- Rien ne crie plus "J'en ai rien à faire de votre menace" que de se montrer en pyjama.
- Plus une amitié est forte, plus vite elle se dissout, déclara-t-il. Les amitiés moins solides endurent plus de choses. C’est le revers de la médaille.
« Aie tes propres standards, Basilia. Accroche-toi à eux, mais reste toujours prête à prendre une autre direction. C’est pour ça qu’on trace des limites dans le sable, pour pouvoir les déplacer au fur et à mesure qu’on grandit. Les idiots rigides se brisent en deux, et ma petite-fille n’est pas une idiote. »
C'était le mauvais moment pour me détendre.
Il m'attire dans une étreinte et ses lèvres s'écrasent sur les miennes, assez fort pour les meurtrir. Cela ne me suffit pas. Je lève les mains et agrippe ses bras pour garder l'équilibre, sur la pointe des pieds. Il émet un petit bruit qui vibre dans sa poitrine et passe un bras autour de ma taille pour me serrer plus fermement contre lui. Est-ce la dernière fois que je le toucherai? Il me relâche, mais pas avant d'avoir porté les lèvres à mon oreille, sa barbe légère éraflant ma peau.
- Tu reviendras, m'ordonne-t-il.
- Oui.
J'évite soigneusement le regard de mon frère quand je m'arrache au roi.
- Bah merde alors, dit Drummond.
- Comment est-ce que ça peut marcher? chuchote Glace d'une voix trop forte. Il est si grand et la gamine est si petite.

- Quand j'ai eu neuf ans, Mère est venue dans ma chambre et m'a dit que j'avais le droit de sortir à l'extérieur, à condition de ne montrer à personne mon visage. Je n'arrivais pas à croire à ma chance. Ma liberté, juste en gardant le secret sur mon apparence ? Je me disais que ce serait facile. Je courais dans les prairies, je grimpais aux arbres, je savourais le parfum des fleurs. J'explorais le village.
Je ferme les yeux pour raconter la suite ; Olandon est le seul à être au courant de cette histoire.
- Il y avait une fille, sous un arbre, qui jouait à un jeu avec des galets. Elle m'a demandé si j'avais envie de jouer, moi aussi. J'y suis retournée chaque jour pendant une semaine, et à chaque fois qu'elle demandait à voir mon visage, je refusais.
Je ravale mes larmes à cette évocation, et continue en chuchotant :
- Mais je n'avais jamais eu d'amie, avant. Alors à la fin de la semaine, j'ai fini par céder et je lui ai montré mon visage.
C'est amusant de jouer les commères - tant que ce n'est pas à propos de vous.
Mon instinct de survie s'était visiblement fait la malle, je n'avais plus aucune volonté de cacher ma haine à son encontre pour faciliter ma fuite.
- Qu'est ce qui vous amène sur Osolis, roi Jovan?
Ma voix tremble.
- Toi, répond-il calmement.
Une large main se pose sur ma cuisse.
Je la repousse.
- De quoi avez-vous besoin?
- Toi.
Namas hoquette et le Satum Jerin toussote pour dissimuler ce qui ressemble fort à un rire.
- Est-ce que le roi de Glacium sait dire autre chose, je me le demande.
Je ne me suis jamais autant amusée de toute ma vie.
Ce n’est qu’après, quand j’ai baissé ma garde, que je peux admettre la vérité. Je ne me suis pas cachée parce que je n’en avais pas fini avec la flèche. Je me suis cachée parce que cet endroit et ces gens commencent à me donner l’impression d’être chez moi.
—Laisse-moi te soigner.
Son visage fut parcouru d’une expression de surprise, puis de confusion, avant qu’il ne fasse la grimace.
— Pourquoi ?
Je posai la tête contre son torse, éreintée plus que de raison. Je laissai ses battements de cœur réguliers me bercer. J’étais presque sûre que c’était de ma faute s’il avait été roué de coups. Son comportement, la plupart du temps, était resté un mystère pour moi, mais ce que je savais en repensant à nos diverses interactions, c’est qu’il avait toujours pris la décision de faire le moins de mal possible lorsqu’il avait eu le choix. Les yeux fermés, je décidai de lui dire la vérité.
— Parce que même si tu es le bras qui inflige la douleur, tu n’en es pas le créateur