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Critiques de Jonas Karlsson (104)
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La pièce

Petit bijou d'audace absurde et décalée, ce livre suédois de Jonas Karlsson m'a fait penser dans un premier temps au Placard du coréen Un-Su Kim. Nous retrouvons en effet le fonctionnement d'une administration dans laquelle est plongé un homme qui semble ne pas être apprécié à sa juste valeur, comme relégué dans un placard. Dans les deux livres, l'absurde règne en maître, satire virulente contre l'Administration et son fonctionnement bureaucratique. Dans les deux livres les narrateurs découvrent un endroit particulier. Dans le placard, comme son nom l'indique, un homme découvre le placard n°13 qu'il parvient à ouvrir à force de patience, ici un homme découvre une mystérieuse pièce. Ces découvertes, dans les deux cas, vont leur permettre de s'évader de leur univers professionnel bureaucratique.

Là s'arrête pourtant la comparaison. le placard va ensuite nous plonger dans un texte fantastique très loufoque, ici le roman se veut plus sobre, teinté certes de fantastique, l'anticonformisme, la folie, l'exclusion étant cependant le véritable coeur du récit.



A Stockholm, Björn vient d'être muté à l'Administration. Nous comprenons rapidement que cette mutation lui a été imposée par son ancien supérieur hiérarchique. Il faut dire que notre homme est particulier : imbu de lui-même, arrogant, parano, psychorigide, maniaque, il ne cesse de juger le travail des autres à l'aune de la très haute opinion qu'il a de lui-même. Il n'a aucune légèreté et aucune capacité à s'émerveiller, à s'émouvoir. Même un dessin d'enfant par exemple sera source d'une analyse glaciale. Dès son arrivée, il ne sympathise pas du tout avec ses collègues, son objectif étant de prendre la place du chef qu'il considère avec mépris. Un jour il découvre l'existence d'une pièce entre l'ascenseur et les toilettes dans laquelle règne une ambiance épurée, minimaliste qui permet à Björn de ressentir un bien-être tel que ses pensées s'éclaircissent, son travail est plus efficace. Un véritable lieu pour se ressourcer, pour méditer. Un sas pour décompresser dans lequel il revient de plus en plus souvent.



« J'ai senti le mur propre et blanc contre mon dos. Les stries légères sous ma main en posant ma paume sur le papier peint. La fraîcheur de l'acier contre ma joue en appuyant ma tête contre l'armoire à documents. le mouvement des tiroirs coulissant en douceur sur leurs rails métalliques. L'ordre. »



Le hic, c'est que pendant que Björn est dans la pièce, les collègues eux le voient planté au milieu du couloir à fixer le mur comme hypnotisé. Son attitude odieuse et son comportement très étrange vont créer un malaise grandissant qui va venir gangrener le service. Björn est-il fou ou ses collègues se sont-ils ligués contre lui pour l'amener à se croire fou ? Qui domine qui ?



C'est complètement kafkaïen…Kafkaïen le travail absurde et sans aucun sens demandé aux employés qui doivent écrire des résumés à partir de rapports d'inspection incompréhensibles. Kafkaïen le comportement de Björn absolument détestable. Kafkaïen la façon dont se diffuse le malaise au sein de l'open-space, tâche poisseuse grandissante étouffant toute légèreté et ambiance d'équipe. Kafkaïenne l'angoisse bien visible du chef qui ne sait comment gérer cette situation inédite entre un employé dérangé et l'ensemble des collègues qui se liguent contre lui, tension inextricable alors que plane la menace de la disparition de cette Administration.



Est-ce un livre sur la différence ? L'anticonformisme ? L'exclusion des personnes différentes et atypiques. Oui assurément, mais au lieu d'en faire un livre lumineux sur la différence, la subtilité provient ici des sentiments même que tout lecteur ne peut s'empêcher d'éprouver : nous le détestons immédiatement, instinctivement, viscéralement, ce personnage, il est notre pire cauchemar. Impossible de le défendre. Non ce livre n'est pas un feel-good mettant à l'honneur l'acceptation et l'intégration des personnes différentes, il montre, par le biais d'une satire décalée, une personne atypique qui saccage tout sur son passage et qui est d'une méchanceté rare. Cela donne un texte totalement jubilatoire, féroce, drôle mais en même temps angoissant car nous nous rendons compte que lui-même porte le même regard sur ses collègues, effet miroir qui nous met mal à l'aise et nous interroge…



« Les gens stupides ne savent pas toujours qu'ils sont stupides. Peut-être sentent-ils que quelque chose cloche, peut-être remarquent-ils que les choses ne se déroulent pas comme ils l'attendent mais peu savent que c'est à cause d'eux. Qu'ils sont pour ainsi dire la racine de leurs propres problèmes. Chose qui peut parfois être très délicate à expliquer ».



