Citations de Mira Maguen (60)
Un jour, il avait acheté au supermarché des petits pains ronds identiques. Il en avait mis un dans un sachet noir, un autre dans un sachet blanc, avait fermé les sachets pour qu’on ne voie pas ce qu’ils contenaient et avait demandé à ses deux frères de choisir. Quatre mains s’étaient tendues vers le sachet blanc. Ils l’avaient ouvert et en avaient sorti un petit pain. Ensuite, ils avaient ouvert le sachet noir, et en avaient sorti un autre petit pain, identique au premier. Les deux garçons avaient lâché : « C’est les deux pareils.
- Vous voyez. Un petit pain, c’est un petit pain, peu importe dans quel sachet on l’a mis, blanc, noir, ça aura toujours le même goût. Eh bien, nous aussi, on est comme les petits pains, la peau de l’être humain, c’est le sachet, un est né dans une enveloppe noire et l’autre dans une blanche. Ce qui est important, c’est le cœur et le cerveau de la personne qui est dedans. »
L’être qui morfle ne se console pas en pensant aux milliards à qui il n’est rien arrivé.
« Tu sais quoi, reprit-t-il, les gens, plus ils en ont, plus ils en veulent. Un animal rassasié cherche de l’ombre et va dormir mais l’homme, non, il cherche comment en avoir plus. Les êtres humains sont trop avides. »
« Un instant avant qu’elle ne disparaisse de sa vie, elle lui avait donné ce petit papillon qui avait une trompe écornée et un œil écrasé .À sa question de savoir s’il guérirait , elle avait répondu : « S’il le veut assez fort , il
guérira » ....
« Partout où il avait été au cours des dix premières années , le précédait un cliquètement frénétique de bracelets qui tapaient ou claquaient , tambourinaient ou dansaient . Un grelottement de ferraille léger, un écho vide sur une cheville étroite . Mama Ruth disait : « Exactement comme une chèvre à qui on a mis une clochette » .
« Pourquoi donc cherche - t- elle un avenir , une bribe d’éternité dans chacune de ses étreintes , chacune de ses caresses ? » ..
« Comment pourrait - il promettre un avenir ——- de l’éternité , n’en parlons pas ! ——, lui qui n’avait même pas tenu la promesse qu’il s’était faite à lui- même .Le jour du premier film qu’il avait vu avec Mama Ruth , il s’était juré de devenir réalisateur . Tous les samedis soir , il allait avec elle au cinéma et les autres jours de la semaine , tout seul, il se prenait pour le gamin de CINÉMA PARADISO , mais au moment de tenir sa promesse, il était devenu médecin » .
« Les boucles d’oreilles violettes . Leur éclat diffus et tremblotant . Si elle les portait encore, il l’a reconnaîtrait tout de suite .Simples , translucides comme des gouttes de pluie sur un iris. Le souffleur de verre qui les lui avait fabriquées avait juré que jamais pièce plus lisse n’était sortie d’entre ses mains » .
Partout où il avait été au cours de ses dix premières années, le précédait un cliquètement frénétique de bracelets qui tapaient ou claquaient, tabourinaient ou dansaient. Un grelottement de ferraille, léger, un écho vide sur une cheville étroite. Mama Ruth disait: "Exactement comme une chèvre à qui on a mis une clochette."
"Ne te moque pas de moi, Adam, pour ce que je vais te dire maintenant, reprit-elle en suivant des yeux le vieillard qui s'éloignait, mais je trouve que la vie réelle n'est qu'une succession de ratages et d'erreurs en comparaison de la vie que nous avions fantasmée, du film qui passe dans notre tête, et qui, à chaque nouvelle séance, nous rajoute une ride. Seule ta mère a fait les choses à l'envers, elle a passé un coup de Tipp-ex sur ses erreurs et a décidé de courir après ses chimères. "
Le soleil alla éclairer l'autre côté de la terre. Le globe, en revanche, avait une peau d'éléphant, il ne dévia pas de sa trajectoire, insensible aux deux bicyclettes qui lui roulaient dessus, avec à leur bord quatre nombrils vibrants. Il continua à tourner comme si de rien n'était. S'il avait eu un tant soit peu de considération envers le genre humain, il aurait fait marche arrière, se serait arrêté et aurait rendu hommage à ces deux enfants-là.
