Citations de Erik Sablé (76)
Bodhidharma est considéré comme le fondateur du kung-fu, une technique d’art martial qui se développa au monastère de Shaolin et qui est l’ancêtre de tous les arts de combat japonais. Par la suite, les Japonais affirmèrent que Bodhidharma était venu sur leur île pour enseigner la voie directe. Cette histoire est notamment transmise par le Genko shakusho, un ouvrage qui raconte la vie des principaux maîtres zen. Il fut écrit par le moine Kokan Shiren (1278-1346), mais il utilise des sources bien plus anciennes.
En revanche, l’œil des chouettes est fixé dans le crâne et ne peut bouger comme celui de l’homme. Mais cela est compensé par une grande mobilité du cou qui peut tourner dans tous les sens.
Ultimement, cette pratique amène l’éveil à notre nature originelle qui est une avec la nature profonde de l’univers.
L’expérience du Tchan est une expérience de l’immédiat, où le monde se révèle dans toute sa pureté originelle, sans interprétations, spontanément, en dehors des calculs de l’ego et des méandres du mental. Et c’est cette expérience qui permet au poème de naître.
L’être individuel, (le jivatma) fondé sur le sens de la séparation se dissout dans le Brahma, comme la goutte se fond dans l’eau et l’étincelle dans le feu.
Un jour, on découvre ce silence du dedans, qui existe en dehors de tous les mouvements de l'âme.
Comme un espace profond, mystérieux, inexprimable.
Ce silence du dedans n'est pas absence de bruit, mais une vie, une présence qui absorbe le temps, efface toute chose.
A ce moment, le monde entier baigne dans le silence, il est enveloppé par lui, et ce silence est plénitude.
"Ceux qui ont la capacité de couper le flux des préoccupations, qui aiment regarder l'herbe pousser, contempler l'océan, se perdre dans les nuages, le blanc de la neige ou le bleu du ciel sont sur le chemin de la Sainte Paresse. Ils savent naturellement s'ouvrir à cet autre dimension de la vie qui est la Vie dans sa pleine réalité, son intime présence, en dehors de la folie qui pousse à toujours désirer vouloir. Ils sont aptes à cette simplicité première." Sagesse libertaire taoïste, introduction à la sainte paresse, Dervy 2005, p 16
Chaque objet vu, chaque son entendu, est un joyau inaltérable
Nous savons comment le psychanalyste Jung fut amené à la notion de synchronicité, cette curieuse corrélation qui s'établit parfois entre un état de la psyché et un événement extérieur.
Un jour, une de ses patientes lui racontait un rêve qui l'avait particulièrement impressionnée. Dans ce rêve, un inconnu lui donnait un scarabée d'or sous la forme d'un objet très précieux. A ce moment, Jung entendit quelque chose qui tapait discrètement contre la fenêtre derrière lui. Il se retourna. C'était un cétoine vert doré qui cherchait à entrer. Elle ressemblait étrangement au scarabée que décrivait au même moment sa patiente.
La présence de ce scarabée à la fois dans le rêve et dans la réalité sensible était pleine de sens. En Egypte ancienne, le scarabée symbolisait la transformation, la renaissance. Or, la patiente de Jung était précisément dans une phase de grande métamorphose intérieure et extérieure.
[...]
En fait, toute personne qui entretient un lien magique avec sa propre vie, sait que de tels faits existent en profusion. Si nous sommes suffisamment attentifs, c’est réellement une "forêt de symboles" qui s'ouvre. Tout parle. Tout est signe. L'univers reflète nos états intérieurs, et la destinée peut s’interpréter comme un rêve s'interprète.
Cette étrange osmose entre le "dedans" et le "dehors" suggère que le monde extérieur se déroule en fait à l'intérieur de notre conscience.... comme un rêve. comme si la substance du rêve et la substance du monde étaient deux cristallisation différentes de la même et unique substance.
Si le monde parle comme un rêve, c'est qu'il est un rêve.
J'aime bien la définition de Dieu qu'Allan Watts avait donné à son fils : "Dieu est le dedans".
En entendant cela son fils avait cassé en deux le petit morceau de bois avec lequel il jouait, pour chercher Dieu "au dedans". Alors son père lui avait dit : " Tu vois, maintenant tu as encore deux extérieurs. Ce n'est pas le dedans..."
Nous pouvons nous interroger et nous demander où se trouve ce mystérieux dedans ? Tout ce que nous percevons est un dehors. Nos pensées les plus intimes sont elles aussi un dehors, tout comme les galaxies les plus lointaines.
Découvrir l'espace du dedans nécessite le creusement de la conscience en son centre, une conversion du regard, qui se renverse, comme un gant que l'on retourne. Alors, nous basculons dans le dedans, un espace où tout est conscience, tout est Dieu. Le dedans est l'envers du monde, tout en étant le monde. Mais comment dire l'indicible ?
Apparemment, l'émerveillement est attente d'une réponse, comme un vide qui aspire à être rempli.
Mais en réalité, il n'attend rien. Il nous met simplement face au mystère.