Ce livre est un petit bijou de causticité à la fois jubilatoire et angoissant, tout du moins dérangeant, j'ai vraiment beaucoup aimé ! Merci beaucoup Christophe (@christophe_bj) de m'avoir fait découvrir cet auteur dont j'ai envie de lire désormais les autres livres.



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L'ami parfait

Moi qui aime les nouvelles, là avec Jonas Karlsson, je suis comblée.

D’emblée avec la première nouvelle, il nous met dans le bain. Comment voulant faire une plaisanterie gratuite, pouvez vous vous trouver dans le pétrin, sans possibilité de faire marche arrière ? Puis une seconde nouvelle déroutante, très courte, définition du bonheur par le narrateur, ooh rien de philosophique, tout simple, délicieuse....donc en quelques pages, juste une mise en bouche qui annonce un régal.

Si on ment sur quelque chose à quelqu’un, dont la vérité est connue par d’autres,

qu’est-ce le pire : « être pris en flagrant délit d’imposture ou risquer d’être trahi à tout moment ? »,

À La Saint -Valentin, tenez-vous à recevoir une rose rouge ? Soyez franche....Et si oui,de qui ??

Vous arrive-t-il de rencontrer quelqu’un qui se jette à votre cou, mais dont vous n’avez aucune idée de qui il s’agit ???....

Conversations décalées, rapports décalés, tout est décalé chez Jonas Karlsson.

Dans des scènes de la vie quotidienne, il utilise ce décalage pour exposer avec humour, finesse et lucidité, l’absurdité de nos comportements, résultat de nos contradictions, nos fragilités, nos désirs, notre amour-propre,....bref tout ce qui est en nous terriblement humain mais que nous refusons d’assumer. Il décrit un monde,

où l’amalgame de la réalité et de l’absurde donne une approche tendre et malicieuse aux réalités de la Vie.

Quatorze délicatesses qui tour à tour, nous émeuvent, nous font sourire,faisant appel à notre propre quotidien dans une autre perspective. Superbement traduites par un groupe, dans le cadre d’un séminaire organisé par Elena Balzamo, critique littéraire au Monde des Livres, un recueil de nouvelles à ne pas manquer !
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La pièce

Björn vient d'intégrer un nouveau poste à l'Administration. Se voulant exemplaire et scrupuleux dans son travail,il découvre un jour à son étage un petit bureau inoccupé, calme et ordonné, qui devient pour lui un sas de décompression.



Seulement voilà : cette pièce, il est le seul à la voir et ses collègues le remarquent de plus en plus souvent planté devant un mur,le regard fixe.



Anti- héros par excellence, un peu comme Meursault dans "L'étranger",dénué d'empathie ,d'émotions, on ne peut que détester farouchement ce personnage.

Il est le collègue arrogant, sûr de lui et de sa valeur et méprisant son entourage.



Tout le monde le croit fou,mais dans ce récit qui flirte avec le fantastique, on se met à douter,qui dit la vérité, est-ce que cette pièce existe vraiment ?



De ce petit livre surgit alors une intense réflexion sur le cynisme,l'intolérance, l'absurdité et l'incompétence, la déshumanisation en marche dans notre société.

Björn représente tout cela. Par un subtil jeu de miroirs,l'auteur arrive à ses fins : j'ai erré jusqu'au bout dans le palais des glaces des fêtes foraines,sans pouvoir trouver la sortie.

L'atmosphère est aussi joyeuse qu'un couloir d'hôpital,la prose est chirurgicale.

