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Critiques de bell hooks (65)
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La volonté de changer

À l’encontre de bien des idées reçues et aussi des positions de certaines féministes, Bell Hooks montre que les hommes sont également victimes de la culture patriarcale qui les mutile, y compris dans leur vie affective, pour les contraindre à devenir des dominants. Elle prône une masculinité libérée, féministe et les invite à changer.

(...)

Conçu à la manière d’un recueil d’articles indépendants plutôt que comme un essai cohérent, cet ouvrage souffre de redites nombreuses qui peuvent décourager la lecture. Cependant, son contenu, novateur et original, mérite largement l’effort de passer outre.



Article complet sur le blog :
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La volonté de changer

Je suis tellement amoureux de bell hooks !



Cet essai est d’une puissance et d’une compassion vertigineuses.



J’adore le féminisme tendre et ouvert qu’elle prône. Revenir sur les masculinités et la violence avec autant d’empathie, c’est bouleversant.



Je recommande fort !
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La volonté de changer

C'est le meilleur livre féministe que j'ai pu lire jusqu'à présent, dans ma courte vie de lectrice.

Je le recommanderais à n'importe qui tellement le sujet est passionnant. Bell Hooks écrit en 2004 et pourtant, ses mots sont terriblement d'actualité.

J'ai particulièrement apprécié le chapitre sur le patriarcat, qui donne une définition précise et explicite de ce qu'est le patriarcat et la manière dont celui-ci exerce une influence négative tout au long de nos vies à toutes et tous, consciemment ou non.

Renoncer aux relations de domination que nous impose le patriarcat pour tendre vers l'amour véritable, la solidarité et une masculinité féministe (plutôt que patriarcale), voilà le beau projet -utopiste mais pas impossible- qu'imagine Bell Hooks pour notre société.

Espérons qu'à sa lecture, nombre d'hommes et de femmes renonceront à la domination, au patriarcat, en faveur de l'amour envers elleux-mêmes et les autres!

C'est un livre qui prône la tolérance, l'écoute et la compréhension, et qui donne envie de croire à d'autres possibles. C'est brillant et nécessaire et ça fait du bien tout simplement.

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Ne suis-je pas une femme ? Femmes noires et..

Cela faisait un moment que je devais me pencher sur le sujet de l'afroféminisme. Trop longtemps ignoré par la recherche/littérature/société, j'admets moi-même avoir pris bien trop de temps à me renseigner sur le sujet alors qu'il est indispensable à la lutte féministe. Et j'insiste sur le mot indispensable, parce que le mouvement féministe ne peut avoir de sens que si toutes les femmes sont prises en compte, avec leurs histoires et revendications propres.



Pour commencer mon éducation, j'ai donc choisi bell hooks. Même si son œuvre est centrée sur le contexte étasunien, elle donne déjà une première idée des diverses oppressions subies par les femmes noires, qui ont mené par la suite au Black Feminism, mouvement né dans les années 60-70, plus ou moins à la même période que l'afroféminisme en Europe.



Mais comment résumer en quelques phrases cet essai si important ? Cela n'est pas possible, mais je vais essayer d'en ressortir les principales idées.



Dans cet essai, l'autrice remonte à l'origine de l’assujettissement des femmes noires aux États-Unis, à savoir l'esclavage, pour montrer comment l'oppression s'est installée, physiquement, mentalement. Elle explique comment les femmes noires ont été placées dès le départ en bas de l'échelle humaine, et comment on les a forcé à y rester tout au long de l'Histoire.



Le plus fou/terrible/contradictoire, c'est qu'on a infligé aux femmes noires les pires horreurs, tout en leur reprochant. On a forcé les femmes noires à assumer des rôles d'hommes en travaillant dans les champs, tout en continuant d'enfanter, de s'occuper des enfants et du foyer, sans jamais se plaindre, sans jamais plier, pour à la fin leur reprocher d'émasculer les hommes avec leur rôle de "matriarche" (qui n'en était pas vraiment un d'ailleurs, voir chapitre 2). On a réduit leur féminité au maximum, les utilisant comme objet sexuel, pour plus tard leur reprocher de ne pas être aussi jolie que les blanches, aussi pure, aussi douce.



Et cette violence, cette oppression, vient d'abord des hommes blancs, mais elle a été perpétuée par les femmes blanches comme les hommes noirs. D'ailleurs, quand les premières revendications féministes ont éclaté, les femmes noires n'étaient jamais prises en compte. Quand les femmes blanches utilisaient le terme générique "femmes", c'était pour parler de la réalité des femmes blanches, pas des femmes noires. Et quand elle parlaient de "noirs", il était sous-entendus les hommes noirs.



