AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Rudolf Otto (2)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées
Le Sacré

Ce n’est pas la première fois mais je vais encore être obligée de vous parler d’une devinette de papillote. Question : « Qu’obtient-on en croisant un sapin de noël et une pomme ? ». Réponse : « un ananas ». Je n’ai pas pu dormir de toute la nuit à cause de cette devinette. Quelqu’un peut-il m’aider à comprendre ? Ce que j’ai vu, en tout cas, c’est que de la sacro-sainte naissance de Yésus, on en fait peu de cas maintenant, c’est tout réduit à sapin, ananas et gode emballé. Quand donc nous parviendra le grand seigneur ? Michel (Houellebecq) pète ses durites le dimanche, jour détestable de mollesse généralisée, alors que nous devrions louer le ciel par crainte qu’il ne nous éclate à la gueule si nous le méprisons :

« Splendeur de Dieu, éclate !

Je viens de m’acheter une poupée en plastique »





Nous en sommes là. Posez-vous la question : préférez-vous les nuits enfiévrées de fantasmes amoureux, ou les insomnies vides qui signent le néant de votre vie ? Factuellement, that’s the same. Intérieurement, la première option vous refourgue une énergie torrentielle, la seconde vous rend crétin des alpes. Le même écart sépare la civilisation du sacré de la civilisation pseudo-laïque. On nous raconte que la deuxième option vaut mieux parce qu’au moins « on ne tue pas des innocents ». Foutaises. Combien des vôtres sont déjà morts, et combien d’entre vous mourront d’un cancer civilisationnel ? On tue toujours autant mais comme des frigides, ça ne fait même plus plaisir à ceux qui restent vivants pour contempler le résultat.





Ici, Rudolf Otto nous raconte ce que c’est que le sacré –preuve que ledit sacré devait être déjà bien dégénéré à son époque qu’on se sente obligé d’en rappeler les bases. D’ailleurs, Rudolf avertit d’emblée : « Nous invitons le lecteur à fixer son attention sur un moment où il a ressenti une émotion religieuse profonde et, autant qu’il est possible, exclusivement religieuse. S’il en est incapable ou s’il ne connaît même pas de tels moments, nous le prions d’arrêter ici sa lecture ». Je suis d’accord, on ne devrait pas donner à croquer les merveilles du divin à ceux qui n’ont pas de dents, ils croiraient encore qu’on veut leur arracher celles qu’ils n’ont plus. Mais c’est pas vraiment de dieu dont il est question ici –c’est de l’aura d’une civilisation jusqu’à ce qu’elle tombe sur la petite tête individuelle, la tienne, la mienne, celle du voisin et qu’elle lui fasse voir le miracle de l’existence au-dessus de ses bocaux de tripes de caen. Qui encore me répétait hier « peu importe les moyens, ce sont les fins qui comptent » ? Personne, sans doute, mais ça aurait pu se produire.





Otto recommande aux seuls avertis de l’émotion religieuse de lire son livre et il fait bien. L’écriture emmerde et finira d’étrangler les ricaneurs dans leur bave laïque. Retracer l’historique du sacré d’après des bases étymologiques n’est pas convaincant. Les références sont maigres et plus philosophiques que religieuses. On lira beaucoup causer de Schleiermacher, Fichte, Platon, Hegel, etc. Une belle tentative est toutefois esquissée dans le sens développé par Jean-Charles Pichon : union des opposés pour nouveau syncrétisme. Citons ce passage : « Les éléments non-rationnels qui restent vivaces et vivants dans une religion la préservent de dégénérer en rationalisme. Les éléments rationnels dont elle est abondamment saturée la préservent de tomber dans le fanatisme ou le mysticisme ou d’y demeurer et l’élèvent au rang de religion qualitativement supérieure, cultivée, de religion de l’humanité ». Foiré Otto, nous avons chu dans le rationalisme. Tu aurais dû mieux écrire. Mais le numineux, c’est peut-être fait exprès qu’il soit si difficile à communiquer ?