Aussi malaisant soit- il,cet ovni littéraire dévoile le génie visionnaire de Jonas Karlsson et restera dans ma mémoire au même titre que l'ouvrage de Camus par cette fine analyse de nos travers.

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La pièce

Coup de cœur ! ● Björn, le narrateur, vient d’être muté à l’Administration. Dès le début de sa collaboration, son caractère étrange le fait mal voir de ses collègues. Mais de toute façon il ne cherche pas à se faire bien considérer, il est là pour travailler. Un jour, entre les toilettes et l’ascenseur, il découvre une pièce qui lui apparaît parfaite, mais qu’il est le seul à voir et dont il est le seul à pouvoir franchir le seuil. Lorsqu’il y va, les autres employés le voient debout, immobile, occupé à fixer le mur du couloir. Le chef, Karl, veut faire valoir le droit de Björn à la différence, mais ses collègues ne sont pas du même avis. ● Ce bref roman concentre beaucoup de qualités. Il décrit une bureaucratie kafkaïenne où les employés font un travail incompréhensible à partir de rapports d’inspection qui leur sont envoyés. Ces rapports sont classés par ordre d’importance et le service de Karl, où Björn travaille, s’occupe des dossiers de moyenne importance. Le sens de ce travail échappe au lecteur, qui n’y voit qu’une activité absurde, justifiant la mise en cause de l’existence même de l’Administration qui est apparemment menacée de disparition. ● Là où l’auteur est très habile c’est qu’il fait de Björn un personnage à la fois détestable, ne présentant aucune sensibilité, ne ménageant pas ses collègues, désagréable jusqu’à la méchanceté, orgueilleux jusqu’à l’arrivisme et la mégalomanie, tatillon, paranoïaque, et rejeté en raison de sa différence. ● C’est une sorte de handicapé mental ou de neuroatypique malveillant. Notre envie de défendre sa différence est tempérée par son mauvais caractère et les sales coups qu’il joue à ses collègues. ● « Les individus bornés ne voient pas le monde tel qu’il est. Ils le voient juste tel qu’ils veulent le voir. Ils ne voient pas les nuances. Le petit rien qui fait la différence. Beaucoup, plus qu’on ne pense, croient que tout va bien. Ils se contentent des choses telles qu’elles sont. Ils ne remarquent pas les erreurs car ils sont trop paresseux pour s’extraire de l’ornière quotidienne. Ils s’imaginent qu’il leur suffit de faire de leur mieux et que tout va s’arranger. Les gens comme ça, il faut les avertir. Leur ouvrir les yeux sur leurs échecs. » ● C’est brillant et jubilatoire, j’ai adoré et je recommande vivement.
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Le cirque

" Nous essayons de créer de l'ordre,a fini par dire Jallo.Mais la nature,c'est le chaos.Tu sais ce que Shakespeare a dit ?

-Non

-" le monde entier est un cirque" !

- " Un théâtre", plutôt ? ai-je corrigé.

Jallo a balayé l'air d'un geste impatient.

-On s'en fout,c'est la même chose.En tout cas,c'était ce qu'il voulait dire...



Le protagoniste est un être solitaire, aux rituels immuables, comme classer et reclasser sans fin son importante collection de vinyles.Il a peu d'amis mais ne semble pas en souffrir.Un soir, Magnus,un copain qu'il voit très peu l'invite au cirque et il accepte son invitation un peu à contrecoeur. Sur place,lors d'un numéro de magie,son copain disparaît. Sa quête pour le retrouver va le confronter à son passé douloureux ,ses angoisses existentielles, comme un miroir tendu qui lui renvoie une image fantomatique et troublante.

Troublant,ce roman l'est assurément qui flirte avec le fantastique pour mieux interroger la psyché du personnage. Qui est-il, que cache son comportement, quelles étrangetés le définissent ?



Toutes ces interrogations flottent dans l'air et m'ont enveloppée dans un brouillard pénétrant qui a du mal à se dissiper...

Je ne sais pas si il faut comprendre le tour de magie ou accepter l'illusion.Un peu des deux sans doute...
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L'ami parfait

Tout peut arriver



C’est ce que vous penserez en lisant ces quatorze nouvelles, florilège du talent de cet auteur suédois,doué pour saisir des situations dans lesquelles un imprévu va perturber le quotidien des protagonistes et les confronter à d’improbables scénarios qu’ils n’auraient pas imaginés même en rêve !

