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Critiques de John Stuart Mill (21)
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L'Asservissement des Femmes

On en parle désormais à toutes les sauces, partout, pour tout et tout le temps, même quand le sujet s'y prête le moins — récemment j'ai vu un documentaire pour enfants qui traitait des corsaires et de la piraterie au XVIIIe siècle, domaine où je crois pouvoir hasarder sans trop me tromper que les femmes ne jouaient pas un rôle fondamental ni décisif, eh bien les auteurs, pour coller à l'air du temps, se sont sentis obligés d'aller farfouiller loin, loin, loin dans les archives, de retourner toutes les vieilles mottes afin de parvenir à dégoter les deux seules nanas connues dans les annales de la flibuste, femmes dont on ne sait d'ailleurs à peu près rien, si ce n'est qu'elles ont existé, un peu comme il existe des femmes à barbe mais qui, je crois, là encore, sans trop de risque de me tromper, ne sont pas spécifiquement le coeur de cible lorsque l'on évoque la clientèle des barbiers. Bon, bref, c'est devenu la tarte à la crème.



Eh bien malgré cela, malgré ce battage médiatique de tous les instants, malgré ce revirement subit de l'ombre épaisse à l'aveuglante lumière soutenue par de puissants projecteurs (jusqu'à l'overdose, parfois, et, souvent, sans trop de soucis d'à-propos), la question du féminisme et de son histoire, de ses figures historiques et de ses promoteurs, etc. auxquels on accorde à présent tant de place dans les débats de tout type, je trouve que l'on est (collectivement) très injuste, très ingrat, très amnésique vis-à-vis de celui que chaque féministe devrait connaître et révérer quelque part dans son coeur, vis-à-vis de celui qui a eu les couilles, — et chers messieurs, sachez que ça n'est pas ici une insulte ou une taxation de machisme, bien au contraire — en un temps et une époque où ça n'était ni la mode ni dénué de risque, d'aborder publiquement la question de la place faite aux femmes dans un monde dominé exclusivement par les hommes.



De tout temps et en tout lieu, on sait qu'on n'est jamais si bien servi que par soi-même : ainsi les causes des minorités sont le plus souvent et majoritairement défendues par des représentants de la minorité en question. Je ne vais pas commencer à en dresser la liste car elle serait lourde et infinie mais vous voyez ce que je veux dire, je pense.



D'où, là encore, l'injustice et l'ignominie de ne pas célébrer à sa juste valeur, nous toutes qui devrions, en rangs serrés, applaudir grandement et avec force « viva ! » celui qui, en tant qu'homme dans une société d'homme, a eu le courage de plaider notre cause avec à la fois talent et conviction, une attitude qui, ne faisant pas partie lui-même de la minorité pour laquelle il s'exposait, est d'autant plus remarquable, d'autant plus noble et d'autant plus rare. J'ai nommé, le grand, le très grand, le gigantesquissime John Stuart Mill.



On sait que le combat pour l'émancipation des femmes, dès le XVIII et surtout à partir du XIXe siècle, doit beaucoup aux intellectuels anglais, parmi lesquels on peut sûrement citer des écrivains notoires tels que Samuel Richardson, par exemple (qui évoquait la double peine de la violée qui OSAIT porter plainte devant les tribunaux et qui se trouvait le plus souvent, non seulement huée, abandonnée par sa famille et sa communauté religieuse mais — sans quoi ce n'est pas drôle — le plus souvent condamnée tandis que son violeur était relaxé quand il ne touchait pas des dommages et intérêts) ou encore l'inénarrable Charles Dickens, qui a fait la part belle à des héroïnes maltraitées dans la société farouchement machiste et patriarcale de son temps. Mais celui qu'on ne remerciera jamais assez, qu'on ne célèbrera jamais à la place qu'il mérite, pour la force, pour la vaillance, pour la pertinence de ce qu'il a fait, c'est bien lui, John Stuart Mill.



(On me permettra simplement de mentionner, côté français de la Manche, un autre grand oublié parmi les penseurs, à la fois lorsque l'on évoque les Lumières et lorsque l'on débat de féminisme, et qui n'est autre que Marivaux. On le cantonne aux petites pièces bouffonnes et sans trop de portée que l'on fait encore étudier au lycée ici ou là alors que, dès 1729 — c'est notable —, il écrivait une pièce fantastique sur la question du sort réservé aux femmes et qui devait faire réfléchir la gent masculine, à savoir sa pièce La Colonie — fin de la parenthèse, pour celles ou ceux que cela intéresse, vous pouvez vous y reporter.)