Commenter  J’apprécie          142
Le Sacré

Je veux tenter de retenir quelques éléments de définition du numineux tel que le qualifie Rudolf Otto. Le mysterium tremendum dans un premier temps, autrement nommé « le mystère qui fait frissonner » ou l’effroi mystique, la « frayeur de Dieu » largement relayée par l’Ancien Testament notamment. Le mystère est aussi le « tout autre ». En tête de chapitre, Rudolf Otto cite sur ce point Tersteegen : « Un dieu compris n’est pas un dieu ».

La majestas ensuite, l’absolue supériorité de puissance. Et l’énergie finalement : « il se fait sentir d’une manière particulièrement vive dans l’orgè ; c’est à lui que se rapportent les expressions symboliques de vie, de passion, de sensibilité, de volonté, de force, de mouvement, d’excitation, d’impulsion » .

A ces trois éléments qui relèvent de la forme du numineux, Rudolf Otto y ajoute comme qualificatif le fascinant, fascinans. Autrement dit, le sacré effraye et fascine à la fois.Une autre caractéristique est « l’énorme », au sens d’épouvantable ou sinistre, maléfique et imposant, puissant et étrange, surprenant et admirable, donnant le frisson et fascinant, divin et démoniaque, et « énergique ». Pour chacune de ces caractéristiques, Rudolf Otto s’appuie sur les textes bibliques et sur les philosophes qui l’ont précédé, de Sophocle à Schleiermacher.



Je ne note rien de la suite de l’essai, je n’en ai rien retenu mis à part un court chapitre sur la manifestation du sacré dans l’art, qui se caractérise alors par le sublime et le grandiose, le geste noble, dont le sentiment du solennel existe depuis l’érection des premiers mégalithes (premières œuvres architecturales). Rudolf Otto souligne que l’on utilise volontiers le terme de « magique » pour certaines œuvres d’arts décoratifs notamment. Le numineux s’associe alors parfois au sublime et dépasse le magique – l’auteur prend pour exemple des statues du Bouddha, la peinture paysagiste et la peinture sacrée des dynasties Tang et Sung en Chine, le gothique en Occident.

Selon Rudolf Otto, l’art est un moyen indirect d’accéder au sacré. En Occident, les deux moyens d’accès directs au sacré sont l’obscurité et le silence. R. Otto cite ensuite le vide spacieux (le désert) comme moyen d’accès direct au sacré, et se réfère à l’architecture et à la peinture chinoises qui savent laisser place au vide dans leurs œuvres.

L’auteur s’attache ensuite à la musique et souligne que l’élément musical le plus sacré est le silence absolu et prolongé. Il est difficile de ne pas noter le parti pris de Rudolf Otto à la fois dans ses exemples d’art sacré – il ne justifie pas vraiment ce qui distingue la présence du sacré du goût personnel, mis à part le sentiment intime (et inexprimable) qui en résulte. Et surtout à maintes reprises dans l’ouvrage, le christianisme est explicitement cité comme la religion spirituellement supérieure à toutes les autres. Pour un homme qui a consacré sa vie à travailler en parallèle sur les religions asiatiques et occidentales – il a publié par ailleurs Mystique d’Orient et mystique d’Occident – cette apologie chrétienne a eu tendance à m’agacer. L'auteur tient là son rôle de théologien luthérien du début du XXème siècle.
Commenter  J’apprécie          60


Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Rudolf Otto (31)Voir plus

Quiz Voir plus

Retour au sens premier ... 🧐 📖

Une polémique fait rage. Vous êtes dans l'œil du cyclone :

en pleine tourmente
ouf ! un moment de répit

5 questions
83 lecteurs ont répondu
Thèmes : expressions françaises , sens , Faux amis , bisous , bisous , baba yagaCréer un quiz sur cet auteur

{* *}