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Citations de Paul Aussaresses (19)


- Tous, ils s'étaient tous tiré à l'étranger, sauf Yacef Saadi.
Mais, après une belle accalmie, les attentats et les meurtres ont repris de plus belle. Le 3 juin, quatre bombes dissimulées dans des lampadaires explosent à l'heure de la sortie des bureaux près de la station de bus à Alger. Elles font des dizaines de morts et de blessés. Le 9 juin, c'est sous l'estrade de l'orchestre du Casino de la Corniche, un dancing très fréquenté par les jeunes Algérois, qu'explose la bombe. Les musiciens sont pulvérisés. Et encore une fois des morts, des mutilés, des blessés, et des dizaines de victimes autant musulmanes qu'européennes.
Massu était fou furieux. Il nous convoquait, Trinquier et moi, et nous engueulait comme si c'était nous qui avions posé les bombes : " Et ça, c'est quoi, espèce de salauds ? nous disait-il. Hein, qui est-ce qui a fait ça ? Qu'est-ce que vous attendez ? ".
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- Cet ingénieur, ce représentant du Giat, ne savait peut-être pas que ce monsieur Altman était Klaus Barbie .
- Vous rigolez . Bien sur qu'il savait ! Si un militaire ou un ingénieur français, débarquant à La Paz, n'apprenait pas dans les jours qui suivaient son arrivée qu'Altman et Barbie étaient un seul et même homme, c'est qu'il était un benêt. L'envoyé du GIAT a donc discuté avec Barbie du pourcentage qu'il allait recevoir sur la vente de ces canons et ils se sont aisément mis d'accord. Nous ne savons pas combien Barbie a touché comme commission, mais ce n'était surement pas des cacahuètes.
- Et l'ambassadeur de France en Bolivie, dans tout ça ?
- Il ne fallait pas lui en parler, car il se serait étranglé de colère. Son excellence l'ambassadeur semblait avoir comme politique de ne rien voir, rien entendre et rien faire.
- Mais les gens du GIAT, à Paris, ceux qui ont donné leur aval pour payer des commissions à Altman, ils savaient ?
- Et bien sur qu'ils le savaient. Tout le monde savait qui était Altman.
- C'était sous Giscard .
- Oui, c'était sous Giscard.
- Cette histoire est-elle connue ?
- Non, pas trop. Irribaren me l'a raconté parce que j'étais de la Maison, sinon c'est motus et bouche cousue. Vous imaginez le tollé, si la presse avait su que le GIAT, c'est-à-dire une entreprise de l'État français, avait versé officiellement de l'argent à Barbie.
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- La réalité, c'est que l'ordre est venu de Paris.
- De Paris, vous voulez dire, du ministère de la Justice ?
- Oui. On nous demandait de "laisser sa capsule de cyanure à Ben M'Hidi". Devant mon ahurissement, lorsqu'il m'a communiqué cet ordre, le juge Bérard a insisté lourdement : "Mais oui, mais oui, tous les grands chefs ont leur capsule de cyanure. Vous ne savez pas ça. Ils l'avalent pour se supprimer s'ils tombent aux mains de l'ennemi."
J'avais compris. Il fallait que Ben M'Hidi se supprime comme un grand chef. Sauf qu'il était impossible de trouver une capsule de cyanure à Alger. Il a donc fallu trouver autre chose pour "suicider" Ben M'Hidi.
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.....Je suis entré chez Thomson. En septembre 1976, je suis embauché à la Direction commerciale de Thomson-Brand Armement. J'étais le second du directeur commercial.
- Donc, à partir de ce moment-là, chez Thomson, vous avez travaillé sur l'Amérique latine, votre secteur de prédilection.
- Au début, pas du tout, sur l'Afrique du Sud.
- Pourtant, le régime d'apartheid était mis au ban des nations et il y avait un embargo de la France et de l'ONU envers l'Afrique du Sud.
- Oui
- Donc, la France violait l'embargo.
- Ce que vous dites là, c'est une accusation ?
- Non, c'est un fait.
- C'est bien dit. Oui.
- Donc, la France violait l'embargo.
- Comme vous dites.
- Elle aidait le régime d'apartheid ?
- Carrément.
- Qu'est-ce que vous leur vendiez ?
- J'ai oublié, j'ai oublié.
- Vraiment ?
- Oh, nous vendions toutes sortes d'armes.
- Vous aviez des contacts avec les services secrets sud-africains, le fameux BOSS ?