On a tous,au moins une fois dans sa vie,ressenti ou fait quelque chose qui,tel un effet domino,nous a entraîné dans un imbroglio dont on a eu du mal à se sortir.

Il nous donne aussi à voir la singularité de tout un chacun et comment la vie peut nous placer dans une autre dimension, ce qui a pour effet de reconsidérer nos jugements et nos certitudes.

Ce pas de côté agit comme un révélateur de nous mêmes.J’ai apprécié le fait que l’écrivain mette en scène l’ordinaire de la vie et la faculté qu’a l’être humain de se fourvoyer, pour le meilleur et pour le pire...

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La facture

J'avais lu de bonnes critiques sur ce livre. Le sujet me plaisait bien. C'est un homme (on ne connaîtra jamais son prénom ni même son nom) reçoit une facture d'une société WDR dont la somme est hallucinante : 5 700 000 couronnes ce qui donne l'équivalent de 600 000 euros. Cet homme n'est pourtant pas bien riche, il vit dans un studio en location et travaille à mi-temps dans une boutique de location de vidéo. Il vit seul n'a qu'un seul ami mais malgré tout il se sent heureux. Il a beau se dire que c'est une erreur, il veut en avoir le coeur net. Il appelle la société en question, attend des heures et finalement réussi à avoir quelqu'un, Marion. Il apprend donc que la somme réclamée n'est pas une erreur : il s'agit de régler son BV (Bonheur de Vivre).

Il va tout faire pour échapper à cette sentence.

Je vous laisse découvrir la suite.

Ce que j'ai bien aimé, c'est l'originalité du sujet. Cela m'a fait pensé à Big Brother dans "1984" écrit par Orwell, la science-fiction en moins mais la gaieté en plus.

Ce que j'ai moins aimé : beaucoup de longueurs, j'avoue avoir sauté quelques pages.

Un joli récit bien écrit mais un peu long à mon goût.
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La pièce

Une incursion inopinée dans une librairie isséenne ( loin de mes trajets habituels, découverte fin juillet, alors que les trois autres , restantes étaient fermées pour cause de "congés annuels"), je souhaitais acquérir "Gabrïele" des soeurs Berest (Stock), mais il ne paraissait que le 23 août... je suis repartie, sur le conseil de la libraire (dont j'avais apprécié un avis antérieur) ,avec ce petit texte, aux thèmes inhabituels, de cet auteur suédois !



Ambiance assez glaciale, le narrateur, Björn, vient d'être muté dans une administration; bureaucrate dans l'âme, il prend tout et tous, de haut. Psycho-rigide, maniaque , tatillon, en un mot, un bureaucrate gris et antipathique à souhait !!

Il n'est guère " populaire" auprès de ses collègues- Rentabilité, efficacité, l'homme est là pour travailler...il semble dénué de la moindre bienveillance, ou attention envers autrui !

Il découvre un jour une porte... Elle ouvre sur une pièce inoccupée, parfaitement rangée. Il s'y réfugie de plus en plus fréquemment, provoquant malaise et interrogations chez ses collègues... qui ne comprennent guère son comportement intransigeant et ses "absences" !



Etrange texte qui cultive "absurde" et semi-fantastique... car on a du mal à saisir si cette porte fantomatique est réelle ou non, visible de tous , ou non ???



Björn... se révèle paranoïaque, avec un complexe de supériorité , qui le rend peu attachant... convaincu que ses collègues le harcèlent et veulent l'exclure....



Une lecture sûrement originale, atypique... mais dans laquelle je n'ai pas réussi à pénétrer.. Ce n'était peut-être pas le genre de livre dont j'avais envie ou besoin dans l'instant présent...Je me suis résignée non sans une réelle déception, à abandonner ce roman quitte à le reprendre un peu plus tard... et redonner une autre fois, une chance à ce jeune écrivain suédois, auteur à la fois de récits, nouvelles et pièces de théâtre...



Un récit franchement kafkaïen , dans une sorte d'univers aseptisé et absurde...

