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Citations de Jacques Ancet (224)


Jacques Ancet
De la fenêtre un homme regarde le monde. C'est toujours comme ça que cela commence. Par cette attente interminable. Un homme assis, et qui regarde. Depuis des années, des siècles peut-être. (...) ce qu'il voit ne l'atteint pas. C'est comme si les aubes et les crépuscules, les saisons lentes ou rapides, la nature les choses et les hommes glissaient sur la vitre, l'abandonnaient à son immobile solitude. Alors, quittant le fascinant spectacle, ses yeux reviennent à la page où ses mains tracent de temps à autre quelques lignes incertaines. A ce moment il lui semble percevoir comme un accord soudain: celui de sa fragile durée humaine et de l'instant absolu du monde. Avec, dès que ses yeux se lèvent à nouveau, retrouvant la vision perdue, le sentiment d'un irrémédiable écart -d'une infime blessure. Un sentiment d'y être et de n'y être pas. Serait-ce cela la beauté? Oui, écrire ce serait d'abord cela: s'asseoir pour voir se lever le monde dans le jour du langage. Et d'une voix presque muette ne cesser de célébrer cette beauté, répétant comme une prière muette cette phrase si simple de Beckett: " Je regarde passer le temps et c'est si beau. '
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Parler de sa vie aujourd'hui est, pour lui, un acte étrange et difficile. Dès qu'il essaie de fixer sur elle son regard mental, il la voit s'éloigner, s'éparpiller en un désordre d'images qui toutes viennent se dissoudre dans l'unique certitude qu'il peut en avoir, celle de son corps ici et maintenant : ce froid aux extrémités des doigts tandis qu'il écrit, la table, la lumière de la lampe et, dehors, un jour gris comme une photo en noir et blanc, un peu ternie... Tout le reste n'est qu'une histoire qui ne le concerne plus. Alors, parler du sens de sa vie ne peut être que plus difficile encore. Car il n'en voit aucun, lumineux et lointain, vers lequel s'en iraient ses jours comme le fleuve vers la mer. Á moins, bien sûr – et cette très vieille image du fleuve coulant vers la mer l'y conduit – de voir dans le non sens même – la mort –, le vecteur et le point de fuite de toute existence.
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nous n'atteindrons jamais le pays du silence
où les arbres craquent avec le vent
où la nuit tombe
sur la blancheur des pierres
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Au lever, c’est un éblouissement sur lequel se détache l’encre de deux grands feuillages, quelques bosquets, un ou deux toits. L’air est d’une fraîcheur sonore, rayée d’insectes vifs, l’herbe un infini de feux liquides. Si les yeux montent, ils ne rencontrent que la dérive floconneuse d’une buée et la découpe lumineuse et obscure à la fois d’un grand vide bleu.
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j’essaie d’être ce mystère en vous qui ne sait pas, qui en sait plus que moi, le vent s’est mis à souffler, une porte claque, vous riez, vous criez, maintenant nous marchons sur le rivage cherchant pierre blanches, coquillages, ovales laiteux et leur spirale brune, l’écume scintille, chaque vague recouvre, découvre le sable, trésors étincelants, vertige du regard, la mer est d’un bleu plombé piqué d’éclairs, le talon s’enfonce, rien d’autre que ce rythme lent de la marche, bruissement, billes dés, billes, un pas encore, et soudain, le miracle recommencé,
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c’est à présent une chambre obscure, je marche, tu pleures sur mon épaule, je sens contre moi cette chaleur terrible, je te parle doucement, je ferme les yeux, cela pourrait-il se passer de mots, cette émotion, souffles croisés dans l’ombre, si loin pourtant, ces années entre nous, tu gémis, je ne sais plus,
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c’est à présent une chambre obscure, je marche, tu pleures sur mon épaule, je sens contre moi cette chaleur terrible, je te parle doucement, je ferme les yeux, cela pourrait-il se passer de mots, cette émotion, souffles croisés dans l’ombre, si loin pourtant, ces années entre nous, tu gémis, je ne sais plus,
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j’ai tracé des lettres, des mots, une phrase comme un fil traversant ma mémoire, remontant jusqu’à cette main solitaire crispée, entrouverte, crispée encore, pulsation lente que je sens maintenant sous mes doigts, coulée obscure, irrésistible, je plonge mon visage dans l’encre, les mots sont étincelles, lunules dansantes, filaments, fissures, sillons dans la nuit étroite, crépitement encore, suif ou résine, éclat soudain et la main s’ouvre, immobile, sur la paroi rouge, elle monte, est-ce la tienne, je vais la toucher mais le jour une fois de plus efface ton vertige,
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toujours tu refais ce pas, toujours je m’émerveille, ta main se tend, saisit la mienne ou est-ce ma main prenant quels autres doigts, geste à l’infini qui se répète, le monde vacille, s’ouvre, tu ris, je ris, il est cinq heures midi ou huit heures, ton pied se lève, se pose lourdement, tu chancelles, tu ne tombes pas, des millénaires marchent avec toi, des hordes titubantes,
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de vagues rumeurs me parviennent à travers l’épaisseur d’un silence où je suis bien, frissons, flux et reflux de la phrase, pour un instant je rejoins ta paix de sang tiède, écume, sillage d’un geste dans l’obscur, nuée pâle du visage, je t’enveloppe d’une membrane de syllabes, ma phrase est rouge, elle ondule jusqu’à toi, tu t’en nourris, par elle tu respires, tu pressens le feu soudain de la lumière, l’air froid qui s’adoucit déjà au milieu d’une rue où je marche, remontant le courant des corps, cette rumeur de vie qui n’est pour toi qu’un souffle à peine comme la mer lointaine où tu flottes,
