Citations de Nikos Lyberis (18)
D2
Les fées ne chantent plus
Sirènes djinns et démons
n’approchent plus le rivage
À l’extrémité de la nuit les vaincus
main sur la plaie
recherchent une clairière au milieu des choses
ils attendent la collision de la terre
et d’une étoile errante
pour la réhabilitation du temps
Parfois ils boivent du vin de deuxième choix
À l’exception de ceux partis
pour les mers du Sud
…
/Traduit du grec par Brigitte Gyr en collaboration avec l’auteur
D’une bouche à l’autre…
D’une bouche à l’autre
une même histoire se poursuit
malgré les bavardages silence intact
parce que la vérité et son objet sont une et même chose
…
D4
Ceux qui ont raté l’attente
tentent de saisir le chaos de l’apprivoiser
en réajustant les morceaux du monde
Au lieu de mâcher la brume ils ont imaginé une farce
un soir de première devant des officiels
Sous les vieilles herbes les marbres se sont esclaffés
Dans l’aquarium oublié des coraux fanés
un poulpe qui se remémore
le destin du temps
/Traduit du grec par Brigitte Gyr en collaboration avec l’auteur
C2
Elles jouent aux dés des fragments de ciel et d’étoiles
chacune exige le butin tout entier
Elles ont mangé les bœufs du soleil et ont toujours faim
Elles ont vendu les hommes en morceaux
pour les empêcher de vivre à nouveau
Combat de coqs empaillés
Le onze Ahau du sixième katun
la colonne de triomphe se fendra
et les vainqueurs seront vaincus
sur la place le Bouffon annonce
la vengeance de l’espace
Débris de la flotte et ruines des dieux
lèvent le voile du silence au-dessus de l’aveugle
qui au bord de la muraille
brandit le bouclier en plumes des Aztèques
Une image sans cesse se répète
essaie de parler mais ne parle pas
Scène de navire coulé
/Traduit du grec par Brigitte Gyr en collaboration avec l’auteur
E2
Tu as quitté
l’île où tu étais enfermé
pour l’autre rive du temps
afin de trouver l’origine du jour
là où s’accordent les temps écoulés
là où s’unit le feu à l’eau
dans la réalité insaisissable
Sur la proue du navire de pierre
la Reine des Rochers répartit les couleurs
cadmium cobalt
trente-sept nuances de noir
Paysages de cailloux
lignes sans repentir
Deux rames fendent la vague sans lendemain sans passé
pendant que le sillon se ferme sans laisser de trace
Et pourtant fils du large
la mer ne t’engloutira pas
/Traduit du grec par Brigitte Gyr en collaboration avec l’auteur
E1
extrait 2
Tu avances sur le chiasme au-dessus de l’abîme
sans savoir où mène
le chemin qui court sous tes pieds
jusqu’à ce que tu découvres les visages
sous la poussière du miroir
Tu es passé par la stèle
gravée de formes inconnues indélébiles
là où autrefois tu avais pris un mauvais chemin
le monde te voyait de tes propres yeux
…
/Traduit du grec par Brigitte Gyr en collaboration avec l’auteur
E1
extrait 1
Tu as fortifié le château de la négation
d’une douve infranchissable
Tu as accroché les soupirs au clou
et abandonnant les habitudes qui te cachent les choses
tu as confié tes désirs aux senteurs de l’herbe
pour qu’on ne te dérobe ni le Printemps
ni les mille autres saisons
Si tu avais le don des miracles et des acrobaties
tu ferais un tour
tu recueillerais la sève de l’arbre du monde
…
/Traduit du grec par Brigitte Gyr en collaboration avec l’auteur
D1
Aube obscure du début des temps
vainqueurs & Co ont enfermé les poissons dans un scaphandre
suspendu des serpents sur les arbres
une balance sous les vêtements jour et nuit
Sur la route Tyrannosaurus Rex
affiche un sourire
et fait don à l’autel de riches offrandes
pour de futurs archéologues babyloniens
A la foire de la Raison Pure
ils ont disposé le paysage en deux dimensions
lestant leur ombre pour avoir plus de poids
ils ont édicté des lois pour ce qui est sans cause
Mots cloués au mur pour un présent mort
cris muets et courses de détresse
Les chants de victoire n’ont duré qu’une journée
…
/Traduit du grec par Brigitte Gyr en collaboration avec l’auteur
A1
Ils sont tombés d’un ciel décoloré…
Ils sont tombés d’un ciel décoloré
ils ont pillé le paysage
Ils en veulent plus encore
ils convoitent les idoles du Château
Quand le clairon a coupé l’aube en deux
un morceau de nuit s’est écrasé sur le pays intérieur
Le lion en pierre rugit
madame Bonheur
illustre mythomane
claque la porte
qu’elle ouvrira aux vainqueurs
…
/Traduit du grec par Brigitte Gyr en collaboration avec l’auteur
Quand les choses se sont dérobées…
Quand les choses se sont dérobées derrière les images
les cinq étages de la parole se sont effondrés,
