Interview de Ian Caldwell et Dustin Thomason (en anglais)
— Vos parents vous ont envoyés ici pour ça ? Pour découvrir ce que moi je crois, ou bien pour apprendre à penser par vous-mêmes ?
Des sentiments profonds remontent du fond de ma gorge.
— Si vous croyez tout ce que les gens vous disent, alors ne devenez pas prêtres. Personne n’a besoin de prêtres comme ça. C’est vous qui devez être le juge. Les gens mentent. Les gens ont des désaccords. Les gens se trompent. Pour découvrir la vérité, vous devez savoir comment la chercher.
Le serment, meilleur ami des bureaucrates. Voilà comment un évêque enterre les erreurs commises derrière son bureau : en soumettant le prêtre sous ses ordres à la loi du secret.
La part enfantine de son cœur se désolait de savoir que l’étable et les mages existaient davantage dans le petit théâtre de la Nativité que lors de cette fameuse nuit magique.
(Actes Sud, p. 159)
Les médecins ressemblent aux joueurs: toujours à la recherche de la bonne combinaison. Les patients, pensent-ils, sont de vraies machines à sous: si vous leur tordez le bras assez longtemps, vous avez de bonnes chance de remporter le gros lot.
Mon fils est trop jeune pour comprendre le pardon. Grandir à Rome lui a donné l'impression que c'était facile : les étrangers font la queue devant les cabines de la basilique Saint-Pierre, attendant leur tour pour se confesser, et les lumières rouges en haut des confessionnaux clignotent, annonçant que les prêtres à l'intérieur ont fini avec un pécheur, et qu'ils sont prêts à accueillir le suivant. Vu la rapidité avec laquelle on nettoie les consciences, mon fils pense qu'elles ne doivent pas se salir autant que les chambres ou les assiettes.
"Quand tu tires un coup de fusil, la balle file à la même vitesse que si tu la laissais tomber."
Encore un truc que j'ai appris dans un cours de physique.
"On ne peut pas distancer la gravité, dit Paul. Quelle que soit la rapidité avec laquelle on avance, on ne va pas plus vite que la pierre qui tombe. C'est à se demander si le mouvement horizontal n'est pas une illusion, si on n'avance pas uniquement pour se persuader qu'on n'est pas en train de tomber."
Observer l'arrivée du cardinal Boia, c'est se trouver en plein passage d'un rouleau compresseur.Il remplit toute la porte, et chasse la lumière de la pièce. Les gens disent qu'il est "prepotente" : despotique, autoritaire, tyrannique. Un géant avec la taille de deux hommes, et l'ego de trois.
On mourrait d'impatience de se retrouver chaque nuit. Dans mon existence ultra-disciplinaire, nos rendez-vous nocturnes me donnaient une chance de goûter à la liberté et au plaisir.
La façade nord de Saint-pierre ne reçoit jamais le soleil. En période de canicule, les prêtres s'y regroupent, telle la mousse sur le tronc d'un arbre, pour griller une clope à l'abri des ombres longues et fraîches. Les murs font douze mètres d’épaisseur et dépassent les falaises de Douvres en hauteur. Tous les feux de l'enfer seraient impuissants à les réchauffer.

C'est pourquoi la majorité des spécialistes croient, comme on l'enseigne à la majorité des prêtres catholiques, que nos quatre Évangiles ne sont pas les mémoires des hommes dont ils portent aujourd'hui le nom. Ce sont des assemblages constitués, des décennies après le ministère de Jésus, de documents plus anciens enregistrant une traduction orale des récits de Jésus. C'est seulement à ce niveau plus profond, et antérieur, de témoignages qu'on pourrait découvrir les souvenirs réels des disciples.
Cela signifie que les Évangiles remontent effectivement à la vie de Jésus, mais pas directement, et non sans additions et soustractions. Il est crucial de comprendre ce processus d'édition, si l'on veut mener des recherches sur la pure réalité historique de la vie de Jésus. Et cela parce que les modifications du texte étaient souvent d'ordre théologique ou spirituel : elles reflétaient davantage la croyance des chrétiens à propos du Messie que des connaissances réelles concernant l'homme Jésus.