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Critiques de Jens Peter Jacobsen (17)
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Niels Lyhne

Il y a des livres dont le célèbre prescripteur reste indissociable de tout commentaire, critique ou analyse, au point de prendre une place exagérée au moment de s'en faire une image résumée ; les exemples ne manquent pas, se classant en deux groupes plus ou moins évidents : les véritables chef-d'oeuvres, et puis les autres… ceux pour qui le coup de projecteur revêt davantage des circonstances, du contexte historio-artistique du moment ; on citera par exemple pour la deuxième catégorie « Le complexe d'Icare » d'Erica Jong, dont certains pensent toujours qu'il a été écrit par Henry Miller, tant sa préface et la volonté de diffuser ce livre ont pris toute la place quand il s'agissait de le présenter — et que ce texte aujourd'hui n'intéresse plus grand monde, vu qu'il représentait un certain type de féminisme n'ayant plus vraiment cours aujourd'hui, et qu'il n'est simplement pas très bon — et puis il y a les autres…



Ces merveilles peu usitées, dont l'encombrante tutelle pourrait être levée, que l'éclat oblige à s'émanciper de cette parentèle accolée.

Ce texte n'a plus besoin de Rainer Maria Rilke pour exister.



Il est déjà passé par l'âge des dédaigneux modernes le trouvant désuet, passage quasi-obligé pour toute littérature ne sachant pas régler ses conflits générationnels, simple signe d'une progéniture obligée de cracher sur son ascendance pour exister… depuis la fin du 19ème siècle, il en a eu le temps… cycles d'oubli et de re-découverte…



Sa version la plus courante en est sa première traduction — sous-titrée « Entre la vie et le rêve » — par Madame Rémusat, datant de 1928 ; les éditions Stock l'ont même ré-éditée en 2003, alors que l'excellente maison toulousaine Ombres — aussi responsable de la publication du reste de son oeuvre — en a proposé une nouvelle version en 1998 par Sten Byelke et Sébastien Voirol.

Je ne saurais conseiller laquelle choisir… l'ayant seulement sous sa jaquette rose encadrée…



Il faut donc oublier cette dévorante présence du poète Rilke, dont le vibrant romantisme peut rapidement fatiguer… Celui de Jacobsen est nettement plus feutré, sans réelle recherche d'effets.

Un roman d'apprentissage de facture on ne peut plus orthodoxe, disposant d'un charme des plus naturels, accompagné de questionnements universels, dont de potentielles générations d'existentialistes, ou toutes autres créatures disposant de nombrils, ne réussiront pas à circonscrire.



Un possible jalon dans la vie d'un lecteur, alors qu'ils sont si nombreux…

Une vie toute entière racontée simplement, à la sensibilité bien tempérée.

En un mot, un classique, un vrai.

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Niels Lyhne

Dans cette œuvre, Niels Lyhne (Entre la vie et le rêve) publiée en 1880 et traduite par R.Rémusat, le poète et botaniste danois  Jens Peter Jacobsen (1847-1885) nous emporte dans une balade romantique en suivant le parcours chaotique de Niels Lyhne dans une société en train de s'ouvrir aux changements.

Un roman d'apprentissage d'une âme sensible.

Un chemin tout tracé avant-même sa naissance car puissamment pensé et rêvé par sa mère, Bartholine. « Pour elle, ses parents, ses frères et sœurs, les voisins, les amis, ne prononçaient jamais un mot digne d'attention, car leurs pensées ne s'élevaient pas au dessus de la terre qu'ils faisaient valoir, et leurs regards n'allaient pas au-delà de ce qui s'offrait à eux tout naturellement. Mais les vers !… Ils étaient pleins de pensées nouvelles et d'enseignements profonds, montrant la vie telle qu'elle se déroule sur la vaste scène du monde, où la douleur et la joie sont intenses ; ils suscitaient des images parmi les rimes qui ruisselaient comme des perles. »

Se considérant comme un être à part, elle se laisse séduire par le jeune Lyhne de Lonborg dans lequel elle reconnaît celui qui pourra répondre à ses aspirations et s'éprend de lui : de cette union naît Niels.

