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3.6/5 (sur 141 notes)

Nationalité : Royaume-Uni
Né(e) à : Cornwall , 1972
Biographie :

Nick Harkaway (né en 1972 à Cornwall) est romancier. Il est l'auteur de The Gone-Away World, publié en juin 2008. Il est le fils de John le Carré.

Il a fait ses études à Clare College, Cambridge, où il a étudié la philosophie, la sociologie et les sciences politiques. Il a travaillé dans le cinéma avant de devenir auteur.

Source : Wikipedia
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Citations et extraits (44) Voir plus Ajouter une citation
"Nous avons perfectionné la justice, le Témoin est partout." C'est le slogan. Et ça marche. Nous sommes tous transparents les uns aux autres. Il n'existe plus de secrets, il ne peut - il ne doit - plus en exister.
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Telle est la promesse du Système. Nul n’est jamais seul, sans protection. Nul n’a jamais à avoir peur du noir.
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Ça le serait moins avec le Saint-Père de Rome, certes, mais, contrairement à ce qu'il a l'air de croire, Dieu n'a que faire de son opinion. Quoique la politesse exige sans doute de nous que nous écoutions ce qu'il a à dire.
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En ce qui me concerne, rien ne légitime cette intrusion. Je conteste l'argument selon lequel elle a lieu dans l'intérêt de la nation, et d'ailleurs, même si c'était vrai, ce qui m'arrive ne serait pas plus acceptable. Légalité et légitimité ne sont pas synonymes. La loi est à l'image d'un idéal, mais les différentes lois ne reflètent pas forcément cette image, elles peuvent appartenir au droit sans être dans la droiture.
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Lorsque je me suis retourné vers l’immeuble, Annabel Sophia Bekele attendait sur le perron, professionnellement accueillante, la main tendue.
« Bienvenue chez les Juges du Feu ! »
Je l’ai serrée.
Ce nom-là, je n’arrive pas à m’en souvenir. Une référence historique, semble-t-il. Après le grand incendie de 1666, vingt-deux juges ont été chargés de délimiter les propriétés disparues de Londres. Il le fallait, vu l’étendue de la destruction : les points de repère qui avaient servi à tracer les contours grossiers des parcelles faisaient partie du champ de ruines. Les juges ont donc pour moitié dessiné des traits en l’air et, ce faisant, il n’est pas impossible qu’ils aient parfois saisi l’occasion d’améliorer un tantinet les flux de la cité, de déraciner impasses et coupe-gorges, de les replier totalement sur eux-mêmes.
« Des géographes fantômes bienfaisants », m’a dit Annabel, juste après m’avoir précisé que c’était Annie, parce que personne ne l’appelait plus Annabel à part son ancienne proviseure et moi.
Le nom convenait bien à son entreprise, qui créait des mondes à partir de rien – ou, plus exactement, de chiffres. La société avait d’autres sources de revenus : elle testait la voiture magique sur le terrain pour son fabricant et ajustait son programme, en phase d’apprentissage ; elle réalisait aussi, grâce au temps machine inutilisé de sa prodigieuse infrastructure, divers calculs requis par des institutions qui manquaient de cycles propres. Toutefois, elle travaillait pour l’essentiel à des créations.
L’immeuble lui appartenait – encore un revenu potentiel -, mais cinquante pour cent de ses locataires échappaient à un loyer vertigineux au motif qu’elle tenait au « bénéfice de la sérendipité ». J’en ai déduit que les jeunes programmeurs à la dérive dans les couloirs et les espaces détente, très occupés à papoter en considérant de haut les créateurs de mode aux marques balbutiantes, les concepteurs de jeux, les microbrasseurs et les architectes, composaient avec eux une version miniature du ragoût culturo-commercial qui avait si bien réussi dans la Silicon Valley. Annabel – Annie – a reconnu que oui, c’était exactement ça. Cette année, les Juges du Feu avaient participé au succès d’une nouvelle chaise ergonomique et d’un système de suivi d’enfant en réseau maillé. J’ignorais ce que pouvait bien être la seconde de ces merveilles, mais d’après ma petite-fille, c’était à la fois simple et très malin – combinaison de qualités que je trouvais aussi agréable qu’elle l’appréciait visiblement. Elle a jeté un coup d’œil à Bobby qui, planté derrière moi, dévissait joyeusement une chose d’où partaient des tas de fils, sans interrompre sa conversation avec un très jeune homme en salopette. Elle l’appréciait évidemment pour les mêmes raisons. Simple mais malin : une bonne combinaison chez un amant. Les auteurs de fictions romantiques aiment la complication lardée d’angoisse, façon Byron ou Tolstoï, mais la simplicité est souvent bienvenue dans la vie réelle, ainsi que la gentillesse. Il fallait transmettre cette immense sagesse à Annie, me suis-je dit, avant d’admettre que si Bobby lui plaisait, elle la possédait déjà.
