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Extrait du livre audio "Un jour ce sera vide" d'Hugo Lindenberg lu par Clément Hervieu-Léger. Parution CD et numérique le 16 mars 2022. https://www.audiolib.fr/livre/un-jour-ce-sera-vide-9791035408152/
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Un jour ce sera vide de Hugo Lindenberg
La vérité c’est que j’absorbais tout ce que je pouvais jusqu’à devenir l’air autour d’eux, jusqu’à être aspiré dans leurs poumons, puis recraché, puis aspiré encore pour saisir l’essence même de leur bonheur. J’aurais bu leur sang si ça m’avait permis de comprendre ce que c’est que d’avoir une famille comme les autres.
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Un jour ce sera vide de Hugo Lindenberg
Et puis la faire rire aussi. C’est incroyable quand je la fais rire, c’est un dépaysement. Comme cette fois où des cousins sont venus nous rendre visite d’Israël et qu’elle a bu et qu’elle a ri. Jamais je n’avais vu ça. Le plateau chinois, les petits verres à brandy, tout ce qui dort habituellement dans les vitrines de la salle à manger ; soudain utile. Et le cou de ma grand-mère se renversant tandis qu’elle riait.
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Un jour ce sera vide de Hugo Lindenberg
Alors je ne fais rien d’autre qu’attendre que ma grand-mère se réveille de sa sieste et que reprenne la valse des tâches ménagères qui rythment nos journées. Petit-déjeuner, se laver, s’habiller, déjeuner, dîner, se baigner, se déshabiller, se coucher. Notre vie est une symphonie de robinets qui coulent, de chasses tirées, de bains vidés, de vaisselle lavée, de linge essoré. Et pour se divertir de ce déluge : la mer. (page 18) |
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Un jour ce sera vide de Hugo Lindenberg
Ce que mon ami ignore, c’est que depuis le début de l’été, le péril urticant des méduses m’a tenu éloigné de l’eau. Leur présence massive sur les côtes, largement commentée par les vacanciers, m’a servi d’excuse auprès de ma grand-mère pour ne pas aller nager et rester avec elle dans le rectangle rassurant d’une natte en osier. Seul avec mes livres et mes pensées, malgré les remontrances qu’elle m’adresse sans même lever les yeux de son tricot. (page 21) |
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Un jour ce sera vide de Hugo Lindenberg
Qu’elle est belle ma grand-mère dans la rue, ses cheveux courts dans le vent, une natte coincée sous le bras, gilet de laine noir sur blouse bucolique orange, tenant le ballon à deux mains, une dessus, une dessous, comme si elle avait la garde de la Terre. Derrière elle une grosse folle et un enfant. (page 69) |
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Un jour ce sera vide de Hugo Lindenberg
Alors j’ai ri, entraînant Baptiste avec moi. Deux petites têtes hilares dépassant de l’eau. Le visage édenté de mon ami disparaissait derrière la dune d’une vague naissante pour réapparaître aussi naïf et franc l’instant d’après, riant de plus belle. Et je l’aimais tant que j’aurais voulu le noyer. (page 35) |
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Un jour ce sera vide de Hugo Lindenberg
J’imagine son espace mental comme une très grande maison aérée, avec plafonds de trois mètres de hauteur et parquet ciré, un piano à queue et de grandes fenêtres ouvertes sur un jardin luxuriant. Quelque chose de bien plus confortable que le taudis aux persiennes duquel j’observe le monde. (page 143) |
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Un jour ce sera vide de Hugo Lindenberg
Tantôt Baptiste avance devant et je mets mes pas dans les siens et tantôt c’est lui qui me suit. Mais qu’il soit devant ou derrière, que je l’entende dans mon dos ou que je regarde sa nuque, j’ai l’impression qu’il m’échappe. Alors que nous sommes seuls sur le sentier, Baptiste me manque plus cruellement que lorsqu’il n’est pas là. Je ressens même de l’agacement contre lui. Contre ses foulées conquérantes. Je lui en veux pour toutes les pensées qu’il me cause. Lui qui suit le fil des siennes en m’accordant l’attention d’un maître pour son chien. (pages 164-165) |
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Un jour ce sera vide de Hugo Lindenberg
Mon monde sous-marin ne connaît pas la rage. J’y suis souverain. Comme mon corps, mes idées sont légères et gracieuses. J’étouffe le monde du dehors le temps d’épuiser l’oxygène emprisonné à la hâte dans mes poumons.
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Le nom (entier) du personnage principal est :