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Citations de Page Comann (158)


D’ailleurs, en parlant de bondieuseries, je crois bien que le lourdaud qui s’approche est le curé du voyage. L’homme aussi haut que large, porte une soutane que sa bedaine interdit de fermer. Ses yeux en capote de fiacre, ses joues rosées de porcelet lui donnent l’air d’un bourgeois gavé de bombances arrosées. Son nez en garde les rougeurs. Sur son crâne, deux mèches en tire-bouchon se bagarrent avec le vent. Il a l’air soucieux, mais un sourire de jésuite illumine son visage quand il aperçoit Martin et Kate assis sur leur rondin.
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Le silence qui s’installe entre eux ne les dérange pas. Pendant plus de six semaines, ils devront se serrer les coudes, chercher un peu plus de nourriture ou de l’eau propre pour espérer s’en sortir sans être contaminés. Trouver d’autres couvertures pour se protéger du froid humide de la nuit. Pour survivre. Parce que la mort est là, dans le ventre du Carrick. Les visages exsangues des embarqués ne laissent planer aucun doute : Le typhus est monté à bord avec nombre d’entre eux. Et le choléra, tapi dans la soute, attend de les mordre.
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Depuis des mois, les cultures meurent, rongées par le mildiou. Avec un inexorable appétit, la Grande Faucheuse se rassasie des âmes de ceux qui n’ont plus rien à manger. Sous les toits des fermes, pour parachever la volonté de Dieu, la dysenterie, le choléra et le typhus puent et emportent les vieux et les plus faibles . Toutes les familles sont en deuil. D’un père, d’une mère, d’un enfant. Aujourd’hui, ne restent debout que des affamés. Une tribu d’êtres décharnés, obnubilés par un dernier rêve : quitter cette île de misère et de tombes ouvertes au ciel. Pluie et malédictions s’abattent sur eux. Ventre vide et regard fou, ils n’ont presque rien à se mettre sous la dent. Leurs mains noires de tourbe ne cultivent même plus le maigre espoir de vivre. Elles ne sont utiles qu’à lâcher les cordes qui claquent sur les cercueils. Les visages râpeux de barbe n’expriment qu’une résignation hagarde, une incompréhension dénuée de compassion. Leur seul pain quotidien, pour eux, c’est la mort.
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Les cancanières n'osent pas affronter cette négresse callipyge qui tient boutique de plaisirs d'homme, hantées par l'idée que le père de leurs enfants soit tenté d'en franchir un jour la porte.
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Fausses bourgeoises d'un jour de messe, les galantes rivalisent de coquetterie et sursautent quand un ivrogne tabassé s'étale à leurs pieds. Ce qui citronne leur sourire n'est pas le vilain qui salit leurs chaussures, mais de croiser une voisine habillée d'un chemisier ou d'une robe de meilleure couture que la leur.
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Le typhus, c'est plein de choses : la fièvre pestilentielle, la fièvre putride, celle des pauvres, des armées, des bateaux... Quand on donne autant de noms à une maladie, c'est qu'elle tue beaucoup de monde.
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Poussée par une main invisible, la gamine se précipite dans les bras de son père. Son visage est déformé par la peur. Un mauvais démon a pris possession de son corps., elle tremble de tous ses membres. McBride la secoue en vain pour qu'elle cesse de hurler, mais les yeux écarquillés, les joues maculées de boue, Kate est comme une bête devenue folle.
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Parce que là-bas, à l'autre bout de ce rocher de quarantaine, dans cet enfer d'excréments, de maigreur et de langues noires, la Grande Faucheuse joue aux quilles.
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Sous un porche, en haut d’un court perron, une nonne attend. À l’endroit où elle se tient, son parapluie ouvert ne lui sert à rien. Voile et coule noirs, scapulaire de dévotion autour du cou, la moniale, aussi haute que large, est une statue taillée dans un bloc de méchanceté. Père Patrick se gare au milieu de la désolation et coupe le contact. Je reste pétrifiée. « Descends, m’ordonne-t-il. » Je descends. Un chien marron et blanc vient à ma rencontre, la truffe reniflant la boue, comme si le diable lui avait botté le derrière. L’animal efflanqué passe devant moi sans me voir. Je ne dois déjà plus exister.
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Et comme ni elle ni personne ne peut rien pour éviter à Sarah ce qui doit lui arriver, elle se décide à l’affronter et reprend sa lecture. Bien plus tard, au cœur de la nuit, les yeux rougis, des mouchoirs en papier trempés dans ses poings serrés, Diane tourne le dernier feuillet. Elle repose le manuscrit sur le parquet, éteint la lampe callipyge, vide son verre de vin blanc, s’enfonce dans le sofa et tire le plaid sur elle. Puis elle ressort les bras et prend son téléphone pour envoyer un message à Ashley.
