Pirkko Saisio

ce qu'elle a déjà appris :
les blonds sont des gens bien, les bruns mauvais, surtout s'ils ont le malheur d'être des filles.
Dans les contes, les blonds sont toujours bons ; dans la vraie vie, presque toujours.

Et tandis qu'elle regarde le dégât des eaux, elle est encore trop petite pour élaborer cette idée qui ne lui apparaîtra qu'à l'âge adulte : son papi était encore considéré comme un homme, mais sa mamie n'était plus considérée comme une femme.

Étonnée, elle remarque combien l'amour déçu donne de force à la haine ; combien la haine peut être juteuse, profonde et savoureuse.

Par cette décision prise à la légère, elle allait se clouer à son destin pour des dizaines d'années :
Être coopérative. Être accommodante.
Être mûre pour son âge.
Être ouverte et souriante.
Être un pont entre les enseignants et les élèves, entre les gouvernants et les gouvernés.
S'intéresser. Être soi-même sans être intéressante.
Regarder. Rester soi-même invisible.

Tata Kerttu me montre une image de Jésus
L'image est troublante.
Jésus a une barbe comme les hommes, mais une jupe et des cheveux longs comme les femmes.

Jésus n'est ni un homme, ni une femme.
Jésus est intéressant.

Le profond étang noir est revêtu d'une mince couche de glace. Alors que je la brise, un zeppelin silencieux apparaît dans le ciel violet.

Les cheveux bruns étaient un destin, comme le statut d'enfant unique.

Aimer, c'est un ordre et un devoir.
Mais maintenant, elle tombe amoureuse sans obligation ni attente.

Papi trouve qu'il ne faut pas embêter l'enfant.
Si l'enfant veut être un garçon, alors l'enfant est un garçon.

Quand je serai grande, je voudrais être père.

Elle se justifiait.
Curieusement, elle éprouvait le besoin de se justifier.