Nous avons erré dans de vastes couloirs où couraient des tuyaux en métal et traversé des espaces de travail aux murs de brique nue, éclairés par des lampes d’architecte à échelle industrielle. Il s’y trouvait notamment l’inventeur d’un nouvel instrument de musique et un type qui mettait au point une souris améliorée. J’ai failli lui demander s’il ne pensait pas plutôt à une souricière, mais j’ai compris à temps qu’il avait dit exactement ce qu’il voulait dire, même si je ne voyais pas en quoi un rongeur amélioré allait se révéler utile. Le locataire s’est expliqué. Le système digestif des vautours éliminant les maladies, leurs excrétions constituaient un pur fertilisant, car leur féroce chimie interne brûlait jusqu’aux microbes les plus révoltants. Le massacre mondial dont ils étaient victimes représentait de ce fait un danger sans précédent pour la santé publique générale. Leur extinction en de nombreuses régions du globe s’accompagnait de la renaissance de graves infections. Mon interlocuteur voulait introduire l’heureuse caractéristique du vautour dans les populations de rongeurs urbains : nous ferions un bond gigantesque vers l’éradication de maladies problématiques – avancée cruciale dans un monde qui perdait rapidement la partie face aux bactéries résistantes.
« Il est docteur en médecine, alors ? » ai-je demandé quand nous avons continué notre chemin, Annie et moi. « Il a un diplôme de scénographie, m’a-t-elle répondu en riant. Au départ, il s’est lancé dans la biotechnologie pour fabriquer un poisson rouge aux couleurs de son équipe de foot. Il met ses plans au point ici, sur nos ordinateurs, et il externalise les trucs expérimentaux. » Je l’ignorais totalement, mais tout cela était possible, semblait-il. Quant à savoir depuis quand… Je souffrais peut-être du « choc du futur ». Cette remarque a éveillé l’ironie d’Annie, qui m’a signalé que l’expression avait près de cinquante ans « quoique Rousseau se soit plaint de quelque chose de très semblable en 1778 ». Ce ton absent m’était familier : elle parlait souvent comme ça dans les réunions et conférences où les journalistes lui demandaient si le monde ne changeait pas trop vite.
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Les quartiers mal famés ne sont plus guère à Londres qu’un souvenir, mais la maison qu’elle cherche se trouve à la limite de l’un d’eux : une vallée hideuse, un lotissement aux bâtisses brutalistes aussi sales que des molaires pourrissantes, disposées autour de cours centrales qui n’ont jamais servi que de champs de bataille. Aux yeux de Mielikki, ces constructions posent plus de problèmes à cause du but dans lequel elles ont été conçues que par leur disposition : il s’agit de boîtes où stocker les Londoniens excédentaires. Le message d’inutilité qu’elles charrient n’est pas difficile à leur arracher, et leurs habitants l’ont déchiffré dès qu’ils ont vu où on les envoyait. À partir de là, le projet s’est échoué dans un marécage d’attentes médiocres et de fureur rentrée. Le siècle précédent a produit nombre de ces mijoteuses à colère, dont la chaleur a imbibé si profondément la terre et les gens que le Système lui-même est incapable de l’en extraire rapidement. Ses détracteurs – le sujet de la présente enquête, par exemple – y voient la preuve qu’il n’est pas tout ce qu’il est censé être, mais Mielikki peut interpréter l’histoire, elle aussi ; elle veut bien qu’on lui cite une société qui a fait mieux avec ce qu’elle avait hérité du passé. Le remède n’est évidemment pas d’en revenir aux itérations de la démocratie théoriquement représentative qui a provoqué ce gâchis, pour commencer.