Quand on se documente moindrement sur ce qu'était la position de la femme dans la société de 1869 (sachant que l'Angleterre était, de surcroît, l'un des pays les mieux lotis au monde — et de loin — sur cette question, c'est tout dire) on mesure l'étendue du chemin parcouru depuis 150 ans, malgré ou en dépit de toutes les injustices, de tous les fardeaux qui se maintiennent et qui perdurent dans cette quête sans cesse vacillante, sans cesse contestée, dans cette lutte interminable et au résultat toujours incertain dont l'enjeu est la reconnaissance et le respect véritable de l'égalité Hommes/Femmes.



Mill a donc écrit cet essai au soir de sa vie. Il en donne d'ailleurs plus ou moins la raison. Cette conviction était ancrée en lui depuis probablement fort longtemps, mais le fait d'avancer de tels arguments pouvait considérablement lui nuire dans le monde dans lequel il évoluait. Il a donc attendu de ne plus rien avoir à prouver ni à attendre de ses semblables pour lancer cette petite bombe, un peu à la manière de Darwin dix ans plus tôt avec son Origine Des Espèces, qui lui aussi avait retardé longtemps la publication de son brûlot, de peur des conséquences…



C'est donc un essai en quatre gros chapitres, que j'aurais plus volontiers appelés " parties " si j'avais eu à les nommer. Dans le premier chapitre, l'auteur dresse le bilan de la position de la femme dans la société, notamment vis-à-vis du droit et constate qu'elle est ravalée au rang de mineure.



Dans le second chapitre, il examine la position de la femme dans le couple vis-à-vis de son mari et de l'institution du mariage et nous décrit un statut très comparable à celui d'une esclave.



Le troisième chapitre intercède dans la légitimité qu'auraient les femmes à accéder à tous types de métiers et enfin, le dernier chapitre présente les bénéfices pour la société qu'apporteraient l'égalité Hommes/Femmes.



J'ai été littéralement enthousiasmée par les deux premiers chapitres, particulièrement édifiants et bien argumentés. Un vrai exemple de pensée positive et d'intelligence où l'angle d'attaque selon le droit et par de judicieuses comparaisons produit admirablement son effet.



J'ai été en revanche moins convaincue par les deux derniers chapitres, plus spéculatifs et moins tranchants à mon goût d'où mes quatre étoiles seulement sur l'ensemble de l'ouvrage.



Toutefois, je tiens à saluer, avec toute la force, la reconnaissance et l'admiration qui conviennent, cet ouvrage et cet homme, haut perchés dans mon panthéon personnel des ouvrages et des penseurs majeurs, que je conseille à tous, hommes comme femmes — plus hommes que femmes, même —, pour secouer un peu la pulpe qui est sédimentée au fond de chacun de nos crânes paresseux. Mais ce n'est bien évidemment qu'un avis, un avis de femme qui plus est, c'est-à-dire, aujourd'hui comme hier, bien peu de chose, comme le chantait si bien James Brown (𝄞♭♫ This is a man's world...♬♪).
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De la liberté



En ces temps de pandémie, de confinements successifs, puis de vaccination à laquelle certaines et certains s’opposent sous le motif de leur liberté de choix, dans un contexte aussi de menaces pour notre sécurité et de développement de la surveillance et du traçage dans tous les domaines, pas seulement par les pouvoirs publics, mais aussi par exemple par les GAFA, on peut lire avec profit je crois, cet essai de John Stuart Mill qui date du milieu du dix-neuvième siècle, essai dont le but principal est de définir les rapports entre liberté individuelle et vie sociale dans une société gouvernée par une autorité démocratiquement élue.



Une relecture passionnante et stimulante.



De la liberté n’est pas un essai sur le concept de liberté tel que l’ont traité de nombreux philosophes avant et après lui.

Il ne s’agit pas ici de se libérer d’une oppression extérieure, ou de se définir une loi intérieure, ou d’être seul responsable de soi-même.



Non, et c’est en ce sens qu’il est, me semble-t-il, un sujet extrêmement actuel, c’est plutôt quelle est la part de la liberté individuelle dans une société démocratique, ou encore, quelles sont les limites de l’autorité et de la contrainte que peut exercer une société démocratique sur la liberté de l’individu.



