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Citations de Jean Lods (13)


Ils portaient tous le même uniforme de l'âge, le poil blanc, la ride austère, ils avaient la poitrine bombée, le regard droit, le corps tassé par les heures de monte, et s'étaient succédé au fil des générations dans la vaste pièce au dernier étage de la tour, cette tour qui s'élevait d'un jet au-dessus des remparts où passaient et repassaient sans fin les sentinelles sur le chemin de ronde, et d'où l'on dominait d'un côté la mer ensemencée de bateaux, de l'autre la terre sans limites où moutonnaient les vagues des collines.
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Mais il n'y avait pas que les hommes à rassurer, pensait-il, la terre aussi avait besoin d'entendre le rythme régulier de ses pas qui lui disait qu'il était là, et que rien de grave ne pouvait arriver. Il aimait cette terre, les hommes passaient, elle restait, et cette nuit-là, peut-être parce que le silence était particulièrement grand, il l'entendait se plaindre. Il l'écoutait avec une attention qu'il ne prêtait pas à son propre corps, qui pourtant aurait eu motif à protester, car il ne l'avait jamais ménagé depuis qu'il était au service... Au service de quoi ? Il ne s'était jamais vraiment posé la question. Il servait. Voilà.
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Il dit que lui s'appelait Léopold. Il n'avait pas prononcé les syllabes de son nom depuis si longtemps que de se les entendre dire lui fit un effet bizarre, depuis des années il n'était pour tout le monde que Mon colonel. Il avait l'impression de se rappeler quelqu'un d'autre qu'il avait été. Ou plutôt qu'il n'avait jamais été, le colonel en lui avait pris toute la place avant même qu'il ne le devienne.
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Lucile expliquait le passé composé à ses élèves, elle leur faisait remarquer cette façon significative qu'a la langue d'associer un verbe au présent à un participe relevant du révolu pour relier une action qui s'était déroulée hier à celui qui en parlait aujourd'hui. Elle proposait à ses écoliers de donner des exemples de ce temps, en leur demandant de choisir des souvenirs particulièrement marquants pour que leur mise en regard grammaticale avec le présent ravive une émotion ancienne. Ainsi, disait-elle, ils prendraient vraiment conscience de la force qui unissait le disparu et l'actuel, comme l'impliquait la structure du passé composé. [...].
Il s'apercevait que s'il s'efforçait de rester dans le registre des réponses des enfant, toutes liées à leur vie quotidienne et à leur entourage familier, les phrases au passé composé qui lui venaient à l'esprit étaient endeuillées par une négation : il prenait conscience, non pas de ce qu'il avait fait, mais de ce qu'il n'avait pas fait. On dira que c'était le hasard qui l'avait conduit à se trouver dans cette classe, à l'occasion de cette leçon précise, mais le hasard n'existe pas, ou du moins les cheminements qu'il creuse sont utilisés pour permettre l'écoulement d'eaux longtemps retenues par des écluses lointaines et mystérieuses.
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seul le silence lui répondait. Ou plutôt ses propres questions lui revenaient : il était face à un miroir.
Mais les miroirs ne renvoient pas toujours les images que l'on attend , ou espère.
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« Je sais, disait-il, est arrivé ce qui devait arriver. Je le savais depuis longtemps, je l’ai su avant tout le monde, je me suis battu contre cet ennemi dont personne ne connaissait le visage, je me suis battu en sachant que c’était inutile et que l’inéluctable était en marche, parce que je pensais que l’important était de se battre, pas de gagner. » (p. 151)
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Et Lucile avait fait le vide dans son regard pour y laisser toute la place à l'homme en face d'elle. Et Mario, au contraire, offrait dans le sien les trésors d'un monde qui ne lui appartenait pas.
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Il y avait, dans sa façon de vivre par procuration à travers ses souvenirs et son attente, quelque chose que je sentais profondément malsain. On eût dit qu’il cherchait à quitter son corps, bon à rien maintenant, pour voyager dans la vie de sa fille et tout voir à travers elle. Son amour se refermait autour d’elle à la manière d’une prison.
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"Du plus lointain de la mémoire, on avait toujours vu des bateaux arriver. Depuis les remparts crénelés, entourant la forteresse on assistait à la croissance de la forêt de mâts perçant l'horizon et, quand le vent venait de la mer, en même que l'odeur du large on percevait la musique des accordéons." (p. 13)
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« Sans le savoir et pour la première fois peut-être, il était venu pour ouvrir ses yeux sur sa fille, lui qui ne l’avait jamais vraiment vue. » (p. 81)
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Inquiétude et colère, parce qu’il savait en danger de mort son activité professionnelle qui tenait bien davantage de la raison de vivre que de l’emploi rémunéré : pour lui, chaque film était un organisme vivant, un réalisateur était un dieu qui créait des mondes dont l’existence était liée à la pellicule où ils étaient inscrits, et chaque fois que par son travail de restauration il parvenait à rendre son éclat et sa jeunesse à une oeuvre que le temps avait détériorée, il avait le sentiment de perfuser de la vie à une planète menacée de disparaître dans le vide intersidéral.
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« Il était vieux certes, comme tous les colonels qui l’avaient précédé et que, comme lui, on avait toujours connus ainsi. » (p. 23 & 24)
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« Le souci du colonel à cette heure avancée de la nuit naissait surtout du caractère flou et mouvant de celle-ci, personne n’avait pu en tracer le contour ni la matérialiser véritablement, elle se perdait au milieu des sables et des lagunes. » (p. 17)
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- "Ma fille vous demande pardon ; elle n'était pas encore tout à fait prête. Votre Excellence sait comment sont les bonnes femmes dans ces occasions", ajouta-t-il en exprimant en des termes quasiment vernaculaires une pensée d'une légèreté parisienne. "Mais elle sera là dans un instant ; notre maison est à deux pas comme vous savez." L'instant dura cinq minutes ; puis la porte s'ouvrit [...] Devant l'impétuosité de sa beauté les hommes furent incapables d'en remarquer, en les analysant, les défauts qui n'étaient pas rares ; et nombreuses devaient être les personnes qui ne seraient jamais capables de cette élaboration critique. Elle était grande et bien faite, sur la base de critères généreux ; sa carnation devait posséder la saveur de la crème fraîche à laquelle elle ressemblait, sa bouche enfantine celle des fraises. Sous la masse des cheveux couleur de nuit enroulés en d'exquises ondulations, il y avait l'aube de ses yeux verts, immobiles comme ceux des statues et, comme eux, un peu cruels. Elle avançait lentement, en faisant tournoyer sa large jupe blanche et portait sur sa personne la sérénité, l'invincibilité de la femme sûre de sa beauté. Ce n'est que bien des mois plus tard que l'on sut qu'au moment de son entrée triomphale elle avait été sur le point de s'évanouir d'anxiété." (Vignette)

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