Isaac de Mont

Ils n'ont plus envie de rire ni de frémir, ils sombrent dans la folie et s'esclaffent pour un rien, ils tremblent de peur depuis que la mortalité n'est plus un assassin. Vous savez, madame, je crois qu'il est devenu notre tortionnaire.

Dans cet ascenseur où nous nous trouvons, décoré de néons bas de gamme et puant l'after-shave, je regrette de ne pas avoir pris de douche depuis la veille. Les quatre miroirs me renvoient un reflet ignoble à l'infini. J'empeste la gnôle, l'amertume et l'échec : le trio gagnant pour un perdant tel que moi.

Mutatis Mutandis

On ne m'entendra plus jamais insulter une fille de pute, de prude, pathétique, pisseuse, prétentieuse. C'est bien dommage, d'aller jusqu'à se glisser dans la peau d'une femme, pour pouvoir s'en rendre compte. Aujourd'hui, j'admets n'avoir saisi qu'un grain de sable, dans le désert du problème. Qu'on me traite de castrat, de pédale. À ces détracteurs en quête de virilité, je leur proposerai de tenter l'expérience, avec tout ce courage qu'ils prétendent avoir. Peu d'entre eux me suivront, à leurs risques et périls.

Sale prude

Dans cette escapade sans gloire, je n'aurai finalement pas su prouver ma bravoure, comme je l'aurais voulu. Le héros qui sommeille en moi ronfle bruyamment. Ma théorie s'est fait abattre par la pratique, qui ne s'en relèvera pas.

Sale prude

Dans son sillage, la catastrophe de la colline d'Hubris n'a pas emporté les arbres qui l'entourent. Il ne reste que les fondations de maisons éventrées, donnant à l'ancienne ville un aspect spectral. Le silence s'est emparé des lieux autrefois vivants. Paisible, le fleuve s'écoule normalement. Peu importe la gravité d'un tel évènement, la nature y demeure indifférente et poursuit son œuvre sans l'humanité. Les animaux errent dans les rues retournées, la pluie tombe et la brume s'installe, recouvrant la butte d'une caresse humide.

La colline d'Hubris

Si on m'avait dit, alors que j'étais encore jeune enfant, qu'on pouvait acheter la souffrance pour le plaisir qu'elle procure, j'aurais nié farouchement.

Les bijoux de la maison Melville

Ne tente pas le Diable, il est joueur.

Désorientée, elle se lance dans une introspection, sourde aux paroles des visiteurs. Elle se dit : "Le chaos effraie notre monde emprisonné des révérences de ces dames, et des poignées de mains viriles des bourgeois en pleine puissance. Mais un jour viendra, peut-être, un homme ou une femme pourrait construire son univers et ignorer les bienséances. C'est alors que les garçons porteront des corsets en se maquillant sans se cacher, et les filles pourront accéder au plaisir et fumer sans passer pour des bougresses.

« - Hélas ma belle et tendre fille ! Je te demande de me croire, car j'aimerais me tromper.

- Je continuerai à l'attendre dans ce cas. Vous mentez, le moindre doute vaut la peine d'être étudié, c'est vous qui le prêchez, depuis que je sais marcher. Regardez donc ce que je m'apprête à faire ! »

Peu à peu, l'apparition ignoble est remplacée, au profit d'un corps presque normal. Seul demeure l'oeil crevé.

Tu es le bienvenu au cabinet de Lulu. Mais n'oublie pas, je peux te rendre riche, tu sais ? Riche, ou très malheureux.