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Citations de Fabien Maréchal (39)


Si le monde est fou, c'est bien que nous le sommes tous un peu.
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Une sinistre sirène annonce un vol de corbeaux. Ils se perchent sur le mur d'enceinte. Leurs ombres se projettent de manière désmesurée sur la chaussée. Je me dis qu'ils devaient naguère barder les branches de la même façon, à la lisière des champs de bataille, en attendant que cesse la canonnade et que les chairs déchirées s'offrent à leurs becs.
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J'étais un ami. On sait ce que cela veut signifie, quand une femme dit à un homme qu'il est un ami, n'est-ce pas ? Ce n'est pas de la cruauté, elles sont ainsi.
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Je n'ai jamais entretenu de femme mais j'ai souvent eu la sensation d'entretenir ma voiture, toujours plus exigeante à mesure qu'elle se décatissait.
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Fabien Maréchal
"u imaginais déjà ton fiston, une semaine plus tard, cavalant vers tes bras grands ouverts à travers l'aérogare numéro trois. Tu le ferais décoller mieux qu'en Boeing. Il jetterait ses mains autour de ton cou. Peu après, tu sentirais celles de ta compagne - ta compagne : rien que ce mot, tu l'aimais, parfois tu le prononçais pour toi-même, doux, moelleux comme un gros pull d'hiver où il fait bon se pelotonner.
Leur retour, tu en souriais d'avance.
Tu étais parvenu à te créer un petit monde au sein du monde. Une forteresse. C'était cela, ta véritable victoire sur la vie. Personne ne pouvait te prendre ça.
Comment se peut-il, alors, qu'ils ne soient jamais revenus ?"
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Fabien Maréchal
"Nul ne peut imaginer le nombre de fois où il faut déclarer être veuf une fois que l'on est veuf, pour régler le juste-après, pour légaliser l'encore-après, pour justifier le maintenant, alors qu'il n'existe aucune case à cocher pour dire que l'on a perdu un enfant. On peut être parricide, infanticide, on peut être orphelin de père ou de mère, mais il n'existe même pas de mot pour nommer ce que tu es précisément.
Orphelin de ton fils. "
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Fabien Maréchal
"Tu imaginais déjà ton fiston, une semaine plus tard, cavalant vers tes bras grands ouverts à travers l'aérogare numéro trois. Tu le ferais décoller mieux qu'en Boeing. Il jetterait ses mains autour de ton cou. Peu après, tu sentirais celles de ta compagne - ta compagne : rien que ce mot, tu l'aimais, parfois tu le prononçais pour toi-même, doux, moelleux comme un gros pull d'hiver où il fait bon se pelotonner.
Leur retour, tu en souriais d'avance.
Tu étais parvenu à te créer un petit monde au sein du monde. Une forteresse. C'était cela, ta véritable victoire sur la vie. Personne ne pouvait te prendre ça.
Comment se peut-il, alors, qu'ils ne soient jamais revenus ?"
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"Déjà, à l'époque où tu te tenais quotidiennement aux barres du métro, direction La Défense, tu rêvais d'un endroit de ce genre, une retraite avant l'heure, un ermitage pas tout à fait décivilisé. Mais tu ne l'avais pas imaginé dans ces conditions-là.
Seul.
Quand tu as dit au revoir à ta compagne et à ton fils, avant qu'ils ne franchissent le premier contrôle de sécurité, tu ne savais pas. Tu ne pouvais pas savoir, bien entendu, même si l'on ressent toujours à ce moment précis un pincement au coeur. De même qu'une île peut être éparse ou annoncer le continent, toujours la séparation, aussi courte soit-elle, porte une incertitude, la possibilité d'un retour plus lointain (ou plus proche) que prévu. D'un non-retour, même. Il suffit d'un rien. Un pneu crevé. Un embouteillage. Une grève du personnel navigant. Une entorse à la cheville. Un ski de travers. Une artère bouchée. Un acte terroriste. Une bombe atomique. Ou bien, au volant, tu passes la première et tu agites la main à hauteur de rétroviseur intérieur pour tes parents restés sur le pas de leur porte, tu leur as promis de revenir avant la fin du mois à Rozay-en-Brie, et] puis une semaine plus tard, ce sont les pompiers qui t'appellent. Cela t'a fait prendre conscience que les au revoir dissimulent toujours des molécules d'adieu, et aussi qu'il n'y a pas d'âge pour devenir orphelin."
