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Citations de Pentti Holappa (24)


LE BERGER

A l'odeur de ton chandail humide
je t'ai reconnu, berger
toi qui menas le poète aveugle
dans les landes de l'Antiquité.

Ici on est aveugle sans cécité.
Octobre vente, octobre pleut,
les maisons chancellent.
Nous rentrons du cinéma.

Dans les derniers mètres du film
les amants sont restés figés
dans un baiser de mort et les étoiles
pleuvaient sur leur couche.

La bêtise ni la haine ne les ont
séparés, le poison non plus
qui consuma jusqu'à la braise
les caresses de Roméo et de Juliette.

Le paradoxe même de l'existence,
le signe fatal noyé en chaque cellule
les contraignit à chercher
le réconfort dans la mort.

Nulle volonté humaine, le destin plutôt
nous a drossés aussi sur les deux rives
opposées du fleuve du temps,
malgré notre amour partagé.

Ta beauté est la destinée que je défie.
Dans les flammes de tes torches de résine
je rassemble en tremblant mes vestiges
pour en bâtir une silhouette humaine.

Je crois que ton visage ambré
par les nuits blanches m'appelle
car tu scintilles comme une ville illuminée
dans les ténèbres des rives arctiques.

Vers toi je tangue sans gouvernail,
épave de navire, pensée sans demeure,
promeneur ivre dans la nuit. Je me glisse
dans la laine de ton chandail mouillé.

Berger, ne pleure pas. Il est un pays
où les amants les yeux grands ouverts
se fondent, se confondent, et veillent sur la nuit.

Les jours sont comptés, pas les caresses.
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ALEXANDRE

Sur un noble destrier et poussé
par l'amitié Alexandre le Grand
soumit l'univers. Je roule à cent
kilomètres à l'heure vers mon bien-aimé.

Mon destrier est une voiture russe, une Lada,
bleu ciel. Cent trente mille bien sonnés au compteur,
elle rugit en traversant ma patrie enneigée.

Une paire d'yeux gris et dans ces yeux la mer,
Ecartez-vous, belle Aphrodite, voici mon tour
de ramper par l'écume blanche
et de lécher l'eau salée sur sa peau.

En lui, près de lui, voici l'Attique,
les rivages azurés protégés du gel à jamais.
Là-bas je renais, je suis Alexandre,
ma voiture prend le frais dans un bosquet d'oliviers.

Les sorcières du Nord, les divinités de Scythie
je me lève avant l'enfer des chrétiens et
la haine des bourgeois rouges ou noirs.
Ainsi je suis prêt à l'aimer.

Sur les rochers du rivage, un jeune homme nu,
un poète, chante sur sa guitare:
Alexandre est un assassin. En amour,
il n'y a pas de héros, juste des estropiés.


Parfum de fumée (1987)
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Du matin au soir la pluie fait sa fable.
Je n'ai pas écouté, maintenant le silence est revenu.
Les arbres, mes amis, sont muets
flânant dans leur passé :
comme enfin l'âme toujours avare laisse courir les souvenirs,
de perle en perle, ils délivrent la pluie.
Je ne vois personne, à perte de vue,
et déraisonnable je suis:
grand ouvert mon coeur est prêt
à suivre la première ombre qui passe.
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La bannière jaune (1988)
PROGRAMME DE PRINCIPE


La prochaine fois que je viendrai au monde ici je
transcrirai chaque minute dès le début. Je n'en consom-
merai pas une seule sans réfléchir d'abord, et le cas
échéant j'arrêterai le temps afin qu'il attende ma déci-
sion. Je choisirai les jours de calme, le travail, les nuits
ardentes, les proches les plus sages, mes amours les plus
belles et les plus fidèles. Avant la scène de l'amour, pen-
dant et après, ni mon partenaire ni moi-même ne devrons
nous sentir étrangers. Jamais, si la vie dépérit et avec elle
toutes les choses, je ne me dirai que demain il sera trop
tard.

p.140
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L'amour parle sous tant d'apparences.
Un train illuminé traverse la chair de la nuit sans bruit,
le ciel se voûte à l'invisible,
la terre gorgée d'eau halète sans relâche,
les étoiles frissonnent,
une ville flamboie au centre névralgique de l'âme. (...)
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Tout près (1957)
SACREMENT


Le pain de chaque jour et l'amour
sont notre chagrin. Notre soleil
ne féconde pas l'asphalte de nos champs,
goulet carrossable. Facile est difficile,
l'éternel s'oublie vite.

