Un road trip émouvant qui vous replongera dans le festival de Woodstock.
Sortez vos robes à fleurs, vos pantalons patte d’eph’, vos petites lunettes rondes et votre petit joint….heu, oubliez le joint, ça ne serait pas raisonnable…
Lazare Bowden est un acteur. Mais pas celui que l’on découvre au cinéma ou dans les séries Netflix. Il est acteur dans la vie privée. En ce moment, d’ailleurs, il a un « rôle » de fils pour Gloria, atteinte d’Alzheimer et qui ne se souvient pas que son vrai fils est mort, et un « rôle » de père pour Swann, dont le géniteur est en prison pour meurtre, mais ça, sa mère s’est bien gardée de le lui dire…
« La semaine dernière, par exemple, j’étais l’ami éploré aux funérailles d’un homme de mon âge – trente ans environ – qui s’était fâché avec tout le monde avant de mourir dans un accident de voiture. »
Il y a un petit air du film « Alibi.com », vous ne trouvez pas ?
J’ai beaucoup aimé le début. Lazare quitte New York pour prendre quelques jours de vacances à Ithaca. Jade monte dans sa voiture, pensant avoir affaire au Uber qu’elle a commandé. Lorsque Lazare lui explique sa méprise, Jade descend de la voiture et le jeune homme reprend sa route. Que se serait-il passé s’il avait répondu oui ? Magie de l’écriture. Mathieu reprend son texte en effectuant un retour en arrière de cinq minutes, et tout s’enclenche.
« Je quitte New York pour aller respirer l’air pur d’Ithaca, à quatre heures de route vers le nord. Je laisse derrière moi cet océan de béton surpeuplé et bruyant pour le spectacle reposant de la verdure abondante. »
Nous sommes en 2019, on fête les cinquante ans du festival de Woodstock. Le lecteur est embarqué dans la voiture avec Lazare, Jade, Gloria et Swann. Car, grâce à un concours de circonstances à la fois drôle et émouvant, tout ce beau monde a pris place dans la voiture. Destination : Woodstock. Gloria est persuadée que nous sommes en 1969 et qu’elle est attendue pour chanter sur scène. La vieille dame pétillante calque le passé avec le présent, revivant cette époque bien particulière et ce festival de musique qualifié comme le plus grand du XXème siècle.
« Dernière chanson avant l’oubli » est un roman émouvant et juste, qui, à travers des rebondissements, des personnages savoureux et une belle dose d’humour, touche le lecteur avec des thèmes important : la maladie d’Alzheimer, bien sûr, mais aussi le bonheur, la famille et le sens de la vie en général.
L’imagination du lecteur est mise à contribution plus souvent qu’à son tour. Souvenez-vous, on a vécu deux fois le début du roman. Chauffeur Uber ou pas ? Partant de là, on peut tout imaginer. Réalité ou fiction ? Tout le roman ne serait-il qu’illusion ? La vie de Lazare en est une, déjà, ça c’est certain. Car il s’est perdu dans son travail, à force de jouer un fils, un père, il a oublié qui il était et ce qui le rendait heureux. Jade, quant à elle, est enfermée dans une relation amoureuse toxique et doit décider rapidement si elle se réconcilie avec son père mourant. Swann, en ado qui se respecte, a fait une belle bêtise dont il redoute les conséquences. Le road trip sera l’occasion pour chacun de fuir une réalité qui les dépasse, et de se retrouver, ensemble. Une équipe pas forcément faite pour s’entendre au départ, mais qui va nouer des liens malgré tout.
J’ai aimé l’immersion dans le Woodstock de 1969, autant grâce aux détails vestimentaires qu’aux valeurs véhiculées par le mouvement hippie, le tout avec une bonne dose musicale. Pour moi qui n’ai pas connu cette époque, je me suis régalée en me projetant là-bas. J’avais presque envie d’y être ! La construction du roman sous l’angle de Lazare avec l’emploi du « Je » y est aussi pour quelque chose.
La plume de Mathieu est fluide, descriptive et juste. Ses personnages sont des gens que l’on pourrait tout à fait croiser dans la rue, suffisamment étoffés pour que le lecteur puisse les imaginer. Gloria m’a beaucoup touchée. Alzheimer est une maladie terrifiante, et pourtant, Mathieu l’a transformée en bulle de joie.
La joie, c’est ce qui ressort de ce roman. Une émotion positive, avec des personnages positifs.
Un mot de la fin, émouvante, bien entendu, et collant parfaitement à l’entièreté du récit. Il n’y en avait pas d’autre possible. Lazare sort grandi de cette aventure, il fait désormais les bons choix pour lui et mène sa vie comme il l’entend. Il a trouvé sa voie, et cela laisse songeur. Ai-je trouvé la mienne ? Que pourrai-je faire pour y arriver ? Il y a un brin de philosophie dans ce dénouement, un rouage de réflexion qui s’enclenche dans l’esprit du lecteur. Permettant de continuer un peu le voyage après avoir tourné la dernière page.
Je vous conseille « Dernière chanson avant l’oubli », c’est une histoire qui fait du bien au moral.
Vous écouterez bien encore une fois « Fire » de Jimi Hendrix ? Pour la route !
Je remercie Mathieu pour cette lecture.
« Une promesse que j’ai bâtie sur des fondations fragiles, celle d’un ailleurs où je pourrais être un autre moi, débarrassé de cette couche new-yorkaise qui m’impose d’être comme tout le monde, c’est-à-dire de n’être personne. »
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