– Tu avais raison, c’est un texte terrible, magnifique s’il raconte une vérité. Je pars demain pour Stockton-on-the-Bridge. Je veux savoir qui est à l’origine de tout ça.
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Son ombre longiligne dessine une tache de deuil sur le mur blanc du bungalow. Il reste dans l’encadrement de la porte. Silencieux. Spectre grisâtre et étrange. Haute figure émaciée dont l’œil aux aguets prend la mesure de ce que je suis et du désordre qui m’entoure. Beau front, traits fins, regard sombre et profond, un visage d’ange tourmenté cerné de cheveux noirs mi-longs. Une coiffure qu’on attribuerait plus volontiers à Lucifer qu’à un homme de Dieu. Énigmatique et avare de gestes, Père Patrick affiche la prestance d’un curé qui meurt d’envie de devenir évêque.
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Je fixe mon interlocuteur à la racine des cheveux. Je passe pour une folle, mais la folie est la pire des menaces.
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... la première erreur de l'homme est de considérer Dieu à son image. Alors que c'est l'inverse. La seconde, plus pernicieuse, est de croire que le Seigneur accorde de l'importance aux agissements des hommes. En réalité, il s'en fiche. Ce qui compte à Ses Yeux, c'est de vivre l'expérience de Qui Il est à travers les résultats découlant de nos propres choix.
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Je serai le vent que tu respireras dans tes plus magnifiques voyages. Je serai l'automne qui flamboie et le feu de cheminée de tes hivers. Je serai le rayon de soleil au matin de tes printemps et la brise fraîche de tes nuits d'été.
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Tu resteras le vent que je respire dans mes plus magnifiques voyages. Tu resteras l’automne qui flamboie et le feu de cheminée de mes hivers. Tu resteras le rayon de soleil au matin de mes printemps et la brise fraîche de mes nuits d’été.
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Silencieux, les pieds dans la gadoue, fouettés par le grésil, les forestiers portent sans sourciller le poids de ces paroles vides de compassion. Ces âmes simples et pourtant fortes, égarées dans ce drame de forêts et de neige, gardent les yeux baissés sur leurs bottes à clous. Tous s’adressent à un dieu capable de les entendre prier, pleins d’une sourde colère et de la crainte d’être un jour allongés, comme leurs compagnons de labeur, sous un suaire de fortune puant le chien mouillé.
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– Les tribus existent encore ?
– Pas toutes. Certaines ont été décimées. Les Iroquois étaient passés maîtres en la matière. Dès qu’ils lorgnaient un territoire, c’était la curée. Les Weskarinis savent de quoi je parle. Il en reste quelques-unes comme les Nipissinges, les Hurons ou les Abénaquis. Bon, j’arrête là sur les autochtones parce que je m’y perds dans toutes leurs histoires. Tu auras l’occasion de les croiser. En Outaouais, si un arbre tombe, un Indien se lève pour décocher une flèche au bûcheron qui l’abat. Tu as la taille et les épaules pour en être un. C’est un beau métier, tu sais ?
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Deux jours au rythme lent des côtes qui défilent, puis un matin, des coups piqués à la cloche annoncent l’arrivée à Québec. Çà et là, des maisons décorent la côte. Au pied des bâtisses de maître, des barques lestées de sacs sont amarrées contre de longues avancées sur pilotis. Devant l’entrée du port de la Basse-Ville, les navires attendent d’être chargés des grumes et des paquets de fourrures rangés le long du front portuaire.
À gauche des fortifications qui descendent de la Haute-Ville, d’immenses chantiers de construction défigurent la colline. En bas, dans le désordre du quai, une foule de curieux assiste au débarquement de cette populace d’étrangers qui les envahit après son passage en quarantaine. En arrière-plan, des tavernes, des commerces de gros, des entrepôts de cordiers et de ferblantiers, des moulins à scie. Au milieu de ces hautes façades sales, comme si la fumée d’un incendie les avait étouffées, les entrées sombres des ruelles grouillent de laborieuses existences.
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Au détour de la route forestière, le Saint-Laurent se rétrécit et renvoie pourtant l’impression d’être encore plus large que l’Irlande. Sur le fleuve, Martin aperçoit les voiles des navires qui vont ou reviennent de Québec. Ceux qui remontent vers la ville sont chargés des mêmes malheureux qu’il transporte dans son attelage. Ceux qui repartent dans l’autre sens ont sans doute les cales remplies d’immenses troncs d’arbres destinés aux mâts des bateaux de Victoria.
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« Son visage est marqué de quelques rides dessinées par les croche-pieds de la vie. »
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