Roman très original d’une quête nihiliste de la jubilation la plus sombre, l’écriture est percutante, acide et contemporaine. On ne sait si l’on doit rire ou être terrifié !
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Les occupations

Ce roman c'est le récit du destin de deux hommes à deux époques différentes : Tout d'abord Marcel travaillant pour les Allemands et la censure d'oeuvres théâtrales pendant l'occupation. Il pense servir sa passion mais son destin sera funeste.Bureaucrate méprisé ayant laissé la honte comme héritage pour ses descendants. On ne parle pas de lui, c'est un sujet tabou. le deuxième personnage est Pierre , son petit-fils , jeune homme errant dans les années 80 entre un travail peu passionnant et un autre garçon duquel il tombera amoureux. C'est un garçon qui s'assume , qui semble vivre au gré des opportunités.



Après son licenciement, il se réfugie chez sa défunte grand-mère , épouse de Marcel. La découverte d'un manuscrit révèle chez Pierre l'envie d'entreprendre, de se grandir , mais son projet échoue...



Les occupations , que signifie ce titre ?



Les occupations accepte pour moi deux interprétations: la période dite de l'occupation nazie vécue par Marcel et les activités comme le travail de Marcel et de Pierre ( les occupations vues comme l'exercice d'un métier ou la passion).



Qu'est-ce qui occupe voire préoccupe les deux personnages ? Pierre occupé, préoccupé par son amour, habité par la découverte du manuscrit et la promesse d'une nouvelle et belle vie. Marcel habité par l'écriture et le théâtre , et qui ne laissera comme souvenir que la honte et le dégoût. Les descendants de Marcel préoccupés par la tare qu'il leur aurait légué comme s'ils devaient porter de génération en génération son destin , sa chute soudaine et brutale.



Roman très agréable à lire, il faut creuser pour essayer de comprendre le lien entre les parcours des deux personnages. On cherche sans aucunes certitudes si les destins des deux hommes sont à mettre en parallèle.
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Les lumières de granite

Petit objet littéraire identifié par la maison Malo Quirvane, ces Lumières de granite couvrent en une vingtaine de pages l'histoire d'un détachement.



Détachement administratif d'abord : celui d'un directeur de communauté de communes que la carrière porte d'un bout à l'autre de la France et qui atterrit en Bretagne, au milieu d'un Finistère aride et rustique. Ce premier détachement en crée un second, à la fois mental et géographique, en d'autres termes un dépaysement. Notre homme, un parisien, ou plutôt un francilien de campagne (la différence est notable), prend son poste et s'y sent d'emblée étranger .



Ce dépaysement "horizontal" prend une nouvelle dimension à la suite d'une expérience métaphysique qui forme un second axe, vertical celui-ci. Au sens propre comme au figuré, cette expérience agit doublement : elle rapproche le héros de sa secrétaire, qui l'a vécue aussi, en même temps qu'elle l'éloigne du reste du monde et de ses obligations professionnelles. (Un constat au passage : la fraternité des individus est plus forte que la méfiance communautaire)



Le récit s'achève en suspens sur le choix du héros : recentrer sa vie autour de son expérience métaphysique, ou poursuivre une existence routinière au service de la bureaucratie nationale. A travers ce grand écart vertigineux, Côme-Martin Karl rappelle que toute vie est possible ; et qu'il ne tient qu'à nous de tirer le voile de l'ordinaire pour contempler, à défaut de les comprendre, les mystères du monde.



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La réaction



C'était mieux avant l'imprimerie ou la pute de Dieu.





Ce roman est incroyable! Sa première moitié n'est que pure jubilation. Je me suis surpris à rire physiquement au détour de chaque page, ce qui je crois ne m'était jamais arrivé en littérature. J'ai un peu mieux compris mon père lorsque je le voyais, enfant, s'esclaffer devant ses San-Antonio.



Pousser les curseurs idéologiques de l’extrême droite jusqu'à l'absurde tout en restant crédible est une performance de conteur d'envergure.



