Julie Clark

Le vrai pardon n’est possible qu’au prix d’un deuil. Le deuil des attentes, des circonstances, des sentiments. C’est à la fois douloureux et incroyablement libérateur.

Le silence résonne à mes oreilles comme une menace murmurée que je suis la seule à pouvoir entendre.

Elle eut alors la certitude que l’affection de Liz était plus terrifiante que tout ce qu’elle avait connu jusqu’à présent, car sa présence à ses côtés n’était que temporaire.

Les regrets avaient cela d’étrange qu’ils vivaient tapis à l’intérieur de vous, se recroquevillant jusqu’à donner l’impression de disparaitre, mais seulement pour mieux revenir et s’épanouir, invoqués par des gens qui, pourtant, ne pensaient pas à mal.

Elle voyait à présent ce qu’elle n’avait pas vu à l’époque. Tout choix avait des conséquences ; ce qui comptait, c’était d’en tirer le meilleur parti.

Il est compliqué de faire le deuil non seulement de mon nom et de mon identité, mais de la vie que j’avais espéré avoir. C’est la mort d’un rêve, et elle mérite d’être pleurée.

Je suis bien placée pour savoir que, quand on est en fuite, on regarde uniquement derrière soi, jamais devant.

Tout récit se doit d'etre envoûtant. Aussi les gens ont-ils tendance à croire ce qu'on leur dit au lieu de s'attarder sur les preuves qu'ils ont sous les yeux.

L’instinct est un phénomène étrange. Une sorte de murmure indéfinissable qui vous permet de renifler le danger. Dès leur plus jeune âge, on apprend aux femmesà ne pas en tenir compte. Nous sommes obligées d'apporter les preuves de la validité de notre instinct, ou bien de l'ignorer, de façon à privilégier le confort des autres en négligeant le nôtre.
Il m'a fallu longtemps pour me défaire de cette injonction. Pour rester attentive à tous les signaux de danger.

Je veux comprendre comment elle manipule les autres, comment elle s'infiltre dans leur quotidien, comment elle gagne leur confiance. Je veux savoir où elle se trouvait tout au long de la décennie écoulée, pourquoi elle a choisi de revenir. Ensuite, je veux l'annoncer à la terre entière. Lui prendre une partie d'elle-même puisqu'elle m'a tout pris.

Ma prof d'anglais au lycée a fait venir un jour une romancière pour nous parler de son processus créatif.
Cette dernière nous a expliqué qu'elle connaissait toujours la fin de l'histoire qu'elle écrivait, mais pas forcément les étapes intermédiaires. À l'entendre, cette inconnue rendait son métier plus riche. Plus amusant aussi.

Je passe des centaines d'heures sur le Net. À établir le profil de ma cible, à dénicher la personne avec laquelle je vais pouvoir me lier d'amitié pour mieux l'approcher. je finis par tout savoir d'elle, de ses proches. Le jour où ma proie me dit : « Ravi de vous rencontrer », je la connais depuis des mois.

Les escrocs ont la capacité de s’inventer un monde, au point que leur auditoire se moque de savoir où se situe la vérité.

Quels sont les principaux traits de caractère d’un escroc ? Quand vous posez la question, on vous répondra souvent : le charisme, l’intelligence, la capacité à mentir, le sens de la manipulation. On vous dira aussi qu’un bon escroc a besoin de se retourner à la première alerte.
Tout ça est vrai, mais ce n’est pas l’essentiel à mes yeux.
De mon point de vue, les qualités premières d’un escroc digne de ce nom sont la patience et le don d’inspirer la confiance.

Je suis née de cette relation qui a insufflé les règles dont toute mon enfance a été bercée :
Le confort et la facilité ne sont rien. Nous sommes parfaitement capables de gagner ce qu’il nous faut, nous n’avons pas besoin d’un homme pour ça.
Si l’argent vient à manquer, il suffit de redoubler d’efforts.
Il ne faut jamais sous-estimer deux femmes qui travaillent main dans la main.

L’essentiel, quand on monte une escroquerie, est d’afficher un maximum de transparence. D’être à quelques détails près la personne que l’on prétend être. Un peu comme une actrice de cinéma. Mes faits et gestes sont réels, seul le décor est en carton-pâte.

Je ne choisis jamais une cible au hasard. Mes victimes ne se doutent jamais que leur vie est sur le point de basculer.

Quant à moi, j’entamais le soir même mes recherches sur Meg Williams, la femme qui a fait exploser la vie de Cory Dempsey avant de disparaître. Accessoirement celle qui allait bientôt détruire la mienne.

Je me suis détournée tout en faisant toujours semblant de téléphoner, une bouffée de haine au fond de moi. Il avait vécu dans ma maison pendant toutes ces années alors que je dormais dans ma voiture. Et que ma mère reposait dans un cimetière.

La différence entre justice et vengeance se trouve entre les mains de ceux qui raconte.