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Citations de Robert de La Sizeranne (38)


Car pour aider à la compréhension d'une oeuvre d'art, pour nous retenir un instant de plus devant un détail de sculpture, Ruskin met le monde physique tout entier à contribution, comme il amis tout à l'heure le monde moral. Ici, dans le pli d'un voile et dans sa chute, il voit la loi mystérieuse qui régit les mondes et là, dans la courbe d'un pétale, il a vu la fleur qui annonce un Dieu. Toutes les notions scientifiques ou morales accumulées par les siècles se groupent naturellement autour de l'objet qu'il examine avec vous.
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Lorsqu'un matin de 1877 éclata, rue Lepeletier, la première grande révolte impressionniste, ce fut, dans le public, un éclat de rire, mêlé de cris d'horreur. On avait vu, çà et là, des tentatives collectives de ces révolutionnaires et Ton en avait déjà discuté, mais ils ne s'étaient pas révélés encore avec cet ensemble, cette audace et cette discipline qui, d'une foule, faisait une armée. Les vieux peintres, eux, ne riaient pas.
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En ce sens, inconscient et fidèle, l'art est bien le « miroir de la vie ». Mais c'est un miroir magique où les choses se reflètent tantôt avant quelles ne soient, tantôt quand elles vont cesser d'être.
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Auquel d'entre nous n'est-il pas arrivé, tandis qu'il regardait les peintures d'un misée ou les fresques d'une vieille église, d'apercevoir, parmi les têtes impersonnelles de saints, d'anges, de Dieux, de nymphes ou de satyres, des spectateurs ou le bourreaux, une figure dont il s'est dit : "C'est un portrait !" Il n'aurait su le dire, mais le chose se faisait pour lui aucun doute. C'est qu'il avait reconnu, dans cette figure, des caractères tellement individuels, à ce point particuliers et, par là, si vivants, qu'il lui paraissait impossible que le peintre ait pu les tirer de son imagination, mais certain qu'il les avait pris "d'après le vif", comme on disait autrefois.Et il probable qu'il ne se trompait pas. Cette figure, qui nous frappe parmi les toutes les autres, qui sort du rang pour nous dire : " J'existe, moi, j'ai existé. Je ne suis pas une formule académique comme mes voisins, j'ai vécu ! ..." est bien un portrait.
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Comme Madox Brown arrivait à Londres, on s'occupait encore de ce grand concours commencé, en 1843, pour la décoration du nouveau palais de Westminster et qui n'avait pas produit moins de cent quarante cartons signés des meilleurs artistes du temps. Ce tournoi esthétique est une date dans l'histoire des arts en Angleterre, parce qu'il fit surgir de la foule des chefs encore inconnus. Un jeune artiste formé sans maître, Watts, venait de s'y révéler.
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Ce qui garde, malgré tout, à ces visions ou à ces rêves une valeur historique, c'est qu'ils ne furent pas ceux des seuls artistes et qu'ils échappent, en leurs plus vivantes expressions, à tout ce que l'histoire nous raconte des lois, des règlements, des inspirations de leurs patrons ou de leurs protecteurs. L'art n'est pas seulement universel par son objet : il l'est encore par ses sources. Il ne montre pas seulement mieux la vie universelle d'un temps : il révèle mieux l'universalité des sentiments de ce temps.
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Et pourquoi? Pourquoi le vêtement contemporain est-il si peu sculptural? Pour en trouver les raisons, il suffit de le considérer. D’abord, il est uniforme ; il offre de grands espaces dénués d’ombre et de lumière. Là où le buste de l’homme se creuse, se renfle, se plie et se cambre au gré des muscles grand pectoral, grand dentelé, grand oblique, la redingote n’a qu’un plan. Là où le corps dit : relief, profondeur, polyèdre, ligne ondulée, accent d'ombre, rouages souples de la machine humaine affleurant à la peau, la redingote dit : cylindre. Le tailleur rectifie le buste de l’homme et apprend à la nature comment elle aurait dû construire les jambes : rectilignes. Car autant qu’il est uniforme, le vêtement moderne est artificiel. Non seulement il cache la forme humaine, mais il la contrefait.
