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Citations de Paul Bourget (155)


Rien n'est perdu quand on l'offre
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Un silence régnait dans cette pièce, coupé par le bruit des papiers froissés et par le craquement de la plume du greffier. Ce dernier se préparait à noter l’interrogatoire avec l’impersonnelle indifférence qui distingue les hommes habitués à jouer le rôle de machines dans les drames de la cour d’assises. Un procès pour eux ne se distingue pas plus d’un autre que pour un employé des pompes funèbres un mort ne se différencie d’un mort, ou pour un garçon d’hôpital un malade d’un malade.
— “Je vous épargnerai, monsieur”, dit enfin le juge, “les questions habituelles… Il y a des noms et des hommes qu’il n’est pas permis d’ignorer…” Le philosophe ne s’inclina même pas sous le compliment. — “pas d’usage du monde, pensa le magistrat ; “ce sera un de ces hommes de lettres qui croient devoir nous mépriser. ” Et tout haut : “J’arrive au fait qui a motivé la citation que j’ai dû vous adresser… Vous connaissez le crime dont est accusé le jeune Robert Greslou.
— “Pardon, monsieur”, interrompit le philosophe en quittant la position qu’il avait prise instinctivement pour écouter le juge, le coude sur le fauteuil, le menton sur la main et l’index sur la joue, comme dans les minutes de ses grandes méditations solitaires, “je n’en ai pas la moindre notion.”
— “Tous les journaux l’ont cependant rapporté, avec une exactitude à laquelle ces messieurs de la presse ne nous ont guère habitués…” répondit le juge, qui crut devoir répondre au dédain de la littérature pour la robe diagnostiqué chez le témoin par un peu de persiflage ; et à part lui : “Il dissimule… Pourquoi ?... Pour jouer au plus fin ?... Comme c’est bête !”
— “Pardon, monsieur”, dit encore le philosophe, “je ne lis jamais aucun journal.”
Le juge regarda son interlocuteur en faisant un “Ah ! ” où il entrait plus d’ironie que d’étonnement. “Bon”, pensa-t-il, “tu veux me faire poser, toi ; attends un peu…” Ce fut avec une certaine irritation dans la voix qu’il reprit :
— “Hé bien, monsieur, je vous résumerai donc l’accusation en quelques mots, tout en regrettant que vous ne soyez pas plus au courant d’une affaire qui peut intéresser gravement, très gravement, sinon votre responsabilité légale, au moins votre responsabilité morale…” Ici le philosophe dressa la tête avec une inquiétude qui réjouit le cœur du juge : “Attrape, mon bonhomme”, se dit-il.
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Paul Bourget
Mieux vaut un morceau de pain chez soi qu'une dinde truffée chez les autres.

Les mensonges (1887)
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Mais s’il existe, ce Père Céleste, vers lequel grands et petits se tournent aux heures affreuses comme vers le seul recours, n’est-ce pas la plus touchante des prières que ce besoin de prier ? Et, si ce Père Céleste n’existait pas, aurions-nous cette faim et cette soif de lui dans ces heures-là ? – « Tu ne me chercherais pas si tu ne m’avais pas trouvé !… » À cette minute même et grâce à cette lucidité de pensée qui accompagne les savants dans toutes les crises, Adrien Sixte se rappela cette phrase admirable de Pascal dans son Mystère de Jésus, – et quand la mère se releva, elle put le voir qui pleurait.

Chapitre VI. Le comte André
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— « Non, mon père, » reprit le comte André, qui reconnut l’accent du marquis, et qui se tourna vers le vieillard comme écroulé sur son banc. « Je ne suis pas fou… J’ai fait ce que l’honneur exigeait… J’espère, monsieur le président, que l’on m’épargnera d’en dire davantage.

Chapitre VI. Le comte André
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Midi allait sonner à la pendule de cuivre doré, à sujet mythologique, dont s’ornait cette pièce que chauffait à grand’peine un feu allumé dans une cheminée qui fumait. Au dehors, c’était sur la ville une pesée d’un ciel de neige, un de ces ciels d’Auvergne où passe par instant le vent glacial des montagnes.

Chapitre VI. Le comte André
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Il se promenait au Jardin des Plantes, par un après-midi de cette fin de février, tiède comme un printemps. Il s’assit sur un banc, dans son allée favorite, celle qui longe la rue Buffon, et au pied d’un acacia de Virginie, étayé de béquilles de fer, garni de plâtras comme un mur, avec des branches nouées comme les doigts d’un géant goutteux. L’auteur de la Psychologie de Dieu aimait ce vieux tronc desséché de toute sève, à cause de la date inscrite sur la pancarte et qui constituait l’état civil du pauvre arbre… « Planté en 1632… » 1632, l’année de la naissance de Spinoza !

Chapitre V. Tourments d'idées
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Cette grande créature, haute en couleur, forte comme un bœuf malgré ses cinquante-cinq ans, demeurée paysanne avec ses gros souliers, ses bas de laine bleue tricotés par elle-même et son bonnet collé sur son chignon serré, ressentait pour son maître une affection d’autant plus forte que les divers éléments de sa franche et simple nature y étaient à la fois engagés.