- Bien sûr que j'avais des contacts. Quelle question !
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Ses cheveux étaient rasés et on sentait comme un trou sous tout le haut du crâne.
- C'est quoi, ce trou, Bob ? lui ai-je demandé.
- Bah, tu sais, je m'étais pris deux balles dans le crâne en Rhodésie et c'était ma copine Marie Élise qui me les avait retirées. Seulement, voilà : Marie Élise était vétérinaire.
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- Des Argentins ont dit qu'à Manaus, on enseignait la torture sur des prisonniers vivants. C'est vrai ?
- Je ne sais pas. Je ne crois pas, mais ça se peut.
- Et pour la torture, ça se passait comment ?
- On leur enseignait les techniques - On ne le faisait pas devant eux - ; on leur racontait comment ça se passait.
- L'enseignement de la torture, c'était uniquement théorique, donc ? Ou est-ce qu'il y avait des exercices ?
- Il y avait des exercices.
- Sur des cobayes...il y avait des stagiaires qui jouaient le rôle de torturés et d'autres celui de tortionnaires ?
- Voilà.
- Chacun jouait son rôle ?
- Oui.
- Mais ils ne le faisaient pas vraiment ?
- Non.
- Mais parfois ils le faisaient vraiment ?
- Parfois ils le faisaient vraiment...
- En fait, vous formiez des spécialistes de la torture brésiliens, qui ont, par la suite, exporté leurs techniques dans d'autres pays d'Amérique latine ?
- Oui, c'est exact.
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Alors, j'ai pris ma plume et j'ai écrit au Monde et au Figaro pour passer une annonce :
" Ancien officier parlant les langues étrangères cherche un emploi de cadre.
Répondre à : Aussaresses, 276 cours de la Somme, Bordeaux."
J'avais donné l'adresse de ma mère pour filtrer les réponses.
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- Quelles étaient vos attributions ?
- Je devais nouer ou entretenir des contacts diplomatiques avec les autres attachés militaires en poste au Brésil. Je faisais bien sûr aussi du renseignement.
- Vous arrivez à Brasilia quelques mois après l'arrivée au pouvoir d'un régime militaire en Uruguay, en Bolivie et trois semaines après le coup d'état au Chili.
Quelle coïncidence !
- C'en est pas une, je vous l'assure. Je me souviens bien de la date du coup d'état de Pinochet, le 11 septembre, parce que c'est l'anniversaire de la mort de Guynemer, qui a disparu au cours d'une mission aérienne.
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Est-ce bien le même homme qu'Yves Courrière, Roger Escarpit, Cécil Saint Laurent, Jean Lartéguy présentent dans leurs romans sous les pseudonymes de Commandant O, Beverrier, Le Barbu ou Boisfeuras ?
Ils en font un baroudeur, un as du renseignement, un officier parachutiste, dont les fonctions secrètes dépassent le grade officiel, et qui ne se soucie ni des règles ni de sa carrière pour aller au bout de sa mission.
C'est le même homme.
C'est lui, âgé maintenant de quatre-vingt-dix ans, grand vieillard affable et quasiment aveugle, qui m'a confié, sans regret ni forfanterie, ses derniers souvenirs, bons ou mauvais, de soldats, de marchand d'armes et d'agent secret.
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Que ceux qui liront cet ouvrage se souviennent qu'il est plus aisé de juger hâtivement que de comprendre, plus commode de présenter ses excuses que d'exposer les faits.
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Les dictatures militaires alors en place en Amérique latine étaient dirigées à Santiago (Chili) par Pinochet, à Asunción (Paraguay) par Stroessner, à Buenos Aires (Argentine) par Videla, à Montevideo (Uruguay) par Bordaberry, à Sucre (Bolivie) par Banzer, et à Brasilia (Brésil) par Geisel.
Ces juntes, pour la plupart militaires, luttaient contre les Tupamaros en Uruguay, le Mouvement de la gauche révolutionnaire (MIR) au Chili, les Montoneros en Argentine, le mouvement populaire révolutionnaire Pyahura au Paraguay, le MAS et le mouvement Kataris en Bolivie, le PCBR (Parti communiste brésilien révolutionnaire) au Brésil.
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(p. 34-36)

