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3.72/5 (sur 67 notes)

Nationalité : France
Né(e) à : Caen , 1972
Biographie :

Jérôme Aumont est né en 1972 à Caen. Un empêchement est son premier roman

Source : Bourgois
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Jérôme Aumont vous présente son ouvrage "Un empêchement". Parution le 17 août 2023 aux éditions Bourgois. Rentrée littéraire automne 2023. Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2882067/jerome-aumont-un-empechement Note de musique : © mollat Sous-titres générés automatiquement en français par YouTube. Visitez le site : http://www.mollat.com/ Suivez la librairie mollat sur les réseaux sociaux : Instagram : https://instagram.com/librairie_mollat/ Facebook : https://www.facebook.com/Librairie.mollat?ref=ts Twitter : https://twitter.com/LibrairieMollat Linkedin : https://www.linkedin.com/in/votre-libraire-mollat/ Soundcloud: https://soundcloud.com/librairie-mollat Pinterest : https://www.pinterest.com/librairiemollat/ Vimeo : https://vimeo.com/mollat
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Citations et extraits (17) Voir plus Ajouter une citation
... Tu ne peux pas tomber éperdument amoureuse d'un garçon décérébré mais avec un corps de rêve et, la semaine d'après, lui faire la gueule parce qu'il passe son temps libre entre le stade et la retransmission de matchs à la télé ! Tout ça c'est couru d'avance.

... Tu veux qu'il devienne une version améliorée de lui-même, parce que tu ne comprends rien à la VO, parce que tu ne veux pas faire l'effort de lire les sous-titres. Si tu veux un mec qui s'occupe de toi ... ne va pas t'imaginer que tu peux choisir n'importe quel mec bien foutu...
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Avant de devenir une femme insatisfaite je fus d'abord une enfant modèle, puis une étudiante accomplie. J'ignore dans quelle mesure une étape à influencé l'autre. Et je ne suis pas certaine que l’on puisse parler ici de réussite. Cela ressemble davantage à une longue série de sacrifices et de désillusions. Pas mal d’amitiés laissées sur le bas-côté aussi. p. 184
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(Les premières pages du livre)
MATHIEU
Je suis l’homme qui a tout perdu. L’homme qui a
échoué. Je suis l’homme échoué. Faut-il que je me lève? Faut-il que j’affronte dorénavant chaque nouvelle journée pesante et prétende qu’elle m’est supportable?
J’ai tant fait semblant. Tant fui la vérité. Et voilà qu’elle me rattrape, me traque, me détraque. Je suis l’homme à qui l’on a tout donné. L’homme abandonné. Je suis terrifié. Je t’ai perdu Xavier. Je suis désolé.
J’avais tout imaginé. Craint le pire. Mais jamais je n’aurais pu imaginer te perdre comme ça. Depuis le coup de fil de cet imbécile de gendarme, je n’ai pas fermé l’œil une seule seconde. Impossible de trouver le sommeil. Je
ne suis bon qu’à ressasser tout ce que j’ai raté, toutes les chances que je n’ai pas su saisir. Toutes les fois où la perspective d’un énième mensonge m’a privé de toi. Car ce sont bien mes mensonges qui m’ont privé de toi. Et
l’imbécile, c’est moi. Un imbécile malheureux.

2
Ma mère, économe en tout, avait pour habitude de me dire que j’avais presque trop d’amour à donner. L’axiome me semblait incongru. Je ne voyais pas bien à quelle réserve naturelle de sentiments elle faisait référence. Mais je n’ai
jamais douté de ma capacité à aimer. Elle a toujours été là, vivante, brûlante. Pour quelle raison aurais-je soudain dû m’économiser ? Mettre de côté pour plus tard ? Tout cela relevait d’un postulat par trop comptable. On aime
et puis on verra bien où cela nous mène. On ne peut pas toujours parier sur l’avenir. On se met à nu et, quand vient le moment de se rhabiller, on rassemble gauchement ses oripeaux, on compte ses abattis. On s’échappe et on se reconstruit comme on peut. Du plus loin que je me souvienne, j’ai très tôt vu les obstacles et les chicanes fondre sur moi. Mais j’étais décidé à ne pas me laisser décourager. Au sortir d’une enfance ordinaire, ni douloureuse, ni tout à fait épanouie, je me suis composé un personnage d’adolescent mystérieux et discret. Je crois
avoir vite compris que mon adolescence ne serait qu’un brouillon de l’âge adulte dont j’observais à la loupe les quelques spécimens que j’avais sous les yeux : mon père, ma mère, leur cercle d’amis, mes oncles et mes tantes, les
voisins. Je ne cherchais pas à les imiter, mais je ne voyais pas non plus l’intérêt de les contrarier pour le plaisir ou de me faire remarquer pour de mauvaises raisons.