Stuart Mill développe sa conception du principe de non-nuisance à travers un premier exemple assez simple en apparence: celle de la liberté de pensée et de parole, ce que nous appellerions la liberté d’expression. Dans le chapitre consacré à cette question, l’auteur insiste tout au long sur l’importance qu’il y a dans une société démocratique de l’expression libre des opinions.

Quelques extraits pour illustrer ce propos:

« S’il y a quelques personnes qui contestent une idée reçue, ou qui la contesteraient si la loi ou l'opinion le leur permettait, qu'on les remercie pour cela, que l'on ouvre nos esprits pour les écouter, et que l'on se réjouisse, s'il se trouve quelqu'un pour faire ce qu'il nous incomberait autrement de faire pour nous-mêmes à plus grand' peine, si du moins nous avons quelqu'égard pour la certitude et la vitalité de nos convictions. »

Ou encore:

« Lorsqu'il se trouve des gens qui représentent une exception sous l'unanimité apparente du monde, sur un sujet quelconque, même si le monde est dans le vrai, il est toujours probable que les opposants ont quelque chose à dire qui vaut la peine d'être écouté, et que la vérité perdrait quelque chose à leur silence. »



Cela vaut pour toutes les opinions, y compris les croyances religieuses. Et Stuart Mill considère dans ce dernier domaine que le politique doit adopter une attitude de neutralité. Et par ailleurs, est assez lucide pour écrire que cela ne mettra pas fin « aux maux du sectarisme religieux ou philosophique ».

Mais cela ne signifie pas que l’on peut dire n’importe quoi.

Et le philosophe d’affirmer que c’est un devoir des hommes et plus particulièrement des gouvernements (et même que ce serait de la lâcheté de ne pas le faire) d’interdire des « doctrines dangereuses pour le bien-être de l’humanité ». Une notion, il faut en convenir, qu’il n’est pas toujours facile à établir.



L’exemple de la liberté de pensée et de parole permet à Stuart Mill de proposer son concept de la liberté, le principe célèbre de non-nuisance.

« La seule raison légitime que puisse avoir une communauté civilisée d'user de la force contre un de ses membres, contre sa propre volonté, est d'empêcher que du mal ne soit fait à autrui. »

Et pour le reste:

« Le seul aspect de la conduite d'un individu qui soit du ressort de la société est celui qui concerne autrui. Quant à l'aspect qui le concerne simplement lui-même son indépendance est, en droit, absolue. L'individu est souverain sur lui-même, son propre corps et son propre esprit. »



Ce principe, qui pourrait être pris comme la possibilité pour un individu de mener sa vie comme bon lui semble, trouve sa cohérence dans l’idée d’autonomie qui le sous-tend. Et c’est en cela que ce traité est passionnant, malgré la foi en l’être humain qu’il suppose.

En effet, Stuart Mill affirme que la société se porte bien mieux si elle laisse aux individus qui la composent le maximum de liberté pour entreprendre, l’autonomie pour agir.

Avec pour corollaire le fait que l’Etat doit s’efforcer d’empêcher le moins possible la liberté individuelle, car « un État qui rapetisse ses hommes afin qu'ils puissent être entre ses mains des instruments plus dociles, même pour des objectifs bénéfiques, verra qu'avec de petits hommes, rien de grand ne peut vraiment être accompli ».

On voit là ce qui fait pour Stuart Mill d’être considéré comme un tenant du libéralisme, qui affirme que c’est bon pour une société que chacun puisse entreprendre, et, au final, si le meilleur gagne, toute la société en bénéficie. Sauf que, on le sait, tous les humains ne partent pas sur la même ligne de départ, etc….

Et poursuivant la même idée, Stuart Mill critique la bureaucratie aussi bien que le fait pour les citoyens de tout demander à l’Etat. Un passage savoureux que je vous cite m’a d’ailleurs fait penser à un certain pays que je connais bien:

« Dans des pays à la civilisation plus avancée, et à l'esprit plus insurrectionnel, le public, accoutumé à attendre que tout soit fait pour lui par l'État, ou du moins à ne rien faire pour lui-même sans demander à l'État, non seulement de le laisser faire, mais même comment faire, tient naturellement l'État pour responsable de tous les maux qui l'accablent, et lorsque le mal excède son seuil de tolérance, il s'élève contre le gouvernement….. »



Mais, et c’est une notion essentielle pour comprendre cette primauté de la liberté individuelle avancée par le philosophe, c’est qu’elle ne vaut que pour des individus autonomes. Et ce principe d’autonomie est, à mes yeux, aussi, voire plus important que celui de non-nuisance. En effet, Stuart Mill précise que la liberté individuelle ne s’applique qu’aux personnes disposant des facultés requises pour juger de ce qui est bon pour elles, ne n’applique pas à celles et ceux qui ne sont pas autonomes, en particulier les enfants, que l’on ne peut de son plein gré choisir de devenir l’esclave d’un autre…Il milite ( on est au milieu du 19 siècle) pour l’obligation de l’éducation des enfants qui doit leur apporter la capacité de faire des choix éclairés.



