Citations de Paula McGrath (22)
L'orage éclatera sans doute avant ce soir, contrairement aux prévisions. S'ils voulaient bien en finir, elle réussirait peut-être à aller courir avant la pluie. Mais les réunions, elle le sait d'expérience, n'ont pas pour but d'aboutir à des conclusions. Elles font office de soupapes de sécurité, où s'expriment des frustrations qui sans elles risqueraient de se révéler dans des circonstances moins propices.
Je me recule et il enfourche la moto.Il aimerait que je me colle contre lui, que j'enroule les bras autour de sa taille et lui serve de bouillotte pour le dos, comme il me l'a dit la première fois que je suis montée. Je lui ai répondu que je n'étais la bouillotte de personne.
Dublin, 2012
She is beginning to think this meeting will never end. Round and round they go, though they must know they won’t reach any conclusions. How could they? The law is the law, and unless it changes, all they can do is what they’ve always done: their best. God, would Sean ever shut up. He doesn’t have the details; no one does. It’s all speculation. Would have, could have, should have. So much for his scientific training.
She tunes him out. The strips of sky between the vertical blinds have darkened as rainclouds gather in the late afternoon. It’s looking unlikely that it will hold off until tonight, as forecast. If they would only finish up here, she might manage to get her run in before it starts. But it is her professional experience that meetings are not about coming to conclusions. Rather, they act as safety valves, where frustrations can be expressed to prevent them being expressed in less appropriate circumstances. Unfortunately, a lot of hot air gets released in the process. It’s always the same one or two, the ones who love to hear themselves speak. She’s never understood it herself. When her opinion is sought, or when she has one to express, she states it succinctly, so much so that her contributions to the minutes have become a standing joke: a page from Sean, followed by one line from her.
—It could be our turn tomorrow. Then what? We’re still none the wiser on where we stand. We don’t want to get caught up in a scenario like that, dragged through the legal system. If the legal system itself doesn’t know what it wants, how are we supposed to know?
On and on. This latest medical scandal is a very real concern, and it has her on edge as much as the rest of her colleagues. Morale is low, and more and more staff are requesting time off for anxiety-related illness. But more than worry, what she is feeling is guilt. NMP, one of her patients told her yesterday, when her breakfast tray slipped accidentally, dousing the bedclothes in tea and cornflakes. She had to ask what it meant: Not My Problem, the new mother told her – as, in fact, propped up in her bed feeding her infant, it was not. And increasingly it looks as if this current debate will not be her problem for much longer: Ken’s email arrived this morning.
A heads-up to let you know the job is yours. Offer in the post. Hoping you will be leading the team very soon, K.
Ken, Jeffrey’s protégé. She doesn’t appreciate his little insider’s heads-up. Even the term grates.
—We do need clarity, she agrees, when she realises Sean is looking at her. But her attempt to show support backfires, and he launches into lengthy agreement with his own argument. She sits back in resignation, maintaining the neutral expression she has perfected over decades of dealing with the same topic, behind which she hides her impatience with the futility of his tirade, and her urgent desire to walk out on the whole pointless debate. But she hasn’t made up her mind if she can go as far as to leave the country.
Tout au fond de toi il y avait aussi un bouillonnement, une excitation pure qu'ils n'auraient pas comprise. Tu brûlais de partir, de voir le monde. Mais l'admettre, ç'aurait été trahir ton pays, ton peuple et ces vieillards.
Frank se plaignait qu’elle était toujours triste, mais elle n’y pouvait rien, la mélancolie paraissait remonter à plus loin qu’elle, peut-être à sa mère et à son enfance dans un endroit que Judy ne connaissait pas et ne pouvait pas imaginer.
Parfois, elle n'avait pas idée qu'elle pleurait, et quand il lui demandait ce qu'il y avait encore, elle devait porter sa main à sa joue et sentir les larmes pour s'en apercevoir. Lorsqu'il plongeait le regard dans ses yeux noirs, elle se rendait compte qu'il ne comprenait pas, mais elle savait aussi qu'elle ne voulait pas comprendre ce qu'il voyait. Il ne voulait pas savoir ce que ses yeux noirs avaient vu, et il recouvrait sa peur d'impatience, puis de colère, si bien que la maison passait d'un silence oppressant à des éclats de voix, souvent suivis d'un claquement de porte, puis c'était de nouveau le silence.