Je n’y mettais pas plus d’enjeux que ça. Pour l’essentiel, j’attendais que cette période ingrate se passe d’elle-même, sans laisser trop de séquelles, de traumatismes ou de mauvais souvenirs. J’ai dû commettre un ou deux actes
de bravoure, mais davantage pour prouver que j’étais un enfant puis un adolescent comme un autre. Je connaissais le terrain de jeu, ses règles. Mes parents les avaient très tôt explicitées, détaillant les pénalités encourues. Je gardais donc l’essentiel pour moi. Ce que j’ai, plus tard, identifié comme une forme de trouble originel. Le tableau était presque parfait, et j’avais le sentiment d’accomplir un sans-faute. Je respectais les consignes, mettais une
énergie considérable à faire mien le protocole, à ne pas décevoir, à me rendre utile, à occuper une place. C’est seulement le soir, regagnant ma chambre bien rangée puis me glissant sous les draps, que je sentais mon corps se relâcher et m’échapper. J’avais alors l’impression d’être
dépossédé de mes résolutions, de tout ce qui rendait ma vie domptable et prévisible. Comme si un changement de garde s’opérait et que, profitant de ce moment d’inattention, un petit malin prenait les rênes pour me soumettre
au supplice ou, plus exactement, à la tentation.
Je venais d’avoir 17 ans. C’était un soir de printemps.
Une famille avait emménagé dans la maison d’à côté peu de temps auparavant, une petite meulière dont le pignon tutoyait la fenêtre de ma chambre. Mathilde et Paul M., la quarantaine comme mes parents, et Stéphanie, leur fille unique, vinrent se présenter. Restés sur le pas de la porte, ils étaient les premiers intimidés par cette visite qui trahissait l’envie maladroite et trop manifeste de sympathiser avec leurs nouveaux voisins. Un peu pris au dépourvu par cette initiative, mes parents firent leur possible pour ne pas accueillir les M. trop fraîchement.
Je m’efforçais quant à moi de donner une raison d’être au timide sourire de Stéphanie, que l’on avait traînée là malgré elle. Mais pourquoi est-ce son père que je ne pouvais quitter des yeux ? Et pourquoi la vision de cet homme me nouait-elle ainsi l’estomac? Qu’était-il en train de se passer? Ce rire nerveux et ces picotements dans les mains. Cette envie de prendre mes jambes à
mon cou, de détaler comme un lapin. Et pour aller où d’abord? J’ignore ce que je laissais deviner de mon trouble, mais je crois qu’il ne me quitta plus. Cet homme, par sa simple présence, me faisait changer de comportement de manière incompréhensible. Irrationnelle. Et
je ne parvenais pas à savoir si tout cela procédait d’une quelconque hostilité ou d’autre chose, une gêne.
Fils unique, j’avais très tôt appréhendé les adultes sans le filtre d’un frère cadet ou d’une sœur aînée qui vous cantonne à la table des petits. Personne ne se préoccupait de savoir si je m’ennuyais ou s’il était pertinent que mes
oreilles traînent trop près des conversations lors des repas de famille ou des apéritifs décontractés entre voisins.
On baissait juste la voix de temps en temps, quand elles prenaient un tour grave ou grivois. Les adultes qui m’avaient vu grandir et que j’avais vu vieillir faisaient donc partie de mon environnement naturel. Je ne comprenais pas pourquoi Paul M. ne s’inscrivait pas dans ce paysage.
Quelque chose coinçait. Il n’était ni un modèle, ni un repère, alors qu’était-il ? Un soir que je me caressais dans ma chambre, la réponse s’est imposée d’elle-même.