Mais pourquoi les ignorer ? Pour garder un statut supérieur. Par vengeance contre les maris infidèles blancs (car il est toujours plus facile de se retourner contre les victimes que contre les agresseurs...). Par assimilation, parce que les hommes blancs étaient foncièrement sexistes et racistes, et que ce système a été perpétué sans réfléchir. Et tant d'autres raisons injustifiées...



De ce fait, les femmes noires ont vécu une double invisibilisation, une double discrimination de sexe et de race, de toutes parts. C'est pourquoi elles ont commencé à se mobiliser ensemble pour créer le Black Feminism. Car une femme noire ne peut pas choisir entre combattre le sexisme ou le racisme, les deux sont intrinsèquement liés. Et la liberté des femmes ne sera jamais acquise sans l'abolition des deux.



Ne suis-je pas une femme ? est donc une très bonne introduction à l'histoire des femmes noires étasunienne et à tous les combats quelles ont dû mener, et doivent encore mener. Cependant, comme nous le rappelle Amandine Gay dans la préface, le contexte est différent en Europe, beaucoup plus empreint par le colonialisme. Je pense donc que ma prochaine lecture sur le sujet se tournera sur le contexte français. Si vous avez des recommandations, n'hésitez pas à me les faire parvenir !
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De la marge au centre : Théorie féministe

Féminisme révolutionnaire et éradication des systèmes de domination



Dans sa préface Nassira Hedjerassi parle, entre autres, de « repenser le féminisme, à l’aune de la question de la classe sociale et de la race », du féminisme radical révolutionnaire, de l’imbrication des systèmes de domination, de « cette intrication à laquelle font face notamment les femmes noires », de solidarité politique non réduite à « la reconnaissance d’une oppression posée comme commune »…



La préfacière souligne aussi « le trait propre à l’écriture » de bell hooks, la mise en avant d’éléments biographiques, d’expériences personnelles, « S’écrire. Se réinventer. S’autoriser ». Elle aborde sa rencontre avec les textes et la pensée de l’auteure.



Nassira Hedjerassi met en avant le risque de dépolitisation, lié à l’institutionnalisation universitaire, de la notion d’intersectionnalité, d’une « dilution de l’axe structurel par la centration sur la construction des subjectivités, ce qui viderait ce concept de sa portée politique et subjective » (P. Hill Collins). Elle parle de « myopie et insuffisance des analyses féministes occidentales » (le terme trop vague d’occidentale ne permet pas de prendre en compte des travaux de féministes radicales d’ici et un crée une sorte de bloc indifférencié).



En parlant de bell hooks, la préfacière souligne certaines positions, « Reprenant des axes de pensée marxiste, elle met au jour les attaches idéologiques et les arrière-fond culturels, qui sont à la fois déterminés socialement et prédéterminent quant à eux, la structure de l’agir individuel comme celle des appareils institutionnels », la relecture historique de la période de l’esclavage, la solidarité et le « commun » au delà des différence. Elle aborde aussi la violence épistémique, la marginalisation des personnes dominées, la non prise en compte des rapports entre pays occidentaux et pays du tiers monde qui affectent les femmes de ces pays, la lutte des femmes qui ne peut être réduite à « la contamination par l’Occident ou la simple imitation par les africaines de valeurs euro-américaines », les productions « coléreuses », les analyses contextualisées historiquement sur les politiques de genres africaines…



Je reste dubitatif sur le caractère expansif de la notion de « classe moyenne » (j’y reviendrai), la notion de « décolonisation des savoirs » ou de « décolonisation de la production des savoirs ».



« les marges sont à la fois un site « imposé par les structures oppressives » mais aussi « un site de radicale possibilité, un espace de résistance » »



Dans sa préface à l’édition de 2000 (le livre a été publié en 1984 – sans compter le temps pour qu’il atteigne la petite et lointaine province française), bell hooks parle de féminisme visionnaire, de la rébellion des femmes contre le sexisme, de théorie féministe, d’« imbrication entre le genre, la race, et la classe », de la nécessité d’une théorie qui « étudierait notre culture depuis une position féministe ancrée dans une compréhension du genre, de la race et de la classe », de critique interne essentielle à tout mouvement progressiste, de langage simple et commun pour répandre les idées, du féminisme calomnié et discrédité, des victoires féministes toujours en danger…



Elle commence ainsi sa préface à l’édition de 1984 : « Etre dans la marge, c’est faire partie d’un tout, mais en dehors de l’élément principal ». Je mets cet élément en relation avec un fil qui parcoure le livre, lutter pour mettre à bas toutes les dominations. L’auteure souligne le manque de complexité, de globalité et d’exhaustivité de la théorie féministe et indique « Tout au long de mon travail, mes idées ont été modelées par la conviction que le féminisme doit devenir un mouvement politique de masse si l’on veut qu’il ait un impact révolutionnaire significatif sur la société ».



