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Citations de Emmanuelle Laborit (85)


Quand je décide de faire quelque chose, je vais jusqu'au bout. Je voulais y arriver. J'avais décidé d'y arriver.
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"Les sourds auraient pu m'appeler "Fleur qui pleur" si je n'avais pas eu accés à leur communauté de langue... Je ne pouvais plus m'arrêter de parler aux gens.
Je suis devenue "Soleil qui pars du coeur". C'est un beau signe."
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"Le soir, je met consciencieusement ma dent sous l'oreiller, je m'endors en éperant que la petite souris, sera fidèle au rendez-vous. Pas du tout éfrayée à l'idée qu'elle va se glisser dans mon lit. Le lendemain à mon réveil, je trouve une pièce de cinq francs, avec un dessin qui représente la souris. Elle est donc venue me voir, réellement. Très exitée par l'évènement, je décide de recommencer le soir même, puisque j'ai gardé ma dent. Avec, je crois l'idée de vérifier si la petite souris est bien une petite souris.
Le lendemain, je trouve effectivement une nouvelle pièce, mais plus de dent! Je cours demander à mes grands parents ce qu'elle est devenue. Ils m'expliquent que la petite souris l'a emportée avec elle tout simplement.
Je suis furieuse. D'abord par ce que c'est MA dent. Ensuite parce que j'avais l'intention de répéter l'expérience.
Vraiment furieuse. MA dent!"
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"Non. La raison qui me fait décider à sept ans que je n'aurais pas d'enfant est plus simple et plus importante. Avec difficulté, je réussi à faire comprendre à ma mère que ma peur vient du fait que je ne pourrais pas entendre mon enfant pleurer, donc je ne pourrais pas courrir, comme elle, pour le consoler, l'aider quand il aura besoin de moi. C'est un problème insurmontable. Alors, je n'aurais pas d'enfant."
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Alfredo :"Je suis sourd, comme toi, et je signe. C'est ma langue"
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La bande du métro Opéra, p. 120
Mes parents me permettent déjà beaucoup de choses, hélas, j’en fais davantage. Ils ne savent pas, par exemple, ils l’apprendront par la rumeur, que je « fréquente ma bande » au métro Opéra. C’est la base des sourds de l’époque, le petit ghetto où tout se raconte, se commente, s’organise, entre sourds. Les jeunes entendants font ça ailleurs, dans les banlieues, les terrains vagues, les cours d’immeubles.
La grande différence est que lorsqu’un sourd rencontre pour la première fois un autre sourd, ils se racontent… des histoires de sourds, c’est-à-dire leur vie. Tout de suite, comme s’ils se connaissaient depuis une éternité. Le dialogue est immédiat, direct, facile. Rien à voir avec celui des entendants. Un entendant ne saute pas sur un autre au premier contact. Faire connaissance, c’est lent, c’est précautionneux, il faut du temps pour se connaître. Des tas de mots pour le dire. Ils ont leur manière de construire leur pensée, différente de la mienne, de la nôtre.
Un entendant commence une phrase par le sujet, puis le verbe, le complément et enfin, tout au bout, « l’idée ». « J’ai décidé d’aller au restaurant manger des huîtres. »
(J’adore les huîtres.)
En langue des signes, on exprime d’abord l’idée principale, ensuite on ajoute éventuellement les détails et le décor de la phrase. Pour les détails, je peux signer des kilomètres. Il paraît que je suis aussi friande de détails que d’huîtres.
De plus, chacun a sa manière de signer, son style. Comme des voix différentes. Il y a ceux qui en rajoutent pendant des heures. Et ceux qui font des raccourcis. Ceux qui signent argot, ou classique. Mais faire connaissance en langue des signes prend quelques secondes.
Nous, on se connaît d’avance. « Tu es sourd ? Je suis sourd. » C’est parti. La solidarité est immédiate, comme deux touristes en pays étranger. Et la conversation va aussitôt à l’essentiel. « Qu’est-ce que tu fais ? T’aimes qui ? Qui tu fréquentes ? Qu’est-ce que tu penses d’Untel ? Où tu vas ce soir ?… »
Avec ma mère aussi la communication est franche, directe. Elle n’est pas comme les entendants qui se cachent souvent derrière les mots, qui n’expriment pas profondément les choses.
Éducation, convenance, mot qu’on ne dit pas, mot suggéré, mot évité, mot grossier, mot interdit ou mot apparence. Mots non dits. Des mots comme un bouclier.
Il n’y a pas de signe interdit, caché, ou suggéré, ou grossier. Un signe est direct et signifie simplement ce qu’il représente. Parfois brutalement, pour un entendant.
Il était impensable, quand j’étais petite, que l’on m’interdise de montrer quelque chose ou quelqu’un du doigt par exemple ! On ne m’a pas dit : « Ne fais pas ça, c’est impoli ! »
Mon doigt qui désignait un être, ma main qui prenait un objet, c’était ma communication à moi. Je n’avais pas d’interdit de comportement gestuel. Exprimer que l’on a faim, soif, ou mal au ventre, c’est visible. Que l’on aime, c’est visible, que l’on n’aime pas, c’est visible. Cela gêne peut-être, cette « visibilité », cette absence d’interdit conventionnel.
À treize ans, j’ai décidé que je ne voulais plus d’interdits, d’où qu’ils viennent. Mes parents ont tenu le choc comme ils ont pu. Au métro Auber, j’étais chez moi, dans ma communauté, libre.