En conclusion , « primum non nocere », ce principe médical qui remonte à Hippocrate, et que reprend ici Stuart Mill pour le fonctionnement d’une société ou d’un État, rejoint sûrement l’obligation vaccinale pour les soignants, pour ne prendre que cet exemple, et sans doute l’obligation du pass sanitaire. Mais, on peut s’interroger sur le bien-fondé de toutes les contraintes et normes, de tous ces dispositifs de surveillance et traçage auxquelles chacun de nous est confronté, dans sa vie personnelle et professionnelle. Sont-elles là au nom du principe de non-nuisance? Sûrement pas dans tous les cas. Et l’idée que, pour le reste, les individus sont à même de décider de ce qui est bon pour eux, sans contrainte, elle relève, je trouve, d’une vision optimiste de l’être humain, et de sa capacité à faire des choix éclairés, vision qui me semble bien éloignée de la réalité, beaucoup préférant qu’on leur dise ce qu’il faut faire pour ensuite critiquer ce qu’on leur a imposé.



Pour finir, Stuart Mill ce farouche partisan de l’égalité homme- femme, ajoute à son traité tout un chapitre émouvant qui rend hommage à la contribution prééminente de son épouse qui vient de décéder. J’en joins un extrait dans les citations.
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L'utilitarisme

J'avais connu John Stuart Mill étudiant, comme économiste classique libéral. Je le découvre aujourd'hui philosophe progressiste, féministe, sensible et... avignonnais durant une partie de sa vie...

Se fixant comme objectif suprême le bonheur, l'utilitarisme de cette fin XVIIIème puise ses racines hédonistes dans l'antiquité d'Aristippe et Epicure, mais ne s'y résume pas. De même, J.S. Mill répond aux a-priori de celui qui serait tenté de le réduire à une morale cynique et égoïste, ou à l'absence de morale. Il s'agit bien de définir un souverain bien collectif. En cela, plus pragmatique, mais aussi moins élégant, J.S. Mill rejoint Kant et Platon, qu'il critique.

Prolongeant Jérémy Bentham, mais à mon goût avec plus d'humanisme dans la démonstration, J. S. Mill gagne vraiment à être connu autrement que par l'exégèse assez insipide des économistes libéraux, aux côtés de Ricardo et A. Smith...

La lecture n'est pas aisée, mais assez rapide... enrichissante, sans être enthousiasmante.... stimulante, sans forcément emporter l'adhésion sur tout, 150 ans plus tard...
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Pour le droit de vote des femmes

John Stuart Mill n'est pas uniquement un économiste. Non, c'est aussi un féministe (oui, un homme peut être féministe). Et en tant que tel et en tant que député, il demande le droit des votes pour les femmes, aux mêmes conditions qu'il a été accordé aux hommes (être propriétaire de son logement ou en être locataire et payé plus de 10 livres/an,...). Pour lui, refuser ce droit aux femmes qui répondent à ces conditions est anticonstitutionnel : c'est une injustice absolue. De plus, il répond à ceux qui disent que les femmes ont déjà suffisamment de pouvoir d'influence sur les votes des hommes de leur famille que leur accorder à elles le droit de vote les obligeraient à faire preuve de responsabilité, puisque ce serait leur propre choix... Et surtout, elles pourraient se choisir des représentants qui s'occuperaient réellement de leurs problématiques, comme l'éducation ou les violences domestiques... Pour Mill, seule la loi peut protéger les femmes, pas les hommes de leur famille.

Les 3 autres discours, tenus devant une assemblée féministe reprend les mêmes idées.

