Citations de David G. Haskell (26)
L'odorat est le plus négligé de nos sens, alors qu'il nous offre l'accès le plus immédiat et le plus profond au monde extérieur, à nos souvenirs et à nos émotions. De plus, il exalte tous les autres sens.
Notre action n'est pas celle d'une période glaciaire ni d'un vent de tempête,
mais quelque chose d'entièrement nouveau. Nous avons bouleversé la forêt
comme l'aurait fait une période glaciaire, mais à un rythme mille fois plus
rapide.
Un des résultats de mon observation du mandala a été de comprendre que c'est en leur accordant notre attention que nous faisons apparaître des endroits merveilleux, et non en trouvant des endroits "vierges" qui nous émerveillent.
Ce matin la tige a la forme d’un élégant point d’interrogation, toujours recouvert de duvet, la fleur bien close suspendue à l’extrémité de sa
courbe.
Pour les Grecs des temps homériques, Kléos, la renommée, consistait en un chant. Les vibrations de l'air recélaient la mesure et la mémoire de la vie d'une personne.
Ecouter, c'était donc apprendre ce qui se perpétue.
Je me suis mis à l'écoute des arbres, en quête d'un kléos écologique.
Cependant, l'indépendance de la vie du mandala me procure par ailleurs une joie ineffable mais intense. J'ai compris cette indépendance en entrant dans la forêt il y a quelques semaines. Un pic chevelu s'est posé sur un tronc d'arbre et a poussé son cri. L'altérité de cet oiseau m'a frappé. Voilà un animal dont les pareils ont lancé leur appel caractéristique des millions d'années avant l'apparition de l'homme. Son univers quotidien est rempli d'écailles d'écorce, de coléoptères cachés et des sons émis par ses congénères, un autre monde, parallèle au mien. Des millions de mondes pareillement parallèles existent dans le mandala.
J'ai eu la chance de pouvoir observer un petit coin de forêt ancienne. C'est un rare privilège : les forêt de peuplement mûr couvrent moins d'un demi pour cent de la surface de l'est des État-Unis. Mais les vieilles forêts ne sont pas la seule fenêtre ouverte sur l'écologie de la planète.
Un des résultats de mon observation du mandala a été de comprendre que c'est en leur accordant notre attention que nous faisons apparaître des endroits merveilleux, et non en trouvant des endroits "vierges" qui nous émerveillent. Les jardins, les arbres des villes, le ciel, les champs, de jeunes forêts, un vol de moineaux en banlieue, sont autant de mandalas. Les observer de près est aussi fécond qu'observer des bois de haute futaie.
Le chant de la grive sort de la syrinx enfouie dans les profondeurs de sa poitrine. A l'intérieur, des membranes vibrent et augmentent la pression de l'air qui s'échappe des poumons. Ces membranes entourent la confluence des bronches, transformant une exhalation sans timbre en une douce musique qui monte dans la trachée et jaillit du bec. Seuls les oiseaux produisent un son de cette manière, se servant d'un hybride biologique entre la colonne d'air tournoyante de la flûte et les membranes vibrantes du hautbois. Les oiseaux modifient la texture et le ton de leurs chants en variant la tension des muscles qui enveloppent la syrinx ; le chant de la grive est sculpté par dix de ces muscles au moins, plus courts que des grains de riz.
Affirmer que le forêt "pense" n'est pas un anthropomorphisme. Seulement, ces pensées ne se forment pas dans un cerveau comme le nôtre, mais dans un réseau vivant de relations.
4ème de couverture :
S'énivrer du parfum du pin ponderosa
Respirer l'odeur d'une forêt pluviale
Humer le nectar du tilleul d'Amérique
Goûter l'arôme corsé du genévrier
Ouvrir un livre fleurant la vanille fumée.
y venir aussi souvent que possible, observer le déroulement d’un cycle annuel, garder le silence, déranger le moins possible, ne pas tuer d’animaux ni en évincer, ne pas y creuser ni y pénétrer, ne m’autoriser qu’un simple effleurement des doigts.
Lorsque le papillon de nuit s'accouple, il remet à sa partenaire un lot contenant une boulette de sperme et un sachet de nourriture.
" Les photons qui ont allumé les feux de l'aube ont parcouru cent cinquante millions de kilomètres depuis la surface du soleil. Mais la lumière peut elle aussi être ralentie et filtrée. Ce ralentissement est particulièrement spectatculaire dans les entrailles du soleil, où les photons naissent de l'union ardente d'atomes sous pression. Le coeur du soleil est si dense qu'il faut dix millions d'années à un photon pour se frayer un chemin jusqu'à la surface. En cours de route, il est continuellement arrêté par des protons, qui absorbent son énergie, le retiennent un moment, puis libèrent l'énergie sous la forme d'un autre photon, Lorsque le photon s'échappe enfin, après avoir été englué si longtemps dans la mélasse solaire, il file comme une flèche jusqu'à la terre en huit minutes."
L'exploitation forestière élimine également des arbres qui, une fois tombés, auraient formé des fissures humides, des trous où nicher et des refuges où se protéger du soleil. Dans le jargon scientifique, on appelle ces arbres morts des « débris ligneux grossiers », expression qui semble bien méprisante pour ces acteurs vitaux de l'écologie de la forêt.
p70
Tel est le paradoxe de la sélection naturelle: la vie doit à la mort son perfectionnement.
Le ver niché dans l'intestin du grillon libère des substances chimiques qui envahissent le cerveau. Le grillon qui d'habitude fuit l'eau y plonge. A ce moment, le ver déploie ses muscles et déchire l'enveloppe corporelle du grillon.
Quand nous regardons un rocher, nous voyons la roche nue ; un escargot, lui, y voit du beurre et de la confiture nappés à la surface. (p317)
Comme la plante est entièrement imprégnée de phytochromes, les arbres se comportent comme de grands yeux et perçoivent la couleur par tout leur corps.
Si on y jette un coup d'œil rapide, ces plantations ressemblent un peu à une forêt. Mais la diversité des oiseaux, des fleurs sauvages et des arbres appartient au passé. La diversité biologique est plus grande dans les jardins des maisons de banlieue que dans ces fantômes de forêt. p97
Notre action n'est pas celle d'une période glaciaire ni d'un vent de tempête, mais quelque chose d'entièrement nouveau. Nous avons bouleversé la forêt comme l'aurait fait une période glaciaire, mais à un rythme mille fois plus rapide. p95