Et l'amour: jouissance le premier jour,
douleur le second, au troisième la solitude.
Le regard d'un passant qui brûle l'âme
répète ceci: l'amour passe sur la route,
goulet carrossable.

               Aussi longtemps que la sueur sera salée,
les larmes cuisantes,
la faim de notre corps sera vraie chaque jour
et sa peine comme sa jouissance s'égareront,
dévorées par les mites, et souillées par la rouille.

p.27
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Sur la terre, sous le ciel
(1991)



LE MERLE

le merle n’hiverne pas sous ces latitudes,
mais il hiverne pourtant. dans l’hiver du cœur
il fait sombre ici, le gel si dur, moins trente
(Celsius, soixante degrés Nord).

La vie n’est pas facile pour le merle noir. Solitaire,
il erre dans le parc, sifflant à fendre l’âme, il
quête à manger, ou bien reste muet
sans se plaindre du destin qu’il s’est choisi.

Car enfin, il a des ailes, il est en bonne santé, il aurait pu
migrer vers le sud, il n’avait qu’à s’y prendre à temps,
maintenant bien sûr, il est trop tard pour regretter. engourdi
comme il est, il ne volerait pas loin. Donc il ne se plaint
     pas

[…]


p.147
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La bannière jaune (1988)



L’INSTANT PASSÉ

Par-dessus les toits la bannière jaune flotte, au sommet
      de sa perche,
le vent souffle donc. L’air remue. Je regarde, ébahi.
Un oiseau s’approche d’un coup d’aile pataud, le ciel
s’est maquillé de gris uni. Cet instant ne peut pas
se reproduire, il est effacé déjà, des cellules de mon
      cerveau
sont débranchées, la truffe de mon chien se lève de sur
      mes pieds.
J’aurais pu trancher mon destin d’une autre manière
que par le passé, me défaire de mes serments d’amour,
ou du moins rompre, me détourner de la peur à laquelle
je suis suspendu, quêtant un refuge. Je me vois, je regarde
l’océan des toitures, les signes du vent, les nuages levant
au loin. Je suis un autre, si je fus moi-même
naguère. L’oiseau n’est plus seul,
mais un vol de passereaux.


p.143
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J'écris l'ouverture d'un long chant
sur la fraîcheur de ta peau, sur tes yeux étranges
où se joignent le Sahara, l'Atlantide
et même la résine des pins roulée en perles.
Et si d'une musique, je prolonge le cours de ma chanson
la pleine harmonie se brise, d'une fissure
où roule la goutte claire de ta jeunesse.
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Pentti Holappa
On ne vit pas en vain quand on laisse derrière soi une tâche sur une feuille, ou un nom dans l'histoire. Tant d'autres se font traître ou assassin et pourtant il n'en reste aucun souvenir même pas dans le procès-verbal d'un tribunal.
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La bannière jaune (1988)



UN MOT DANS LA LANGUE

Ce qui existe est un message de ce qui pourrait être,
et se trouve dans l’inexistant comme un mot dans une
      langue
qu’on n’a pas encore ou jamais songé à entendre.
On ne sait même pas ce qu’il faudrait entendre.


p.139
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Le mois de mars arrive, tous membres craquants,
il vente encore la nuit comme le soufflet d'une forge jadis.
Au matin il s'éveille, le soleil sur le front, le regard pétillant
de la passion bleue qui se tend dans
les muscles des jeunes gens aux cheveux de laine,
puis il s'échappe en rire sous un vaste ciel.
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Point d’ancrage 1994
LA BARGE DE POSE DE CÂBLES


Une voiture vient buter contre la poutrelle métallique.
Devant la fenêtre la barge aux tourets de câbles rampe,
 lente,
haute comme une tour. Il pleut. On annonce l'hiver.
L'obscurité. Je suis malheureux. Pire encore je suis.