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Il n’est qu’un comédien, celui qui tient le rôle de syndicaliste, de même que dans toute entreprise il existe un type qui tient le rôle du syndicaliste et se chicane avec le big boss sur la longueur de leurs tirades respectives. A cet instant, dans un sous-sol du KGB, avec une lampe de deux cent watts en pleine tronche, il ne lui faudrait pas longtemps pour avouer qu’il est un complice du patronat, que c’est grâce à des gens comme lui que le patronat peut continuer à exploiter le travailleur, parce que lui, François Rawkiewicz, permet de donner l’illusion d’un rapport de forces et donc d’une légitimité des décisions prises par le patronat : si on a le droit de les contester, si un Rawkiewicz a le droit de militer pour la grève, comment voulez-vous appeler ça une dictature ? Toujours plus facile de savoir contre qui on se bat que pour quoi on se bat.
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Les humeurs de sa femme, les conditions objectives d’un mouvement de masse, l’aveuglement du libéralisme… Ces incompréhensions qui l’accablent sans cesse laisse François désemparé, faisant renaître à tout moment la sensation qu’il a éprouvée un jour d’été, enfant, quand une vague l’a renversé et roulé jusqu’à la plage : il est désarticulé, il a peur, il a besoin de respirer mais il garde la mâchoire verrouillée pour ne pas boire la tasse. S’il crie, il crève.
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« Trois et demi ! »
Marson lève les yeux au ciel comme si le chiffre s’y inscrivait en lettres hautes d’un kilomètre.
« Trois et demi pour cent !
Mais pour qui se prennent-ils ?
Savent-ils combien ils nous coûtent ? Les charges. La cantine. Le comité d’entreprise. Le Code du travail. Ah ! Et les trente-cinq heures…
Pourquoi ne pas égorger l’actionnaire, tant que nous y sommes ? »
Le p-dg tourne en rond dans la pièce en battant de bras, menaçant d’explosion les boutons de son costume croisé.
« Ha, les rouges ! Les rouges ne changeront jamais. Le monde entier change, mais pas eux. Un jour, on trouvera des os de dinosaures en Corée du Nord, et les socialo-communistes de toute la planète crieront « Papa ! » «
Le comité de direction et les éléments les plus sûrs du top management opinent en silence. Marson les a convoqués dès qu’il a appris la nouvelle. Il cesse de tourner. Il a le souffle court, ces dernières semaines.
Marson les connaît, les Rawkiewicz, il en a maté une tripotée dans ses précédents postes. Il martèle sa paume avec son poing. Ça fait le bruit d’une escalope qu’on attendrit.
« En vérité, il n’y a qu’un seul syndicat dans l’affaire, et même un seul homme. Nous savons qui c’est. » (« La Guerre froide »)
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Paulin est un costaud à la barbe entortillée dont la conversation achoppe rapidement sur les monosyllabes. Cinq jours par semaine, il est photographe numérique à Paris : il joue des épaules lors de shootings de stars ou de conférences de presse ministérielles, et loge dans un hôtel pouilleux qui finira de passe. Le vendredi soir, il monte dans une longue Citroën CX mangée par la rouille pour rejoindre l’arrière-campagne où il se retranche chaque week-end.
Trois cents bornes plus tard, des lapins font rebondir leur queue blanche dans le faisceau des phares. Des ornières longent un bosquet de pommiers jusqu’à une masure paysanne en pierre volcanique. Paulin pousse la porte en bois percée d’une chatière. Des poutres de deux empans traversent la pièce basse, et on cuirait tout un cochon de lait dans la cheminée. Quand l’orage fouette le toit d’ardoise, ployant la cime des arbres, la maison évoque le refuge d’un gardien de phare à jamais éteint.
