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Citations de Françoise Mallet-Joris (143)


Laurent Mancini, féru d’astrologie, ne s’était pas borné à cette prédiction. Entre autres oracles, il avait prédit à la pusillanime Mme Mancini qu’elle mourrait dans sa quarante-deuxième année. En 1656, Mme Mancini atteignait justement cet âge. D’une superstition outrée, ce fut avec terreur qu’elle accueillit donc une fièvre qui sembla d’abord bénigne. Elle s’alita. Les visites ne lui manquèrent pas. La sœur du puissant ministre était sûre de ne pas être négligée. Et parmi ces visites, le roi.
Marie n’était pas admise dans la chambre de sa mère pendant ces visites. Elle se tenait parfois dans une antichambre assez obscure qui précédait cette chambre. Le roi finira par l’y croiser, lui adresser quelques mots. Ces brefs entretiens sont le point de départ de la faveur de Marie.

Chapitre 1
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Comme toujours, Marie est à l’écart, un peu gênée (...) ; silencieuse, discrète, qui se douterait que quelques mois plus tard, elle sera une étincelante jeune fille, centre de tous les plaisirs de la cour ? La métamorphose paraît presque incroyable, et pourtant…

Chapitre 1
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Ses brèves apparitions à la cour n’ont pas été des succès. Fait d’autant plus remarquable que ses cadettes, Hortense et Marianne, en sont la coqueluche. Hortense a douze ans. Elle est éclatante de beauté et de joie de vivre, Marianne, sept ans, ravit la reine et le cardinal par sa spontanéité et son esprit. Elle fait des vers, elle sert de prétextes à mille amusements à la fois naïfs et grossiers. Elle plaît comme un petit chien savant, et on s’en amuse parfois de façon étrange.

Chapitre 1
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Cette auréole de malédiction ne lui était peut-être pas, d’ailleurs, entièrement désagréable. L’orgueil de cette Marie de seize ans ne pouvait qu’être flatté de l’idée d’être un être à part, différent des autres, et même « maudit ». L’idée de cette fatalité qui pèse sur elle la poursuivra toute sa vie, et elle y attachera une importance démesurée. Et pourtant, en cette année 1656, c’est le hasard, ce sont les « astres », qui vont tout à coup la servir. Elle est plus que jamais négligée. Hélas, soupirera-t-elle dans ses Mémoires, « l’éducation, après l’être, est le plus riche présent, mais il est de très grande importance qu’elle soit accompagnée de quelque douceur… »

Chapitre 1
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Au-dehors, déjà, la seule solution qui paraissait devoir assurer la paix était le mariage du jeune roi avec l’infante MarieThérèse, et le cardinal, ainsi que la reine-mère Anne d’Autriche, sœur d’ailleurs du roi Philippe IV, avait déjà les yeux fixés sur cette alliance, difficile à réaliser. Tous les rouages qui broieront le jeune amour éblouissant de Marie sont déjà en place, à l’instant même où elle est encore obscure et méprisée.

Chapitre 1
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Olympe, qui partage l’aversion de sa mère pour Marie, fait de chaque ragot de cour une épine qu’elle enfonce au cœur de Marie. Toutes ces splendeurs auxquelles elle n’est pas conviée… Et toujours ce refrain moqueur : « Vous qui vous destinez au cloître… »

Chapitre 1
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Réfugiée dans sa chambre, la plus obscure, la moins agréable de l’appartement, elle se rejette avec une avidité désespérée sur ses livres. Elle aime l’apaisement amer de la lecture. Elle en ressort plus calme, elle arrive à regarder les autres comme des personnages, odieux mais sans pouvoir, (...).

Chapitre 1
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Son lot, c’est Olympe triomphante, la fausse indulgence de Mme Mancini (devant les dames de là cour : « Marie ? elle n’aime qu’à lire, qu’à rester chez elle » et le premier mot du roi, ce foudroiement de bonheur : « Mais elle se prépare ainsi bien des richesses, madame »).

Chapitre 1
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Elle est encore laide. La métamorphose sera tardive, mais soudaine.

Chapitre 1
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Première halte, premiers doutes, première apparition fugitive de cette angoisse qu’elle passera sa vie à repousser sans pouvoir la vaincre (Était-ce la fatalité ? Y avait-il quelque chose à faire ? Est-on maître de sa vie ?) et elle interrogera les étoiles, les astres, les vieux livres mystérieux, un astrologue arabe. Mais l’angoisse, elle ne la connaît pas encore quand enfin elle sort de la Visitation pour revenir chez sa mère, au Palais-Royal ; elle ne connaît encore qu’une passion froide, le mépris.

