Citations de Maurice Olender (30)
Comme toute oeuvre de création, l’amour résulte sans doute d’abord d’un jeu enfantin.
L’amour invite à jouer à cache-cache.
Le sémitisme ne se réduit pas nécessairement aux Hébreux. Mais si l'on peut considérer l'arabe, la langue, et l'islam, la religion, comme des expressions sémitiques cardinales, l'hébreu - la langue identifiée à la religion monothéiste qu'elle véhicule - oriente bien souvent au XIX°s les questions posées à l'aire sémitique.
Nombreux sont ainsi les spécialistes qui atrribuent à la totalité des groupes sémitiques les caractéristiques qu'on a voulu reconnaître aux Hébreux de la période historique. Corollaire à cette généralisation: Renan et tant d'autres dans l'Europe savante du siècle dernier appliquent à ceux qu'ils nomment Aryens - ou Indo-Germains ou Indo-Européens - les qualités spécifiques dont ils créditent les Grecs. Si le dynamisme et la capacité d'intelligence abstraite de ces derniers annoncent un monde indo-aryen en devenir, le pôle védique de l'univers aryen représente les puissances du primordial.
pp. 36-37
On peut aimer s'entourer de livres pour rêver de les lire. Et si la fonction la plus efficace de toute bibliothèque était d'inciter à une lecture sans fin qui n'aura jamais lieu ?
Rien ne l'écartait de sa règle de lecture : ne jamais tenter de comprendre quoi que ce soit dans le dos de l'auteur, ne pas savoir mieux. Son absence de maîtrise lui permettait de retrouver parfois, sous les doigts de l'auteur, ce qui leur avait à tous deux échappé
L'enfant rêvait d'être sans regard sur le monde. De ne discerner l'univers que par les mouvements du corps, les rythmes de la vie, au son des tambours. Il voulait happer les histoires sans les déchiffrer.
Quand deux êtres singuliers se croisent sur cette terre, se devinent au point d'imaginer se connaître par la traversée de l'autre en soi, il peut y avoir vision d'amour. Pourtant, souvent, se trompant de rôle, jouant à être l'autre de soi, rêvant d'une impossible maîtrise, on oublie que l'intransigeance n'est un droit absolu qu'entre soi et soi.
Comme la course est une effervescence sans lieu, la séduction s'exerce jusqu'au bout pour écarter la mort un instant encore.
L'écriture peut-elle animer le blanc de la page sans s'y laisser aller ?
L'absence de récit ne rend-elle pas compte, aussi, d'un désir - mais désir régenté, peut-être, et par quelle angoisse - de ne pas dupliquer en un autre corps, de ne pas se traduire en quelque image que ce soit, de ne pas se confronter au texte pour et contre soi ?
Car, pour mieux s'ancrer dans la vie de tous les jours, les traditions sont oublieuses de leur histoire.
Insistons sur ce point : pour cause de représentation, nous n'appartenons pas (ou si peu) à notre propre présent.
On ne choisit ni le moment ni le lieu de sa naissance. Un peu plus les récits qui contribuent à la fabrique de soi.
(...) une seule page peut faire un livre alors que mille pages pourraient ne pas en être un.
Quand j'écris, j'ai de la peine à me relire. D'autant plus que je rature et surligne presque tout ; ce que je veux gommer, en le rayant, ce que je décide de conserver en le mettant en relief : encore les embarras du lire et de l'écrire jamais vraiment apprivoisés.
En effet, il n'est pas impossible qu'on archive avant tout pour pouvoir avoir droit au sommeil profond.
La mémoire n'est-elle pas d'abord mélodie, temporalité saisie à la racine des émotions ?
On peut aimer s'entourer de livres pour rêver de les lire.
En quête l'un livre égaré, entre écriture et sommeil (car on écrit souvent en dormant), on peut avoir le sentiment qu'un fragment de soi perdu cherche à se compléter.
Avancer nécessite alors un triple mouvement : poursuivre "à vide", assumer de s'égarer ; rejeter le trop-plein en soi en l'assimilant, ou, hors de soi, en l'oubliant, sans l'escamoter pour autant ; enfin, se lancer, sans trop tenir compte des habitudes de penser inhérentes à tout savoir établi.
Comment peut-on apprendre à lire, à écrire les alphabets de langues dans lesquelles ont été pensées et consignées, en toute légalité, des lois (en France, en Italie, en Allemagne) qui triaient les humains, séparant ceux qui était destinés à la vie de ceux qui devaient disparaître pour "raison de naissance" ?