Une enfance choyée sur le domaine de Lonborg mais déchirée entre l'amour paternel et maternel car depuis que le couple se désagrège Niels reste le seul lien entre ses parents.

Bercé jusqu'aux portes de son adolescence par les récits, la poésie et l'imagination fertile de sa mère, Niels est formaté pour devenir un homme au destin exceptionnel, un héros ; lui se rêve poète.



Niels atteignant l'âge adulte, et ayant confirmé ses aptitudes et ses appétences littéraires, va découvrir et affronter la réalité avec son cortège de joies et de peines.

Nous le suivons étudiant à Copenhague évoluant au milieu des artistes et de l'avant-garde intélectuelle .

Pour l'accompagner, son ami d'enfance de la ferme voisine, Frithjof , et depuis l'adolescence, Erik

Refstrup, recueilli et adopté sur le domaine de Lonborg, futur artiste, avec lequel il tisse une indéfectible amitié.

Comme un preux chevalier, il part en quête de l'amour qu'il aura du mal à trouver.

« Il aimait. Il se dit à voix haute qu'il aimait. Il le dit bien des fois. Ces paroles avaient comme une dignité, une noblesse, et leur signification était grande. Il n'était plus soumis aux influences diverses de ses chimères d'enfant, il n'était plus le jouet de désirs sans but, de vagues rêveries : il s'était échappé de la forêt fantastique qui avait grandi autour de lui, où cent bras l'avaient tenu captif, où cent mains s'étaient posées sur ses yeux pour l'aveugler. Il avait secoué ce joug, il s'était retrouvé, reconquis. »



Ainsi au gré du temps qui passe, de la vie qui s'effeuille, nous allons subir ses déceptions, ses désillusions, ses deuils, ses peines mais aussi être témoins de ses joies, de ses extases même si ces dernières sont beaucoup moins fréquentes .

Après la découverte de Copenhague, où il étudie, il découvre l'Europe , toujours sur les traces d'hommes mémorables ou d 'artistes, à Clarens en Savoie sur les pas de Rousseau pour la dernière retraite de sa mère, en Italie à Riva au bord du lac de Garde.

Au fil des années, après les désenchantements, les ruptures, les séparations, sa quête d'amour et de l'âme sœur reste inabouti. Toujours épris d'absolu et enfermé dans ses rêves, il souffre de la solitude et la ressent comme un isolement et un abandon.

Un destin qui ne sera pas à la hauteur de celui que sa mère attendait.

Une mort héroïque pourra-elle racheter sa vie ?



Une balade dans l' univers romanesque et romantique de Jens Peter Jacobsen entrecoupée et illustrée par de magnifiques visions et descriptions de la nature où l'on sent l'oeil averti du botaniste.

Cette immersion dans le 19ème siècle nous rappelle sans cesse les conditions de vie difficiles de tout être humain à cette époque: tout le long du récit des jeunes gens succombent dans la fleur de l'âge aux maladies (Jens Peter Jacobsen, phtisique, mourra à 38 ans), une jeunesse encore enchaînée arrive peu à peu où partiellement à se libérer des conventions bourgeoises et religieuses…



Une découverte et une très agréable lecture. Un style limpide et empli de poésie.



« Ce petit livre est de cette lignée de grandes œuvres ; je voudrais qu'on le lut comme on les lit . C'est l'histoire des âmes trop grandes pour leur vie ; des âmes trop spiritualisées pour le monde où elles ont vécu et pour les amours dont elles ont souffert ; des âmes obscures et profondes que la destinée à enfermées dans un cycle de malheurs moyens. Certains êtres ont donné toute leur foi à ce désir éperdu de beauté qui vaut seul que l'on vive, mais ce désir, brutalisé par les circonstances, ne peut s'épanouir que dans le renoncement aux satisfactions terrestres et dans la création d'un songe plus beau qu'elles. » Extrait de l'avant-propos de Edmond Jaloux 28 mai 1928
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Niels Lyhne

Rilke n'a pas connu Babelio, n'empêche, lui aussi aimait bien conseiller des livres oubliés ou obscurs à ses connaissances. Et à lire les lignes élogieuses qu'il consacre, dans ses lettres à un jeune poète, à un certain Jens Peter Jacobsen, j'ai eu envie d'aller y voir de plus près. Bien m'en a pris !



