Citations de Wilfred R. Bion (290)
Supposons que la réalité soit un chaos sans signification. L’apparition de l’ordre et de la cohérence peut sembler caractéristique du système déductif de l’observateur humain et rapporté comme s’il s’agissait d’un aspect d’une « conjonction constante », observé de l’extérieur. De plus, que veut dire « à l’intérieur » et « à l’extérieur » ?
Il y a une pérennité remarquable de la capacité humaine à croire en Dieu. La Religion fournit une source continue de recherche. La persistance de la croyance est utilisée par certains comme argument en faveur de l’existence de Dieu -comme si un individu ne pouvait pas croire, et encore moins l’espèce humaine, dans l’existence et jusqu’à l’adoration d’une réalité proche d’une façon ou d’une autre de la réalité de la pulsion humaine et animale à adorer.
L’avantage de recourir à l’emprunt d’un terme mathématique comme « vertex » est qu’il permet de s’adresser à ces insensés qui sombrent dans la confusion si vous parlez du « point de vue de l’odorat ». C’est très agaçant que quelqu’un vous interrompe pour dire « Mes yeux ne sentent pas » ou « Mon odorat ne peut rien voir ». Mon agacement n’arrange rien non plus.
Je suis fatigué, et j'en ai marre, d'entendre des théories psychanalytiques. Si elles ne me renvoient pas à la vraie vie, elles ne me sont d'aucune utilité.
Le domaine des idées, y compris les pensées et les sentiments de toute sorte, concerne la psychanalyse.
Il me semble valoir la peine de préserver l’expérience analytique, la vraie chose, la chose de base, la chose fondamentale et de la communiquer à autrui la semaine prochaine, l’année prochaine, le siècle prochain et peut-être même dans plusieurs siècles -non pas pour informer, mais pour faire voir quelle sorte de direction nos pensées et nos êtres empruntaient et que d’autres emprunteront pour bien longtemps encore, dans la mesure où ils seront encore là pour la voir.
Dès que j’entends répéter, « Oui, je sais » ou « Vous savez bien », cela m’attriste car je devine le mal que je vais avoir à obtenir ou à communiquer ce que je voudrais savoir ou communiquer. Il semble y avoir si peu de place pour ce que l’on ne sait pas puisque tout le monde sait, moi inclus.
Par rêveur j’entends la personne qui recueille cette « pensée vagabonde ».
Commençons par l’idée que l’énoncé n’est jamais juste ou faux, mais uniquement qu’il a du sens. Juger l’épisode comme test empirique d’une hypothèse mène à une impasse. Mais si on l’envisage comme un énoncé visant tout d’abord à lier une conjonction constante et, ce faisant, à constituer la première étape vers l’établissement du sens de la conjonction constante, certains aspects du dit épisode s’éclaircissent.
Si la pré-conception est psychanalytique, il y a de fortes chances que des observations faites sous son influence paraissent se rapprocher d’une théorie psychanalytique, puisqu’en fait elles en dérivent. Cela équivaut à un raisonnement circulaire. Je n’ai pas d’objection contre le raisonnement circulaire même s’il comporte des dangers […].
L’observation précède l’interprétation, mais également […] elle est de première importance, car si l’analyste est capable d’exactitude dans ses observations, il y a de l’espoir.
La tentative visant à fuir l’expérience d’un contact avec des objets vivants par la destruction de la fonction-alpha laisse la personnalité dans l’incapacité d’avoir une relation avec tout aspect d’elle-même qui ne ressemble pas à un automate.
La peur de la peur, de la haine et de l’envie est si forte que des mesures sont prises pour détruire la prise de conscience de tout sentiment, même si cela équivaut à se donner la mort.
En pratique analytique, il faut considérer tout énoncé comme étant une transformation. Même un mot isolé tel que « chat » accompagné de mouvements, intonation, etc. est la transformation d’une expérience émotionnelle, O, en un produit fini, Tβ.
Les attaques contre la fonction-alpha, suscitées par la haine ou par l’envie, détruisent toute possibilité d’un contact conscient du patient avec lui-même ou avec un autre en tant qu’objets vivants.
Dans notre travail, O doit toujours être une expérience émotionnelle, car il est admis en psychanalyse que le patient recherche notre aide vis-à-vis d’une difficulté émotionnelle et que c’est donc de cela qu’il va vouloir nous entretenir.
L’axe horizontal est incomplet et, de la sorte, divisé en colonnes indiquant que la série est extensible. La nécessité d’une extension et la manière de la faire restent à déterminer à l’usage.
Dans la méthodologie psychanalytique, le critère n’est pas de savoir si tel ou tel emploi est correct ou incorrect, pertinent ou vérifiable, mais s’il favorise ou non le développement.
L’expérience émotionnelle du petit enfant est précipitée par la juxtaposition : 1) d’une pré-conception innée (ou connaissance a priori) du sein, une sorte de « pensée vide » en attente d’être « remplie » ou « saturée » par la réalisation du sein, et 2) d’une non-réalisation du sein, le nourrisson n’éprouvant d’abord qu’un besoin du sein non satisfait -et la faim, l’angoisse et la peur de mourir qui l’accompagnent. L’union de la pré-conception et de la non-réalisation engendre une « proto-pensée » qui présente les caractéristiques d’un élément-bêta : un « mauvais sein », -non-sein ou « mauvais sein » -besoin d’un sein ressenti comme une chose en soi. Cette proto-pensée peut être évacuée immédiatement au moyen d’une identification projective excessive, ou tolérée et « pensée » ; dans cette seconde hypothèse, la proto-pensée engendre à son tour une première « activité de pensée », sous la forme d’une identification projective réaliste, destinée à susciter chez la mère des sentiments dont le nourrisson ne veut pas. Le « mauvais sein » élément-bêta est projeté dans le sein de la mère, pour y être transformé, converti en élément-alpha, et réintrojecté sous une forme plus tolérable. Une fois réintrojecté, ce « bon sein » élément-alpha peut alors fonctionner comme une véritable « représentation-chose », une représentation du sein distincte de la réalisation du sein comme telle.
La pré-conception est une matrice d’engendrement de nouvelles abstractions.
[avant-propos de François Robert]