Citations de Leonard Michaels (27)
Les mots m'obsedaient, les relations étranges entre leurs sons comme s'ils recelaient une musique, le chant bizarre d'un démiurge duquel émergeant des imagesdes choses virtuelles, rues, arbres, gens. La musique allait crescendo comme si c'était elle l'histoire. Je devais laisser le champ libre, attendre le déclic, mais je n'y parvenais pas. J'étais un mauvais danseur, j''entendais la musique, j'effectuais les pas, mais j'étais incapable de me laisser emporter dans la danse.
Sylvia pouvait se montrer joyeuse et drôle, mais il est plus facile de se rappeler les moments difficiles. Ils sont plus sensationnels ; il est également moins douloureux de se souvenir d'eux que de se remémorer des choses que j'aimais. Il nous arrivais de nous regarder, assis à quelques mètres l'un de l'autre dans une rame bondée du métro, chacun à un bout de la pièce lors d'une fête où au milieu d'une conversation amortie par la drogue avec d'autres personnes dans notre salon, l'aube grise éclairant petit à petit les fenêtres, et nos yeux se souriaient, comme gênéspar tant de chance, celle d'être ensemble.
… moi, jeune homme surqualifié de 27 ans, fumeur et qui, pour se présenter, savait seulement dire : “J’aime lire.”
Ce qu'on aime le plus chez les autres, c'est ce qu'ils ne savent pas sur eux-mêmes.
Malgré les milliers de propositions de travail, aucune ne m'interpellait. Je voulais faire quelque chose, pas juste avoir quelque chose à faire.
Insaisissable est la vie et ce n'est
Que dans le souvenir qu'elle dévoile ses traits,
Une fois dans le non-être.
Adam Zagajewski
Tu croises un vieil ami, vous échangez une poignée de main, tu lui dis : "Quoi de neuf ?" Il répond : "Je me suis marié le mois dernier." Ton cœur chavire. Le pauvre. Non seulement il ne lui arrive rien mais, en plus, il ne va pas tarder à être malheureux. Tu dis : "Merveilleux."
Sylvia était mince et bronzée. Ses cheveux lui descendaient à mi-dos. de longues mèches lui voilaient les yeux, donnant l'impression qu'elle était timide ou qu'elle se cachait modestement, mais aussi qu'elle était plus petite que la moyenne. Elle mesurait un mètre soixante-sept.
Janvier 1962 : «Je n’ai pas de travail, pas de travail, pas de travail. Je ne suis pas publié. Je n’ai rien à dire. J’ai épousé une folle.»
Écrire une histoire n’était pas aussi simple que de rédiger une lettre, ou de raconter une anecdote à un ami. Pourtant je pensais que cela aurait dû l’être. Tchekhov disait que c’était facile. Mais je produisais rarement une page entière en une journée. Les mots m’obsédaient, les relations étranges entre leurs sons, comme s’ils recélaient une musique, le chant bizarre d’un démiurge duquel émergeaient des images, des choses virtuelles, rues, arbres, gens. La musique allait crescendo comme si c’était elle l’histoire. Je devais laisser le champ libre, attendre le déclic, mais je n’y parvenais pas. J’étais un mauvais danseur, j’entendais la musique, j’effectuais les pas, mais j’étais incapable de me laisser emporter dans la danse.
Tout le monde a un rôle à jouer; ou tout le monde, que ça nous chante ou non, doit jouer un rôle. On joue dans sa propre comédie ainsi que dans celle des autres en fonction de la volonté et de l’imagination de chacun.
Elle m'écoutait patiemment lui lire mes nouvelles, en aimait certaines. Elle souriait et disait : "Oui." Ce seul mot me grisait terriblement.
Dès que le téléphone sonne, j'ai l'impression qu'on attente à ma vie. Ca me déroute.
L'attente ne dérange pas les masochistes, contrairement à la plupart des gens. Ce sont des instants terribles et avilissants, une torture sociale infligée aux prisonniers et aux chiens.
La vie est une affaire injuste. Qui a dit le contraire ? La vie est un milliard de spectacles ratés, de coups bas ; celui qui est au sommet est celui qui s'amuse le plus.
J'étais déprimé en rentrant à la maison. Le coût de notre amitié dépassait sa valeur.
Ils passaient souvent tard le soir et nous discutions jusqu'à l'aube en fumant de la marijuana. Nos conversations, qui tournaient souvent autour de la littérature ou du cinéma, étaient influencées par la marijuana, ce qui les rendait à la fois passionnantes et très ennuyeuses. Comme dans les films d'Antonioni, nous tirions une étrange satisfaction de l'ennui qu'engendraient nos longues soirées enfumées d'une décontraction moribonde durant lesquelles nous refaisions le monde. La plupart du temps, Sylvia était la seule femme dans la pièce.
J’étais misérablement normal; j’étais normalement misérable
On a besoin de sentir la présence d'une personne pour comprendre ce qu'elle dit, même la chose la plus simple. On n'entend pas les mots ; on s'entend soi, personnellement, prononcer des mots.
Les propriétés du coeur sont mises à l'épreuve par l'amitié.
Les choses n'ont de sens dans le monde humain que dans la mesure où elles n'en ont pas.