Une sensation littéralement physique de froid ... pour nous, lecteur !! En tous cas,... ce fut mon ressenti...un univers parallèle, voisin de la folie...Une sorte de fable sur le conformisme, l'exclusion et la peur de la différence....



" j'ai veillé à participer à toutes les pauses-café communes et à toutes les conversations. Personne ne me parlait, ni même me regardait, mais j'étais là. Je participais. Je faisais acte de présence physique, au milieu d'eux.



Au début, j'ai remarqué que tout s'arrêtait dès que je me joignais au groupe. J'ai fait comme si de rien n'était. Peu à peu, je me suis approprié le rôle de participant passif, celui dont personne ne se préoccupe, mais qui est là,

comme une condition préalable à la vie sociale du groupe" (p. 140)
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La facture

C'est quoi le bonheur? Difficile à évaluer pense-t-on. Taratata. L'administration suédoise a tranché : à coups de tables chiffrées secrètes, tout se calcule. Vie sentimentale, sociale, professionnelle, on additionne de-ci de-là, on multiplicationne beaucoup, on divisionne un peu, moins 12 racine carrée de 276 puissance 5 et hop, on imprime la facture. Souriez et payez. C'est pas sorcier nom d'un Jamy.

Et apparemment la vie du narrateur (dont on ne saura jamais le nom) vaut des millions de couronnes. Faut dire qu'un amour de jeunesse raté et nada sous la couette depuis lors, un job à mi-temps de vendeur vidéos chez les Bobines de Jojo, des parents out pour cause de décès à priori définitif, un seul pote radin à souhait, et zéro marmaille à élever, ça vous fait monter le curseur du Bonheur Vécu au top. Car notre héros se satisfait de peu le bougre. Un rien le rend heureux. Sauf la douloureuse qui a quand même du mal à passer dans le tuyau du bonheur. Et pas simple de trouver une oreille bienveillante pour défendre et négocier le montant.



On l'aura compris ou pas, mais ça ressemble à du Kafka, avec l'odeur du Kafka, et une idée digne de Kafka. Mais on soustrait le F.

L'idée de départ pourtant séduisante se réduit à un imbroglio administratif plus qu'ennuyeux. Une sacrée aubaine pourtant de pointer du doigt cette société régie par l'argent, et de pousser le lecteur à évaluer son propre potentiel au bonheur. Malheureusement ça tourne en rond, en carré, en tout ce que vous voulez, mais ça n'avance guère. Avec un style aussi plat que l'encéphalogramme du bulot à crampons munichois face au Larousse (non Frank, il n'y a pas d'erreur d'article. J't'explique : Larousse, dico / la rousse, Mylène Farmer), donc avec ce style plat disais-je, on ne ressent pas grand chose. Ni empathie pour les déboires de ce pauvre type, ni tristesse, ni tendresse. Calme plat, plat comme l'encépha... bref. Même ma feuille d'impôt un soir d'hiver au coin du feu me passionnerait davantage.

Seul le personnage hélas trop secondaire de Roger, l'ami au porte-feuille fourré au porc-épic, a su susciter un semblant d'intérêt à ma difficile personne.



Peut-être l'auteur voulait-il imager la lourdeur de l'administration par une répétition lourdingue de scènes supposées loufoques? Auquel cas, bravo, carton plein...

Manque pourtant pas grand chose, juste un peu d'humour, de second degré, de réparties fines pour faire mouche.

Mais tant mieux finalement, mon Bonheur Vécu sur ce bouquin ne pèsera pas lourd en couronne à l'heure des comptes.
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La pièce

Après un bref coup d’œil aux autres critiques, tout me semble déjà dit. Et dans l'ensemble, je suis d'accord avec ce qui est dit. On pense bien sûr à Kafka. Ce pauvre employé est complètement décalé dans cette administration. On peut se demander qui est fou, Björn où l'administration qui l'emploie ou plus largement, la société dans laquelle il évolue ? C'est peut-être bien le monde qui est malade. Björn ne fait que suivre le mouvement. Jonas Karlsson ne fait que poser la question à travers son personnage. Le texte est épuré au maximum pour donner l'impression d'étrangeté qui finit par régner dans le service. Finalement, on en vient à se demander si cette pièce existe véritablement. Les autres employés finissent par s'interroger et douter d'eux-mêmes. Et nous lecteurs, sommes rattrapés par l'absurdité ambiante.