Lire aujourd’hui cet ouvrage, et cela reste à la fois nécessaire et passionnant, implique de prendre en compte les contextes socio-économiques, politiques et institutionnels des Etats-Unis (mais pas seulement) des années 80 (et celles plus antérieures), les débats portés par les mouvements féministes et/ou Africain-Etatsuniens et d’autres populations dominées, les points aveugles d’autres discours dont une (bonne) partie du « mouvement féministe blanc » ou du mouvement ouvrier étasunien – débats recoupant ou non ceux qui eurent lieu en France et Europe de l’ouest dans cette période.



bell hooks souligne que les mots d’ordre et les préoccupations mises en avant par « le » mouvement féministe blanc ne correspond pas à la situation de la grande masse des femmes étasuniennes. Elle parle « de femmes au foyer blanches aisées », de classes moyennes voire de femmes bourgeoises. La stratification sociale aux USA est certes différente de celle de l’Europe de l’ouest, je ne pense cependant pas que le mouvement féministe blanc puisse être réduit à ce que dit l’auteure. Une chose est de signifier que les préoccupations et les mots d’ordre ne correspondent qu’aux besoins d’une fraction des femmes – et qu’il est donc injustifié d’en faire l’universel décrété des femmes – autre chose est de contester sa contribution à la subversion partielle aux rapports sociaux. Mais la position de l’auteure à quelque chose à voir avec sa radicalité, « placer la lutte féministe dans un cadre politique radical », le refus de laisser de coté certaines oppressions., la prise en compte de la situation de la majorité des femmes.



Reste que ce type de débats a aussi traversé le mouvement noir, sans qu’il soit possible d’attribuer unilatéralement au coté réformiste ou au coté révolutionnaire une « vertu » que l’autre coté ne partagerait pas. (voir par exemple Caroline Rolland-Diamond : Black America. Une histoire des luttes pour l’égalité et la justice (XIXe-XXIe siècle)). Pour en terminer avec cet aparté, les femmes blanches qui se sont battues pour le droit à avoir un emploi salarié et qui ont travaillé comme salariée subordonnée, non seulement ont mené un combat légitime mais elles ne peuvent être considérées comme bourgeoises sous le prétexte que leur revenu permettait un enrichissement familial.



Combattre le faux universel décrété par un groupe, la sororité affirmée sans prise en compte des différentiations était et reste nécessaire, souligner que le particulier limité ne fait pas sens pour d’autres – d’autant qu’il est porté par des couches plus privilégiées, dénoncer l’uni-dimensionnalité et les trous noirs des analyses et des propositions relève de la lucidité politique et d’objectifs de mobilisations de masse que l’auteure soulève souvent et de manière pertinente dans son ouvrage. J’y reviendrai.



Cependant la dénonciation du caractère unidimensionnel des propositions de féministes blanches doit-être mis en rapport avec l’analyse de la structure socio-économique étasunienne « modelée par la politique raciale de la suprématie blanche ». Il convient de bien entendre l’auteure lorsqu’elle analyse les diverses formes oppressives du sexisme, la non-détermination unique, les marqueurs de privilège de race et de classe, les conditions propres d’oppression des femmes noires, les attitudes condescendantes des unes, les menées pour « silencier les femmes noires », le poids de l’oppression raciste sexiste et classiste.



Les hommes noirs et les femmes blanches peuvent agir « en oppresseuses et en oppresseurs ou être opprimé·e·s » ou dit autrement « les femmes blanches et les homme noirs connaissent les deux cotés ». Les mouvements de libération « pour défendre leurs intérêts » menés par ces deux groupes l’ont été « tout en soutenant l’oppression perpétuelle d’autres groupes ». L’expression de bell hooks est nette et précise, radicale et porteuse d’ambition émancipatrice pour toustes. Elle propose aux femmes noires de critiquer l’hégémonie dominante sexiste, classiste et raciste et partir de leur marginalité « pour imaginer et créer une contre-hégémonie ».



Il y a donc bien un fil, déjà signalé, pour construire une alternative globale, regroupant la majorité des dominé-e-s, construire une sororité pleine et combattante, une universalité réelle et non abstraite. Je souligne la force de ces idées qui irriguent bien des analyses de bell hooks. Une illustration particulièrement bien argumentée de ce que je nommerai un programme d’émancipation, de destruction des rapports sociaux imbriqués de classe, de sexe, de racisation, partant de caractéristiques historiques concrètes et situées. Une volonté affichée d’une égalité sociale qui anéantirait l’ensemble des privilèges.



