Pierre Kyria

Écrire m'a toujours paru être une activité dérisoire, surtout de nos jours. Pourquoi rajouter des mots sur des images dont la vie est faite pour l'essentiel ? Passe encore pour un musicien, un peintre, il y a un instrument, des tubes de couleurs, de la matière, quoi ! Mais une rame de papier blanc, vous parlez d'une matière ! Tout cela pour y jeter ce qui se brinquebale dans votre cervelle pour en remontrer aux autres, qui d'ailleurs s'en foutent. Il faut être un peu fou pour s'y mettre.

On croit souvent que l'amitié compense les excès et les carences de l'amour, qu'elle repose, répare, équilibre, offre un éclairage constant aux saisons changeantes de la vie dont elle dissipe les ombres, rectifie les erreurs de perspective, compense les manques. Outre qu'on la confond trop, par paresse ou frivolité, avec la camaraderie ou sa forme dévoyé,le copinage, c'est oublier qu'elle procède du sentiment avec des détours suspicieux, inquiets, et cette hypocrite lenteur prévient trop en sa faveur. On la pense spontanée quand elle n'est que fugacement oublieuse de sa nature, prodigue, alors qu'elle ne perd jamais de vue ses dons ; ses mouvements ouverts d'un instant sont repensés, refermés l'instant d'après, elle est moins avisée que timorée, moins sage que réticente, moins aveugle et plus économe qu'on ne croit dans ses dispositions à toucher le cœur, susciter l'estime, la confiance. Chez cette amoureuse inachevée, transie, délicate et fuyante, fiévreuse aussi par à-coups, se lovent, prêts à prendre un jour le dessus, ces deux composantes refoulées de la passion charnelle : la possession et la jalousie.

Les Anglais ont la réputation d'être patriotes,chauvins. Et pourtant,il y en a toujours de par le monde qui promènent leur exil . Au cours des siècles,l'Angleterre a su,par son intolérance,sa cruauté,former une race unique de voyageurs ,de fuyards,de maudits itinérants. Les persécutions religieuses,morales,politiques ont toujours été la grande affaire du Royaume, d'où cette vocation de l'exil.

C'est cela le merveilleux de la vie, on ne sait jamais à qui on a affaire. J'ai entendu des grands bourgeois s'exprimer comme des charretiers et le plombier venu me changer un joint dans la salle de bains faire allusion à 'un artifice de commodité'.

Les morts prennent leur temps avant de nous renvoyer d'eux mêmes une image précise et souvent apaisante ; ils nous ménagent, ne veulent pas douloureusement s'imposer quand on vacille encore alors à leur sujet entre stupeur et chagrin, incapable que l'on est alors de régler pour notre propre sauvegarde cette implacable machinerie du temps qui nous broie peu à peu. Un faux mouvement de cœur et de pensée et l'on risquerait d'y laisser un morceau de notre précieuse personne, voir le tout.

Les gens seuls reportent souvent leur trop plein d'affection sur des animaux. C'est un amour sans risques, mais c'est quand même de l'amour.