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Beauté plastique des figures autant que pittoresque des paysages, — cela s’entend de reste, car si nous voulons qu’elle réside dans le corps humain tel que l’a fait la Nature, est-ce à dire que les types ordinairement choisis par les réalistes représentent la Nature et s’approchent de la Beauté? Voici un gros électeur ou un menu fonctionnaire assis à la terrasse d’un café et qui, d’un geste approprié, prend un bon bock , ou goûte quelque absinthe. Il est courbé sous le poids de maladies ataviques, déformé par les accessoires du vêtement moderne, renfrogné par les passions et les vices de notre temps, les muscles atrophiés par un trop long repos, la peau pâlie et décolorée sous les linges inutiles, la main tremblante d’alcoolisme.... Est-ce là l’homme de la Nature? Et s’il fut jamais au monde un être artificiel, n’est-ce pas lui? Est-ce la femme naturelle, que la morphinomane, ou que la chlorotique, ou que la peinte au filo d'oro , ou que l’émaillée? Est-ce la Nature qui a fait ces mains d’ouvriers modernes, qui a mis ces durillons sur celles du corroyeur et ces bourses séreuses à celles du découpeur sur métaux? Est-ce une teinte naturelle que celle du visage sous la lampe Edison?
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C'est ce qu'ont fait les impressionnistes. Ils ont bien représenté, selon la formule réaliste, les spectacles de la vie moderne, mais en les éclaboussant de tant de couleur, qu'on ne les reconnaît plus. Quand la nature était laide, ils ont tâché de la dissimuler à l'aide de la nature même. Ils ont demandé au soleil d'effacer les lignes disgracieuses, comme autrefois on l'aurait demandé à l'ombre.
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Comment juger d'une architecture nouvelle?
Comment en jugerons-nous? Avec notre goût. Car, pour juger d'une forme nouvelle, nous devons nous garer de deux suggestions : L'une que nous fournit la pure habitude, L'autre que nous inspire le raisonnement pur; la première ayant façonné notre goût, jusqu'à le rendre hostile à toute forme nouvelle, et le second nous faisant défier de cette habitude, jusqu'à l'abdication complète de notre goût. Les deux manières de juger sont fatales, car elles entravent également l'indépendance du seul sentiment qui nous permette d'éprouver la beauté : le sentiment esthétique, alors que la raison ne doit servir qu'à écarter du sujet les entreprises de la raison môme et assurer le libre exercice du goût.
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S'exalter aux qualités "sensorielles" des formes dans l'air et sur la terre, vivantes ou inanimées : lignes, couleurs, valeurs, souplesse, éclat, équilibre, harmonie; parcourir avec sa sensibilité les innombrables nuances colorées ou tactiles dont l'esprit ne peut se faire une idée et que les arts intellectuels : la parole, la description littéraire, l'analyse philosophique, la poésie ne peuvent rendre ou ne rendent que bien grossièrement au regard des arts plastiques; et ainsi, juger de l'Art plastique pour la qualité d'émotion que, seul, il apporte et que rien autre, ni poésie, ni philosophie, ni histoire ne peuvent nous apporter; l'aimer pour lui et non pour elles, pour l'enthousiasme tout sensible qu'il nous fait éprouver, pour la sensation d'une vie plus ardente et plus complète qu'il éveille, et non pour les souvenirs ou les associations d'idées qu'il nous procure, — telle est la méthode employée ici.
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Le témoignage de l'art sur une époque ou sur une race ne peut égaler en précision celui de l'histoire ou de la littérature. Mais il est, en un sens, plus universel; il est plus sensible et il est plus sincère. Plus universel, parce qu'il dévoile des choses ou des gens qui n'avaient pour eux que leur beauté pittoresque et semblaient aux chroniqueurs dépourvus d'intérêt historique; plus sensible, parce que des nuances d'âmes ou des étals qui ne peuvent s'exprimer par l'action, se sont, à leur insu, inscrites dans le galbe délicat des gestes; plus sincère, parce que limage fut toujours moins surveillée que la parole écrite, chacun surveillant mieux sa bouche que ses yeux.
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Les grandes nations, dit Ruskin, écrivent leur autobiographie dans trois manuscrits : le livre de leurs faits, le livre de leurs paroles et le livre de leur art. Aucun de ces manuscrits ne peut être parfaitement déchiffré si nous ne lisons pas aussi les deux autres, mais, de tous les trois, le seul absolument digne de foi est le dernier. Car les faits d'une nation peuvent être triomphants grâce à sa bonne chance et ses paroles puissantes grâce au génie de quelques uns de ses enfants : mais son art ne peut l'être que grâce aux dons communs et aux sympathies universelles toutes de sa race.
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L'auditoire écoutait recueilli, manœuvrant avec la ponctualité d'un peloton prussien pour se porter en face de telle ou telle figure, suivant les indications du mince livre rouge et or. Parfois le ton s'élevait jusqu'à l'invocation. Quelques lointains bruits d'orgue l'accompagnaient en sourdine. Des souffles d'air parfumés de fleurs passaient comme un encens. Les points d'or des mimosas, touchés par des rais de soleil, brillaient dans les mains comme des cierges. Je remarquai que ces voyageuses se tenaient sur la pierre sépulcrale des ambassadeurs espagnols qui ont donné leur nom à cette chapelle. Ce qu'elles lisaient semblait aussi une gerbe de fleurs jaillie d'un passé mort. Quels étaient donc ce livre, cet office inconnu, le prêtre de cette religion de la Beauté? le sacristain, revenu par là, me jeta ce nom: RUSKIN!
