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Citations de Gail Reitano (37)


Il  avait surtout l’air légèrement déprimé, et je n’aurais su dire si c’était une conséquence de la chaleur ou bien si cet homme considérait l’existence même comme une épreuve. Peut-être était-il tout simplement d’une nature morose. Je n’aimerais pas être la malheureuse affublée d’un mari pareil, ai-je songé.
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Elle préférait glorifier ce qu’elle avait, ses compétences et ses talents, et cette belle silhouette qu’elle aimait à magnifier. C’est pourquoi, sans me soucier de la tâche salissante qui m’attendait – à savoir l’application du glaçage –, j’ai enfilé ma nouvelle robe bain de soleil, que j’avais précieusement mise de côté, avec ses tournesols d’un jaune éclatant sur un fond caramel, ses pinces élégantes au corsage et ses larges bretelles qui mettaient en valeur mes bras. J’ai même glissé à mes pieds mes plus belles sandales et remonté mes cheveux en un chignon flou afin d’avoir moins chaud.
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Ses imposantes colonnades et ses moulures ornées semblaient dire : L’argent et la prospérité sont à votre portée, il vous suffit de travailler dur. Je travaillais dur, et pourtant l’argent et la prospérité ne se bousculaient pas au portillon.
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J’ai décidé d’ajouter une pincée de menthe, qui, à en croire l’un des livres de Maman, attirait l’argent et le désir sexuel, ce qui me faisait rire. J’ai eu un instant de confusion en lisant dans la recette que la pâte devait être disposée au fond du moule, pour recevoir ensuite le mélange à base de ricotta. Maman avait écrit : le fromage riche coule au fond et forme un coussin léger. Comment diable la pâte et le fromage pouvaient-ils ainsi échanger leurs places en cours de cuisson ?
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Comme il faisait trop chaud pour dormir, je passais en revue tous mes sujets d’inquiétude : l’argent, le magasin, la solitude, les relations tendues avec mes frères, Kenny et monsieur E. Et je venais d’en ajouter un à la liste : la peur d’être enceinte. J’avais déjà une semaine de retard. Pourtant, je n’avais aucun désir de revoir cet homme. Je n’avais rien éprouvé de plus que la pulsion puissante d’accueillir un homme en moi et, à présent que c’était chose faite, je pressentais qu’il faudrait la prochaine fois ajouter un ingrédient non négligeable, un sentiment dont je savais qu’il existait, bien que ne l’ayant jamais éprouvé moi-même : l’amour.
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Toutes nos conversations tournaient autour de l’argent, du délabrement de l’économie et des ragots qu’elles avaient entendus. Elles partageaient les histoires des malheurs des autres car elles se savaient elles-mêmes à l’abri du scandale. Elles étaient mariées et installées, tandis que mes moindres faits et gestes étaient scrutés à la loupe. Pourquoi diable Marie Genovese était-elle toujours célibataire ?
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Ma colère à moi était différente. Elle était bien présente, mais comme endormie, apaisée par l’apparition d’un homme les bras chargés de cadeaux. Car chaque cadeau était une promesse d’avenir que l’on me tendait comme si j’avais remporté un concours.
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Il était doux, expérimenté – ne l’étant pas moi-même, il m’était difficile d’en juger, mais tout semblait si naturel, et sa surprise à lui si sincère, que je me suis aussitôt détendue. Lorsqu’il a fini par venir en moi, j’ai eu mal, mais d’une douleur délicieuse qui m’a délestée de tous mes tracas, de mes obligations et de l’œil vigilant de la ville.
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Il s’est mis à m’embrasser avec plus de passion que la première fois, et lorsqu’il a posé les mains sur ma poitrine, sans rudesse mais avec insistance, et que ses pouces ont frôlé mes tétons, la sensation m’a débordée et a effacé toute résistance en moi. Il m’a prise par la main pour m’emmener dans la réserve, où on déballait le stock et où les garçons écoutaient la radio. Entre deux baisers enflammés, il a gémi. C’était la première fois que j’entendais un homme gémir.
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Bats-toi.

Lorsque tu n’es pas de taille face aux épreuves que l’on t’inflige, ne le laisse pas voir.

Tu es américaine, à présent. Continue à tracer ta voie.

Veille sur tes frères, mais pas au-delà de certaines limites...
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J’étais folle de joie de constater que ma tenue n’était pas si différente de celles que portait Katharine Hepburn, avec ses jupes crayon et ses tuniques impeccablement repassées. Il en allait de même pour ma silhouette, étroite à la taille et légèrement plus rebondie au niveau du buste et des hanches. Quant à ma chevelure, je la tenais de ma mère : épaisse, noire et ondulée. Je me sentais libre et sensuelle, aux anges sous l’éclairage jaune tamisé, jusqu’au moment où, en regardant autour de moi, j’ai remarqué que pratiquement tous les spectateurs étaient par deux.
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Si tant est que les fantômes existent, je savais que ma mère était présente dans cette pièce avec moi. J’ai même senti un léger souffle me frôler lorsque mon regard s’est posé sur une carte postale tombée d’un carton. Elle était écrite en italien, aussi n’ai-je pu déchiffrer que la signature : Ada.
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Je m’étais laissé leurrer par la chimère des couples amoureux montrant leur passion au grand jour, mais j’avais compris désormais qu’avec la mort de Maman, ma jeunesse m’avait été volée.
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Aux yeux de Gino, j’étais un obstacle, cette grande sœur sur laquelle il comptait toutefois pour répondre à ses besoins essentiels, pour faire sans fin la cuisine et la lessive. Pour Sammy, son cadet de plusieurs années, je représentais moins une contrariété.
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Depuis le début de la Grande Dépression, les prix n’étaient pas les seuls à flamber : la colère des hommes semblait elle aussi se débrider. Ils passaient leur temps à crier et je voyais de plus en plus de femmes avec un œil au beurre noir ou des bleus sur les bras. Coughlin avait beau être prêtre, il avait un discours de dictateur. Peut-être était-ce désormais la même chose.
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Le coût de toutes les denrées ne cessait d’augmenter, chaque fois que je saisissais un sac de farine ou de sucre il était plus cher que la veille, or j’avais constamment besoin de ces ingrédients à présent que je m’étais mise à la pâtisserie pour arrondir les fins de mois. Je parcourais les étals en me remémorant quels articles achetait Maman et lesquels elle considérait comme trop onéreux, et je passais sans m’arrêter devant les olives importées.
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Sa main s’est posée sur mon épaule et il m’a doucement fait pivoter vers lui. Il s’est pressé contre moi, j’ai senti le rebord dur du comptoir contre mon dos, et subitement il m’a embrassée, longuement et avec fougue. Il avait une haleine sucrée, masculine, sans arrière-goût de bière ou de cigarette.
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