Car toute réponse est faite de mots. Toute réponse est une fermeture, une mort. Et le paradoxe du monde peut simplement être posé…
La réponse EST le miracle de chaque instant…
Dans le Rig-Véda, l’adepte en extase vole en esprit, « monte sur le char des vents, aidé par les dieux » (X 136, pp. 3-5) pendant que son corps demeure immobile. Dans la Hamsa Upanishad, « l’Upanishad de l’oiseau migrateur », il est dit assez mystérieusement « qu’il faut méditer encore et encore sur l’oiseau […] car c’est par la connaissance de l’oiseau que l’on devient libre à jamais ». Grâce à cette méditation, on peut espérer s’envoler, migrer pour l’autre rive. C’est le grand envol, l’envol spirituel.
Il est précisé que Hamsa, « l’oiseau migrateur », est présent dans tous les êtres, « comme le feu dans le bois de friction, comme l’huile dans le sésame… »
Tout être humain est donc un peu oiseau… même s’il l’ignore. (p. 55)
Or, précisément, l'éveil ne peut pas être appréhendé, il échappe complètement à cette vision linéaire. Il la foudroie.
Il suffit d'écarter le voile pour vivre l'éveil. bien que ce voile n'ait pas réellement d'existence et que l'acte même d'écarter le voile soit lui aussi illusoire. Comme le dit Huang-Po, il s'agit juste de prendre conscience de la perle que nous cherchions en vain alors qu'elle se trouvait là où elle a toujours été : au milieu de notre front.
S'éveiller, c'est comprendre une vérité qui existe de toute éternité. Après le grand bouleversement de l'éveil, nous sommes là où nous avons toujours été sans le savoir.
Dans beaucoup de traditions religieuses, de croyances populaires, de mythologies, l’âme est un oiseau.
Si le corps appartient à la terre, l’âme se lie au ciel.
Elle est un principe ailé, une conscience ascendante, fluide, libre, qui demeure tout au fond, emprisonnée dans « l’argile du corps » comme « l’oiseau dans la cage ».
Le mystique kurde Barhrâm Elahi parle de « l’état de l’âme lorsqu’elle pénètre dans le corps, comparable à celle d’un oiseau exilé de son nid, et emprisonné dans une cage étroite et sombre. » (La voie de la perfection). Et le grand poète soufi Farid al-Din Attar la compare lui aussi à un « oiseau céleste enfermé dans le filet du corps ».
Platon parlait déjà dans le Timée de « cette âme [qui] nous élève au-dessus de la terre en raison de son affinité avec le ciel, car nous sommes une plante, non point terrestre, mais céleste. »
Le maître Yuan Miao de Kao Feng a dit : « Si l’on veut rapidement arriver au succès dans la pratique Ch’an, il faut agir comme un homme qui est tombé dans un cul de basse fosse. Toutes ses pensées se réduisent à une seule : s’en sortir. Il y pense du matin au soir et du soir au matin. Si l’on parvient à cela et que l’on ne réalise pas très rapidement la Vérité, je veux bien être accusé de mensonge et être envoyé dans l’enfer où l’on arrache la langue. » Le vieux maître était très compatissant et craignait que nous ne manquions de persévérance : il fit ce vœu pour nous stimuler
Le désespoir est aussi menteur que l'espérance. Il n'y qu'une chose qui compte : devenir ce que l'on est et faire ce que l'on doit
Tous ces écrits, toutes ces paroles, sont les poèmes qui scandent la vérité d'une société. En Occident, les plus grandes révolutions de conscience ont été induites par des poètes : le romantisme allemand, le surréalisme.
Nous verrons notamment que le «moi» n'a pas d'existence «en soi», en dehors des pensées. Dès qu'on tente de l'isoler, il se dissipe «comme un rêve au réveil», « une bulle illusoire», un fantôme. Plus précisément, il apparaît comme un «effet de perspective», un pli de sa psyché sans réalité véritable. Cette prise de conscience sera déjà un grand pas dans la découverte de son fonctionnement, de son rôle dans l'alimentation des pensées.
En fait cette perception du «moi» n'est pas possible au moment même ou se produit l'identification, lorsque la conscience n'est plus présente à elle-même, mais immédiatement après, nous pouvons prendre le recul nécessaire et nous remémorer la pensée passée. Nous pourrons alors saisir intuitivement ce qu'est le «moi», le «je» individuel.
Peu à peu, nous saisissons de plus en plus clairement ce qu'est le «moi». Il se profile à la surface des pensées et se révèle étroitement lié au flux mental. Il ne se laisse pas facilement percevoir, mais on peut réussir à le repérer et tenter de l'isoler du mouvement des pensées auquel il est intimement lié.
Aucune vision n'est plus réelle, plus juste que l'autre. Simplement l'incroyable arrogance de la civilisation occidentale lui fait croire qu'elle détient l'unique vérité, comme les missionnaires chrétiens étaient persuadés de détenir la seule religion véritable face à la barbarie généralisée...