Une méduse ondule dans la mer, brûlante
membrane. Lucide je vois s'ébrouer dans mes pensées
des vagues qui se brisent sur le rivage plus anonyme que
 naguère.
Sous le manteau quelqu'un joue aux dés, l'Esprit du Jeu.

p.182

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Parfum de fumée (1987)
Parole de ruine


Je veux venir près de toi.
Je ne trouve vrais
ni la pierre, ni le monde ni les distances.
Le coup d'aile d'un oiseau dans le ciel de grand gel dure
aussi longtemps que la ville aux murs coulés de béton
Il m'a fallu me briser avant de perdre mes illusions.
  Aujourd'hui,
je suis certain que tes cellules m'entendent quand je parle
la langue aux mille sens des ruines
en moi-même, mais rien que pour toi en vérité.

p.117
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CINQUANTE-DEUX (1979)
poème 35

Le rayonnement gamma bombarde les murs et les vitres.
La naissance de l’univers n’a pas cessé.
L’explosion se poursuit. Le silence fait grand vacarme dans les corridors,
le flot puissant siffle à travers les jointures de la maison.
Dehors le ciel écarquille son regard bleu
malgré l’effondrement des continents sous la voûte.
L’horizon vacille.
J’apprivoise cette tempête insensée :
deux baguettes de bois en croix
et voici les fondations d’un brise-lames.
Sans y croire je cherche à tâtons une grande aiguille
pour la piquer dans le pilier transparent.
Quelque part noyé dans ma mémoire un regard se cache,
une phrase amicale, et d’entre ces vestiges
je me fabrique une illusion multiple :
elle a quatre facettes au moins, sinon quatre destinées,
d’où vient à s’ouvrir une porte, les amis entrent,
ils s’installent dans les chambres de mon cœur.
Je leur dirai que ce lieu n’est pas sûr,
ce n’est qu’un logement de location
qu’on n’entretient plus depuis bien longtemps.
Mon adresse n’est pas celle-ci,
je me suis déguisé comme si j’existais.
Je me trompe moi-même, je ressens la douleur et j’attends
la chaleur d’une peau contre la mienne.

p.57-58
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Le beau vide est taché de traces de doigts.


p.152
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CINQUANTE-DEUX (1979)
poème 29

L’amour parle sous tant d’apparences.
Un train illuminé traverse la chair de la nuit sans bruit,
le ciel se voûte à l’invisible,
la terre gorgée d’eau halète sans relâche,
les étoiles frissonnent,
une ville flamboie au centre névralgique de l’âme.
Un cri solitaire est emprisonné derrière les dents,
il descend la gorge en tourbillonnant puis il arrache les cellules
dans sa bourrasque, jusqu’à l’explosion.
Ensuite, il pleut comme dans l’espace planétaire,
la poussière, le silence.

p. 53
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UNE VILLE ILLUMINÉE DANS LA NUIT ARCTIQUE (1985)

OUI OU NON

Pour l’essentiel, chaque phénomène a une forme simple ;
le bois brûle, l’eau gèle, toute matière se dissout,
soit tu m’aimes soit tu ne m’aimes pas.

Tes torches de résine brillent même à travers la pierre,
je me réfugie dans le rêve, pourtant j’entends ta voix
quand je sais que tu n’es que songe, chimère.

Je souffre comme tout homme souffrirait
de ton absence, telle une brûlure dans ma chair,
elle aigrit mon vin, elle ensable mes poèmes.

Enfin quand tu reviens, tu descends d’une autre étoile,
je m’aperçois que tu n’es pas tout entier en ce lieu,
derrière toi devant toi quelque chose erre encore.

Pourtant s’il y avait un destin je lui rendrais grâce
car dès après ma chute tu es venu, tu as brûlé mes yeux,
aveugles à moi-même désormais comme à toute vérité.

Mais tu ne m’aimes pas encore, tu n’oses pas sans doute,
assez pour que la mort ne soit pas, et que je ne sois jamais poussière.
Je ne te demande rien qui dépasse tes forces.

p.103-104
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Si seulement je me souvenais comment on jouit, par quel organe, / et comment on oublie.

Et l’amour : jouissance au premier jour, douleur le deuxième, au troisième la solitude.

Toute chose trouve sa fin.

Je suis malheureux. Pire encore : je suis.

Le vin de messe a un petit goût de sang.
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Un homme sur le toit

Par-dessus la ville es cheminées voilées de crêpe noir
des ombres se précipitent depuis les toits
et les mouettes clabaudent
le ciel broui par le soleil se désagrège


Sur le faîte du toit un homme joue au funambule
sans corde sans balancier et sans pensée
un oiseau jaillit de sa main
et le vent de son front
d'en bas on le regarde le sang glacé
on lui crie prenez l'ascenseur
d'en haut une voix répond priez pour moi ici-bas.
Alors calmement l'homme fait un pas dans le vide
marchant ainsi doucement vers la mer

L'instant de surprise passé
on crie à l'imposteur
arrêtez-le !
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