Elle escalade le talus et se retrouve au bord du champ de maïs. C'est assez facile, une fois qu'on va dans la bonne direction. Il suffit de suivre une rangée. Et même si on se trompe de sens, on finit toujours par arriver à une route ou une limite quelconque. Voilà ce qu'elle se dit résolument, mais son coeur tambourine. Elle a l'impression de nager dans une mer de feuilles, très loin au large, sans rivage en vue. Contente-te toi d'avancer, de suivre la rangée. Respire. Mais elle sent la panique monter en elle, de cet endroit coupé de la raison. La sueur qui perle sur sa peau ne vient pas de la chaleur du soleil, encore haut dans le ciel, mais du plus profond d'elle-même, et elle a l'odeur de la peur.
Depuis peu, un ruban de mal-être flotte autour de ses jambes, telle une brume. Il est là en ce moment-même, alors que la maison redevient silencieuse. Il est là aussi la nuit, avant qu'elle s'endorme. Il s'enroule autour de sa taille, de ses hanches, et s'insinue entre ses cuisses.
Un matin, voilà Albert, l'Allemand, qui te dit : Viens, viens. Je t'apprends à patiner. C'est une drôle d'activité pour un Irlandais. Tu préférerais un bon match de football gaélique.
il y a des trucs qu’ils ne savent pas, ou bien ne veulent pas savoir, ou ne veulent pas qu’on sache
Quand elle courait, elle avait le sentiment que personne ne pouvait lui faire de mal, parce qu'elle n'était plus constituée de chair ferme. Les cellules de sa peau, cette frontière entre ce qui est vous et qui n'est pas vous, se desserraient, de sorte que l'air pouvait entrer, circuler et les laisser respirer.
Moi, je pensais à mon bébé comme un petit ange, pas comme un problème à régler.
» Tu ne comptes pas faire ça toute ta vie, seulement jusqu’à ce que tu aies économiser assez. En attendant, tu as échangé le ciel contre le monde souterrain des hommes et de l’argent, les grands espaces contre des galeries où tes muscles sont tendus, le bon air, l’herbe et la pluie contre les corps sales et les pets des buveurs de bière. Tu t’y habitues. Quand tu émerges de la cage, ce n’est guère mieux. Il n’y a presque pas d’arbres et pas la moindre verdure. Tu sors du trou noir dans la roche pour contempler un paysage de roches noires. »
Quand nous sommes rentrées de nos voyages, je me suis enfuie. Je suis sortie de la maison alors que j'étais censée être au lit et j'ai marché. Ce n'était pas planifié ni rien. La puberté, ça a été comme se réveiller pour découvrir que j'ai été en prison toute ma vie, mais que le gardien avait laissé la porte ouverte. Quand on m'a retrouvée, ma mère est devenue tellement parano que si elle avait pu me mettre un bracelet électronique, elle l'aurait fait. Et plus elle flippait, plus je déconnais.
partir courir, est-ce la même chose que partir en courant
Qu'est-ce qu'ils avaient tous, à vouloir la raccompagner ? Elle souhaitait juste rentrer seule à pied sans craindre d'être agressée, ou traquée par un cousin. Une fille n'avait-elle pas le droit d'avoir la paix?
Jusqu'ici, elle a toujours été du genre voyage organisé, mais maintenant, elle est une pionnière, un personnage des Raisins de la colère, une Thelma. Ou une Louise.
Je suis toute dégeu en bas, toute endolorie, et il y a une odeur que je n'identifie pas tout de suite - si : c'est la sienne. Je suis prise d'un haut-le-cœur et je vomis sans pouvoir m'arrêter.
Il ne pensait pas à mal. Il avait juste bu un coup de trop.
Elle commence à penser que cette réunion n'en finira jamais. Ils tournent en rond, sachant pertinemment qu'ils n'arriveront à aucune conclusion. Comment le pourraient-ils ? La loi est la loi, et tant qu'elle ne changera pas, ils feront ce qu'ils ont toujours fait, c'est-à-dire de leur mieux.