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« Je suis une mouette qui aime le théâtre, qui aime la vie, qui aime les deux mondes. Celui des enfants du silence et des enfants du bruit. Qui les survole et s’y pose avec autant de bonheur. Qui peut parler pour ceux qui n’ont pas cette chance. Écouter les autres. Parler aux autres. Comprendre les autres. »
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« Muet signifie qui n’a pas l’usage de la parole. Les gens me voient souvent comme quelqu’un qui n’a pas la parole ! C’est absurde. Je l’ai. Avec mes mains, comme avec ma bouche. Je signe et je parle français. Utiliser la langue de signes ne veut pas dire que l’on est muet. Je peux parler, crier, rire, pleurer, des sons sortent de ma gorge. On ne m’a pas coupé la langue ! J’ai une voix particulière, c’est tout. »
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« J’ai découvert récemment le célèbre questionnaire de Proust. Aux deux dernières questions : Votre devise préférée ? Le don de la nature que vous aimeriez avoir ? J’ai répondu : Profiter de la vie, le don, je l’ai déjà, je suis sourde. »
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« Aucun des médecins qui prétend au miracle avec cet engin ne parle la langue des signes. Ce qu’il veut, c’est que le sourd entende comme lui. Parle comme lui. Ce qu’il prétend, c’est que nous hurlons au loup. Il nous taxe de « poignée de militants manipulés », qui craignent que disparaisse le « pouvoir » de la langue des signes.
Pas « pouvoir », monsieur le chirurgien, « culture ». »
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« Une fois, nous avons rencontré pour un colloque l’ex-ministre aux handicapés et accidentés, lui-même dans un fauteuil roulant. […] Il ne savait que répéter :
« Parlez et vous vous intégrerez ! »
Finalement, un sourd s’est levé, fâché, et lui a répondu :
« Si je dois parler, alors lève-toi et marche ! »
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« Je ne suis pas la seule. L’adolescence est terrible pour certains jeunes. Sourds ou pas. Il y a ceux qui naviguent à l’aise entre treize et dix-huit ans, sans problème, ceux qui se trompent de sillage, ceux qui foncent dans la tempête comme moi, ceux qui n’en reviennent jamais, et ceux qui attrapent un jour une bouée, pour sortir la tête de l’eau.
Ça dépend de tellement de paramètres. Éducation, caractère, amour, milieu. L’adolescence est une alchimie compliquée. On cherche la pierre philosophale, comme si elle existait. »
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« Je plonge dans l’amour et dans la révolte, comme on plonge dans la mer ; avec délice et sans peur, ni des vagues ni du fond vertigineux qui danse sous moi. »
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« Il faut que chacun puisse choisir. Or ce n’est pas le cas. On continue à bourrer le crâne des parents avec la formule « Forcez-le à parler, il parlera. »
A onze ans, j’ai déjà envie de hurler à ce sujet. Et ça continue. J’ai des camarades dont l’enfance a été si dure si éprouvante. Ils se rappellent avoir jeté leurs appareils auditifs dans les toilettes ; ils ne pouvaient plus les supporter. Certains ne communiquent absolument pas avec leurs parents, ils en sont incapables. Je connais un petit garçon qui est devenu violent, sauvage, il tirait les cheveux de sa mère pour communiquer avec elle, il se roulait par terre, dans la boue, n’importe où. Il ressentait une telle impuissance, un tel isolement. »
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« Une petite révolution s’est faite en moi, que je voudrais bien leur faire partager. Révolutionner les sourds autour de moi, leur ouvrir le monde comme on l’a fait pour moi. Leur donner la possibilité de s’exprimer librement, de faire avec leurs mains, comme dit Alfredo Corrado, « des fleurs dans l’espace. »
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« Avec la langue des signes, plus l’oralisation et la volonté dévorante de communiquer que je sentais en moi, j’allais faire maintenant des progrès inouïs. »
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« Je suis à l’âge où les bébés s’amusent par terre, à quatre pattes, et commencent à vouloir dire maman ou papa. Mais je ne dis rien. Je perçois donc les vibrations par le sol. Je sens les vibrations de la musique, et je l’accompagne en poussant mes cris de mouette. C’est ce qu’on m’a dit.
Je suis une mouette perceptive, j’ai un secret, un monde à moi. »
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Je suis toujours étonnée par ce terme « sourde-muette ».

Muet signifie qui n'a pas l'usage de la parole. Les gens me voient comme quelqu'un qui n'a pas la parole ! C'est absurde. Je l'ai. Avec mes mains, comme avec ma bouche. Je signe et je parle français. Utiliser la langue des signes ne veut pas dire que l'on est muet. Je peux parler, crier, rire, pleurer, des sons sortent de ma gorge. On ne m'a pas coupé la langue ! J'ai une voix particulière, c'est tout.
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Je comprends parfaitement que des adultes qui deviennent sourds après avoir entendu demandent de l'aide. Eux deviennent brutalement handicapés. Ils sont privés d'un sens dont ils avaient l'habitude, de leur culture, de leur mode de fonctionnement, de leur mode d'emploi, finalement. Mais que l'on ne touche pas aux enfants qui naissent comme moi. À toutes les petites mouettes de ma tribu à travers le monde. Qu'on leur laisse le choix, la possibilité de se réaliser dans les deux cultures.
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La surdité est le seul « handicap » qui ne se voit pas. On voit les gens en fauteuils roulants, on voit que quelqu'un est aveugle, ou mutilé, mais on ne voit pas la surdité, alors les autres rêvent de l'effacer, puisqu'elle n'est pas visible. Ils ne comprennent pas que les sourds n'aient pas envie d'entendre. Ils nous veulent semblables à eux, avec les mêmes désirs, donc les mêmes frustrations. Ils veulent combler un manque que nous n'avons pas.
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