Citations de M. L. Stedman (344)
- Un bout de cuivre ne fait pas de quelqu'un un héros, dit Tom. Presque tous ceux qui méritaient vraiment les médailles ne sont plus là.
Je peux laisser ruiner mon passé, consacrer mon temps à haïr les gens pour ce qu'ils m'ont fait ou je peux pardonner et oublier. C'est tellement moins fatiguant. Il suffit de pardonner une fois, tandis que la rancune il faut l'entretenir à longueur de journée et recommencer tous les jours. Il faudrait que je fasse une liste pour m'assurer que je hais bien tous ceux qui m'ont causé du tort. On a tous la possibilité de pardonner.
On doit vivre avec les décisions que l'on prend. C'est ça le courage. Assumer les conséquences de ses erreurs.
L'histoire c'est ce sur quoi on se met d'accord. C'est ainsi que la vie continue.
Enfin, il fallait s’efforcer d'être heureux de son sort et reconnaissant que les choses ne soient pires.
L'histoire, c'est sur ce quoi on se met d'accord.
-Mais comment ? Comment fais-tu pour surmonter ça, mon chéri ? lui avait-elle demandé. Tu as enduré tellement d'épreuves, mais tu es toujours content. Comment fais-tu ?
-J'ai choisi de l'être, avait-il répondu. Je peux laisser ruiner mon passé, consacrer mon temps à haïr les gens pour ce qu'ils m'ont fait, comme mon père l'a fait, ou je peux pardonner et oublier.
-Mais ce n'est pas si facile.
Il avait souri, de son sourire de Franck.
" Oui, mais, Trésor, c'est tellement moins fatiguant. Il suffit de pardonner une fois. Tandis que la rancune, il faut l'entretenir à longueur de journée, et recommencer tous les jours. Il faudrait que je fasse une liste pour m'assurer que je hais bien tous ceux qui m'ont causé du tort. Non, avait-il ajouté, on a tous la possibilité de pardonner."
Et l'obscurité s'infiltre dans le ciel seconde après seconde, jusqu'au moment où les ombres ne tombent plus mais s'élèvent du sol pour remplir l'air. Les êtres humains se retirent dans leurs maisons et abandonnent la nuit aux créatures qui la peuplent : criquets, chouettes, serpents. Un monde qui n'a pas changé depuis des centaines de millions d'années s'éveille et s'active, comme si la lumière du jour, les humains et les évolutions du paysage avaient été une illusion. Plus personne ne marche dans les rues.
Plus tard, alors que Violet polissait les cadres en argent des photographies de ses fils, elle repensa à la situation pour la énième fois. Une fois qu'un enfant était entré dans votre cœur, il n'y avait plus de bien ou de mal qui tint. Elle avait vu des femmes donner naissance à des enfants engendrés par des maris qu'elles détestaient, ou, pire encore, des hommes qui les avaient violées. Et les femmes avaient aimé ces enfants d'un amour farouche, tout en haïssant les géniteurs. Il n'y avait pas moyen de se défendre de l'amour qu'on portait à un enfant, Violet ne le savait que trop bien.
Tout en vaquant à ses occupations de la journée - toujours en mouvement, toujours occupée -, Isabel sait instinctivement à quel endroit se trouve Lucy, reliée à elle par un fil d'amour invisible. Elle ne se met jamais en colère - sa patience vis-à-vis de l'enfant est infinie. Quand de la nourriture tombe par terre, quand des traces de mains sales tapissent les murs, cela ne provoque jamais de réaction, ni de regard désapprobateur. Si Lucy s'éveille en pleurant la nuit, Isabel la réconforte gentiment, avec amour. Elle accepte ce cadeau que la vie lui a envoyé. Et elle en accepte les fardeaux.
La lumière capta les yeux d'Isabel de telle façon qu'il eut l'impression de pouvoir voir en elle : une certaine ouverture, une clarté qui l'attirait.
" Revenez demain. Je vais préparer un pique-nique. On ira jusqu'à la baie.
- Je devrais peut-être d'abord demander la permission à votre père, non ? Ou bien de votre mère ? ajouta-t-il en penchant la tête de côté. Je veux dire, enfin, si la question n'est pas trop grossière, quel âge avez-vous ?
- L'âge d'aller pique-niquer.
- Ce qui, en chiffres, donnerait...
- Dix-neuf. Environ. Alors, laissez-moi me débrouiller avec mes parents", dit-elle, avant de lui adresser un signe de la main et de rentrer dans la maison.