"Niels Lyhne" raconte la vie brève d'un danois fin de siècle, un jeune idéaliste romantique par sa mère, progressiste par son père, désireux de se lancer dans la carrière littéraire, et qui n'arrive à rien. Une histoire simple, qui pourrait même donner lieu au plus ennuyeux des romans, si n'était le regard d'une justesse et d'une tendresse incroyables que Jacobsen porte sur ses personnages. Souvent les poètes sont un peu étourdis, les psychologues sont par trop précis, mais imaginez un peu quand le miracle se produit et que soudain un auteur parvient à mêler en lui les deux natures.



Ici chaque phrase, en plus de faire preuve d'une intelligence acérée sur la nature humaine, semble extraite d'un long poème en prose, tant les images sont belles, les comparaisons émouvantes, les métaphores sensibles. Avec une grâce rare, Jacobsen peint le portrait d'un homme repu de rêve et qui ne connait que la déception, d'une génération qui à force d'idéal passe à côté de la vie, d'une humanité qui voudrait jouer au Grand mais n'est qu'un enfant abandonné et fragile. Douces et banales tragédies. En attendant que les choses changent, semble soupirer Jacobsen, faisons de notre malheur une chance, et profitons de la fugacité des choses, puisque la beauté n'est belle que de ne pouvoir durer.
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Marie Grubbe

Vie et destin de Maria Grubbe, une vie de femme bien remplie et pleinement vécue, avec ses joies et ses peines, fortunes et infortunes. Vie sentimentale riche et éprouvée d'une femme qui embrasse tout, le meilleur et le pire, qui passe d'un milieu social à l'autre, qui se donne beaucoup de peine, mais pas pour rien. La vie de Marie en plusieurs vies, sa jeunesse protégée, son riche mariage, puis l'irruption inopinée du destin, la roue qui tourne, qui écrase et emporte, changements de situation, revirements, solitude, fuite, errances. Mais aussi le fil rouge, de soie, de laine probablement, bien tressé jamais rompu, de ses rêves et de sa foi, le maintien d'une cohérence, une ligne de conduite, les lignes de sa main. Marie avance en âge et en sagesse, elle comprend qu'il faut passer outre convenances et conventions poursuivre avec courage et instinct sa ferme volonté de bonheur. Elle a sans doute beaucoup en commun avec Gertrud, l'héroïne du film éponyme de Dreyer. L'atmosphère du livre m'a souvent évoqué l'univers de la peinture néerlandaise, certains tableaux de Vermeer, ou de Pieter de Hooch, où l'on entrevoit une cour, un intérieur, un sol en damier noir et blanc, la présence fidèle et complice, réconfortante, des objets familiers, un lit, un pot de chambre, un balai contre un mur. Une fenêtre ouverte, une porte entrebâillée, laissant deviner une femme: lisant une lettre ou travaillant, dentelière ou laitière, ou assoupie, la tête appuyée sur la main. Un univers paisible et ordonné, immobile presque et très concret. C'est Rilke qui m'a mis sur la piste de cet auteur, dont je n'avais jamais entendu parler. Il en dit beaucoup de bien dans ses Lettres à un jeune poète. Je lui en suis reconnaissante. Plus que ça.