Chapitre 1
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Pour Marie, la lutte commence. Au couvent de la Visitation, sous la direction de sœur Marie-Élisabeth de Lamoignon, sœur du premier président, elle va mettre toute son ardeur, tout son désir de revanche, appliquer toute son inflexible volonté à une nouvelle passion : la culture. Elle lit, étudie le français, vainc ses difficultés de prononciation, étend ses connaissances déjà surprenantes, mais y ajoute un vernis mondain qui lui manquait totalement. Pas un instant de relâchement ; tout lui est étude. Danse, musique, rien ne lui est agrément ; ce sont des armes qu’elle fourbit, et non des plaisirs qu’elle se donne. Pas un attachement, une amitié : elle n’en a pas le temps. Un jour, se dit-elle déjà, on reconnaîtra ce qu’elle vaut, on reviendra sur cet injuste mépris qui la ronge. « On m’admirera. » Pense-t-elle parfois : « On m’aimera » ? Sans doute, car elle est sensible. Mais peut-être rougit-elle de le penser, car elle est déjà assez fière pour ne pas solliciter ce qu’on ne lui accorde pas d’emblée.

Chapitre 1
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Grosse femme morose, craignant tout, n’aimant rien que ses aises, et l’argent, et ses maladies qu’elle mignote comme de petits chiens, Mme Mancini paraîtrait quelconque à n’importe qui, sauf à l’enfant qu’elle déteste.

Chapitre 1
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(...) dès le plus jeune âge, elle sent, elle sait, qu’elle n’est pas aimée. « Dès l’âge de sept ans, ma mère, ne trouvant pas en moi cette beauté qu’elle voyait en ma sœur Hortense, me persuada d’entrer dans le Campo Marzio, qui est un couvent de l’ordre de SaintBenoît. » C’est quarante ans plus tard que Marie entreprendra le récit de sa vie, et pourtant, on sent la plaie encore vive. À travers l’extrême dignité du ton passe et repasse ce soupir douloureux, cet intolérable sentiment d’injustice : elle n’a pas été aimée. « Ma mère, qui véritablement ne m’aimait pas avec cette tendresse qu’elle aimait ma sœur Hortense… »

Chapitre 1
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Les Mazarin semblaient posséder en héritage le don de la réussite. Mais cet héritage, Marie n’en profita point, ou dédaigna d’en profiter.

Chapitre 1
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Né à Rome de parents romains (son père était de Palerme, mais s’établit jeune à Rome), le cardinal Mazarin avait eu un frère et quatre sœurs. Deux de celles-ci s’étaient fort bien mariées, et c’était celles-là, Mme Martinozzi et la baronne Mancini, que leur auguste frère devait faire venir en France, avec leurs enfants, pour s’y créer une famille, et par là, comme les ministres et les favoris l’avaient toujours fait, établir un système d’alliances avantageuses.
De cette circonstance fort simple devait découler toute la vie de Marie, qui fut l’une, et la plus remarquable, de cet escadron de nièces charmantes du grand cardinal, qu’on appela les Mazarinettes, nom frivole qui va bien mal à notre austère héroïne.

Chapitre 1
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On parle de violence : notre époque n'est pas violente, elle est cruelle, comme toutes les époques de transition et de dégénérescence. La violence a pour contrepartie l'enthousiasme, la barbarie a la foi et la simplicité. La cruauté n'a pas d'autre envers que la médiocrité, la tristesse, l'ennui.

(p. 228 - Éd. Grasset)
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Il faut être vis-à-vis des événements comme on est vis-à-vis des gens : espérer tout et ne rien attendre.

(p. 206-207 - Éd. Grasset)
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Ce n'est pas que je sois franchement bête, mais entre les couches les plus profondes de ma pensée, qui est, je crois, sérieuse, et même grave, et mon humeur superficielle, qui est enjouée, voire parfois puérile, il n'y a pas cette classe moyenne des pensées qui permet d'être sérieux sans l'être, de parler de ce qu'on ne connaît pas, de paraître porter intérêt à des sujets qu'on connaît mal, ou dont on se fiche, tout importants qu'ils soient.

(p. 204 - Éd. Grasset)
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Moi, je n'ai pas de bibliothèque. J'ai des livres. Ce sont rarement ceux que j'aime, parce que ceux que j'aime, je les prête et on ne me les rend pas.

(p. 170 - Éd. Grasset)
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La consommation est une grosse baudruche, vite crevée. La culture (une certaine forme de culture) est moins vulnérable. L' orgueil du parvenu fait rire. L'orgueil de l'érudit, du technicien, de celui qui parle bien, qui trouve ses mots, qui connaît les manières, les formules, est plus insidieux. Ça ne brûle pas.

(p. 111 - Éd. Grasset)
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