C'est le premier livre que je lis de cet auteur, mais sûrement pas le dernier.
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La pièce

Bjorn n'est pas particulièrement sympathique et l'on se réjouit de ne pas avoir un collègue comme lui. Jonas Karlsson nous brosse le portrait de ce personnage de façon peu flatteuse : psychorigide, égocentré et méprisant.

A travers ce Bjorn, Jonas Karlsson nous parle du système bureaucratique, des relations entre collègues, de la hiérarchie. L'administration nous est ici dépeinte de façon terne, triste et surtout angoissante. Son côté absurde, nous fait penser à l'univers de Kafka.

Je regrette mais je n'ai pas su apprécier comme il se doit ce roman qui, je suis sûre, est plus profond que ce que j'en ai perçu. Les conditions dans lesquelles je l'ai lu n'étaient sans doute pas favorables pour ce genre de lecture.
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La facture

Quand il reçoit une facture d'un montant astronomique, l'employé d'un petit commerce ne prend pas ce courrier au sérieux, pensant à une erreur de la société. Commence alors un engrenage ubuesque entre appels téléphoniques, auditions dans les bureaux pour apprendre rapidement que ce montant a été calculé en fonction du Bonheur Vécu, un indicateur savamment calculé non sur les accumulations matérielles mais sur l'immatériel, s'appuyant sur le bonheur ressenti par chacun. Cette taxe incommensurable va permettre à cet homme de réfléchir sur sa vie et s'interroger sur ce qui touche à son existence et son ressenti de bonheur...



La facture est un conte tragi-comique et absurde dans lequel un être humain est plongé dans un univers quasi kafkaïen, un homme qui doit justifier sa vie et son bonheur, un bonheur qui a été évalué et monetisé par une administration sourde et hermétique à tous les arguments. C'est une réflexion surréaliste sur la notion de bonheur, pour cet homme modeste qui, par caractère, envisage la vie en voyant le verre toujours à moitié plein et qui le condamne finalement à une plus grande taxe. Au cours de ses pérégrinations et sa rencontre avec ses interlocuteurs, c'est une réflexion humaniste et profonde à laquelle nous invite Jonas Karlsson, sur la notion de bonheur, indépendante des biens matériels, en suivant les aventures surréaliste d'un homme simple qui se retrouve broyé par un système qu'il ne peut maîtriser qu'il doit subir, le tout sous forme d'une fable drôle et très fine.

Une belle découverte.
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L'ami parfait

- C'est une nouvelle...



- Tu sais bien que je n'aime pas les nouvelles.

C'est comme ça, je n'y peux rien. Je n'arrive pas à m'y faire. Je ne trouve jamais vraiment d'intérêt à en lire.



- Oui, mais c'est la nouvelle...



- Les nouvelles ne sont jamais bonnes de toute façon.

Il n'y a qu'à écouter les infos.



- Mais, enfin, c'est la nouvelle...



- La nouvelle freebox ??

Tu crois vraiment que ça m'intéresse ?!



- Mais, non, pardi, la nouvelle année !



- Ahh !! Mais il fallait le dire plus tôt !

Eh bien bonne et heureuse année à tous alors !



- Et sinon ce recueil de nouvelles, tu as aimé ?



- Hmm, bof bof...tu sais, moi, les nouvelles ...
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La pièce

Ce livre m’a fait l’effet d’une claque, tant cette littérature m’a chamboulée, dans le bon sens du terme. Une très belle surprise d’un auteur suédois dont je lirai d’autres livres, c’est certain. Dans le monde de l’Administration, j’ai pensé que j’allais entrer dans un univers kafkaïen. Oui pour le côté saugrenu, mais avec une plume simple et fort agréable à lire. Difficile de le résumer sans divulguer. Je dirai donc que l’histoire a lieu, vous l’aurez compris, dans les bureaux d’une administration, que la subordination y a une place prépondérante, ainsi que les échelons, la folie, l’isolement, l’orgueil et la différence.

Ça se lit d’une traite et c’est franchement jubilatoire, bien que la fin soit… comment dire…



Attendez, je réfléchis.