C’est toutefois la façade arrière de la maison qui domine la vallée des dents. L’inspectrice descend du tram puis le regarde disparaître. Un instinct capricieux la pousse une seconde à se lancer à sa poursuite, à y remonter puis à y rester jusqu’au terminus. Un tram en mouvement matérialise une bulle spatiale nettement séparée de ce qui l’entoure. Le temps y passe à une vitesse légèrement différente ; ses occupants sont incapables d’interaction physique avec la population de l’extérieur. Ses rails représentent l’intrusion dans l’espace normal d’un autre plan physique – d’une banalité si confortable, pourtant, que peu de gens sont conscients de ce qu’ils voient. Son terminus est un carrefour au même titre qu’un aéroport, un endroit où une réalité temporaire se fond dans la réalité consensuelle permanente – où les rails s’interrompent -, un pont entre deux pouvoirs : une transition en transition. Un lieu aussi enserré recèle certainement des indices relatifs à presque tous les mystères, crachés dans la plaine littorale du mouvement humain.
Mielikki grogne en reconnaissant cet état de flux persistant – le dialogue entre fugue et logique qui appartient à son arsenal professionnel.
Elle regarde autour d’elle, repère les caméras des façades et des réverbères, cherche les angles morts – créés ou inattendus -, les endroits où elle s’installerait en tant que gamine pour jouer à cache-cache et la murette depuis laquelle les adolescentes suivent les concours de frime des jeunes mâles. Elle cherche les emballages de fast-food et les bouteilles plastique, les mégots, les aiguilles, les téléphones jetés, le moindre détail racontant une histoire. Ça ne risque pas d’être celle qui l’intéresse, mais toutes les histoires ont des points communs. Toutes les histoires sont une, au bout du compte.
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Eh bien, je n’ai pas peur. Lorsque le sac me libère la tête, je suis très occupée à infliger à je-ne-sais-qui la plus belle engueulade de sa courte vie de jeune Romain. Je ne suis pas une petite traînée qu’on emporte, gloussante et protestant sans conviction – d’ailleurs, aucune femme, quelle qu’elle soit, ne devrait rire de telles balivernes ! Moi, j’ai quarante-deux ans et je suis une putain de lettrée, nom de Dieu !
Oh, bien sûr, j’aurais sans doute trouvé ça drôle à l’époque de mes études. Et ce putain d’Aurelius Augustinus aurait aussi été partant, à l’époque de ses frasques. S’il y avait pensé, il m’aurait jetée sur son épaule et portée jusqu’à quelque repaire adéquatement meublé pour la fornication pastorale, où tout le monde aurait eu droit à de la bonne huile d’olive et de la piquette, dont une grande partie aurait terminé à des endroits qu’aucune olive levantine digne de ce nom n’aurait reconnus. À vrai dire, puisqu’on en parle, je suis à peu près sûre qu’il y a pensé – si ce n’est lui, alors un des prédécesseurs dont l’existence lui inspirait une telle fureur.
Seulement voilà : mon fils mort, j’incline à une manière moins exubérante d’être au monde. Une femme privée de son mari est une veuve, une fille de ses parents une orpheline, mais il n’existe pas de mot pour dire ce que je suis parce que je ne devrais pas être ou, peut-être, parce que ce genre de choses arrive si souvent que ça ne vaut pas la peine d’en parler. C’était mon fils : je n’ai pas besoin de mot pour définir ce que je suis à présent. Cela ne me quitte jamais.
Je vis donc mon après-vie. Je suis sérieuse ; je lis beaucoup et je bois peu. J’enseigne, je mène des recherches, je prends des avis. Mes élèves me paient bien – ceux qui ont sondé le mystère de Carthage et peu à peu compris qu’ils vont avoir besoin de connaissances véritables, outre celles dispensées ici. Je me conduis avec la dignité de l’érudite et vais connaître un âge mûr confortable puis une longue vieillesse très respectée. J’appartiens à présent au corps enseignant ; il nous arrive toujours de trouver à l’occasion entre nous quelque consolation physique, mais, professeurs que nous sommes, c’est en général avec beaucoup de modération. Des dîners aux chandelles auxquels les autres convives ne se présentent pas, une proximité décontractée, voire, peut-être, une coupe de vin pour laisser tomber la toge : séduction mutuelle complice, d’une élégance et d’une discrétion toutes romaines. Ce genre de mise en scène ne sert pas à grand-chose.