Si c'était mal écrit, sa critique en forme d'exploration de ce camp politique pourrait passer pour pathétique mais il faut reconnaître, le style est brillant. Chaque mot est à sa place et dans une juste quantité. Je ne connais absolument rien de la biographie de l'auteur et de ses idées politiques mais une phrase du narrateur le trahit et montre qu'il n'appartient pas au camp qu'il décrit. Également difficile de l'imaginer engoncé dans une gauche sectaire tant la tendresse qu'il développe pour ces excentriques et ces décalés de la réaction est grande.



La plupart des protagonistes sont homosexuels et ajoute encore à la confusion sarcastique de l'ensemble. L'auteur justifie d'ailleurs le fait que l'on puisse être gay et appartenir à un groupuscule d’extrême droite. Pour une rare fois ça sort de de la satire, ça tient même la route. Autant catholique que de l'héritage grec et romain.



Pour conclure, un livre dont je n'ai entendu parler nulle part, découvert par hasard, et que je garderai longtemps au fond de ma mémoire tout comme un bon Houellebecq. (C'est vous dire !)

J'ai donc découvert un auteur non précédé par sa réputation et c'est peu fréquent. Quand cette connerie de coronavirus sera retournée dans les entrailles du pangolin ou du laboratoire qu'elle n'aurait jamais dû quitter, je n'hésiterai pas à me rendre dans ma librairie familière, commander ses deux premiers ouvrages, à la condition qu'ils soient toujours disponibles.







Samuel d'Halescourt
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Les occupations

2 destins sans panache à 2 générations d'intervalle. Le ton est enlevé pour décrire 2 existences assez falotes et une incapacité à sortir du lot.

Le rendu de la jeunesse de Pierre est saisissant. Étant de la même génération que le personnage, j'ai retrouvé mes marques et les mentalités de l'époque dans ce roman.

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La réaction

Après Styles et Les occupations, Côme Martin-Karl est revenu récemment en librairie avec La réaction publié aux éditions Gallimard. Dans ce livre, l’auteur propose une plongée dans la vie de Matthieu Richard, citoyen et activiste d’extrême droite. Ambiance.



# La bande-annonce





« Le propriétaire de l’appartement s’appelait Yvon Saillac de Livès, il avait vingt-neuf ans mais la tête de quelqu’un de dix-neuf ans qui allait mourir à vingt-cinq. Il fumait, se droguait à l’occasion, vivait la nuit et se nourrissait de saucisses cocktail. Il avait des sympathies libertariennes et envisageait son logement comme une communauté politiquement incorrecte où il réunissait des gens qui partageaient son point de vue : peine de mort, État faible, dérégulation généralisée, darwinisme social, privatisation des sols, des sous-sols, de l’école, de la police, de la monnaie, de l’armée, de la santé, de l’air, du feu et de l’eau. »





Matthieu Richard, un trentenaire sans emploi, grenouille dans une France de plus en plus réac. Par dandysme, il fréquente divers milieux d’extrême droite, peuplés de marginaux bien nés et d’idéologues sous acide. En rejoignant le Renouveau réactionnaire, un groupuscule catholique intégriste, il se confrontera à ses névroses politiques et sentimentales.

Avec La réaction, qui nous entraîne du centre de Paris à la France des ronds-points, Côme Martin-Karl signe un roman édifiant sur notre époque.





# L’avis de Lettres it be





Le refus d’un emploi doré dans le marketing, l’intégration de groupuscules d’extrême-droite… Le contexte est très vite posé dans ce troisième roman signé Côme Martin-Karl. De fil en aiguille, la rencontre se fait entre le lecteur et Matthieu, personnage principal de cette histoire. Homosexuel discret et peu assumé, notre héros de papier grimpe les échelons d’un milieu que l’auteur dépeint avec force détails pour nous le faire détester. Très vite, il s’emmourachera de Khalid Derradji alias Enguerrand, un personnage auto-intitulé ainsi pour mieux pénétrer le milieu. Pourquoi « Enguerrand » ? Parce qu’il y a « guerre » dedans (si, si, c’est l’auteur qui le dit…). Et ce n’est que le début…