"De tous mes livres peu me sont indispensables : deux sont toujours parmi les choses à ma portée, où que je sois. Ici même ils sont près de moi. Ce sont : la Bible et les livres du grand poète danois Jens Peter Jacobsen. À propos, connaissez-vous ses œuvres ? Vous pouvez facilement vous les procurer. Une partie en a paru, très bien traduite, dans la Bibliothèque Reclam. Procurez-vous le petit volume Six nouvelles et le roman Niels Lyhne. Commencez par la première nouvelle, qui a pour titre Mogens. Un monde vous saisira : le bonheur, la richesse, l’insondable grandeur d’un monde. Vivez quelque temps dans ces livres, apprenez-y ce qui vaut, selon vous, d’être appris ; mais surtout aimez-les. Cet amour vous sera mille et mille fois rendu, et quoi que devienne votre vie, il traversera, j’en suis certain, le tissu de votre être, comme une fibre essentielle, mêlée à celles de vos propres épreuves, de vos déceptions et de vos joies."

Ainsi soit-il...
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Niels Lyhne

Niels Lyhne est un roman d'apprentissage dans lequel le personnage tente de donner un sens à sa vie, tout en s'affranchissant de la foi de ses ancêtres – il célèbre la nature sans pour autant y voir la manifestation d'une providence, comme si l'homme était constamment confronté à des forces contraires et arbitraires – des rêves et des illusions qui consolent. A l'amour et l'amitié se succèdent souvent les drames et les déceptions, le sentiment d'une solitude infinie. le style de Jacobsen est plein de délicatesse et de sensualité mais aussi marqué par une profonde mélancolie et une vision tragique. Il orne son intrigue de réflexions pénétrantes qui donnent à son récit une dimension philosophique et poétique autant que romanesque. Et l'émotion, à chaque page, affleure, en sorte qu'il est difficile de ne pas en être bouleversé.
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Niels Lyhne

Fabuleux ! pour ce livre je donnerais tout Flaubert. Ecriture limpide, sans effets de style (c'est une traduction de Mme R. REMUSAT).



Ce roman traite, à travers les différents points de vue incarnés par les personnages, des rapports de la poésie et de la réalité, et finalement, en filigrane, des rapports de la poésie et de Dieu.



Niels Lyhme, le héros de JACOBSEN est poète dans l'âme. Niels Lyhme est athée aussi, mais d'un athéisme ni borné, ni ricanant : c'est un athéisme qui est une quasi-croyance et qui s'accompagne d'une vision poétique du sens de la vie, de la nature, de la souffrance, de l'amour et de la mort. Et du don de soi.



Après lui avoir fait perdre successivement sa femme et son enfant, Jacobsen écrit de Niels : "Il avait abandonné son drapeau. En effet, ces grands mots, athéisme et sainte cause de la vérité, n'étaient que des mots pompeux décernés à cette chose si simple : accepter la vie comme elle est avec ses inéluctables lois."



En faisant un saut au-dessus de l'abîme, j'oserai pour ma part, ajouter que la vie avec ses inexorables lois sont un attribut divin car la Nature selon Spinoza, c'est Dieu.



Spinoziste, JACOBSEN ? Peut-être.



Niels a abandonné toute revendication non religieuse (son athéisme est une croyance) en même temps que ses prétentions à devenir poète : à son insu, il s'est fait caisse à résonance pour autrui et lui-même, sa vie est devenue poésie comme son athéisme est devenu foi.



Niels a aimé, beaucoup.



Niels Lyhme est une grande oeuvre, le livre préféré de Rilke.

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Mogens

Jens Peter JACOBSEN était botaniste et poète : l'ensemble des nouvelles regroupées sous le titre de "Mogens"

l'attestent. Elles sont sept à entremêler la description de la nature et celle du sentiment amoureux, qui se correspondent comme l'écrin et la perle, et mieux encore, tissent des liens mystérieux.

Toutes sont belles ; mais parmi ces merveilles, deux m'ont tout particulièrement plu : "Là eussent dû être des roses" et "Madame Fonss". On y touche au sublime.

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Marie Grubbe

Sublime.
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Niels Lyhne

Je viens de terminer la lecture de ce classique de la littérature danoise : Niels Lyhne de Jens Peter Jacobsen.

C'est indubitablement un livre remarquable et je regrette de ne pas l'avoir apprécié à sa juste valeur. Je l'ai lu dans une période d'activités et de voyages et ce n'est assurément pas un livre qu'on emporte avec soi pour le lire après une journée de randonnée. Ni une lecture de plage.

