Citations de Didier Pleux (115)
Remplacer les exigences par de simples demandes
[...]
L'attente, l'exigence, sont stériles car pleines d'hostilité, là où une simple demande "non émotionnelle" peut faire bouger les choses. Reconnaître la "jambe de bois" de l'autre, c'est l'accepter. Le critiquer pour cette même "jambe de bois", c'est attaquer son estime de soi. Agressé, l'humain se retranche dans des comportements d'évitement ou d'agressivité. Reconnu et accepté dans ses faiblesses, il peut se mobiliser pour se corriger, l'enjeu étant de progresser sur tel ou tel comportement là où l'attaque "globale" le détruit tant il se sent touché dans son intégrité.
Là encore, il est utile de faire preuve de bon sens : dormir est un futur bien-être pour l'humain, qu'il soit adulte ou non.
La voiture semble être un lieu privilégié où s'exprime librement la colère. Telle patiente me disait : "A la maison, ça va, mais au volant, je ne suis plus la même... une véritable diablesse !" Nous verrons plus tard que cette colère est rarement limitée "au volant" et qu'elle est en réalité bien là dans tous les domaines de la vie. Elle éclate en conduisant mais révèle le plus souvent un tempérament colérique plus ou moins bien maîtrisé au quotidien. Mais, culturellement l'agressivité au volant est souvent, inconsciemment admise, permise.
"La nature veut que les enfants soient enfants avant que d'être hommes.Si nous voulons pervertir cet ordre, nous produirons des fruits précoces, qui n'auront ni maturité ni saveur, et ne tarderont pas à se corrompre;nous aurons de jeunes docteurs et de vieux enfants".
J-J Rousseau dans Emile ou De l'éducation
De l'acceptation inconditionnelle de la réalité
Ces "acceptations" que je viens de décrire aboutissent à ce concept encore plus large d'acceptation inconditionnelle de la réalité en son entier. Savoir augmenter, par cette acceptation totale de la réalité, son seuil de tolérance à la frustration, c'est apaiser bien des colères. Ce n'est pas, je l'ai souligné, un nouveau stoïcisme. Non, c'est surtout constater, reconnaître que la vie est comme cela et se demander ensuite, et non plus sous l'effet de la colère (qui ne fait que générer des exagérations et des aberrations), ce que je peux faire pour la changer.
[La colère] est universelle [...], les Occidentaux expriment la colère par les mêmes gestes ou grimaces que le font les membres de sociétés plus primitives : "Ces résultats semblent attester le caractère universel des émotions et leur expression plus primitive [...] ; l'humain en colère signe le même langage non verbal, le visage se tend, le regard fixe, les lèvres se serrent. Cela traduit sans doute que "cette capacité à nous mettre en colère est inscrite dans notre patrimoine génétique".
... pour ceux qui ont des conduites vraiment pathologiques, il ne semble plus exister le moindre repos : tout est prétexte à se mettre en colère, colère contre soi, contre les objets, les autres, la vie en général.
Une mère idéale
Ma mère aurait dû être aimante, chaleureuse, caressante, attentive, empathique.
Oui, c'est indéniablement mieux, même si, là encore, aucune loi humaine ne vient déranger la loterie de la naissance : on a les parents qu'on peut ! De là à exiger qu'une maman dépressive soit attentionnée envers le tout-petit, qu'une autre dilettante n'oublie jamais tel soin ou telle stimulation, qu'une frivole favorise le bébé aux dépens de sa vie privée... Autant de désirs qui restent réalistes.
Même s'il n'existe aucune loi démontrant qu'il y a forcément escalade des comportements ("Qui est colérique en famille deviendra un assassin..."), rappelons que le risque d'être frappé ou tué est le plus grand en famille et qu'un conflit conjugal est le facteur qui, dans près de 50% des cas, provoque la première admission dans un hôpital psychiatrique aux Etats-Unis.
La colère est mauvaise pour la santé
Si certains pensent qu'il existe une forte corrélation entre la colère refoulée et les crises cardiaques, un psychologue chercheur de l'université de Maryland, Aaron Siegman, a démontré le contraire : exprimer souvent sa colère est un sérieux risque de souffrir de maladie cardiaque, tant la colère endommage les artères. A l'inverse, une bonne maîtrise de la colère est moins dangereuse.
Certains déterministes ont bien lieu et certaines expériences de vie vont en quelque sorte dicter nos conduites, nos souhaits, façonner nos désirs, nos attentes et nos demandes en amour. ... il faut croire en cette force du conscient... cette possibilité de repenser nos émotions.
Souvenons-nous de ce qu'écrivait Platon dans "La République" :" Lorsque les pères s'habituent à laisser faire les enfants...Lorsque les maîtres tremblent devant leurs élèves et préfèrent les flatter, lorsque les jeunes méprisent les lois parce qu'ils ne reconnaissent plus, au-dessus d'eux, l'autorité de rien et de personne, alors c'est là, en toute beauté et en toute jeunesse, le début de la tyrannie..."
Si les aides psychothérapiques peuvent aider à tempérer certaines colères, l'aide médicamenteuse semble être le seul recours possible quand toute l'humeur colérique domine chaque instant de la vie d'un patient.
Lorsque chaque humain demeure dans son pré carré, c'est le retour aux instincts de survie les plus primaires qui domine et la colère en est une réelle expression. Cette même colère, toujours teintée d'intolérance aux frustrations, stimule et nourrit les comportements incivils.
Ainsi, si nous ne pouvons tout maîtriser, si nous sommes impuissants pour éviter les adversités, il nous est cependant possible de disputer nos irrationalités pour éprouver ensuite des sentiments certes négatifs, mais appropriés et non disproportionnés : frustrés mais pas colériques.
Accepter les inévitables frustrations, s'accepter et accepter les autres, comprendre, mais aussi réprimer, et non refouler, ses sentiments de colère, c'est mieux penser sa vie.
Etre tolérant aux frustrations n'est pas une philosophie monacale, bien au contraire. Reconnaître la frustration, ce n'est pas l'attendre, la désirer, la provoquer, c'est l'accepter, parce qu'elle "est".
Accepter d'être psy, c'est accepter la réalité des croyances des gens sur le monde psy, même si c'est injuste ou déplaisant.
... il est recommandé de ne pas attendre de se trouver dans "la" situation qui risque de déclencher notre colère. Il est souhaitable d'anticiper : bien sûr, pas question de prévoir tous les aléas qui risquent de nous mettre en furie, mais travailler sur ceux que nos rencontrons le plus souvent au quotidien.
Retrouver les pensées subconscientes
Dans l'approche cognitive, il est possible à chaque instant de retrouver le pourquoi de certains automatises de pensée ou de les comprendre sans avoir besoin de décrypter un pseudo-langage cabalistique.
Bien avant les approches cognitives, Jean-Paul Sartre avait évoqué ce lien entre l'émotionnel de l'homme et sa façon d'être dans le monde : l'émotion n'est pas un simple symptôme de quelque chose de plus profond en moi, mais serait l'expression même de ma singularité devant les aléas de l'environnement.