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Citations de Jean-Marc Lévy-Leblond (36)


Mort en 1964, mon grand-père chrétien, au demeurant fort méritant puisqu’il avait été boursier de la République et venait d’un milieu très modeste, n’était pas différent des mâles de la petite bourgeoisie, cela s’entendait tout de suite. Gentiment macho, banalement misogyne. Sans doute ne prononça-t-il jamais les mots « adultère » ou « tueuse » à votre propos, chère femme si longtemps diffamée. La construction de l’adultère s’est faite en tapinois : deux époux savants travaillant de concert, voilà qui n’existe qu’au pays des fées. On ne va pas nous la faire : elle était trop belle pour ne pas le tromper. Et puis, une femme chimiste ? Qui se salit les mains et porte un grand tablier sur sa robe comme si elle cuisinait ? Inimaginable. Femme savante : une chimère.
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... vous écriviez à votre amie Kazia en 1883 : « ... Aussi, malgré ce diplôme qui me confère la dignité et la maturité d’une personne qui a terminé ses études, je me sens incroyablement bête. »
Il n’y a au monde que vous pour écrire une phrase pareille. Les gens stupides se trouvant souvent érudits, ingénieux et clairvoyants, il n’y a qu’une personne immensément intelligente pour reconnaître qu’elle ne sait que très peu.
L’ignorance étant le meilleur remède contre le doute, les ignorants sont toujours les plus convaincus par ce qu’ils pensent savoir.
Lettre de Marjane Satrapi
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- Je ne crois évidemment pas qu'un Dieu a créé le monde tel qu'il est en une seconde ou en sept jours. Et sur des questions comme la théorie de l'évolution, c'est la connaissance scientifique qui l'emporte, ne serait-ce que, justement, parce qu'elle est capable de se corriger elle-même. Donc, toute forme de religion qui prétend imposer des réponses irréfutables à n'importe quelle question me paraît haïssable, car exigeant l'abandon de l'esprit critique et aboutissant à de véritables dictatures intellectuelles - et souvent politiques du même coup.
- Tu dis « toute forme de religion », mais y en a-t-il d'autres ?
- Oui, certes. On peut très bien croire en un Dieu, ou plusieurs, en espérant que la religion donne des règles de conduite morale. On peut aussi y trouver une consolation face aux difficultés de la vie et à la crainte de la mort. On peut encore lui reconnaître la capacité à sublimer l'esprit humain et à produire de grandes œuvres artistiques et même philosophiques. Toutes ces dimensions n'exigent nullement que la religion interfère avec les connaissances scientifiques. Même si je ne partage aucune de ces inclinations religieuses, je les respecte - mais je demande réciproquement aux croyants de respecter mon incroyance !
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si tu te limites aux aspects singuliers de telle chose particulière, le monde t’apparaîtra comme un immense amas hétéroclite. Il ne commence à prendre sens que si tu l’organises en catégories
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Un très grand physicien, Rutherford, celui qui a découvert le noyau atomique, déclarait dans les années 1930 que jamais l’humanité ne pourrait maîtriser cette énergie. Il se trompait complètement puisque, à peine quinze ans plus tard, les bombes atomiques éclataient sur Hiroshima et Nagasaki.
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On vous promet la transmission des images. Comme physicien, j'admire l'expérience. Mais je trouve mes contemporains si laids, si mal bâtis, si désagréables à regarder, que je ne m'exalte pas à l'espoir de les contempler au bout d'un fil. La plus jolie femme perd singulièrement de son charme à la reproduction photographique ; elle sera toujours plus charmante dans l'imagination de son adorateur que sur sa télégraphique caricature. (Henri Bouasse, Houles, rides, seiches et marées, paru en 1924)
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dans l’ordre de nos besoins et des objets de nos passions, le plaisir tient une des premières places, et la curiosité est un besoin pour qui sait penser, surtout lorsque ce désir inquiet est animé par une sorte de dépit de ne pouvoir entièrement se satisfaire.
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-C’est quoi ces signes bizarres que tu gribouilles sur le papier ?
– C’est mon travail : de la physique.