Mais ce classique du romantisme où le héros s'initie à la vie et en cherche le sens dans l'amour, l'amitié, l'art, la nature et la famille est écrit tout en poésie et en profondeur.



Un extrait :

"- Il n'y a pas de Dieu, et l'homme est son prophète, dit Niels avec amertume et tristesse.

- Oui, n'est-ce pas ? dit Hjerrild railleusement ; puis, après un silence : l'athéisme est cependant terriblement insipide et, à la fin du compte, son but n'est qu'une humanité sans illusion. La foi en un Dieu qui gouverne et qui juge, voilà la dernière des grandes illusions de l'humanité, et quand cette illusion aura disparu, que restera-t-il ? Ah !oui, je sais, elle sera devenue plus raisonnable ! En sera-t-elle pour cela plus riche et plus heureuse ? Je ne le pense pas.

- Mais, s'écria Niels Lyhne, ne comprenez-vous donc pas que le jour où l'humanité pourra librement triompher, Dieu n'existant plus, ce jour-là verra naître, comme par enchantement, un ciel nouveau et une terre nouvelle ? Alors, seulement, le ciel deviendra l'espace libre et infini, à la place de cette menace sur nos têtes ! La terre enfin nous appartiendra, comme nous appartiendrons à la terre lorsque l'autre monde obscur de béatitude ou de tourments aura éclaté comme une bulle ! La terre sera notre véritable patrie, le pays réel de notre coeur, où nous ne serons plus des étrangers invités pour quelques misérables années ; l'Eternité nous appartiendra. Quelle intensité prendra la vie qui, en elle-même, contiendra tout sans rien espérer d'extérieur à elle ! L'immense courant d'amour qui monte maintenant vers le Dieu, objet de nos croyances, se répandra sur la terre lorsque le ciel ne sera plus qu'un désert ; ce courant s'épanchera amoureusement sur toutes les vertus et les qualités humaines dont nous avons orné la divinité pour la rendre digne de notre amour : bonté, justice, sagesse ! qui pourra les énumérer toutes ? Ne comprenez-vous pas toute la noblesse dont sera revêtue l'humanité, lorsque, libre, elle pourra vivre sa vie et mourir sa mort sans crainte d'enfer ou espoir de ciel ? Elle ne redoutera plus qu'elle-même et en elle seule elle mettra ses espérances."





Si vous aimez la littérature romantique, ce livre en est l'un de ses chefs-d'oeuvre.

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Niels Lyhne

Comme la majorité des francophones, j'ai rencontré Jacobsen et son roman, Niels Lyhne, grâce à R. M. Rilke qui conseille cette lecture à un jeune poète qui s'interroge sur ses aspirations littéraires. Car le jeune Niels est un poète, bercé dès le biberon par les récits merveilleux d'une mère angoissée par le prosaïsme austère de la réalité. Mais cet idéaliste ne parvient pas à passer le difficile cap de l'accomplissement créatif. Jamais satisfait de son travail, glissant peu à peu dans la solitude, Niels est constamment confronté aux inadéquations de ses désirs avec le réel.

Prolongeant la veine romantique, le style de Jacobsen est prolifique et chatoyant, tellement empreint de grandiloquence lyrique qu'il frôle parfois le cliché.
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Niels Lyhne

Une belle prose poétique. Le parcours d'un jeune homme qui est le miroir du poéte qui est en chacun de nous. Une réflexion délicate et poétique sur la vie, l'amour la mort et Dieu. C'est un livre que je relirai plusieurs fois avec autant de plaisir esthétique qu' existentiel.
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Marie Grubbe