Ce sont 4 discours très intelligents et documentés, ce qui leur donnent une très grand force (mais pas assez pour que le suffrage soit accordé aux femmes avant 1918 (puis 1928, levée des dernières restrictions). Intelligents parce qu'ils n'abordent que le droit de vote et pas un autre sujet, tout en disant que du droit de vote découlera tout le reste ; documenté parce que Mill s'est intéressé réellement à la vie des femmes de son temps : violences domestiques, éducation et instruction, travail... et que ces éléments étayent ses discours. Il y a aussi beaucoup de situations qui résonnent avec des situations contemporaines comme ce qui est aujourd'hui appelé harcèlement de rue qui touche les femmes qui passent dans l'espace public pour travailler ou des publications anonymes prenant à parti des femmes et des propositions de femmes visant à plus d'égalité entre les 2 sexes. Sans parler des violences domestiques. Ca ne vous rappelle rien ?

Merci à Babelio Masse Critique et aux édition iXe pour ces discours qui donnent matière à réflexion
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De l'assujettissement des femmes

le pércurseur de Simone de Beauvoir, un génie.
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L'utilitarisme

Le but de la morale est le bonheur du plus grand nombre. Même un acte motivé par l'égoïsme est moral s'il est socialement utile, autrement dit s'il apporte du bonheur et du plaisir (entendu comme l'absence de douleur).

Beaucoup de causes de malheur pourraient être évitées grâce à une meilleure répartition des richesses, l'éducation pour tous, les progrès de la science.
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De la liberté

Essai sur la liberté (vaste sujet, il va sans dire), sur les liberté individuelles et ses rapports à la société.

Écrit en 1859 -- l'année de L'origine des espèces ! --, le Britannique John Stuart Mill signe ici parmi les "grands" discours de la philosophie politique.

Malgré des longueurs un peu datées et un prisme forcément marqué par la situation politique de la Grande-Bretagne de l'époque, le propos reste très intéressant au regard des interrogations qui sont les nôtres presqu'un siècle et demi plus tard. Par exemple, Mill examine en détails les modalités souhaitables de ce qu'on appelle le "débat public". Les plateaux télévisuels qui ponctuent notre campagne présidentielle de 2022 montrent à quel point cette problématique reste d'actualité...



A lire pour celles et ceux qui s'intéressent de près à la "chose" politique. Dans le domaine, il me semble que Raymond Aron offrait une approche plus contemporaine et plus intéressante que Mill.

Comme quoi il faut beaucoup lire pour se faire une idée des choses...









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De la liberté

Le principe énoncé dans ce livre sonne à la fois comme une évidence et comme une nécessité. Sur tous les sujets qui ne le concernent que lui, l'individu est absolument libre et la société n'a aucun droit de lui imposer quoi que ce soit, ni sa façon de vivre (et Dieu sait si encore aujourd'hui, les modes de vie sont déterminés par la société), ni sa croyance religieuse (alors que toutes les religions, qui se disent vérité, cherchent à s'imposer par tous les moyens), ni son opinion politique, ni ce qu'il achète ou vend, ni les gens qu'il fréquente. Cette liberté ne peut être limitée que si elle touche à celle d'autrui, que si elle nuit à la société et non à l'individu seul. Celui que se nuit à lui-même, on peut certes essayer de l'en dissuader, mais non lui imposer une pensée ou une action qu'il refuse. Le rôle de l'Etat sera donc de créer les conditions pour que la liberté de chacun puisse s'exprimer et se vivre. La liberté n'est donc pas l'ennemie de l'égalité. Elle en est le but. Mill s'attarde ensuite sur des cas pratiques, des situations-limites, en essayant toujours de trouver l'équilibre entre la valeur fondamentale de la liberté individuelle et le bien commun. Cet équilibre est bien sûr toujours précaire mais je crois qu'il doit toujours être un but à atteindre. Le plus grand bien qu'un homme puisse avoir, c'est la liberté.
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Pour le droit de vote des femmes

Ce recueil de plaidoyers pour le droit de vote des femmes regroupe quatre discours prononcés par John Stuart Mill, introduits par une courte présentation rappelant de manière brève le contexte historique, politique et social. En effet ces discours s'inscrivent dans le cadre très spécifique de l'Angleterre victorienne, moment de l'Histoire qui certes est particulièrement oppressif pour les femmes, mais qui signe également la naissance du premier grand mouvement féministe.



Connaissant surtout le philosophe pour sa doctrine utilitariste et sa défense des animaux face aux actes de cruauté, c'est avec plaisir que j'ai découvert son engagement sincère en faveur des femmes. L' introduction met en valeur le rôle déterminant que tient son épouse Harriet Taylor, elle-même écrivaine et grande intellectuelle, dans le militantisme de John Stuart Mill.



