je vous observe
derrière les buées du temps
vivantes dans vos tourments
je pense aux courants d’arrachement
qui me raptent et m’aimantent vers vous
je cherche ce qui me rive
à l’écho de votre présence
La nostalgie à le goût écœurant des fruits trop mûrs.
La beauté, la cohérence, la continuité, le respect de l’esprit des lieux, toutes ces considérations semblent accessoires face aux lois du marché et devant le va-comme-je-te-pousse qui orchestre trop souvent nos manières d’organiser la trame de nos villes : Nos paysages humains sont à repenser entièrement.
(Lux, p.31)
J’écris parce qu’en cette période de pandémie et de bouleversements climatiques, d’inégalités, de pauvreté de violences ahurissantes, il importe de trouver des refuges, des lieux où tout pourrait s’épanouir, pour le plus grand nombre possible, quelque chose comme la vie bonne.
(Lux, p.140)
« Vous voilà
de mères en filles
bien portantes de corps
affairées
à mener à leur pleine grosseur
la tauraille et la marmaille
qu’il faut élever
pour les manger
toutes crues d’amour » ,…
Chacun d'eux m'a dit un jour qu'il espérait très fort que je meure très vieille. Déjà leurs voeux portaient en eux l'écho anticipé de ma disparition.
Les souhaits tristes sont peut-être les plus doux.
chaque jour nos assiettes ébréchées
donnent un goût de fêlure
à tout ce qu'on mange
Nous ne saurons jamais dire j'habite
mais nos gorges durcies de ronces
nos lèvres mûries de sèves
nos langues de lierres deliés
chuchoteront encore dans le coma
des cimes
l'étrange appel d'un territoire
à venir.
Je dresse la liste des fragments d'elle qui me constituent.
Ma mère cueillait des choses pour que je les ingurgite. Des fruits infimes un peu acides. Des saveurs brutes et sans apprêt. Des trésors de patience. Quel poids occupe en moi toutes ces choses avalées? Je ne connais pas ma densité. Je ne sais pas exactement ce qu'elle m'a transmis. Je ne magnifie rien. Je ne la magnifie pas. La nostalgie a le goût écoeurant des fruits trop mûrs.
Même quand j'écris "je", je veux dire "nous"; mes mots sont des échos incertains où résonnent d'autres vies que la mienne.