Le roman de JP Jacobsen est un portrait assez fidèle de Marie Grubbe, noble danoise du XVIIè siècle, dont la vie a inspiré plusieurs écrivains danois. D'abord mariée à un bâtard du roi, puis à un homme de la petite noblesse, et enfin à un simple paysan, Marie Grubbe cherche avant tout à suivre la voie de son cœur, et n'accepte aucune limite pour se plier aux conventions. Elle n'hésite pas à sacrifier la vie dorée de la cour pour vivre conformément à ce que lui dicte sa conscience. S'il n'y a, dans la narration de JP Jacobsen, rien de révolutionnaire, ce sont ses descriptions qui retiennent l'attention. Il est parfois décrit comme celui "qui peint avec les mots". D'ailleurs, le sous-titre danois, Scènes d'intérieur du 17è siècle, en est la preuve manifeste. Aux pesants intérieurs danois s'opposent les descriptions plus légères des jardins, dont les tonnelles ouvertes vers le ciel appellent à la rêverie. Très joli roman historique, certes sans grande surprise, mais avec un charme fou.
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Niels Lyhne

Niels Lyhne est un jalon important dans la littérature danoise du XIXè siècle, parfaitement ancré dans ce qu'on appelle la "percée moderne" initiée par Georg Brandes, même si, semble-t-il, ce dernier n'a pas apprécié le roman. On suit le parcours d'un homme, une sorte de rêveur pourrait-on dire à première vue, mais porté par un désir de vivre, et qui ne s'accommode pas de la platitude de la vie quotidienne. Elevé par une mère férue de poésie, mais coincée dans une petite ville jutlandaise, Niels vise toujours plus haut, plus beau, mais sans se mentir. Pour lui, l'humanité se leurre en s'inventant des dieux qui ne sont là que pour la rassurer, en vain. A Niels sera refusé tout bonheur : les amours lui glisseront entre les mains, sa carrière de poète ne dépassera pas le stade du projet, et ses amitiés seront trahies. Il est difficile de ne pas faire le rapprochement entre le personnage et l'auteur, chantre du darwinisme et de l'athéisme dans un Danemark encore empreint de protestantisme luthérien. En relisant ce texte que j'avais lu la première fois il y a25 ans, j'ai été surpris d'y découvrir quelques considérations sur la statut de la femme, construction sociale artificielle voulue par l'homme, sorte d'idéal inatteignable, voulu pour être figé, et dont je ne me rappelais pas. Un texte à découvrir.
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Mogens

Il s'agit d'un recueil de six nouvelles, dont une inachevée. La première, qui donne son titre au recueil, est un hymne à la vie vers laquelle le héros revient après avoir vécu une crise métaphysique et morale qui l'a mené au bord de la folie. J'ai beaucoup aimé "Madame Fonss" que j'ai trouvée très moderne pour l'époque (1882). C'est l'histoire d'une femme, veuve, qui retrouve le grand amour de jeunesse qu'elle n'avait pas pu épouser et qui décide de se marier enfin avec lui, même si cela lui coûte sa relation avec ses enfants qui n'acceptent pas ce remariage. Quel courage ! Quelle conscience de ce qu'elle se doit !
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Niels Lyhne

Très grand livre découvert également par les lettres à un jeune poète de Rilke.

Et le moins qu'on puisse dire c'est que je n'ai pas été déçu. Histoire d'un jeune danois pas croyant et qui aura bien des désagréments en amour ayant du mal à marier ses ambitions avec les destins des femmes rencontrées.

C'est très bien écrit et traduit et je le conseille fortement.

Lecture très forte avec des personnages bien construits et profonds.
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Marie Grubbe

Je sors partagée de cette lecture. Si je suis contente d'avoir découvert un auteur qui fut une référence à son époque, je ne sais pas trop ce qu'on en retient lorsqu'on le lit en 2022. J'ai l'impression que beaucoup de pistes sont lancées vers le lecteur, mais que finalement aucune n'est vraiment exploitée, et que l'on se retrouve avec une narration classique de faits qui s'enchaînent, seulement entrecoupée de romantiques (et certes, réussies) descriptions de la nature. Et c'est dommage, car les quelques incursions de "folie" auraient vraiment pu apporter une tout autre dimension à ce roman ; je reste sur ma faim.
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Niels Lyhne

J’ai découvert l’existence du roman Niels Lyhne dans l’Art de la joie (ô merveille), et j’ai immédiatement eu le désir ardent de le lire en apprenant qu’il était le livre de chevet de son héroïne Modesta : « Tu as encore Niels Lyhne ? — Bien sûr, je le garde toujours sur ma table de nuit. — Moi aussi, à la place de la Bible de grand-mère Valentina. ».