Le premier de ces discours est certainement le plus important puisqu'il s'agit de celui énoncé devant la Chambre des Communes pour réclamer l'extension du droit de vote aux femmes, dans le cadre d'une proposition de loi plus générale visant à ouvrir ce droit à une plus large partie de la population. John Stuart Mill affronte alors courageusement les parlementaires dans leur grande majorité hostiles aux questions féministes, et ne prenant pas même au sérieux le sujet.



Les trois autres discours ont été réalisés quelques années après devant un public déjà acquis à sa cause, celui d'associations féministes. L' enjeu en est donc différent, puisqu'il ne s'agit pas de les convaincre, et ce cadre plus informel permet une plus grande liberté de ton que j'ai appréciée.



Ces discours sont donc complémentaires et évitent globalement l'écueil de la lourdeur que je craignais. Vraiment, le style est bien plus agréable que ce à quoi je m'attendais. Mes préjugés sur les philosophes et les discours politiques (ennuyants au mieux, au pire complètement inintelligibles) en prennent un coup, et c'est tant mieux !



J'ai reçu ce livre (ou plutôt les épreuves) dans le cadre de Masse critique, que je remercie ainsi que les éditions iXe pour cette découverte surprenante, car si le sujet m'intéresse, je ne me serais peut-être pas spontanément tournée vers les écrits de John Stuart Mill.

Je recommande donc cet ouvrage à toutes les personnes (femmes et hommes ! bien entendu) s'intéressant à l'histoire des mouvements féministes.
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De la liberté

De la liberté de John Stuart Mill, comme son nom l'indique, traite de la liberté individuelle et collective. C'est aussi un éclaircissement sur la société des années 1850 qui peut dans une certaine mesure s'adapter à notre société.



L'essaie est découpé en plusieurs parties. J'ai trouvé la préface de Pierre Bouretz assez fastidieuse à lire mais je ne regrette pas de l'avoir lu cette introduction est précieuse pour bien comprendre l'essaie en lui-même ainsi que le contexte de sa rédaction. Au fil des parties successives, on découvre la notion de liberté individuelle, de liberté d'expression. Chaque partie est bien démontrée avec thèse anti-thèse et le tout de manière simple. Une dernière partie se consacre à l'application de cet essaie permettant une synthèse affinant la compréhension de l’œuvre dans son ensemble, cette dernière partie fut la bienvenue.



Au niveau du style d'écriture, on se retrouve face à des phrases un peu longue de construction complexe. Il ne m'a pas été rare que je relise plusieurs fois certaine phrase avant de comprendre, mais je dois dire que c'est mon premier essaie que je lis. Sinon ça reste fluide à la lecture excepté la préface qui est, je trouve, un calvaire à lire même si c'est tout à fait intéressant.



J'aimerais terminer avec une citation, la dernière phrase du livre : « un État qui rapetisse les hommes pour en faire des instruments dociles entre ses mains, même en vue de bienfaits, un tel État s'apercevra qu'avec de petits hommes ; rien de grand ne saurait s'accomplir, et que la perfection de la machine à laquelle il a tout sacrifié n'aboutit finalement à rien, faute de cette puissance vitale qu'il lui a plu de proscrire pour faciliter le jeu de la machine. » Cette phrase m'a fait penser à la fable romaine Des membres et de l'estomac qui montre que les choses sont complémentaire, qu'il faut laisser certaine liberté même si la société pense que c'est néfaste pour qu'elle progresse. C'est cette idée de, il faut des gens qui soutienne la thèse et d'autre l'antithèse pour progresser, cette idée que si on est tous ''formaté'' on ne peut plus progresser.



Ce livre est vraiment passionnant et ne demande pas de base solide en philosophie, la préface apporte tous les éléments à la compréhension de l’œuvre. C'est un bon ouvrage de science politique et de philosophie.
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L'utilitarisme

Cet ouvrage est un accueillant assemblage de petits paragraphes aérés, titrés et organisés. John Stuart Mill nous propose sa pensée : l'Utilitarisme.