« Malgré mon intégration pleine et entière au Renouveau réactionnaire, j’avais du mal à nouer une relation avec Enguerrand. Il me résistait, c’était le couvercle d’un pot de confiture qu’on ne peut pas ouvrir même avec un torchon, même en tapant violemment le fond, même en y glissant un couteau. »





Le frère Marie-Marie comme porte-étendard de la cause royaliste, le combat permanent contre les gauchistes et les LGBT, une France purulente entre gilets jaunies et xénophobie rance, des passages hasardeux sur l’homosexualité (je vous laisse goûter le passage précédent)… Il y a eu au cinéma le Problemos d’Éric Judor, satire hilarante de l’extrême gauche tendance « zadiste » et cheveux sales. Avec La réaction, on se rêve à penser que Côme Martin-Karl ait aussi fait le pari de la drôlerie pour dépeindre un milieu de l’extrême-droite aussi caricatural et ridicule. Non pas que ce milieu soit, en vérité, exempt de tout reproche (bien au contraire !) mais les excès répétés et martelés de l’auteur pour bien faire comprendre à son lecteur que tous ces gens ne sont que peu fréquentables, hautement racistes et dégoûtants, ces excès-là transforment l’exercice littéraire en belle rigolade. En espérant que cela soit le but initial…





On ne sait que penser… Côme Martin-Karl est-il vraiment sérieux avec ce livre, ou n’est-ce là qu’une parodie politique hilarante par ses excès stéréotypiques ? La question mérite d’être posée lorsque l’on tourne l’ultime page de La réaction. Impossible que l’auteur parvienne à se prendre au sérieux dans une telle exacerbation des lieux communs de l’extrême droite, une critique branlante qui se rêverait avec de gros biceps idéologiques… On ne sait que penser, et on préfère se rassurer à croire que tout cela n’était qu’une farce réussie.



Retrouvez la chronique en intégralité sur Lettres it be
Lien : https://www.lettres-it-be.fr..
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Les lumières de granite

Une nouvelle très agréable à lire, joliment écrite. En quelques lignes nous sommes aux côtés du personnage principal qui découvre une petite commune de Bretagne où il s'installe pour raison professionnelle. L'histoire contemplative et introspective prend un virage fantastique inattendu...



J'ai apprécié la modestie et la simplicité qui se dégagent de cette histoire, impressions qui restent présentes jusqu'au bout malgré l'apparition de "l'élément fantastique". Et comme souvent avec des textes courts, c'est au lecteur de s'approprier le récit et de le poursuivre...



Cela donne envie de découvrir d'autres livres de cette collection présentée ainsi :

Les mini-romans de la collection Fragiles Pouvoirs mettent en scène l'exercice du pouvoir administratif en France par les hauts fonctionnaires parachutés dans des provinces pleines de charme et d'embuches.



Merci à Babelio pour cette lecture offerte lors d'un événement "Masse-critique".
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Les lumières de granite

J'ai adoré ce mini-roman à la fois poétique et administratif, jacobin et breton ! C'est un texte bien troussé, fort intelligent, qui se lit comme on sirote une bonne petite bière, dans un bon fauteuil, entre l'après-midi et le soir.

Le style de Côme Martin-Karl réussit l'alliage de la précision chirurgicale et de la poésie, mais une poésie évidente, immédiate et pas du tout recherchée, qui surgit entre les mots, entre les phrases, entre les sentiments inattendus.

Un haut-fonctionnaire quelque peu sérieux et fade en apparence, se retrouve à la direction des services dans le Finistère qu'il ne connaît pas. Il prend son poste avec sérieux et s'attèle à la tâche, sous les yeux de la secrétaire, une locale aux faux airs bonasse. C'est pourtant cette Anne-Sylvie qui sera son alliée et sa sœur d'âme face au surgissement du fantastique au milieu de l'intrigue.