Désir devenu nécessité suite à la lecture de l’éloge qu’en fait Rainer Maria Rilke sur la 4ème de couverture : « De tous mes livres peu me sont indispensables : deux sont toujours parmi les choses à ma portée, où que je sois […] Ce sont : la Bible et les livres du poète danois Jens Peter Jacobsen ».



Vous imaginez les attentes qui étaient les miennes. La comparaison renouvelée de Niels Lyhne avec un livre saint laissait présager qu’il était un absolu de sagesse et de littérature.



Ces attentes ont été déçues pendant les deux premiers tiers de ma lecture. J’ai trouvé cette trop longue phase d’installation du récit indigeste. Le développement de la psychique de Niels, de sa compréhension du monde et de ses relations de tout ordre sont éclipsées par des descriptions trop nombreuses et par une plume ampoulée. Il est toujours difficile d’évaluer le rôle de la traduction là-dedans. Néanmoins, j’ai eu le sentiment qu’on tentait de nous convaincre de la soi-disant nature poétique de notre héros par un style exagérément recherché plutôt que par les impressions singulières qu’il pourrait tirer du monde qui l’entoure.



Il faut aussi reconnaitre que je n’étais personnellement pas dans les meilleures dispositions mentales pendant cette première grosse moitié de lecture. Cette réflexion m’est venue en refermant le livre et en ayant l’impression d’une inexplicable inégalité entre la partie que je critique ici sans trop de nuances et une fin brillantissime de subtilité et de justesse. Je fais donc amende honorable par précaution.



J’avance donc péniblement dans Niels Lyhne, sans bien me figurer comment nous pourrions basculer dans une œuvre qui nous aspire, fige notre cou dans une posture courbée, et fait courir nos yeux sur les pages et les aiguilles sur nos montres.



Et comme si seule une rupture pouvait ressusciter ce roman, c’est finalement une ellipse qui lance réellement cet ouvrage. Tout se décante au chapitre 11 qui fait suite à ce saut dans le temps, grâce à la progression induite dans le récit, mais surtout grâce au retournement des priorités littéraires. La lourdeur des tournures cède la place à la profondeur des réflexions, la plume reprend son rôle et s’asservit au fond. Et nous, lecteurs, pouvons admirer la finesse avec laquelle sont traités les changements traversés par les personnages: les inévitables désillusions qu’engendre l’Amour, l’expérience qui rétrécit les idéaux et les espérances, et avec cela l’angoisse face au temps qui passe.



Ces ellipses successives me sont apparues comme un refus d’obstacle, celui d’être capable de décrire l’imperceptible évolution des sentiments et des personnalités à l’échelle de temps la plus fine. Cet art dans lequel Proust excelle.



Mais le dernier tiers demeure époustouflant, addictif, et m’a fait hésiter à mettre une meilleure note. La concurrence est cependant trop rude dans la catégorie des romans d’apprentissage pour céder à cette tentation. Rien ne dit que je ne changerai pas d’avis à la lumière d’ une relecture future.



Finalement, peut-être que 250 pages ne suffisent pas pour un roman d’apprentissage. Et c’est un argument que je ne pensais jamais utiliser, moi qui ai un a priori négatif concernant tous les livres de plus de 800 pages (a priori parfois démenti, évidemment).



Je termine en soulignant que Niels Lyhne est un livre fait par les femmes que l’on y rencontre. La divine et inaccessible Edele, la séduisante et affranchie Mrs. Boye, l’évidence Fennimore pourtant si complexe, et Gerda en constante évolution, assoiffée de savoir et de sentiments, sont toutes à leur façon les personnes qui m’ont le plus marqué et inspiré. Et c’est peut être parce qu’elle se retrouvait un peu en chacune d’entre elles que Modesta les gardait toutes près de son lit.

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