Chapitre V. Tourments d'idées
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(...) j’étouffe de remords. J’ai besoin d’être compris, consolé, aimé ; qu’une voix me plaigne et me dise des paroles qui dissipent les fantômes.

Chapitre 4. Confession d'un homme
&. VII. Conclusion
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Elle avait aimé en moi un mirage, un être absolument différent de moi-même, et la vision subite de ma vraie nature ayant du coup déplacé ce plan d’illusion, elle me haïssait de toute la puissance de son ancien amour.

Chapitre IV. Confession d'un homme
&. VI. Troisième crise
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(...) certains silences vous exécutent comme le fer du bourreau.

Chapitre IV. Confession d'un homme
&. VI. Troisième crise
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Quelle fibre secrète de haine cet homme avait-il, par sa seule existence, touchée dans mon cœur, (...).

Chapitre IV. Confession d'un homme
&. V. Seconde crise
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De quelles profondeurs de mon âme cette idée était-elle sortie, et à quelle seconde ? Je ne sais pas, mais je sais qu’à peine entrée en moi, elle grandit, grandit…

Chapitre IV. Confession d'un homme
&. IV. Première crise
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(...) et moi aussi, tout tendu que je fusse dans mes doctrines et mes théories, je ressentis cette puberté de toute la nature. La glace d’idées abstraites où mon âme était emprisonnée se fondit. Quand j’ai relu plus tard les feuillets du journal, aujourd’hui détruit, où je notais alors mes sensations, je suis demeuré étonné de voir avec quelle force les sources de la naïveté se rouvrirent en moi sous cette influence qui n’était pourtant que physique, et de quel flot jaillissant elles inondèrent mon cœur !

Chapitre IV. Confession d'un homme
&. IV. Première crise
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Et quel printemps ! Il faut avoir connu l’âpreté de l’hiver dans ces montagnes, puis la subite douceur du renouveau, pour savoir quel charme de vivre flotte dans cette atmosphère quand Avril et Mai ramènent la saison sacrée.
C’est d’abord à travers les prairies humides comme un réveil de l’eau qui frémit sous la glace plus mince ; elle la brise, cette glace aiguë, puis elle court, légère, transparente et libre, en chantant. C’est, dans les bois abandonnés, un infini murmure des neiges qui, se détachant une par une, tombent sur les branches toujours vertes des pins, sur le feuillage jauni et desséché des chênes. Le lac, débarrassé de son gel, se prit à frissonner sous le vent qui balaya aussi les nuages, et l’azur apparut, cet azur du ciel des hauteurs, plus clair, semble-t-il, plus profond que dans la plaine, et en quelques jours la couleur uniforme du paysage se nuança de teintes tendres et jeunes.

Chapitre IV. Confession d'un homme
&. IV. Première crise
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Charlotte était fine, pure et tendre. Il convenait de l’engager sur le dangereux chemin de la curiosité romanesque par des peintures de sentiments analogues à son cœur.

Chapitre IV. Confession d'un homme
&. IV. Première crise
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Certes, je goûte ce petit livre, quoique je lui préfère dix autres romans dans l’œuvre de Balzac, ceux, par exemple, comme le Curé de Tours, qui sont de véritables écorchés littéraires, et où chaque phrase ramasse en elle plus de philosophie qu’une scolie de Spinoza.

Chapitre IV. Confession d'un homme
&. IV. Première crise
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Comme elle était jolie dans sa robe de drap clair, et fine, et presque idéale avec sa taille mince, son corsage frêle, son visage un peu long qu’éclairaient ses yeux d’un gris pensif ! Elle ressemblait à une Madone gravée d’après Memling, dont j’avais tant admiré autrefois la silhouette, fervente, gracile et douloureuse, à la première page d’une grande Imitation appartenant à l’abbé Martel.

Chapitre IV. Confession d'un homme
&. IV. Première crise
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(...) je continuai de garder tout en contemplant la neige qui fouettait les vitres. Elle tombait maintenant, du matin jusqu’au soir, par larges étoiles tourbillonnantes, avec un enveloppement, un endormement de tout le paysage, et, dans les pièces tièdes du château, c’était un charme silencieux d’intimité, une lointaine mort des moindres bruits de la montagne, tandis que les carreaux des fenêtres, revêtus de givre au dehors et de vapeur au dedans, tamisaient une lumière plus adoucie, comme malade.

Chapitre IV. Confession d'un homme
&. IV. Première crise
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Là, derrière les grilles doublées d’une toile verte, s’entassaient d’innombrables volumes reliés en basane, notamment toute la suite de l’Encyclopédie. C’était un héritage du fondateur du château, grand seigneur philosophe, parent et ami de Montlausier, et qui s’était construit cette habitation en pleine montagne afin d’y élever ses deux fils dans la nature et d’après les préceptes de l’Émile.

Chapitre IV. Confession d'un homme
&. IV. Première crise
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