Tom emporta la lampe dans la chambre à coucher. Son ombre se colla contre le mur, comme un géant plat, tandis qu'il retirait ses bottines et se déshabillait, gardant néanmoins son caleçon long. Ses cheveux étaient gonflés de sel et sa peau irritée par le vent. Il ouvrit le lit et se glissa dedans, avant de sombrer dans les rêves pendant que son corps continuait à suivre le mouvement des vagues et du vent. Toute la nuit, bien au dessus de lui, le phare monta la garde, fendant les ténèbres comme une épée.
Il s'agrippa à chaque pensée comme aux barreaux d'une échelle sur laquelle il pourrait se hisser afin de retrouver le monde connu, retrouver la vie.
Bien sûr, la perte d'enfants avait toujours été dans l'ordre naturel des choses. Rien n'avait jamais garanti que la conception aboutirait à la naissance d'un enfant vivant, ni que la naissance engendrerait une vie d'une longévité décente. La nature n'autorisait que les forts et les chanceux à profiter de ce paradis. Il suffisait de consulter la première page de n'importe quelle bible familiale pour le comprendre. Les cimetières, également, racontaient les histoires de ces bébés dont les voix, à cause d'une morsure de serpent, d'une fièvre, ou d'une chute de chariot, avaient fini par céder aux supplications de leurs mères: "Chut, chut mon tout petit." Les enfants qui avaient survécu s'étaient peu à peu habitués à la nouvelle manière de dresser la table, avec un couvert en moins, tout comme ils s'accoutumaient à se serrer comme des sardines sur le banc quand leur arrivait un petit frère ou une petite soeur. De même que dans les champs de blé où l'on sème bien plus de grain que ce qui peut arriver à maturité, Dieu semblait éparpiller des enfants excédentaires pour les récolter selon un calendrier impénétrable.
Elle savait que quand une femme perdait son mari, il y avait un mot tout nouveau pour la définir, elle était dorénavant une veuve. Un mari devenait un veuf. Mais si un parent perdait un enfant, il n'y avait pas de mot spécifique pour ce chagrin-là. Ils étaient encore un père ou une mère, même s'ils n'avaient plus de fils ou de fille. Tout cela semblait étrange. Pour sa part, elle se demanda si elle était toujours techniquement une soeur, maintenant que ses frères adorés étaient morts.
C'est un luxe que de faire quelque chose qui n'a pas d'utilité pratique : le luxe de la civilisation.
Point Partageuse tient son nom d'explorateurs français qui dressèrent la carte de ce cap saillant au sud-ouest du continent australien, bien avant que commence en 1826 la ruée colonisatrice britannique vers l'Ouest. Depuis lors, les colons s'étaient faufilés peu à peu vers le nord à partir d'Albany, ou vers le sud en partant de la colonie de Swan River, pour se déclarer propriétaires des forêts vierges couvrant les centaines d'hectares entre les deux. Des arbres hauts comme des cathédrales furent abattus à la scie à main afin de créer des pâturages; des routes étroites furent tracées à la force du poignet, centimètre après centimètre, par des gars à la peau pâle, aidés d'attelages de chevaux de trait, et c'est ainsi que cette terre, qui, jusque-là, n'avait jamais été marquée par l'homme, fut griffée, brûlée, cartographiée, mesurée, distribuée par lots, pour tous ceux qui souhaitaient tenter leur chance dans un hémisphère susceptible de leur apporter le désespoir, la mort, ou au contraire la fortune, au-delà de toutes leurs espérances.
Elles [les baleines] refaisaient surface de temps à autre à la faveur de grands coups de queue telle une aiguille ondulant dans une tapisserie.
On pouvait tuer un gars, avec toutes ces règles. Tom le savait. Et pourtant, parfois, elles étaient tout ce qui séparait l’homme de la barbarie, l’homme des monstres. Ces règles qui imposaient qu’on fasse prisonnier un soldat ennemi désarmé plutôt que de le tuer. Ces règles qui enjoignaient aux brancardiers d’emporter un ennemi blessé pour le soigner comme ils le faisaient ordinairement pour leurs camarades. Mais toujours, il en revenait à cette simple question : pouvait-il priver Isabel de ce bébé ? Et si cette enfant était seule au monde ? Pouvait-il être vraiment juste de l’arracher à une femme qui l’adorait, pour le confier à la loterie du destin ?
Il regarde l'océan se rendre à la nuit, il sait que le rayon de lumière va revenir.