En général, je montais me coucher après le journal télévisé, sauf le mardi et le samedi soir où j’avais le droit de regarder le film avec mes parents. J’étais censé réviser ou lire un peu avant l’extinction des feux à 22 heures.
Ma mère ne montait jamais avant la fin du film. Cela me laissait le temps de me masturber une, deux, voire trois fois les bons soirs. J’avais sacrifié une paire de chaussettes dans laquelle je me vidais les couilles. Je n’aimais pas trop
la sensation du sperme chaud sur mon ventre. Je les roulais ensuite en boule sous mon lit, où régnait un bazar suffisant pour que j’estime mon secret bien gardé. Le lendemain matin, les chaussettes étaient un peu raides et j’étais
sans doute le seul à ne pas remarquer l’odeur âcre qu’elles dégageaient dans toute la chambre. Mais ma mère ne m’a jamais fait la moindre réflexion. Au début, je venais très
vite, sans même avoir besoin de fermer les yeux. Puis des images commencèrent à apparaître. Un visage bientôt. Un corps. Un soir, j’ai installé ma chaise de bureau devant la fenêtre, et là, les yeux braqués sur la salle de bains de la maison d’à côté, j’ai attendu. J’ai attendu qu’apparaisse Paul M. Tapi dans le noir, soustrait à tout jugement extérieur, je me suis préparé au seul spectacle qui valait toutes les soirées télé. La vision de cet homme de 40 ans, nu dans sa salle de bains avant d’enfiler ce pyjama qu’un
jour, le cœur tambourinant dans ma poitrine, je finirais par aller décrocher du fil à linge. Sans doute un dimanche après-midi qu’un match de foot ou un grand prix de Formule 1 avait vidé le quartier, hommes vautrés dans leur canapé, femmes courbées sur leur planche à repasser.
Était-ce pour me racheter à mes propres yeux que je me mis ensuite en tête de séduire sa fille Stéphanie? Ou me rapprocher de celui dont j’enfilais désormais le pyjama et en frottais l’étoffe contre mon sexe, les yeux collés au
carreau ? Je me souviens seulement que Paul accueillit cette idylle adolescente avec résignation et bienveillance, voyant en moi un garçon sérieux, mature et responsable.
Ce petit jeu dura un été je crois. J’avais 17 ans et je laissais déjà une indicible schizophrénie s’emparer de moi.
Stéphanie et moi passions nos après-midi à errer dans les rues toutes identiques de notre petite ville de banlieue, parfois en compagnie d’autres filles ou garçons de notre âge. Sans but mais sans vraiment ressentir l’ennui pour
autant. Elle était belle comme un cœur, douce, sereine, drôle. J’aurais voulu être amoureux. Être à la hauteur.
Je serrais sa main, sa taille ou son épaule comme si ma vie en dépendait. Comme si quelque chose allait forcément finir par se passer, comme si ma détermination allait payer, congédier mes mauvaises pensées. Je me dégoûtais. Je haïssais ce simulacre auquel je ne voyais aucune issue. La journée, je parvenais par je ne sais quel miracle à ne pas me laisser gagner par la vision nocturne de son père nu dans leur salle de bains, à la lumière d’un
tube fluorescent qui rendait sans doute sa peau un peu plus blanche qu’elle ne l’était en vérité. Mais, le soir, rendu à l’intimité de ma chambre, c’est bien à lui que je pensais, et son corps que j’explorais dans ce demi-sommeil honteux et douloureux.
À la fin de l’été, le père de Stéphanie est passé à la maison un soir. Je bouquinais dans un coin du salon. Je ne l’ai pas entendu sonner. Et il était là, dans l’entrée, face à ma mère. Il souriait, un peu décoiffé je crois. D’un geste maladroit et levant les yeux au ciel, maman m’a fait signe d’ôter le casque que j’avais sur les oreilles :
— Paul, enfin, Monsieur M. est gentiment venu t’inviter à partir en week-end avec eux en Bretagne. Cela te fera du bien de voir la mer avant la rentrée des classes.
Ça te dit mon grand ?
— Si ça me dit ? Plutôt deux fois qu’une ! Merci,
c’est trop gentil ! Stéphanie est au courant ?