Bon, après tout, lisez-le !

(189 pages) :-)

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La pièce

Jonas Karlsson est beau, suédois et connait du succès en tant qu'acteur de théâtre et de cinéma. Comme si cela ne suffisait pas, il écrit. Après La facture, La pièce est enfin traduit en français, 7 ans après sa parution en Suède. Un petit bijou concis rédigé dans un style minimaliste et diablement efficace. Une comédie aux accents tragiques ou bien l'inverse, une oeuvre où l'insolite le dispute au réalisme dans la description minutieuse de la vie de bureau. Le livre est narré par son personnage principal, Björn, qui débarque dans un open space de l'Administration avec la ferme intention de progresser dans la hiérarchie. Méthodique jusqu'à la maniaquerie, il souffre d'un énorme complexe de supériorité qu'il exprime par un comportement antisocial et un mépris de ses collègues et de son chef. Frustré de ne pas voir ses compétences reconnues, il découvre un jour un bureau inoccupé où il vient se ressourcer et élaborer une stratégie de conquête. Sauf que pour tous les autres, cette pièce n'existe pas et est le fruit de son imagination. De roman fantaisiste et très drôle, le livre bascule rapidement dans un fantastique inquiétant entre Orwell et Kafka. La santé mentale de cet arriviste forcené est forcément sujet à caution mais il attire également une forme de sympathie tant ses efforts pathétiques pour se distinguer de la masse figurent la lutte contre une société où le conformisme est apprécié et la différence dénigrée. Parabole de l'absurde, La pièce est un livre aussi glaçant que le célèbre Cri de Munch, pour rester dans les références scandinaves, tout en étant délicieusement caustique et onirique. Un petit chef d'oeuvre au goût d'orange amère.
Lien : http://cin-phile-m-----tait-..
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Le cirque

Après la découverte de l’auteur avec le roman « La pièce », fort apprécié, je me suis procurée son petit dernier « Le cirque ». Une histoire d’amitié, de magie, un peu de fantastique et d’angoisse, les ingrédients sont présents pour un moment de lecture divertissant.



Derrière le côté absurde et mystérieux et une ambiance proche d’un songe, se cache un personnage tiraillé entre le désir de se fondre dans la société et le rejet de cette même société qui ne lui apporte rien. Tout jeune déjà, le protagoniste se sent différent des autres et tente de se faire accepter par les jeunes de son âge. Mais, on ne peut forcer la nature et ses tentatives se soldent par des échecs successifs et une plongée encore plus profonde dans les méandres de son esprit et dans sa passion pour la musique.

Adulte, il revoit son seul ami d’enfance, Magnus, et l’accompagne au cirque. Lors d’un numéro de magie dans lequel Magnus souhaite participer, celui-ci disparaît pour ne plus revenir. L’ami ne cessera de le chercher. Le retrouvera-t-il ? Je vous laisse le découvrir car la fin fut pour moi une réelle surprise.



Encore un petit livre brillant, intelligent, qui va bien au-delà d’une simple histoire de disparition.



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Le cirque

Un nouveau roman qui ne déroge pas à la règle que s'est fixée Karlsson : cultiver l'art de l'absurde, de la chute et un goût certain pour les personnages disruptifs. Tout ce dont je raffole (dans les livres) !



Plus le temps passe et plus j'apprécie les récits qui se révèlent à la fois « méchamment drôles et drôlement tristes » (comme le dit si bien @Ingannmic), et beaucoup plus engagés qu'on pourrait le penser à première vue.



J'aime le regard décalé et perçant que cet auteur suédois porte sur notre société et ses travers modernes. Son nouveau « héros » est encore une fois un personnage tragi-comique mémorable : un de ceux qui résistent à tout ou bien un de ceux à qui tout résiste ? Ca se discute...



C'est un livre splendide dans sa façon jusqu'au-boutiste d'envisager l'art comme une valeur refuge en ces temps incertains.



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La facture

Vous faites probablement partie, vous qui me lisez, de cette bande d’égoïstes qui profitez de la beauté du soleil couchant, de la sérénité d’une promenade dans les bois l’automne, ou simplement du réconfort d’un visionnage de film à deux sous un plaid l’hiver, et ce sans payer le moindre centime. Eh bien, c’est TER-MI-NÉ ! Un gouvernement mondial a instauré une taxe sur le bonheur, afin que les trop heureux contribuent financièrement à améliorer le sort des moins heureux.



