Plus on lit des livres de Bion, plus on a l'impression de n'en avoir lu qu'un seul. Je pense pouvoir dire que c'est bon signe.
C'est peut-être une vue un peu rapide et engagée qui me fait penser de la sorte mais il me semble les auteurs médiocres, c'est-à-dire superficiels, n'écrivent que des livres sur des thèmes différents dont on perçoit mal les connexions. Par exemple un Lenoir ou un
Comte-Sponville écrit un truc sur le bonheur, ou sur la tristesse, ou sur l'amour, ou sur la jalousie, enfin des trucs comme ça, comme des sujets qui tombent pour une épreuve du bac. Ce sont des auteurs qui ne pensent pas dans la durée mais qui ne pensent que le temps suffisant nécessaire pour pondre une petite merde consensuelle en cent pages.
Les livres de Bion forment un ensemble cohérent dont on peut suivre l'évolution au fil du temps, au fil des livres. Je ne sais pas s'il existe un livre idéal pour découvrir Bion. Il faut commencer à en lire un par hasard, et puis en lire un autre, commencer à comprendre certaines subtilités, relire l'ancien livre qu'on n'avait pas compris, comprendre d'autres choses, lire un autre livre, élargir encore sa compréhension, et découvrir ainsi un nouveau monde. Comme l'écrivait Bion lui-même :
« Ce livre est conçu pour être lu d'une traite, sans s'arrêter aux passages qui pourraient de prime abord paraître obscurs. Ces obscurités viennent en partie de l'impossibilité d'écrire sans présupposer une certaine familiarité avec tel ou tel aspect d'un problème qui ne sera élaboré que plus tard. »
D'ailleurs, tous les bons livres se lisent de cette façon.