1. « Les voyageurs les plus distants ont été étonnés devant de telles jongleries, parce qu'ils ont vu des succès de la force de l'imagination qu'ils pensaient à peine possibles, et qu'ils ne savaient pas expliquer. En effet, parmi toutes les forces de l'âme humaine, l'imagination est peut-être la moins explorée : étant donné son lien avec la construction du corps entier et en particulier du cerveau et des nerfs comme de nombreuses et étonnantes maladies le démontrent, il ne semble donc pas seulement être le lien pour, et la base de, toutes les forces subtiles de l'âme, mais aussi le nœud des relations entre l'esprit et le corps, de même que la fleur bourgeonnante de toute l'organisation des sens pour les autres utilisations des forces de la pensée. » (Johann Gottfried Herder, 1785, cit. pp. 49-50)
[Dans la mythologie esquimaude,] il existe un grand nombre d'esprits mineurs. Appelés Tornait, ils se manifestent sous la forme d'hommes, d'ours ou de pierre. C'est grâce à leur aide qu'un homme peut devenir ce qu'on appelle un angakoq, c'est-à-dire une sorte de prêtre ou de magicien. Les esprits l'aident à découvrir les causes de maladies ou de décès, raison pour laquelle il est un homme-médecine. Dans ses incantations, l'angakoq utilise un langage particulier, qui se compose en grande partie de racines archaïques, et il est remarquable que certains des mots que j'ai pu recueillir sur la côte de la baie de Baffin existent également dans le langage des tribus d'Alaska, ce qui démontre qu'un lien étroit existait autrefois entre les Esquimeaux de l'Amérique du Nord-Est et les habitants de l'Alaska.
La véritable sagesse ne peut être trouvée que loin des gens, dans la profonde solitude. On ne la rencontre pas à travers le jeu, mais seulement dans la souffrance. La solitude et la souffrance ouvrent l'esprit humain. C'est donc là que le chamane doit puiser sa sagesse.
3. « C'est vrai que Wasson et ses amis ont été les premiers étrangers qui sont venus dans notre village en quête des "enfants sacrés" [les champignons hallucinogènes], et qui ne les prenaient pas pour guérir d'une maladie. Leur raison était qu'ils venaient trouver Dieu.
[…]
Le jour où pour la première fois j'ai fait une veillée devant des étrangers, je n'ai pas pensé qu'il pouvait en sortir quelque chose de mal […] Mais qu'est-ce qui s'est passé ? Eh bien, que beaucoup de gens sont venus chercher Dieu, que sont venues des personnes de toutes les couleurs, de tous les âges. […] Mais à partir du moment où les étrangers sont arrivés pour chercher Dieu, les "enfants sacrés" ont perdu leur pureté. Ils ont perdu leur force, on les a gâchés. Désormais, ils ne feront plus d'effet. On n'y peut rien. » (Maria Sabina interviewée par Alvaro Estrada, 1977, cit. pp. 175-176)
5. « Une fois que tout le monde eut parlé, le directeur aguaruna de l'école nous remercia de notre visite et dit : "Ici, en Amazonie, notre connaissance a souvent été prise par d'autres sans que nous n'en retirions aucun bénéfice. Maintenant, nous aussi, nous aimerions pouvoir y trouver quelques avantages." Il indiqua qu'un accord compensatoire pour le savoir fourni par les indigènes se devait d'être signé avant que toute recherche ne soit poursuivie.
Cette expérience semblait donc indiquer que les scientifiques peuvent apprendre des choses en travaillant avec des chamanes amazoniens indigènes.
Certains observateurs ont suggéré que nous assistons à la fin du chamanisme selon sa définition classique. Mais la rencontre entre chamanes et scientifiques ressemblait plus à un commencement. » (Jeremy Narby, 2000, cit. p. 323, excipit de l'anthologie).
4. « Les enfants du monde entier connaissent ce jeu qui se trouve à l'origine même du chamanisme – ce désir de retrouver la sensation joyeuse de la perte de moi. L'humanité entière la recherche dans sa soif inextinguible d'amour, dans le chant, la danse, les rêves ou dans la spirale de la dépendance de l'alcool et des drogues. Tous, quoique dilués, sont des états qui nourrissent la transe ou qui s'y apparentent. La transe n'est donc pas un état particulier ou exceptionnel. Toute notre vie émotionnelle se concentre sur un seul point : atteindre l'apogée, l'expérience du flux ininterrompu, dans lequel les mécanismes compulsifs ou rationnels qui lui font constamment barrage sont mis hors circuit. » (Holger Kalweit, 1987, cit. p. 192)
2. « Au cours de la première moitié du XXe siècle, les anthropologues se mirent à écouter attentivement les chamanes et à enregistrer ce qu'ils avaient à dire sur eux-mêmes. C'est à partir de là que leur compréhension du phénomène s'est approfondie.
Pendant toute cette période, les anthropologues et les ethnopsychiatres débattirent de la santé mentale des chamanes. Claude Lévi-Strauss sembla mettre un terme à la polémique en allant jusqu'à en renverser la logique, affirmant que le chamanisme tenait davantage du domaine psychanalytique que du domaine psychotique. Le débat continua néanmoins à faire rage. » (Auteurs, incipit de la 4e partie, p. 87)
Le tapioca serait-il une sorte de sperme végétal aux propriétés magiques ? me demandai-je...