Je suis principalement frappé par cette pensée en cela qu'elle est intuitive et puissante à la fois. Aujourd'hui, il devient immoral de contredire son principe directeur : le bonheur pour le plus grand nombre. Lorsqu'on agit, il est inconcevable d'accepter que notre action causera plus de malheur que de bonheur dans le monde, en général. Qui peut cautionner, en connaissance de causes, agir pour son bonheur tout en causant plus de malheur à autrui ou à soi même ? C'est bien compliqué à défendre. Paradoxalement, cette pensée est d'une puissance incroyable. Il est étrange qu'elle ne soit pas adoptée unanimement. Dans le domaine judiciaire, on pourrait répondre à bon nombre de questions épineuses (peine de mort, condamnations...). En effet, si apporter une plus lourde peine produit plus de bonheur, en dissuadant d'autres de causer du malheur à quelqu'un en agissant illégalement, qu'en causant le malheur du condamné, cette décision d'alourdir la peine est "utile". Au contraire, si instaurer une peine de mort ne dissuade personne de tuer, ce qui cause toujours le même malheur aux tués, mais cause un nouveau malheur en tuant le condamné, le bilan utilitariste bonheur/malheur n'est pas favorable. Profitez en, c'est la seule fois que vous pouvez affirmer qu'un calcul mathématique est humain. Cette doctrine est applicable partout.



John Stuart Mill introduit aussi la notion de qualité des plaisirs. Sa célèbre citation résume bien cette idée: "il vaut mieux être un homme insatisfait qu'un porc satisfait". Il dira que certains plaisirs ont plus de valeur que d'autres dans la balance utilitariste. Par exemple, lire a plus de valeur que de fumer une cigarette. Comment évaluer cela, me diriez-vous ? Mill vous répondra: "De deux plaisirs, s'il en est un auquel tous ceux ou presque tous ceux qui ont l'expérience de l'un et de l'autre accordent une préférence bien arrêtée, sans y être poussés par un sentiment d'obligation morale, c'est ce plaisir-là qui est le plus désirable." Pour savoir si la cigarette est moins désirable que la lecture, je demande à tous ceux qui lisent et qui fument de me dire ce qu'ils préfèrent. A eux de faire un réel calcul cout bénéfice engageant ces deux pratiques afin de définir la meilleure. Mill parlera de "dignité" pour définir une activité préférable. C'est un peu flou comme notion mais cela permet de saisir les grandes lignes. Cette méthode d'évaluation des plaisirs est très intéressante. En effet, en "sondant" un grand nombre de personnes, on peut arriver à classer objectivement les pratiques selon le bonheur ou malheur qu'elles apportent. Qui est mieux placé ici pour évaluer le plus agréable entre fumer et lire, que quelqu'un qui fume et qui lit ? Cependant, loin d'être à jeter, cette méthode est beaucoup trop dépendante de facteurs subjectifs, du contexte sociétal ou encore de lacunes culturelles de la part des sondés. Retour en 1920, entre fumer et lire, beaucoup plus de personnes choisiraient de fumer qu'en 2020. Depuis 1920, le contexte social a évolué (fumer est mal vu) tout comme la culture sur le sujet (on sait que fumer tue).



Sinon, ce livre est une bonne lecture. La moitié du temps, je me suis perdu et je n'ai pas réussi à accrocher aux mots de Mill. En effet, il répond souvent à des critiques de son temps à travers des réponses qui me paraissent ennuyantes par leur évidence. Aussi, Mill s'éparpille beaucoup sur la notion de devoir, son lien avec la morale ou encore la justice. Quelquefois, c'est passionnant, d'autres fois, je me suis dit: "Quel rapport ce passage a avec le reste du livre ?". Ce livre n'est en aucun cas une perte de temps : approfondir la pensée de Mill me fut très utile. Aujourd'hui, lorsque j'agit, je m'exerce à faire un calcul utilitariste afin de juger la valeur de mon acte. A mon avis, si vous voulez simplement prendre connaissance de la morale de Mill, je vous invite à regarder des vidéos Youtube de vulgarisation. A contrario, si l'état d'esprit de Mill vous intéresse, ce live est fait pour vous.



Luc
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L'utilitarisme

Livre intéressant où Mill nous explique que chacun cherche le plus brand bonheur possible.

Intéressant pour les éléments sur la loi, les sentiments, l'expérience; las science qui portent des espérances énormes.



Intéressant mais pas indispensable.
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Pour le droit de vote des femmes

La totale égalité des droits pour les femmes



La reine Victoria, le « renforcement du rôle strictement domestique des femmes » (En complément possible, Leonore Davidoff et Catherine Hall : Family Fortunes. Hommes et femmes de la bourgeoisie anglaise 1780-1850)s argumentaires contre celles et ceux qui voudraient limiter le droit de vote (des femmes, des résident·es « étranger·es », des grand·es enfants… sans oublier le périmètre des sujets, des lieux ou des « identités »… des entreprises et du pouvoir arbitraire patronal aux lieux d’habitation ou aux chambres du pouvoir masculin).
Lien : https://entreleslignesentrel..
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L'utilitarisme

30 septembre

L''ouvrage fonctionne par objections, éventuelles ou réelles, et réponses.