Un format formidable, qui permet de fermer le livre une demi-heure après l'avoir ouvert, en ayant l'impression d'avoir englouti un roman.

Un style très « Martin-Karl », mais avec un zeste de poésie qu'on ne trouve pas dans ses autres romans, tout aussi sarcastiques mais plus cyniques.

Une histoire très charmante et drôle, qui nous rappelle qu'aucun Etatisme n'effacera jamais les marottes locales et le désir d'évasion des gens du commun.

Un sourire aux lèvres, j'ai fermé ce bouquin que je rouvrirai dans deux ou trois ans sûrement, pour retrouver ces sensations à la fois légères et caustiques.
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La réaction





Dans ce roman Côme Martin-Karl décrit parfaitement les moeurs des clans politiques extrémistes. Dans ce cas-ci il s'agit de la droite mais la gauche est identique dans son fonctionnement, seuls les buts visés les différencient. C'est amusant à lire, jamais caricatural et l'on sent que l'auteur n'a pas voulu être méchant avec ses personnages . Certes ils sont un peu (beaucoup ?) à la marge mais ils dégagent dans l'ensemble une certaine forme de sympathie teintée d'ironie surtout lorsqu'on ne partage pas leurs opinions . Un récit court, bien calibré qui fait qu'on ne s'ennuie pas à la lecture.
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Les occupations

Premier roman de Côme Martin-Karl, Les Occupations établit un parallèle assez habile, à un demi-siècle de distance, entre deux hommes à l'existence terne, obsédés par la peur du déclassement et désespérément en quête d'identité. Dérangeant.
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La réaction

"La réaction" de Côme Martin-Karl est un roman inquiétant et drolatique, perturbant et corrosif. Une plongée sans bouteille au cœur des mouvances d'extrême droite dans les pas d'un narrateur qui se cherche et se perd dans les brouillard d'une France rance et crépusculaire.

Un éclairage sur ce que nous sommes collectivement (en train de devenir) ?
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Les lumières de granite

Je tenais d'abord à remercier Babelio et la maison d'édition Malo Quirvane pour cette lecture offerte lors d'un événement "Masse-critique".

Cette lecture je l'ai avant tout choisie pour la poésie de son titre "Les lumières de granite", mais aussi pour son format très particulier de "mini roman". C'est en effet la spécificité de la maison d'édition Malo Quirvane d'éditer des textes courts s'apparentant à la nouvelle. Ce n'est pas mon habitude d'aller vers ce genre de textes, mais celui-ci m'intriguait. La quatrième de couverture n'en dit pas long, mais c'est joli, déjà: "C'était la lune : des rochers secs, une végétation si triste qu'on ne la remarquait pas, des éboulis comme si une force surnaturelle avait décollé les pierres enfouies sous la poussière grise." Il s'agit en fait, de l'incipit, et c'est alléchant. le lecteur est d'emblée transporté au coeur de la Bretagne et englouti par l'atmosphère énigmatique des Monts d'Arrée. Et j'aurais tant voulu que la magie poétique de cette première page opère tout au long des 36 pages suivantes. Pour un texte court, je m'attendais à une fulgurance, j'aurais voulu que ce soit "beau comme une claque", à l'image des paysages bretons. Malheureusement, je suis restée perplexe face à cette lecture trop courte qui ne pas transportée. En effet, cette histoire d'un directeur municipal qui, pour se remettre à neuf, choisi de se couper du monde en prenant poste en Bretagne, tombe à plat. Et l'élément "fantastique" qui survient n'est pas non plus d'une grande force, ni très original. Je me suis trouvée déçue également face à une intrigue qui ne mène nulle part, avec une impression d'inachevé. Si l'écriture reste jolie, elle perd très vite de sa poésie. Je n'ai donc pas été convaincue par cette expérience du mini roman, en tout cas pas par celui-là. Je pense que j'ai besoin de plus de consistance, de plus qu'un quart d'heure de lecture pour me sentir happée. Mais peut-être suis-je passée tout à fait à côté.
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