Une peine immense le tenaillait, l’écartelait, le déchirait, le martyrisait et le brûlait. Son cœur se brisa et le goût de la cendre se répandit dans son corps, le chagrin l’avait consumé.
Mais Isaac n’était rassuré qu’au moment où il se retrouvait seul, dans sa chambre d’adolescent, à dévorer des livres par centaines. La lecture constituait pour lui une échappatoire. Elle lui permettait de survivre dans ce monde, qu’il considérait comme un territoire hostile.
Isaac, de son côté, ne comprenait toujours pas ce qu'il se passait. Il avait rencontré beaucoup de déconvenues durant son enfance et son adolescence, cependant il restait un homme rationnel. Tout devait posséder un début, une fin et surtout un fonctionnement bien précis. Le besoin de tout contrôler représentait l'équilibre de tout son être. Néanmoins, il se rendait à l'évidence qu'aujourd'hui, il se trouvait devant une situation surprenante qui dépassait son entendement.
Au royaume d'Arysmeïl, le temps n'avait pas d'importance, les arysmeïliens vivaient des centaines d'années et parfois même des millénaires pour les plus chanceux. Par conséquent, si le temps n'avait pas de droits sur la vie alors il n'en avait pas non plus sur la vengeance de Kamjiyn. Elle était la reine déchue, celle qui fut bannie de la citadelle tandis qu'elle dominait Arysmeïl en semant la terreur au sein du royaume.
Il avait franchi les barrières de son cœur comme un taureau chargeant la foule. Et aussi insensé que cela puisse paraître, elle adorait ça. Le tumulte d'émotions et de sensations qu'il faisait naître en elle avait un goût aussi sucré qu'acide. Elle mourrait d'envie d'y goûter et de s'y jeter à corps perdu. Pour lui, elle pourrait endurer mille tourments. Pour lui, elle pourrait perdre la vie.
Tandis qu’un aigle royal incarne la beauté, la force et le prestige. C’est aussi le seul oiseau à voler face au soleil sans en redouter les rayons.
- (...). Tu n'es pas commun, Isaac. Mais ça, je pense que tu le sais déjà.
Il haussa les épaules avec sa nonchalance coutumière. Cette remarque-là, il l'avait entendue toute sa vie. De la bouche de ses camarades, de ses instituteurs et parfois de ses amis, même s'ils étaient peu nombreux et souvent de court passage dans sa vie.
- Oh oui, je sais que tu me pensais naïf, pauvre et par-dessus tout stupide. Je me demande d'ailleurs toujours pourquoi tu ne m'as pas laissé mourir sur le plancher de ma cabane comme tu comptais le faire si je ne t'avais pas confié ce que je ressentais pour toi ce jour-là !
- [...] Elle était bien vivante quand je l'ai trouvée et elle m'a demandé de te dire...
Il posa une main sur son bras pour l'empêcher de poursuivre. Son coeur battait à tout rompre dans sa poitrine au point qu'il le sentait taper contre ses tempes.
- Tu me fais mal !
- Je n'ai pas le temps de te dorloter, Elyam ! Sais-tu au moins où nous sommes ?
Elyam fronça les sourcils.
- J'imagine que nous sommes à Vitalya.