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Citations de Joachim Du Bellay (185)


Il n’est feu si ardent qu’un feu qui est enclos,
Il n’est si fâcheux mal qu’un mal qui tient à l’os,
Et n’est si grand douleur qu’une douleur muette.
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Ô marâtre nature (et marâtre es-tu bien,
De ne m’avoir plus sage ou plus heureux fait naître),
Pourquoi ne m’as-tu fait de moi-même le maître,
Pour suivre ma raison et vivre du tout mien?

Je vois les deux chemins, et ce mal, et de bien :
Je sais que la vertu m’appelle à la main dextre,
Et toutefois il faut que je tourne à senestre,
Pour suivre un traître espoir, qui m’a fait du tout sien.

Et quel profit en ai-je ? Ô belle récompense !
Je me suis consumé d’une vaine dépense,
Et n’ai fait autre acquêt que de malet d’ennui.

L’étranger recueillit le fruit de mon service,
Je travaille mon corps d’un indigne exercice,
Et porte sur mon front la vergogne d’autrui.
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L'habitude s'est perdue de lire intégralement des recueils de poésie : l'école et la paresse nous ont habitués à lire un peu au hasard, ou à nous contenter de morceaux choisis. Or Les Regrets, comme Les Fleurs du Mal et certains autres recueils particuliers de notre littérature (mais non tous) est un ensemble de poèmes construit selon une progression, un développement thématique, et dans le cas des Regrets, des itinéraires géographiques de voyage (dans Rome, de Rome à la France, etc). Si chaque sonnet est comme un "arrêt sur image", il appelle sa suite et commente celui qui l'a précédé. Donc une lecture progressive s'impose, même lente, et peut-être l'accompagnement d'un commentaire comme celui que proposent les éditions Folio, où l'on trouvera différentes manières de traverser les Regrets, selon les thèmes, et de lire le livre comme l'auteur voulait qu'on le lise.
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Je n'écris point d'amour, n'étant point amoureux,
Je n'écris de beauté, n'ayant belle maîtresse,
Je n'écris de douceur, n'éprouvant que rudesse,
Je n'écris de plaisir, me trouvant malheureux.
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Les Regrets, XC (extrait)

Ne pense pas (Bouju) que les Nymphes Latines
Pour couvrir leur traison d'une humble privauté,
Ny pour masquer leur teint d'une faulse beauté,
Me facent oublier noz Nymphes Angevines.
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Les Regrets, XXV (extrait)

Malheureux l'an, le mois, le jour, l'heure, et le poinct,
Et malheureuse soit la flateuse esperance,
Quand pour venir icy j'abandonnay la France :
La France, et mon Anjou, dont le désir me poingt.
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Les Regrets, XIX (extrait)

Je me pourmene seul sur la rive Latine,
La France regretant, et regretant encor
Mes antiques amis, mon plus riche tresor,
Et le plaisant sejour de ma terre Angevine.
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Pierre de RONSARD (1524-1585)


Mignonne, allons voir si la rose

A Cassandre

Mignonne, allons voir si la rose
Qui ce matin avoit desclose
Sa robe de pourpre au Soleil,
A point perdu ceste vesprée
Les plis de sa robe pourprée,
Et son teint au vostre pareil.

Las ! voyez comme en peu d'espace,
Mignonne, elle a dessus la place
Las ! las ses beautez laissé cheoir !
Ô vrayment marastre Nature,
Puis qu'une telle fleur ne dure
Que du matin jusques au soir !

Donc, si vous me croyez, mignonne,
Tandis que vostre âge fleuronne
En sa plus verte nouveauté,
Cueillez, cueillez vostre jeunesse :
Comme à ceste fleur la vieillesse
Fera ternir vostre beauté.
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Quand vous serez bien vieille

Quand vous serez bien vieille, au soir, à la chandelle,
Assise auprès du feu, dévidant et filant,
Direz, chantant mes vers, en vous émerveillant :
Ronsard me célébrait du temps que j’étais belle.

Lors, vous n’aurez servante oyant telle nouvelle,
Déjà sous le labeur à demi sommeillant,
Qui au bruit de mon nom ne s’aille réveillant,
Bénissant votre nom de louange immortelle.

Je serai sous la terre et fantôme sans os :
Par les ombres myrteux je prendrai mon repos :
Vous serez au foyer une vieille accroupie,

Regrettant mon amour et votre fier dédain.
Vivez, si m’en croyez, n’attendez à demain :
Cueillez dès aujourd’hui les roses de la vie.

Pierre de Ronsard, Sonnets pour Hélène, 1578
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Marcher d’un grave pas et d’un grave sourcil,
Et d’un grave sourire à chacun faire fête,
Balancer tous ses mots, répondre de la tête,
Avec un Messer non, ou bien un Messer si :

Entremêler souvent un petit E cosi,
Et d’un son Servitor contrefaire l’honnête,
Et, comme si l’on eût sa part en la conquête,
Discourir sur Florence, et sur Naples aussi :

Seigneuriser chacun d’un baisement de main,
Et, suivant la façon du courtisan romain,
Cacher sa pauvreté d’une brave apparence :

Voilà de cette cour la plus grande vertu,
Dont souvent mal monté, mal sain, et mal vêtu,
Sans barbe et sans argent on s’en retourne en France.
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Je me feray sçavant en la philosophie,
En la mathematique, et medecine aussi :
Je me feray legiste, et d’un plus haut souci
Apprendray les secrets de la theologie :


Du luth et du pinceau j’ébatterai ma vie,
De l’escrime et du bal. Je discourais ainsi,
Et me vantais en moi d’apprendre tout ceci,
Quand je changeai la France au séjour d’Italie.