Par tous les dieux et tous les saints, j’espère qu’aucun de mes collègues ne s’est senti pousser des ailes. Si jamais un vieux bouc costumé en Dionysos a décidé de me courtiser pendant qu’un quartet de charmantes petites choses du marché aux esclaves joue du crincrin les yeux bandés, je vais sans doute le poignarder, et ça va faire tout un foin. Oui, le poignarder, comme la petite provinciale que j’étais en arrivant ici. J’ai toujours ma novacula sur moi. Je m’en sers pour mes préparations aux plantes, mais je n’ai pas oublié qu’elle me permet au besoin de m’affirmer. Une lame est une lame ; la petite garde en croix de la mienne évite aux doigts de glisser, au cas où.
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Quatre jours plus tard, rebelote : la traînée de 4 révélatrice. Le moniteur de Harrison a disparu à jamais, Dieu merci, après avoir émis en mourant un gaz apparemment toxique qui interdit à son ex-propriétaire de s’en offrir un autre. Restent, hélas, les émulateurs, ces programmes malins qui, appliqués à un matériel coûteux, l’obligent à se comporter en vieillerie à deux euros. Il est possible de se procurer un stock ticker pour iPad qui fait ça et, allez savoir pourquoi, j’ai été contaminé, je me suis mis à utiliser l’engin. Mes autres appareils tournent toujours, mais ma tablette, posée sur son petit support, ne montre plus que des chiffres d’un vert froid à la dérive – on se croirait dans ce film, là, avec Keanu Reeves.
Les 4 traversent la liste des cours dans un sens, puis dans l’autre, jusqu’à un prix sur lequel ils s’attardent, comme s’ils réfléchissaient. Puis ils disparaissent. Une entreprise tout ce qu’il y a de bien, en bonne santé, apparemment.
Je passe un coup de fil à un laquais.
« Vends Couper-Seidel.
– Hein ?
– Vends, je te dis. Je n’y crois plus. Allez. Tout de suite. »
Il obtempère.
« Nom de Dieu, Constantin, ça a coûté bonbon. »
Je réfléchis à la question. Couper-Seidel a trois concurrents.
« Achète un max de Juarez Industrial Copper et d’Ardhew Metallic. » Le troisième ne me plaît pas ; trop fluctuant. « Qui détient la dette de Couper ? »
Tout le monde est endetté. Tout le monde est soumis d’une manière ou d’une autre à un effet de levier. Il me répond. Je vends les détenteurs à découvert.
Quatre minutes plus tard, ça y est. Brunner et De Vries regardent par-dessus mon épaule. Le seul fait de nous débarrasser de Couper-Seidel nous a évité de perdre dix millions d’euros. Les ventes à découvert nous en ont fait gagner quarante millions de plus. Si on liquide maintenant, les gains sur Juarez et Ardhew porteront le total à quelque chose comme cent millions.
Par la grâce de la connerie suprême d’une industrie fondée sur la connerie, le genre de choses que je viens de faire lance une carrière. Ce matin, j’étais un très bon trader. Là, je touche aux frontières de la divinité financière. Je suis entré dans la zone réservée aux prophètes et aux experts qui savent où va le monde de l’argent avant qu’il n’y arrive, à Michael Burry, George Soros et d’autres, peu désireux de se faire connaître du grand public. Joignez-vous au club, et vous vous joignez quasi automatiquement à celui des Mille Cinq Cents qui ont collectivement plus de pouvoir que n’importe quelle autre force sur terre. Il n’est pas question de conspiration ; ils concentrent juste une telle capacité d’accès et de telles ressources qu’ils ne peuvent que peser énormément. Nul besoin de prêter allégeance – ça, c’est implicite. Il suffit d’être riche, mais à un niveau équivalent, dans les faits, à une étape de l’évolution.
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Est-ce que c'est une cigarette ? Baptiste Vasille nous jurera loyauté éternelle pour une cigarette. Il a deux cents soldats prêts à faire bien plus que cela. Pour du tabac, ils marcheront sur l'enfer et en éteindront le feu avec leur propre sang. Bien sûr qu'ils le feront ! Ils sont français, que diable !
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Ça nous coûterait juste notre vie privée et, franchement, qui y tient tant que ça ?
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