Nous abîmez alors dans la louange…
Extrait 6
L’amie est dans le rêve,
Dans les voiles d’oubli, de marche et de grand vent.
Son âme est un vaisseau
(Le corps aux isthmes où l’on aborde).
Ma peur, je crie vers les collines de chaleur,
Les servitudes des arbres et des fontaines,
Les sentiers noirs, le miel des rives ;
Pour qu’elle aborde en ces contrées.
O ma douleur d’être avec toi sur cette lame de vie
Et décriés comme au néant de l’être nous serons
Et morts dans l’âme de survivre
Et de naître si violemment à chaque saison de toi.
(Mémoire)
Tombe de jeune homme
Je fus l’enfant très aimé des habitudes et des
routines. J’ai connu l’amour de ma mère et
d’autres femmes peu, une seule peut-être
reste à rêver aux larmes que j’ai laissé
glisser sous mes paupières
La vie me fut douce et absente, la mort
aura rongé avant longtemps mon visage de
miel ; je relis à l’envers les phrases de
mes maîtres, je suis libre.
Nous abîmez alors dans la louange…
Extrait 5
Ou lorsque vous baisez ma bouche un long temps
Avant les pièges de la nuit,
Que mon sommeil en est séduit
(Les nuits d’obscur sont nos bonheurs)
Que d’enfants blondes et de lèvres
Sur le bateau de cette nuit.
Nous abîmez alors dans la louange…
Extrait 4
Infante, ma maison est blanche dans le bleu,
Votre main si futile a dérouté les langues de la mort.
De ma fenêtre enracinée je vois les filles dans le soir,
Leurs pieds sanglés de cuir et leurs robes qui glissent
sur le flanc des chevaux ;
Et la fin qui me guettent en ma tour vers l’obscur
Et votre main légère qui demande mon bras pour le
repas du soir.
Nous abîmez alors dans la louange…
Extrait 3
En silence le vase identifie la salle
Et les murs sont ténèbres et vastes et vénéneux,
L’air a cette moiteur des robes en été
(Irrespirables et douces)
Et quelle effroi d’avoir opté pour l’infante,
D’avoir neigé pour elle,
Et de l’avoir lavé avec l’eau des sources domestiques.
Nous sommes en vos bras, grand favori, grand échanson,
Celui qui tend les bras et déchire la robe.
Nous abîmez alors dans la louange…
Extrait 2
Je fus il y a longtemps abordé et fidèle,
Aujourd’hui à ma porte,
Lorsque sont devant moi les ténèbres du soir,
Je ne sais rien sinon l’espace de ma chair
Et sur des mains absentes les traces de mes mains ;
Et souvent aux degrés la brise de passage
Laisse un passé de sel, une trace de pas
Et le poids de ton corps, l’orgueilleuse mémoire
De mon geste à tes reins.
Plonger dans le regard
Plonger dans le regard
(toujours la profondeur des yeux m’étonne)
Déjà tu sais cette petite lèvre qui me brûle.
Une infante posée dans sa forme parfaite, nue, droite
Jouant, blessant les oiseaux et les fleurs ;
Une buée de rose est sa parole.
Je vieillirai sans vous connaître dans mon silence dévasté.
Nous abîmez alors dans la louange…
Extrait 1
Nous abîmez alors dans la louange de vos gestes,
Ainsi, afin de demeurer,
Car la face de dieu toujours dans l’ombre persévère.
Les traces de vos pas m’ouvrent un chemin serein,
Jamais le corps ne fut un si grand risque.
Voix ailée et vaine de Béatrice
Extrait 2
Et tu viendras,
Dans ces allées où mon cœur saigne à chaque pas,
Mes bras seront d’une autre nuit, d’un autre ciel,
Et nos embrasements parmi les arbres morts
Seront d’une autre terre, d’un autre temps.
Et nos arbres et nos bras déchirés vers le ciel
Et les ronces d’enfance et les baies dans nos mains.
Car dans la nuit de notre peur,
Tu aimes avec des larmes dans la voix
Et la douleur qui est la tienne est sans raison
Et le jeu adorable de l’amour que tu donnes
Est sans raison.
Et toujours je me laisse réduire par ta voix,
Toujours au même ventre je suis grande prêtresse
Et servante de roi.
Et la blessure que tu fais a la violence des saisons
Mais le temps après la blessure est une lente floraison.
Une descente au monde bas
Stèle d’une courtisane
Toutes mes portes furent ouvertes, forcées à
cris, ou larmes, ou plaisirs, tous mes anneaux
sans clefs furent ouverts. Il ne resta qu’une
habitude de plaisir, d’autres plaisirs, rien qui
ne fût ensemble de plaisirs. Ma mémoire
sera dans l’oubli. Ainsi fut désirée ma fin,
mais les dieux seuls savent vers quoi je
marche. Il ne reste de moi que quelques fleurs
éparses, peu de larmes pour mon bûcher.
Ici cette beauté que je ne voile pas et sur ma
chair de marbre cette pâleur que je conserve.
J’ai ordonné ainsi que l’on colore la
pupille de mes yeux verts