Ô beaux discours humains ! Je suis venu si loin,
Pour m’enrichir d’ennui, de vieillesse et de soin,
Et perdre en voyageant le meilleur de mon aage.

Ainsi le marinier souvent pour tout trésor
Rapporte des harengs en lieu de lingots d’or,
Ayant fait, comme moi, un malheureux voyage.
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Malheureux l’an, le mois, le jour, l’heure et le point,
Et malheureuse soit la flatteuse espérance,
Quand pour venir ici j’abandonnai la France :
La France, et mon Anjou, dont le désir me point.

Vraiment d’un bon oiseau guidé je ne fus point,
Et mon cœur me donnait assez signifiance
Que le ciel était plein de mauvaise influence,
Et que Mars était lors à Saturne conjoint.

Cent fois le bon avis lors m’en voulut distraire,
Mais toujours le destin me tirait au contraire :
Et si mon désir n’eût aveuglé ma raison.

N’était-ce pas assez pour rompre mon voyage,
Quand sur le seuil de l’huis, d’un sinistre présage,
Je me blessai le pied sortant de ma maison ?
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Las, où est maintenant ce mespris de Fortune ?
Où est ce cœur vainqueur de toute adversité,
Cest honneste desir de l’immortalité.
Et ceste honneste flamme au peuple non commune ?

Où sont ces doux plaisirs, qu’au soir sous la nuict brune
Les Muses me donnoyent, alors qu’en liberté
Dessus le vert tapy d’un rivage escarté
Je les menois danser aux rayons de la Lune ?


Maintenant la fortune est maistresse de moy,
Et mon cœur qui souloit estre maistre de soy,
Est serf de mille maux et regrets qui m’ennuient.

De la posterité je n’ay plus de souci,
Ceste divine ardeur, je ne l’ay plus aussi,
Et les Muses de moy, comme estranges, s’enfuyent.
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Je ne veux point fouiller au sein de la nature,
Je ne veux point cercher l’esprit de l’univers,
Je ne veux point sonder les abysmes couvers,
N’y dessigner du ciel la belle architecture.

Je ne peins mes tableaux de si riche peinture,
Et si hauts argumens ne recerche à mes vers :
Mais suivant de ce lieu les accidens divers,
Soit de bien, soit de mal, j’escris à l’adventure.

Je me plains à mes vers, si j’ay quelque regret,
Je me ris avec eux, je leur di mon secret,
Comme estans de mon cœur les plus seurs secretaires.

Aussi ne veux-je tant les peigner et friser,
Et de plus braves noms ne les veux desguiser,
Que de papiers journaux, ou bien de commentaires.
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Ne craignez plus ces oies criardes, ce fier Manlie, et ce traître Camille, qui, sous ombre de bonne foi, vous surprennent tous nus comptant la rançon du Capitole. Donnez en cette Grèce menteresse, et y semez encore un coup la fameuse nation des Gallogrecs. Pillez-moi, sans conscience, les sacrés trésors de ce temple Delphique, ainsi que vous avez fait autrefois : et ne craignez plus ce muet Apollon, ses faux oracles, ni ses flèches rebouchées. Vous souvienne de votre ancienne Marseille, seconde Athènes, et de votre Hercule gallique, tirant les peuples après lui par leurs oreilles, avec une chaîne attachée à sa langue.
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Il me semble (lecteur ami des Muses françaises) qu’après ceux que j’ai nommés, tu ne dois avoir honte d’écrire en ta langue ; mais encore dois-tu, si tu es ami de la France, voire de toi-même, t’y donner du tout, avec cette généreuse opinion, qu’il vaut mieux être un Achille entre les siens, qu’un Diomède, voire bien souvent un Thersite, entre les autres.
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Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage,

Ou comme celui-là qui conquit la toison,

Et puis est retourné, plein d’usage et raison,

Vivre entre ses parents le reste de son âge !



Quand reverrai-je, hélas, de mon petit village

Fumer la cheminée, et en quelle saison,
Reverrai-je le clos de ma pauvre maison,

Qui m’est une province, et beaucoup d’avantage ?

Plus me plait le séjour qu’ont bâti mes aïeux,

Que des palais Romains le front audacieux,
Plus que le marbre dur me plait l’ardoise fine,



Plus mon Loire gaulois, que le Tibre latin,

Plus mon petit Liré, que le mont Palatin,

Et plus que l’air marin la douceur angevine.
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Quand Cicéron et Virgile se mirent à écrire en latin, l’éloquence et la poésie étaient encore en enfance entre les Romains, et au plus haut de leur excellence entre les Grecs. Si donc ceux que j’ai nommés, dédaignant leur langue, eussent écrit en grec, est-il croyable qu’ils eussent égalé Homère et Démosthène?
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Je vis haut élevé sur colonnes d’ivoire,
Dont les bases étaient du plus riche métal,
À chapiteaux d’albâtre et frises de cristal,
Le double front d’un arc dressé pour la mémoire.

À chaque face était portraite une victoire,
Portant ailes au dos, avec habit nymphal,
Et haut assise y fut sur un char triomphal
Des empereurs romains la plus antique gloire.

L’ouvrage ne montrait un artifice humain,
Mais semblait être fait de cette propre main
Qui forge en aiguisant la paternelle foudre.

Las, je ne veux plus voir rien de beau sous les cieux,
Puisqu’un œuvre si beau j’ai vu devant mes yeux
D’une soudaine chute être réduit en poudre.

-SONGE:SONNET 4-
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Pour conclure ce propos, sache, lecteur, que celui sera véritablement le poète que je cherche en notre langue, qui me fera indigner, apaiser, éjouir, douloir, aimer, haïr, admirer, étonner : bref, qui tiendra la bride de mes affections, me tournant çà et là, à son plaisir.
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