Un habitant suédois a la surprise de recevoir une facture exorbitante. Sa vie lui semble pourtant bien simple : un petit job à mi-temps dans un magasin de location de vidéos, qui lui permet de gagner juste assez pour payer son loyer et quelques pizzas, pas de petite amie, pas d’enfant, même pas un animal de compagnie, peu de loisirs… Ses efforts pour contacter l’organisme de paiement et faire corriger le montant, cependant, ne tourneront pas exactement comme prévu.



Ce petit livre offre une réflexion sympathique sur le bonheur : comment sait-on qu’on est heureux ? L’herbe est-elle vraiment plus verte ailleurs ? Ce qu’on envie chez quelqu’un peut-il lui miner le moral ? Le bonheur se situe-t-il dans ce qu’on reçoit, ou dans la manière dont on le reçoit ? Les autres ont-ils le droit de vous proclamer heureux alors que vous ne ressentez personnellement aucun bonheur ?



Le ton du récit est tout juste assez acide pour échapper à la catégorie des romans « feel good ». Néanmoins, on en ressort avec l’envie de profiter des petits moments de bonheur du quotidien, et de retrouver un émerveillement d’enfant en contemplant un coucher de soleil.
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L'ami parfait

Acteur très connu en Suède (sur certaines photos, il possède un faux air de Jude Law), Jonas Karlsson s'est lancé en littérature en 2007. Spécialiste des courts récits et nouvelles, selon sa biographie, il s'est paradoxalement fait connaître en France par deux romans, assez brefs d'ailleurs, La facture et La pièce, publiés par Actes Sud. Deux sommets d'absurde kafkaïen d'une logique implacable et hilarante pour peu que l'on goûte l'humour scandinave (voir celui du cinéaste Roy Andersson dans une veine plus corrosive). Et voici qu'un premier recueil de nouvelles arrive enfin avec L'ami parfait qui compile 14 récits parus entre entre 2007 et 2011. Le premier sentiment, à leur lecture, est une légère déception tant leur écriture semble moins affirmé, plus naïve presque, que celle de ses romans. Cela est dû à ses sujets, également, qui renvoient à la jeunesse, voire à l'adolescence, avec des préoccupations quotidiennes relativement éloignées de celles de La facture ou de La pièce, ce dernier notamment, entièrement consacré au monde du travail. Mais cette impression initiale se dissout progressivement par la qualité des différentes nouvelles, leur diversité apparente et leurs points communs avec en particulier ces situations inextricables dans lesquelles chacun se met, faute d'avoir réagi trop vite ou à cause de sa propre lâcheté. Ce qui aboutit le plus souvent à des quiproquos et parfois à des catastrophes. En fin de compte, l'on retrouve dans L'ami parfait ce qui fait le sel des fictions de Jonas Karlsson, à savoir cette ingéniosité à pousser le curseur très loin avec un sens parfait du timing, sans épargner le moins du monde des personnages faillibles qui ressemblent par bien des traits, y compris les moins reluisants, à chacun d'entre nous.
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L'ami parfait

Première lecture d’un recueil de nouvelles suédoises, « L’ami parfait » de l’acteur et auteur Jonas Karlsson ne m’a pas déçu, mais comme souvent dans ce type de recueils, certaines nouvelles nous interpellent plus que d’autres. J’ai apprécié les changements de perspective et de style des différentes histoires, avec le fil rouge du manque de communication entre les êtres humains, sujet récurrent chez cet auteur. Légèrement décalées, frôlant le surréalisme, flirtant même parfois avec des jeux de miroirs, ces nouvelles sont tour à tour loufoques, tristes ou simplement des instantanés dans la vie du personnage principal, souvent dépassé par les événements. Elles ont chacune leur spécificité, et surtout elles nous invitent à méditer un instant sur la morale de chacune avant de passer à la suivante, ce qui est pour moi un gage de qualité.

Dans l’ensemble, cette lecture était plutôt plaisante et je continuerai de suivre cet auteur de près.



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