Bénédicte Lombardo -
Un blog trop mortel .
A l'occasion du Salon du Livre de Paris qui s'est déroulé du 18 au 21 mars 2011,
Bénédicte Lombardo, directrice de la collection Territoires aux éditions Fleuve noir, vous présente l'ouvrage "
Un blog trop mortel" écrit par
Madeleine Roux. http://www.mollat.com/livres/madeleine-roux-blog-trop-mortel-9782265090736.html
Ils arrivent.
Ils arrivent et je ne crois pas qu'on puisse sortir! Si quelqu'un lit ceci,je vous en prie,alertez la police,tout de suite.Appelez les flics-s'il en reste quelque part.Dites-leur de venir nous sauver!Je ne sais pas si nous serons toujours vivants demain,après-demain,ou le jour suivant,mais dites-leur de venir avant qu'il soit trop tard...Qu'ils essaient,ou moins.
[...] mais Coquin − c’est son nom − les a tous charmés ! Bien sûr, voilà une bouche de plus à nourrir, à abreuver, et il faut le sortir, mais grâce à lui, on est moins grognons.
Et je dors, enfin ! Coquin s’allonge à mes pieds, appuie sa truffe sèche sur mes tibias. De temps en temps, il me lèche les pieds, il doit se rendre compte que j’aurais bien besoin d’un bain, mais il ne se plaint pas. Il ne me dit pas que tout est perdu, que nous resterons ici jusqu’à l’épuisement de nos provisions ou l’invasion finale des morts-vivants…
Non, il me regarde avec toute la tendresse du monde, reconnaissant.
Il me remercie de l’avoir pris avec moi, il est gentil, c’est mon bon chien.
L’étrange sensation d’être observé était toujours plus présente dans les couloirs. Il attribuait l’impression aux petites fenêtres qui ne laissaient filtrer que des jets anémiques de lumière. Cependant, il ne pouvait franchir cinq pas dans les couloirs sans sentir son dos se hérisser. Peut-être était-ce parce qu’il savait que ces photographies se trouvaient en bas, laissées là, dans ce bureau de l’horreur. Il semblait toujours les oublier une fois qu’il était à l’extérieur des murs de Brookline, mais quand il était dans son enceinte, elles se glissaient de nouveau dans son esprit.
Voilà ce qui nous attend derrière la porte, des prédateurs rendus fous par la faim, tenaillés non par un désir conscient mais par un besoin aveugle, irrépressible…
Je m’efforce de rester calme, j’espère que je ne m’en tire pas trop mal. En fait, bizarrement, ça m’aide d’écrire cette histoire, car elle devient ainsi un conte que je dévide pour vous, de la fiction, plutôt que cette réalité impitoyable qui dicte tout ce que je fais, dis ou pense. Je crois que c’est ce qui me manque le plus : la possibilité de choix.
— … tu imagines tes racines individuelles. Visualise-les alors qu’elles s’enfoncent dans le sol, toujours plus creux. Concentre-toi sur chacune d’elles, une après l’autre, alors qu’elles s’enfoncent plus profondément dans la fraîcheur et qu’elles sont en sécurité et enveloppées…
Le simple fait d’écouter sa description était relaxant. Puis, elle tendit les mains vers lui et appuya doucement les pouces contre ses tempes.
— Chaque racine se déplace dans le sol, remue la terre, prend de la force…
- Regarde donc dehors ! Il ne reste rien. Où irait-il ? On ne va pas se conduire en barbares, Ted, sûrement pas. Si ça avait été toi, caché dans ce placard…ou ma mère ? Quand les choses reviendront à la normale, ce sont ces petits actes d’humanité qui compteront.
Rosalyn had endured disappointing birthdays before, but never one in ankle-deep corpse sludge.
She shifted her boots out of the reddish muck, swallowing hard as her feet suctioned to the floor. The job got more familiar but not easier. Never easier. And this was way beyond skin slippage, this was putrefaction on a level she had never seen before in person. Digital images just didn't capture it, really. The microscopic bacteria on the bodies were having a field day, turning once soft but decidedly human humans into a soup as dark and hideous as black gut blood, the kind of blood one never wanted to see squirt out of anything. But now she had to look at it.
Now it was her job.
Grandir dans le système des familles d’accueil avait fait naître en lui un intérêt pour les machines sociales, les systèmes qui prenaient des décisions au nom des gens plutôt qu’avec eux. Il ne comparaît tout de même pas sa vie aux tristes circonstances de ces pauvres gens. Le système avait pris une bonne décision pour lui, tout compte fait. Il n’aurait jamais échangé sa famille contre une autre.
Ted et moi avons plus ou moins mis au point une stratégie : viser la tête, à défaut la poitrine. Je crains que le jeunot n'ait pas assez de force dans les bras pour infliger de vrais dégâts, mais il se débrouille à merveille avec Manchote: un bon coup dans le torse tandis que, d'un revers peu académique, je m'attaque au cou. Il cède avec la même facilité bizarre que le bras l'autre fois. Je n'ai pas l'impression d'avoir affaire à un corps humain, c'est trop mou, trop facilement détruit.
La tête en putréfaction de Manchote, suintante de partout, continue à me fixer depuis le sol où le reste gît en tas informe. Elle porte toujours ce maudit T-shirt avec des pâquerettes qui dansent et en dessous, écrit d'une main enfantine, maladroite : "La meilleure des mamans".
Elle est passée tout près du livre qu'elle avait laissé tomber, étalant son sang en marchant, et avançait les pieds en dedans, les traînait; on aurait dit un canard en plastique assemblé n'importe comment par un gosse. Elle se dirigeait vers moi sans se presser et mon cerveau ne parvenait pas à assimiler ce que mes yeux découvraient. A ce moment-là, la hache d'un rouge luisant est apparue à la limite de mon champ de vision : la hache, cette si jolie hache avec son manche briqué à mort et sa belle tête rouge incurvée! Elle brillait d'une couleur parfaite, comme du gloss soigneusement appliqué avant de sortir s'amuser. Un petit marteau pendait à côté de la vitrine, avec l'indication : En cas d'urgence, brisez la glace. Putain, oui, ça c'était du cas d'urgence!