Le samedi et le dimanche, après le déjeuner, Paulin remonte son pré jusqu’aux pommiers. Il emporte le minimum : un vieux reflex Nikon, deux pellicules 100 et 200 iso, un objectif 50 mm, un 300 mm, et deux cannettes de bière.
Son chat gris grimpe à un arbre et se couche sur une branche basse. Paulin s’allonge sur le dos, ferme l’œil gauche, colle le droit au viseur, pointe l’objectif vers le ciel et s’adonne en argentique à la pêche aux nuages. Pour lui les cumulus dessinent des hommes du palais et de la rue, des animaux ordinaires, légendaires ou disparus. S’il fait chaud, Paulin rampe sous le bosquet. Parfois il sent un vaisseau battre dans la paupière de son œil clos, puis celui du viseur se ferme à son tour et, petit à petit, l’objectif de l’appareil rejoint l’oseille sauvage et les coquelicots. (« Le Monographe »)
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Et puis c’est venu naturellement, on a beau être communiste, on pense aussi à soi : j’ai voulu calculer mon emplacement. Une vie d’ouvrier avec la retraite et les soins gratuits qui seraient bientôt instaurés, ça me mènerait bien jusqu’à soixante-dix, soixante-quinze ans, et les quatre cinquièmes du cimetière seraient occupés. J’ai commencé à prévoir quelles allées auraient été remplies, selon quel plan d’autres seraient tracées. Année après année, j’affinais mes calculs. L’espérance de vie augmentait pour tous et je n’avais pas de maladie grave. Même si l’Avenir radieux se faisait un peu attendre, pour sûr, l’allée H ne serait pas pour moi, elle atteindrait le mur ouest avant mes soixante-cinq ans. (« Démolition »)
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Nul ne peut dire si les arbres qui bordent la rue, le long de l’usine, sont vivants ou morts. Les premiers cris d’oiseaux sur les branches, lorsque les températures sont repassées pour la première fois au-dessus de zéro, ont eu quelque chose de surnaturel – le souvenir enregistré d’un monde englouti auquel seuls quelques fous prêtaient encore foi.
("La Guerre froide")
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Dans la maison, le téléphone sonne dans le vide. Toutes les cinq minutes, ça recommence. On voudrait prendre racine qu’il se trouverait toujours un emmerdeur pour vous scier.
("Le Monographe")
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Après tout, nul n’est obligé d’être heureux. Si le bonheur devenait un impératif légal, tous les tribunaux du monde ne suffiraient pas à condamner les délinquants.
("La Cérémonie")
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L’homme est ainsi fait que, quand il ne voit pas de nuage, il a besoin d’en trouver un pour se rassurer. S’il ne voit pas un malheur s’avancer, il se dit que la prochaine catastrophe, pour être aussi bien dissimulée, elle sera d’ampleur, aussi vaut-il mieux tout de suite œuvrer à mettre des nuages dans le ciel, des nuages qu’on connaît, ce n’est pas d’aujourd’hui qu’on meurt de faim ou noyé ou lépreux ou bombardé à travers le monde, mais le soleil, allez savoir ce que ça cache, d’ailleurs si on le regarde en face, ça rend aveugle, c’est bien la preuve.
("Démolition")
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Le Parti n’avait pas de position officielle sur la question 
mais, à titre personnel, j’estimais qu’un bon communiste pouvait se réjouir d’être enterré sous un tilleul,
et qu’un tilleul pourrait être heureux de se nourrir sur
un bon communiste : ce sont de tels échanges qui
font avancer le monde.
("Démolition")
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Ce matin, pour la première fois depuis dix ans, je ne
prendrai pas mes médicaments pour le cœur et contre
l’angoisse. J’aurais dû arrêter plus tôt, dès qu’ils ont
annoncé la démolition de l’immeuble. C’est terrible
comme on s’attache à ce dont on n’a pas besoin. On
harponne une illusion, on se la colle dans le crâne et,
pour l’en sortir, il faudrait se faire sauter le caisson.
("Démolition")
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