Que lui dirait-il en guise d'au revoir? Les formules rebattues du genre: puisses-tu ne jamais connaître d'autres peines?puissions-nous ne nous voir qu'en d'heureuses circonstances ? Non, ces phrases les pompes funèbres n'avaient qu'à les lui servir. Pour sa part, il lui chuchoterait: tu devrais toi aussi en terminer avec ton bus, le bon Dieu mérite un carton jaune, tire la langue au ciel, fais-lui un doigt d'honneur, vas-y, comme tu le sens. N'oublie pas, ajouterait-il, que ton foetus était unique et qu'il ne reviendra pas, c'est terminé pour lui alors que Dieu est exactement le contraire, jamais de limite, jamais épuisé. C'est à l'homme de savoir dire stop. Assez.
Les jambes bancales d'Anna les minaient de l'interieur, de même que la commotion cerebrale de Tom, sans compter qu'ils gagnaient difficilement leir vie, et pourtant leur amour ressemblait à ces galets au fond des rivières, entiers, durs, que le courant n'emportait pas.
"(.) Vous, la seule chose qui vous interesse c'est Dieu et cette parcelle de terre merdique! Les pauvres gens, les malades, les arriérés, les infirmes, vous vous en foutez. Ça ne vous concerne pas. Où crois-tu que vous mènera votre entêtement? Une barrière pourra bouger d'un kilomètre d'un côté ou de l'autre, sache que le sol sous tes pieds restera toujours à la même place. La seule chose qui n'est jamais immobile, c'est la vie. Or, l'être humain n'a pas d'autre vie. Et elle ne lui est donnée qu'une fois, s'il la loupe, c'est foutu. Pourquoi est-ce que vous faites chier tout le monde pour des dunes arides qui remontent au temps de Mathusalem?(...) "
"Ce n'est pas l'avenir que j'interroge, mais vous ! L'avenir nous le dira, l'avenir nous le dira, et que dira mon fils? Vous qui parlez du haut d'un penthouse de luxe, descendez donc au rez-de-chaussée pour me parler! Mon gosse se reveillera-t-il, oui ou non? Tiendra-t-il sur ses jambes, oui on non? Ne vous cachez pas derrière l'avenir, c'est vous qui devez me donner une réponse! Vous êtes payés pour ça ! "
"Regardez comment va la vie! En un e seconde, tu es en bas et, la seconde d'après, la roue tourne en sens inverse.
- C'est la chance ma chérie, la chance dit son père.
- C'est le bon Dieu, mon chéri, le bon Dieu répliqua sa mère en allumant une cigarette.
- Tu sais quoi ? Appelle ça comme tu veux, je m'en fiche.
- Tu sais quoi ? Peut-être qu'il ne s'agit que d'une question de physique et de chimie à laquelle, on ne comprend simplement rien."
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Le temps viendra où toi et moi nous retrouverons, nous comblerons le fossé, rattraperons le temps perdu et nous étreindrons sur l’éminence d’une splendide étoile, et les enfants, comme tous les enfants du monde, se prendront la main, courront, émus et à perdre haleine à poursuivre les étoiles, dans des terrains de jeu infinis.
D’un côté habite Yoav, de l’autre Asaël, l’archange Michel à droite et Gabriel à gauche. Qu’adviendra-t-il ? Laissons les jours parler. Si malgré tout nous voulions formuler une parole aimable à l’égard de Dieu, louons-le de nous cacher l’avenir : seul le temps fractionné en jours et en instants nous révélera la suite.
Il était de ces êtres dont la présence vous faisait sentir que quelque part, au-delà de l’instant prévisible, se trouve apparemment l’existence.
J’aime Yonina quand elle est débridée et sans tact, primesautière et sauvage comme les roses épineuses avant qu’on les taille, de même qu’il m’aurait fallu sa grande gueule à cette heure et en ce shabbat. Une bouche qui ne craignait pas la sainteté du deuil ni la majesté du veuvage.