Par crainte de ces méthodes ou grâce à elles, les prisonniers se mirent à donner des explications très détaillées et même des noms grâce auxquels je procédait à des nouvelles arrestations.

Cette fois, avec la collaboration de la police, je fus amené à participer plus activement à ces interrogatoires "poussés" et il ne me sembla pas inutile d'en rendre compte au colonel de Cockborne qui se montra frileux.

- Vous êtes sûr qu'il n'y a pas d'autres moyens pour faire parler les gens ? demanda-t-il avec gêne. Des moyens plus...

- Plus rapides ?

- Non, ce n'est pas ce que je voulais dire.

- Je sais, mon colonel, vous vouliez dire : plus propres. Vous pensez que tout cela ne colle pas avec notre tradition humaniste.

- En effet, je le pense.

- Même si je partage ce point de vue, mon colonel, l'accomplissement de la mission que vous m'avez donnée m'oblige à ne pas raisonner en termes de morale mais du point de vue de l'efficacité. Le sang coule tous les jours. Pour l'instant, c'est surtout dans le bled. Demain, ça peut arriver dans la maison voisine.

- Et que faites-vous de vos suspects, après ?

- Après qu'il parle ?

- Exactement.

- S'ils ont un lien avec les crimes terroristes, je les abats.

- Mais vous vous rendez compte que c'est l'ensemble du FLN qui est lié au terrorisme ?

- Nous sommes d'accord.

- Ce ne serait pas mieux de les remettre à la Justice, plutôt que de les exécuter ? On ne peut quand même pas flinguer tous les membres d'une organisation ! Ça devient dingue.

- C'est pourtant ce que les plus hautes autorités de l'État ont décidé, mon colonel. La Justice ne veut pas avoir affaire au FLN, justement parce qu'ils deviennent trop nombreux, parce qu'on ne saurait pas où les mettre et parce qu'on ne peut pas guillotiner des centaines de personnes. La Justice est organisée selon un modèle correspondant à la métropole en temps de paix. Ici, nous sommes en Algérie et c'est une guerre qui commence. Vous vouliez un officier de renseignements ? Vous l'avez, mon colonel. Comme vous ne m'avez pas donné de consigne, j'ai dû me débrouiller. Une chose est claire : notre mission nous impose des résultats qui passent souvent pas la torture et les exécutions sommaires. Et, à mon avis, ce n'est qu'un début.

- C'est une sale guerre. Je n'aime pas ça.

Le colonel de Cockborne s'était rembruni. Il savait que j'avais raison. Je compris qu'il ne resterait plus très longtemps en Algérie.
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(p. 44-45)

Un pied-noir qui se promenait dans la rue avait été abordé par un musulman. Ils se connaissaient bien. Pourtant, le musulman lui avait fendu le crâne à coups de hache. Alexandre Filiberti, le chef de la sûreté urbaine, s'était rendu au chevet du blessé qui lui avait soufflé à l'oreille le nom de l'agresseur.Le renseignement m'étant parvenu, nous l'avions presque aussitôt arrêté pour commencer à l'interroger. Je voulais absolument savoir si ces attentats étaient commandités par une organisation et quels en étaient les membres.

Il était important qu'il parle parce que cette flambée de violence nous avait surpris. De tels incidents pouvaient se renouveler à tout moment, et Dieu sait où. Et d'autres bombes exploser dès le lendemain. Le plus odieux de l'histoire, c'était qu'on ne s'en était pris qu'aux civils. Il fallait absolument que je sache qui était capable de donner des ordres pareils.