Mill ne se contente pas de l'utilitarisme laissé par Bentham. Il veut rendre le principe d'utilité plus humain : les droits individuels, la dignité humaine, le développement des facultés qui s'éloigne du sensualisme de Bentham, tout cela participe au progrès de la société, et même le constitue. Et, pourtant, il ne renonce pas à l'utilitarisme : la société n'est pas un agrégat, mais le critère moral est toujours dans les conséquences de l'action sur le bonheur collectif.
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L'utilitarisme

Ouvrage posant les fondements de la doctrine de l'utilitarisme qui connaîtra des fortunes diverses mais toujours vivace aujourd'hui.



L'intérêt intellectuel n'est pas fou, la démonstration philosophique non plus.



Intéressant en tant que livre fondateur du mouvement.
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Pour le droit de vote des femmes

Merci à Babelio et aux Éditions iXe pour l’envoi de ce livre en échange d’une chronique !



C’est toujours un plaisir d’être sélectionnée pour une masse critique, mais plus encore quand c’est pour un livre de ces éditions que j’ai découvert il y a peu, mais elles sont engagées sur plusieurs fronts et cela ne peut que me plaire ! Par exemple, la première chose que j’ai remarquée sur la couverture : le nom du traducteur est de la même taille et tout aussi visible que celui de l’auteur de l’œuvre originale. À une époque où certains éditeurs continuent à ne même pas mentionner les traducteur·rice·s sur leurs couvertures, c’est vraiment louable. De plus, le tout petit format était aussi original qu’agréable : un réel livre de poche, aucun soucis pour l’emmener partout avec vous !



Et puis bien sûr, beaucoup de leurs publications tournent autour du féminisme donc ça m’intéresse ! J’avais déjà entendu parler de John Stuart Mill dans mes cours d’histoire britannique à la fac, avec quelques extraits de ses discours mais je ne les avais jamais lu ainsi donc j’étais curieuse de découvrir cela.



Mais pour celles et ceux qui ne connaîtraient rien du contexte historique de ces discours : nulle inquiétude, une présentation du traducteur replace les textes dans leur période, de quoi pouvoir entamer leur lecture sereinement.



John Stuart Mill était très engagé à une époque ou il n’était pas acquis de défendre les droits des femmes : si de nos jours, cela pourrait s’apparenter à un vol de prise de parole, à l’époque en Angleterre, les femmes n’avaient tout simplement pas l’occasion de la prendre, la parole. Pas dans les conditions où John Stuart Mill le fait, comme par exemple à la Chambre des Communes. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il ne tourne pas autour du pot, et qu’il entend bien dire, de façon passive agressive même, à quel point il serait ridicule de refuser de donner le droit de vote aux femmes.



Comme cela arrive parfois dans des écrits de personnes engagées, vieux de plusieurs décennies ou siècles, des passages sont terrifiants quand on voit que certains arguments de Mill doivent encore être employés aujourd’hui pour le féminisme. Certes, les femmes ont le droit de vote, mais pour celles et ceux au fond qui pense que ça signifie que la lutte est finie : réveillez-vous et lisez ces textes. Mill allait plus loin que le « simple » droit de vote (à demi-mot, parce qu’il en demandait quand même déjà beaucoup).



Une lecture courte mais très enrichissante !
Lien : https://deslivresetlesmots.w..
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De la liberté

à lire pour ceux qui veulent comprendre les rouages de nos sociétés et comprendre l'actualité
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L'utilitarisme. Essai sur Bentham

Deux essais de John Stuart Mill dans ce livre de 250 pages de mon édition (P.U.F - col. Quadrige - 1998) :

- L'utilitarisme : texte publié pour la première fois en 1861, présenté, traduit et annoté ici par Catherine Audard sur la base de la 4e édition de 1871 qui fut la dernière à paraître du vivant de l'auteur ;

- Bentham (ou comme le titre : Essai sur Bentham) : texte publié pour la première fois en 1838, présenté et traduit ici par Patrick Thierry, annoté par Patrick Thierry et Catherine Audard.
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Considération sur le gouvernement représentatif

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L'utilitarisme

Un livre de base sur l'utilitarisme anglais, après Bentham.

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