– Mais je croyais que la physique s’occupait des atomes, des molécules ou alors des quasars, des trous noirs… et qu’il lui fallait des appareils très compliqués pour observer ces choses ?
– Tu as tout à fait raison ! Et cette feuille de papier et ce crayon, c’est justement l’un de ces appareils très compliqués.
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ce que [Galilée] a apporté d’essentiel, c’est l’idée que le monde céleste et le monde terrestre ne font qu’un et que les lois physiques y sont les mêmes, à l’encontre de la tradition aristotélicienne qui séparait le monde terrestre, le nôtre, monde de l’imperfection et du changement, du monde céleste, monde de la perfection et de l’immuabilité.
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Il semble aller de soi aujourd'hui qu'il existe un rapport direct et consubstantiel entre le développement de connaissances fondamentales sur le monde, et notre capacité à agir sur lui, entre science et techniques donc; par exemple, c'est bien grâce à la mécanique quantique que nous pouvons fabriquer des lasers. Or cette connexion - c'est ce que je veux tâcher de montrer - est toute récente dans l'histoire de l'humanité, elle n'a pas toujours existé et elle caractérise une phase très étroite de la modernité. Ainsi, pour en revenir aux mathématiques grecques si j'ose le dire un peu brutalement, elle ne servent à rien. Je veux dire par là que les théorèmes d'Euclide ne sont jamais utilisés par les architectes, les maçons, les arpenteurs. Les artisans qui sont au travail sur le terrain disposent de formules empiriques; ces connaissances pratiques peuvent certes être parfois démontrées, appuyées sur des théorèmes d'Euclide, mais praticiens se moquent bien de savoir si leurs méthodes sont mathématiquement rigoureuses ou pas. On le voit d'ailleurs très bien, avant les Grecs, chez les Égyptiens, où les formules dont disposent les arpenteurs sont parfois approchées et parfois même fausses. Pourtant, ils les utilisent de la même façon. Il y a une raison profonde pour laquelle la mathématique grecque n'a pas de rôle technique, ou très peu. C'est que ceux qui s'occupent de mathématique théorique et ceux qui sur le terrain arpentent les champs, construisent des temples, décomptent les bestiaux, appartiennent à des strates complètement différentes de la société. Les premiers sont des hommes libres, des philosophes; les seconds sont des esclaves, artisans qui ne savent en général pas lire et n'ont de ce fait pas accès aux Éléments d'Euclide, dont ils n'ont d'ailleurs nul besoin pour comprendre leurs tâches. la mathématique chez les Grecs joue un rôle essentiellement philosophique. Au fronton de l'Académie de Platon, on lit: "Que nul n'entre ici s'il n'est géomètre". Autrement dit, la mathématique grecque est un exercice de développement de la pensée logique, qui exemplifie la possibilité d'atteindre à des vérités démontrées, et joue un rôle très important dans le développement d'une philosophie rationnelle, ainsi d'ailleurs aussi que de le développement de la démocratie politique. l'acceptation du débat démocratique repose sur le postulat que, par le logos, par le discours argumenté, il est possible de convaincre vos adversaires ou vos partenaires. Et les mathématiques avec leurs méthodes de démonstration assurées offrent un modèle réduit, si j'ose dire, de cette capacité de la raison à débattre et à convaincre.
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On devrait surtout, non pas tant produire toujours plus d'énergie, mais bien plutôt en consommer moins.
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Dès lors, il devient clair que si la physique entretient avec les mathématiques ce rapport privilégié, c'est tout bonnement d'en être définie. La mathématicité n'est pas une propriété particulière et éventuellement temporaire, qu'il s'agirait d'expliquer, mais sa spécificité même, tant que l'on s'en tient au niveau épistémologique, tout au moins : on verra plus loin que c'est là un aspect seulement du problème de la scientificité de telle ou telle science.
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Mais si la source lumineuse qui éclaire les objets n’émet pas une lumière blanche, alors nous les verrons avec des couleurs différentes.
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– Et, si je reviens à ma devinette, le fromage, on l’appelle tome parce qu’on le découpe ?