laissant seulement voir le toit
les condoléances sans fin des nombres
et quelq
ues copies de l’original perdu
Sur l’autre face du vent le rêve d’une fleur
…
Tambours d’eau
extrait 2
Des sons se concertent sans se compromettre
le chant du funambule aveugle
soutient la tension
Des vagues du large a l’acier
mille harmonies pour chaque syllabe
jusqu’à une terre nouvelle
le secret de la fleur
La flûte de roseau se rappelle l’eau qui coule
et pourtant
le son disparaît quand tu le touches
Tambours d’eau
extrait 1
Six pêcheurs ont raté le sable
déplient le mur pour s’y asseoir
gestes lents comme au fond de l’eau
pour ne pas effrayer les plumes
au-dessus des toits
L’herbe des collines verdit le ciel
les flancs des choses fanées s’enchevêtrent
avant de trouver l’aspect qui leur convient
et des jeunes cherchent l’autel
Où offrir leur vie
entre deux pensées
entre deux gestes
entre
le pouls du monde
leur propre pouls
…
F2
Quatuor de couleurs et syrinx
sonate pour un corps
rencontre dans le vent
beauté au-delà du tombeau
Souffle qui a pris forme pour se rendre visible
et que le temps ne soit plus
Peut-être est-ce ainsi
qu’apparaissent sur terre les immortels
tout ce qui a commencé finira
susurrent les feuilles de gazon
pendant que le fou subit
Et pourtant
l’eau chassera
les feuilles mortes qui barrent le courant
chantera à nouveau
son propre chant
/Traduit du grec par Brigitte Gyr en collaboration avec l’auteur
F1
Tes chairs étaient séparées de leurs os
quand un chant sans paroles
a désenvoûté le silence
des mots que ta langue ne peut pas saisir
paroles d’avant que tu aies appris à parler
des hiéroglyphes de la bouche d’une pierre
rafale de vent pour t’accrocher
Comme si une raie t’avait piqué
grandeur d’un commencement et peur que
disparaisse tout ce que tu nommes
dans le passage qu’a ouvert ton pas
la lumière s’est cristallisée
sûrement un soleil a explosé
dans quelque galaxie
…
/Traduit du grec par Brigitte Gyr en collaboration avec l’auteur
D3
Djilam Balam de Djemaël
prédit l’esclavage massif pour les arbres et les pierres
le verbe enchaîné
Les ombres des ombres combattront
chacun creusera son trou
et quand il en sortira effrayé
il verra les choses troubles
ils ont éteint l’odeur des fleurs
en décorant les ombres ils ont castré le soleil
tandis que les chevaliers de la détresse
qui ont prêté serment sur la hache
afin d’être quelque chose de plus
tissent la bannière du désespoir
Leurs mains saignent
jusqu’à ce qu’étonnés ils découvrent que
les grands événements surviennent à l’improviste
…
/Traduit du grec par Brigitte Gyr en collaboration avec l’auteur
C1
Du vin vieux a inondé les rues
des cris troubles
les charognards boivent le sang noir de la nuit
à la lisière de l’eau des feuilles de laurier recouvrent des visages pâles
des corps qui n’ont pas encore trouvé la terre
Dans le port qui a sombré
des poissons s’échappent des grottes
et les sirènes se réfugient sur les monts du large
Paysage en noir et blanc
Des ombres dans les ruines
à la recherche du rêve des vaincus
argent fondu de Corinthe
Trouble et clameur dans les sous-sols de la pensée
exhalent d’anciennes images
qui ne leur permettent ni de voir ni d’entendre
…
/Traduit du grec par Brigitte Gyr en collaboration avec l’auteur
B
Tel le premier rayon de l’aube sur la rosée
la flèche t’a frappé
déshabillant ta pensée
L’instant s’étend
enveloppant le monde d’un écho mat
Quand tu as atteint le bout
tu as su que tu ne te trouvais qu’au milieu
que tu n’étais pas
ce que tu croyais être
Lorsque tu as chuté dans le précipice tu possédais un nom
Devant l’Achéron
soudain l’horizon s’est vidé
et lorsque tu as contemplé au soleil ton visage
tu n’avais plus de nom
Le nom c’était toi
La porte du monde s’est ouverte
ont resplendi au Printemps premier
celui que l’histoire n’a pas enregistré
arbres et rocs
monuments non taillés
C’est la première fois que tu chantes ton chant
Inutile désormais de t’attacher au mât
/Traduit du grec par Brigitte Gyr en collaboration avec l’auteur
A2
Le jour se fend…
Le jour se fend
Les épées tranchent les illusions
tandis que les nuages légers flottent
Des regards démembrés
s’écroulent dans les limbes des héros
que seules distinguent leurs blessures
Trirèmes birèmes unirèmes s’enfuient à toute vitesse
hissent grande voile bonnettes et cacatois
serrent les drailles
Ralingues cerceaux et chevilles grincent
Troie brûle toujours
Mots impuissants
Espace sans temps
/Traduit du grec par Brigitte Gyr en collaboration avec l’auteur