L'homme refusait de parler. Alors, j'ai été conduit à user de moyens contraignants. Je me suis débrouillé sans les policiers. C'était la première fois que je torturais quelqu'un. Cela a été inutile ce jour-là. Le type est mort sans rien dire.

Je n'ai pensé à rien. Je n'ai pas eu de regrets de sa mort. Si j'ai regretté quelque chose, c'est qu'il n'ai pas parlé avant de mourir. Il avait utilisé la violence contre une personne qui n'était pas son ennemie. Quelqu'un qui avait juste le tort de se trouver là. Un responsable, même un militaire, j'aurais pu comprendre. Mais là, un quidam de Philippeville, et de connaissance, par surcroît. Je n'ai pas eu de haine ni de pitié. Il y avait urgence et j'avais sous la main un homme directement impliqué dans un acte terroriste : tous les moyens étaient bons pour le faire parler. C'étaient les circonstances qui voulaient ça.
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Pour faire bon poids, on avait reçu un ordre de Paris disant qu'il était de première importance de coffrer les propagandistes de "La voix du soldat", une feuille de chou d'endoctrinement communiste qui appelait les soldats français à désobéir et à refuser de faire la guerre en Algérie.
Depuis, Massu me les cassait tous les matins à propos des cocos : " Alors, z'avez pas encore mis la main sur La voix du Soldat. Vous servez à quoi ? "
Nous avions donc décidé de nous intéresser de plus près au P.C.A et de mettre la main sur le chef de son service Action, un certain André Moine.
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[...........]
- Je faisais fructifier mon carnet d'adresses.
- Dans quels pays ?
- Brésil, Argentine, Chili, Paraguay...
- C'était Stroessner au Paraguay. Et là aussi, vous vendiez la même chose ?
- Eh oui, je ne pouvais pas leur vendre des bénitiers...
- Et bien sûr, tout cela se faisait en bonne et due forme, c'est-à-dire avec l'aval du gouvernement français ?
- Evidemment. Jamais au grand jamais je ne me serai livré à un trafic d'armes relevant du marché noir. Ce que nous vendions relevait du marché blanc, plus que blanc même. Ceux qui, au ministère des Armées, s'occupaient de ces dossiers savaient presque au jour le jour ce que nous fourguions comme munitions, à qui, à quel prix, quelles étaient les commissions et qui en était le ou les bénéficiaires.
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- Ce que vous appreniez à ces officiers, eux-mêmes l'ont enseigné à d'autres, je suppose ?
- Il ne faut pas supposer, c'est certain. Ils étaient en stage à Fort Bragg pour l'apprendre. Ils ont donc formé dans leur pays d'autres officiers pour le renseignement, la lutte contre la guérilla.
- Donc, ils ont torturé, ils ont fait du renseignement, de l'infiltration...
- Eh oui.
- Ils ont torturé leurs propres citoyens car ces pays étaient quasiment tous en guerre civile.
- Oui. Vous pouvez supprimer le mot "quasiment". C'était la guerre civile partout en Amérique latine.
- Les officiers que vous avez formés, ils ont été au pouvoir dans les dix ans qui ont suivi ?
- Voilà
- En fait, vous avez formé ceux qui allaient être les piliers des dictatures d'Amérique latine ?
- Comme vous dites.
- Vous savez, je suppose, ce qu'ils sont devenus ?
- Bien sûr ! Ils ont tous obtenu des commandements importants dans leur pays, soit peu après leur passage à Fort Bragg, soit plusieurs années plus tard.
Ils sont devenus commandants des forces armées ou patron des Services spéciaux, ou bien ils se sont retrouvés dans les missions diplomatiques dans d'autres pays d'Amérique latine. Ceux-là étaient alors chargés de coordonner les actions entre alliés.
- C'est ce qu'on a appelé l'opération Condor.
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L'action que j'ai menée enAlgérie, c'était pour mon pays, croyant bien faire, même si je n'ai pas aimé le faire.Ce que l'on fait en pensant accomplir son devoir, on ne doit pas le regretter.
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Vive lalgerie
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Comme beaucoup de mes camarades qui ont combattu en Algérie, j'avais descidé, non pas d'oublier, mais de me taire.
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