– Ah tu y tiens ! Non, je ne pense pas. D’autant que l’on peut aussi l’écrire tomme. Tiens, cherchons ensemble l’étymologie sur internet. Voilà : « de l’ancien provençal toma, du latin populaire *toma, fromage gras ». Rien à voir. Revenons donc à l’atome. Au sens strict, c’est donc un morceau de matière inusable, incassable, insécable, pour les atomistes grecs comme Leucippe et Démocrite (au Ve siècle AEC), Épicure (IVe siècle AEC)…
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Réalise-t-on assez qu’il y a moins de deux siècles encore, seules nous éclairaient (mal !) des flammes ? Et que nous étions entourés d’obscurités peuplées d’ombres, mobiles et instables, projetées sur les murs et dans les rues ?
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Au moins, disposant de deux versions du futur, puis-je me rassurer en constatant que la possibilité de l’une comme de l’autre n’en garantit nullement une réalisation effective et laisse ouverte la porte de l’avenir.
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L’étudiante Maria Skłodowska est devenue Madame Pierre Curie, l’épouse du professeur Curie, la mère d’Irène et de Ève, vos deux filles. Vous deviendrez bien plus tard Marie Curie, celle dont la renommée dépasse les frontières, la « savante aux deux prix Nobel », unanimement adulée.
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Marie, tu incarnes la femme libre, qui choisit sa vie et ses passions sans se préoccuper de ce qu’écrivent les vipères, comme te le conseillera si justement ton ami Albert Einstein. Pour les filles dans l’auditoire tu ne pouvais qu’être un modèle inspirant, et pour les garçons, une belle leçon !
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En fin de compte, nous avons introduit trois symétries d'une grande importance en physique fondamentale:
- la réflexion d'espace, usuellement notée P (à cause de son autre appellation de "parité");
- le renversement du temps, noté T;
- la transformation mutuelle matière-antimatière, appelée aussi conjugaison de charge, puisqu'elle inverse le signe des charges (électriques ou autres), et notée C.
Leur caractère est d'être réflexif, c'est-à-dire que leur réitération ramène à la situation de départ : une image miroir dans un second miroir est identique à l'objet de départ, un film passé à l'envers de nouveau inversé est le film originel, et l'antimatière de l'antimatière est la matière ordinaire.
L'une des grandes surprises de la physique moderne est d'avoir montré que, en toute rigueur, aucune de ces symétries n'est valide pour tous les phénomènes (même si la plupart, à notre échelle au moins, les respectent toutes les trois). Mais cette rupture d'avec le sens commun est partiellement compensée par un puissant résultat de cette théorie, que l'expérience confirme. Si ni la réflexion d'espace P, ni le renversement du temps T, ni la conjugaison de charge C ne valent absolument, en revanche leur combinaison reste une symétrie valide. Autrement dit, le film d'une expérience de physique passé à l'envers et vu dans un miroir représente une autre expérience de physique possible où les particules auraient toutes été remplacées par leur antiparticules. C'est en ce sens que matière et antimatière peuvent être dites avoir les même propriétés, cet énoncé exigeant que, dans certains cas au moins, les propriétés considérées fassent l'objet d'une double inversion temporelle et spatiale. Il reste donc au cœur de la matière une symétrie fondamentale. L'importance considérable de cette assertion provient de ce qu'elle repose sur une démonstration rigoureuse. La preuve de ce "théorème CPT", comme on l'appelle, repose à la fois sur la théorie relativiste einsteinienne de l'espace-temps et sur les concepts de base de la théorie quantique. La confirmation expérimentale de ce résultat, jusqu'ici jamais mise en défaut, apporte un soutien de poids à ces deux théories à la fois, et souligne leur compatibilité.
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La science, qui avait été présagée d’un zèle messianique, a lentement contribué à sa propre déchéance, du moins dans le rôle d’autorité épistémologique absolu. La science, aux yeux d’une jeunesse de plus en plus vocale, comportait une lacune importante. Elle était incapable d’atteindre les sommets transcendants de l’humanité. La science est réductrice, matérialiste, objective. Elle déshumanise. Elle comprend la quantité, non la qualité. Elle ne peut comprendre l’amour. […] La beauté de la création a été perdue dans la destruction de Hiroshima. Auschwitz s’est moqué du progrès.
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