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pour que dure l’instant, construisant un présent dilaté où je suis bien, où tout ce qui m’atteint devient silence, blancheur, toute parole brille et s’efface, chaque objet flotte et se dissout ne laissant que ce vide où je t’imagine, rose à peine dans la lumière, forme comme montant du fond, mais il n’y a pas de fond, tout est présent et nous déborde infiniment, montagnes poussière feux tournant, caillou crevant le noir, doigts, silences impénétrables, ressacs de l’espace et du temps, l’eau, cette souffrance qui me poursuit, malgré moi, ce vertige, et toi, au bout,
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les voix des vivants qui semblent désigner le lieu de ta venue, t’appeler comme je t’appelle dans l’obscure marée de la phrase, comment continuer avec ce poids mort des heures qui te recouvrent et qu’il est dur de les repousser, tenter d’être ton rythme d’eau, ne pas me perdre dans l’encre de ton signe au matin avec la neige légère sur la grisaille des murs quand je voudrais que mes mots soient comme les flocons, lents et rapides à la fois, révélant en la couvrant ton absence si proche, je suis seul à présent sous la clarté pâle de la fenêtre secouant mon stylo à en tacher la page, combien de minutes pourrai-je encore tenir le fil, remonter peu à peu vers toi, quelle image viendra soudain déranger l’ordre de la phrase, au moment du plus grand abandon,
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la danse d'ombres sur le mur, plainte aussi, murmure, quelque chose d'indéfinissable, un peu comme le vent, un animal blessé, des pleurs ou, simplement, un son pur de tout sens ouvrant un espace vacant, grisaille lumineuse, écoute, basse lancinante à la racine du silence, tambour muet, rythmant quelle danse, apparitions, disparitions,
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Ces « Cercles en méditation » accompagnent, en effet, les concrétions intenses des poèmes d'une manière de murmure, de basse continue, où la description minutieuse d'états douloureux et confus, la célébration des beautés du monde (fleurs, couleurs, astres), la remémoration d'instants heureux, viennent se confondre dans la trame serrée d'une prose lente, obstinée, fascinante dans ses intermittences mêmes. (à propos de Jacques Roubaud)
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Cette angoisse de la vie qui s’en va pour peu qu’on la regarde en face, c’est, précisément, cela que Bernard Delvaille tente de fixer. Du regard et des mots. Tentative vouée à l’échec mais qui finit par nous faire partager ce glissement, cet éboulement qu’elle cherche à annuler. Car, au fond, écrire, peut-être, est-ce moins fixer que mimer.
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Et c'est comme si, peu à peu, la montagne entière redevenait ces images qu'on avait mis si longtemps à traverser. Front obscur, muraille crènelée, face de pierre, page grise offrant à nouveau ses signes indéchiffrables, tandis que d'une seule phrase sinueuse on glisse dans l'ombre clignotante, interminable des sous-bois, leur fraîche odeur de terre, leurs bruits de pas étouffés, leur silence de grotte où ce qui pousse c'est maintenant la pente, la facilité de la marche.... ses visions rassurantes, près d'un vert lumineux au soleil déclinant, vaches paisibles, ruisseaux traversés dans un bruissement d'eaux, premiers toits entrevus...
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La marche et l'écriture se ressemblent. Une chose obscure, impérieuse, insiste, emporte, et si l'on avance c'est pour savoir, pour la découvrir... Pas à pas, mot à mot, avancer c'est s'approcher de cet autre côté dont on sait bien pourtant qu'on ne l'atteindra pas.
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A chaque instant recommençant. Au bord toujours d'abandonner.. D'en rester là. Perdu. Sans autre repère que le souffle, le coeur qui bat trop fort. Comme au bord de la phrase inachevée. Quand il n'y a plus rien à voir, à dire, à penser. Et qu'on avance, pourtant, mot à lot, sur le vide. Et qu'on n'en finit pas.
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Inextricable, la forme n'occupait pas l'espace entier. L'oeil pouvait la franchir, la contourner, explorer à gauche, à droite, derrière, l'inépuisable profondeur du paysage. Aujourd'hui, il ne peut que s'y heurter ou s'y soumettre, accompagner le perpétuel jaillir d'un élan arrêté. Les terres montent, se superposent en couches successives, dressant soudain cette tache rocheuse dans la cascade transparente de l'air. Tout est bleu : la pierre, les ombres, les forêts, jusqu'au vert des prés, au rose des toits. Tout est une même quiétude chromatique à laquelle participent cris, bourdonnements, rumeurs et la lenteur du corps qui s'est mis à flotter
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Il s'en rend compte aujourd'hui, après tant d'années: écrire, au plus profond est un acte né de la douleur. Un acte qui libère dans le langage cette blessure lointaine du corps, la soulage mais ne l'efface jamais. Il aurait souhaité n'écrire que la beauté de vivre, la splendeur du monde, comme il l'a fait aussi. A chaque fois, pourtant, au coeur de la lumière, il y a ce noir: le corps seul, souffrant et qui gémit. Lui voudrait ne pas l'entendre, ne pas le voir. Il voudrait continuer à chanter, mais sa voix se brise, elle mue, et c'est la tragédie qui sort de ses lèvres
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