Tout ce que nous te demandons, c’est de garder l’esprit ouvert et de demeurer conscient du fait qu’il existe toujours d’autres points de vue sur n’importe quel sujet que l’esprit humain puisse imaginer.
Cette première impression de grâce fluide, naturelle, avait à jamais marqué sa mémoire, parce qu’elle était unique. Tous les chevaliers étaient extrêmement forts. C’était un fait si évident que les gens n’en étaient plus conscients, car lorsque des hommes se battaient et s’entraînaient au combat pendant aussi longtemps et de manière aussi intensive que le faisaient les chevaliers, à manier quotidiennement des armes lourdes pendant des heures, ils développaient des muscles énormes, de même que la force et la détermination qui allaient de pair avec un effort prolongé. Mais ce qu’ils développaient rarement, c’était la légèreté des mouvements, la grâce et l’agilité. Prisonniers de la masse de muscles qu’étaient devenus leurs corps, les chevaliers avaient tendance à marcher d’une manière lente et inexorable, les épaules penchées vers l’avant et les genoux fléchis. C’était là une posture qui se prêtait au style de combats qu’ils connaissaient le mieux, l’affrontement armé, face à face et lame contre lame, jusqu’à ce que le meilleur gagne.
Mais celui-ci était d’une race différente. Alix avait d’abord vu une forme imprécise qui se déplaçait très vite, mais, presque aussitôt, ses yeux et son esprit s’étaient ajustés à ce qu’elle voyait et elle avait remarqué les quatre silhouettes accroupies qui se tournaient en même temps, trop tard, pour poursuivre l’adversaire qui s’était jeté sur eux, se servant d’une murette comme d’un tremplin pour sauter par-dessus leurs têtes. Il avait atterri derrière eux, les genoux pliés, puis avait tourné sur lui-même avec agilité et frappé du plat de sa lame le plus proche de ses quatre adversaires avant de se tourner de nouveau et de sauter dans les airs pour saisir une traverse qui dépassait d’un toit à proximité, l’utilisant pour se remonter d’une seule main sur le rebord d’une fenêtre d’où il avait salué de la main, en riant, ses quatre compagnons pour finalement disparaître à l’intérieur du bâtiment. Toute cette scène n’avait duré que quelques instants et, lorsque Alix avait finalement pu crier au conducteur d’arrêter le carrosse, l’homme avait disparu.
Elle baptisa l’enfant Merlyn, en référence à l’oiseau noir dont la voix magique enchante, aux quatre coins de la Bretagne, les longues journées printanières et estivales. Caius Merlyn Britannicus.
Les guerres, m’avait-on appris, devaient se mener vite et bien. Lorsque c’était impossible, une fois que l’une ou l’autre des factions avait montré un signe de faiblesse, l’affaire devait se régler par la négociation. Même les négociations malhonnêtes étaient préférables à l’épuisement progressif des effectifs qu’engendrait un affrontement trop long.
A mesure que je vieillis, il m’apparaît que la vie est comparable à une campagne militaire : une alternance de longues plages de calme et d’ennui, comme désertées par le moindre événement notable, et de courtes périodes d’intensité où tout ce qui revêt de l’importance forme un concentré d’action.
Les damoiseaux étaient tout ce que leur nom suggérait : des vierges parmi les carnivores ; des innocents parmi les satyres ; des cavaliers néophytes qui n’avaient pas encore combattu les guerriers à cheval les plus féroces du monde. La plaisanterie qui courait en Outre-mer était que la pâleur des damoiseaux venait de leur peur à l’idée de voir leur premier janissaire turc se ruer sur eux au triple galop.
Aucun autre problème de notre époque n est si profondément ancré dans le passé commission royale pour la Palestine
Il n’est pas un seul des francs qui ne comprennent que si nous procédons à la reconquête du littoral (Syrie) et si nous déchirions le voile de leur honneur ce pays leur tombera des mains et que nous pourrons alors étendre nos mains pour aller à la conquête du leur
Abu Shama historien arabe 1203 -1267
Britannicus, mon général, avait quitté l’avant de notre colonne à peine quelques instants plus tôt pour houspiller nos retardataires et, en faisant volter ma monture, j’avisai à environ trente pas de là son panache cramoisi tandis qu’il s’efforçait de maîtriser son cheval récalcitrant. Immédiatement à son aplomb, les parois grouillaient d’hommes vêtus de peaux de bête qui s’apprêtaient à sauter, alors je fouettai mon cheval apeuré pour l’inciter à bondir par-dessus les soldats, et me donner l’espace nécessaire à une résistance efficace.
Le nouvel arrivant était grand et rose pâle à la façon de tous les nouveaux arrivants en Terre sainte, le teint des gens qui n’avaient pas encore eu le temps de s’acclimater à l’éclat cruel du soleil du désert et aux gifles des vents chauds qui soufflaient le sable sur la peau exposée. On les reconnaissait immédiatement à leurs vêtements trop neufs et mal adaptés au climat d’ici, leurs couleurs trop voyantes, leur cotte de mailles et leur armure encore rouillées et humides du voyage en mer qu’ils venaient d’accomplir. Il allait falloir des mois dans l’air sec du désert avant que leurs mailles ne prennent un aspect bruni, poli par le sable, et que leur propriétaire ne pût passer pour un vétéran.
Les damoiseaux étaient tout ce que leur nom suggérait : des vierges parmi les carnivores ; des innocents parmi les satyres ; des cavaliers néophytes qui n’avaient pas encore combattu les guerriers à cheval les plus féroces du monde. La plaisanterie qui courait en Outre-mer était que la pâleur des damoiseaux venait de leur peur à l’idée de voir leur premier janissaire turc se ruer sur eux au triple galop.