— Évidemment, gros nigaud ! Mais c’est une idée de Monsieur M., tu peux donc le remercier en effet. Il ne va pas vous déranger au moins, vous êtes sûr ?
— Non, au contraire, ça nous fait plaisir. C’est un bon gars votre fils, vous savez. Et puis, c’est seulement
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Pour peu enviable que soit mon sort à présent, je te plains de toutes mes forces. Tu vas devoir continuer à vivre dans ton bel appartement bourgeois, avec ta femme délicieusement dépressive, tes week-ends sur l’île de Ré chez tes beaux-parents, tes déjeuners professionnels interminables, tes rares soirées «entre mecs». Toutes ces obligations qui scandaient ta vie et te tenaient par là même éloigné de moi avec une cruauté métronomique. Tout ce qui rendait au reste du monde ton existence respectable et bien rangée. Cet emploi du temps, tu vas désormais devoir continuer à le respecter comme si tu avais toujours tout, alors que toi et moi savons que tu as tout perdu. p. 92
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Après avoir pris possession de tout l'espace, après l'avoir annexé pendant dix-huit ans, notre enfant nous le restituait du jour au lendemain, comme une scène de théâtre sur laquelle plus aucun acteur n'osait monter de peur d'y oublier son texte. Son absence trônait au milieu de chaque pièce, arrogante, indéboulonnable, fière de son œuvre. Tout était à reconstruire : le volume sonore, le rythme de nos soirées, le samedi matin, la chambre vacante.
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Oui, le désir se dissout dans les noces de plomb, de porcelaine ou d'opale. Mais on est là l'un pour l'autre. On a construit une histoire, un semblant d'équilibre. On est lié par une forme de contrat. Et quand bien même on sait avoir franchi un cap, à partir duquel c'est le sommeil qui vous offre la plus langoureuse des étreintes, c'est abandon-là parvient à vous convaincre qu'il est le plus précieux de tous.
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Une soirée avait suffi à faire ressurgir un pan entier de ma vie, de ce passé bafoué, renié,enseveli. Une petite soirée et j en étais à rallumer ce que j avais cru éteint. Comment
avais-je pu espérer être débarrassé de cette part de moi qui avait façonné toutes les autres ?
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L'affaire était réglée et ma décision prise. Mon amour mort jamais ne serait exhumé. Il n’était nullement question d’homosexualité. J'avais rencontré, puis soigné et accompagné un être qui m'avait touché, que j'avais aimé, mais finalement de manière presque platonique. (...) Non, je n'étais pas gay, je ne l’avais jamais été. Non, je n'étais pas PD, j'étais un mec, un vrai, rien ne me détournerait du droit chemin. J’allais fonder une famille, avoir des enfants. J’allais avoir une existence rangée, normale. Rien ne dépasserait, Je ne mangerais pas de ce pain-là. Pas moi. J’allais raccompagner Marianne chez elle après cette étrange soirée, clouer d’un coup le bec à Nathalie, couper court à toute spéculation, reprendre le droit chemin que je n’aurais jamais dû quitter, le sillon dont je n'aurais jamais dû m'écarter. Vivre, c’est choisir. Je choisissais de vivre et de donner la vie. C'était dans l'ordre naturel des choses. Je devais mettre un terme à cette période de ma vie consacrée à de vaines éjaculations, à de mortes amours. Elle s’appellerait Marianne ou peut-être bien Marie. J’apprendrais à la désirer, à l’aimer, à la pénétrer, Cela ne devrait pas être si compliqué. p. 34-35
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On est toujours seul face à ce que la vie a à nous offrir et à nous prendre. Que l’on est condamné à tracer une route médiane entre celui que l’on pense être et les chemins de traverse que l’on découvre à mesure que l’on avance. Et une autre part de moi est persuadée que pour connaître vraiment quelqu’un, on ne peut négliger l’enfant qu’il a été, ses peurs, ses doutes, ses rêves. 
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Une soirée avait suffi à faire ressurgir un pan entier de ma vie, de ce passé bafoué, renié, enseveli. Une petite soirée et j’en étais à rallumer ce que j’avais cru éteint.
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