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CE n'est pas seulement le geste de l'acteur qui change, dans les portraits, c'est aussi le décor. Il se modifie, selon l'époque, avec une simultanéité telle qu'il semble qu'un même machiniste fait jouer des ressorts pareils derrière toutes ces tètes de femmes. Au début, le fond est uni et sombre, mat et irréel. Les profils ou les faces luisent dans cette nuit, comme des apparitions. Ce sont les Clouet, les Ghirlandajo, les Ambrogio de Prédis, et même les Rembrandt et jusqu'aux Philippe de Champaigne. Un rideau noir, vert ou rouge est tiré derrière la figure humaine. Le monde extérieur n'existe pas et importe peu. Pour être, il suffit qu'on pense, et l'esprit est plus facile à connaître que la nature. L'attention se porte tout entière sur le front, siège de la pensée, sans que rien la puisse distraire.
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L'artiste sort de son atelier; le grand jour tombe sur l'épreuve, et aussitôt l'on aperçoit tout ce que l'homme y a mis de lui. Elle n'est pas fille du hasard et de la matière. L'esprit a fait plus que la matière, la volonté plus que le hasard. Il y a eu collaboration de l'intelligence et du cœur; et parce qu'ainsi il a pu y avoir erreur ou folie, il peut y avoir vérité et amour. Si cette image est laide, nous n'avons rien à dire en sa faveur. Mais s'il est arrivé qu'elle soit belle, de quel nom l'appellerons-nous ? Dirons-nous que ce n'est pas là une œuvre d'art, parce que le vocabulaire la nomme photographie au lieu de la qualifier fusain, lithographie ou sanguine, et parce qu'au lieu de tenir entre ses doigts un petit morceau de bois carbonisé, l'artiste a. en quelque sorte, manié un rayon de soleil ?
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Maintenant regardons les principales œuvres de sculpture parues dans ces dernières années. La première chose que nous constaterons, c’est que M. Rodin a dépouillé Victor Hugo de ses vêtements modernes, comme Chaudet avait fait Napoléon, et que « l’idée bizarre » de représenter un contemporain « les jambes nues » non seulement a survécu à Chaudet ou à David d’Angers, mais s’est revivifiée dans le plus puissant des novateurs.
Il y aurait beaucoup à dire du Victor Hugo de M. Rodin, et le moins que la critique puisse suggérer devant lui, c’est qu’une belle ébauche n’est pas un chef-d’œuvre, ni même toujours la promesse d’un chef-d’œuvre.
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Tel fut Watteau, tel fut Turner, ces gauches constructeurs d’ombres charmantes, ces inconscients casseurs de vitres et ces prodigieux appelants de rêve. L "Embarquement pour Cythère était bien le départ pour une terre nouvelle d’art et de poésie. Les Funérailles en mer du peintre Wilhie étaient bien l’ensevelissement de toute une peinture vieillie et d’un idéal mort. Mais ceux qui firent ces révolutions ne se doutaient pas qu’ils les faisaient. Ils croyaient de bonne foi suivre la grande route quand ils frayaient des trouées nouvelles. Ils ne croyaient qu’agrandir un ancien domaine quand ils découvraient des mondes....
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Un artiste ingénieux peut exagérer ce froncement. Il peut coller le tissu au corps pour le mouler comme a fait M. Marqueste dans son Victor Hugo ou, au contraire, en faire flotter les extrémités pour l'animer; il peut imposer à son héros — poète, historien, chimiste, — une élégance ou bien une agitation qu'un modeste ou paisible savant n'a jamais connues : il n'arrivera pas à traduire les inflexions délicates et subtiles du corps. Il ne trouvera pas dans l'enveloppe moderne les éléments nécessaires à son œuvre. L'artiste qui veut traduire le corps humain par la redingote, c'est un écrivain à qui l'on donnerait pour traduire du Bossuet le code des signaux maritimes ou l'Espéranto.
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On a dit beaucoup trop de mal de la photographie et pas assez des photographes. Il est vrai que la photographie, telle que nous la connaissons d'habitude, a mille défauts qui sont la négation même de l'Art, sans être le moins du monde l'affirmation de la Nature. Elle n est pas plus près de la vérité que de la beauté. Elle exagère la perspective à ce point qu'une grande route, prise de face, fuyant droit vers l'horizon, ressemble à une pyramide, ou qu'une table carrée vue de la même façon paraît quasi triangulaire et qu'une main tendue vers vous est plus grosse que la tête de l'ami qui vous la tend.
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