J’a particulièrement apprécié les critiques de l’auteure sur la focalisation sur l’identité, ses développements sur l’idéologie de la suprématie masculine, les interactions entre femmes, la solidarité politique à construire, les propositions de réelle démocratie, l’estime de soi, les préoccupations économiques et la place du travail, l’alphabétisation et la nécessité d’apprendre à lire et à écrire, l’unification de la théorie et de la pratique – « une praxis féministe véritablement libératrice », les combats contre les violences masculines envers les femmes et contre les enfants, (lire aussi les pages contre les « autres » violences, racistes, militaristes, patriarcales, etc.), l’éradication de l’hétérosexisme, les femmes comme « des êtres politiques »….



Et comme déjà indiqué, l’insistance à s’adresser au plus grand nombre, de prendre ne compte les besoins de toutes les femmes.



Outre le point déjà soulevé, certains éléments me paraissent discutables dont une vision peu historique de l’institution sociale familiale. La famille n’est pas seulement un lieu de « domination sexiste », c’est aussi un lieu d’extorsion du travail gratuit des femmes, le lieu principal des violences sexuelles – contre les filles et les femmes – sans oublier les viols conjugaux. Certes, et l’auteure a raison de le rappeler, c’est aussi un lieu « de solidarité régulier et permanent ». Un rapport social plutôt qu’un lieu, dont ni les un-e-s ni les autres, sauf exception, ne peuvent s’abstraire… Rien n’indique cependant que cette institution sociale puisse être un lieu d’émancipation future…



Quoiqu’il en soit, l’auteure donne sur la parenté des pistes, non confinées à la famille, la « parentalité révolutionnaire », l’égalité entre « maternité » et « paternité », les prises en charges collectives ou communautaires, qui ouvrent me semble-t-il d’autres horizons.



Féminisme révolutionnaire, propagation par la lutte, refus du dualisme, éradication des systèmes de domination… Un livre au souffle chaud du féminisme révolutionnaire.
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La volonté de changer

En 2019, j'avais été conquis par l'essai d'Olivia Gazalé intitulé _Le mythe de la virilité_ (paru en 2017), car pour la première fois je m'exposais à une analyse féministe des ravages du sexisme (patriarcat ou virilisme ?) sur les hommes, outre que sur les femmes. Or je m'aperçois maintenant que bell hooks, théoricienne afro-féministe états-unienne traduite tardivement avec le concours du CNL par un éditeur plutôt éloigné du grand public, travaillait déjà sur le sujet depuis au moins les années 2000, peut-être même depuis la moitié des années 1980...

Le présent ouvrage, publié à l'origine en 2004, est un essai de vulgarisation sur la masculinité patriarcale, qui mêle la propre expérience familiale de l'autrice avec quelques références citées sans faire usage du protocole de la recherche scientifique (pas de bibliographie ni même de notes bibliographiques). En se posant d'emblée en opposition au féminisme « anti-hommes », hooks aborde diverses facettes du patriarcat, en insistant sur l'amputation du développement émotionnel qu'il provoque aux hommes : le patriarcat comme origine de la violence et des rapports inégalitaires, l'éducation patriarcale des garçons par leurs pères et leurs mères, la vie sexuelle inhibée et frustrante pour les deux sexes, le patriarcat et le travail, la patriarcat diffusé par les supports de la culture populaire et les médias. De plus, l'essai possède le grand mérite de proposer une alternative à la masculinité patriarcale, qui de ce fait cesse de paraître une fatalité (une malédiction), en fournissant les clés concrètes pour l'éducation des enfants à une masculinité féministe, à l'avantage de tous.tes. L'idée fondamentale est celle de « défendre l'intégrité des hommes » : le concept d'« intégrité » ayant le mérite de la polysémie – hommes intègres au sens éthique, et développement émotionnel et sentimental du garçon intégré au reste de sa personnalité.

Il va sans dire que le style très lisible et abordable du texte, qui accepte comme une évidence que les hommes aient intérêt à embrasser le féminisme en vue de la « guérison » de leur propre esprit, ainsi que l'évidence de l'avantage incontestable de l'abandon des relations de domination aussi bien entre les genres qu'entre les classes, possède des avantages et des inconvénients. Une lecture superficielle offre un sentiment d'adhésion facile et un certain optimisme quant à une réalisation des objectifs qui serait déjà bien avancée. Par contre, une lecture plus attentive met en exergue autant les spécificités (noire-)américaines qu'un parcours évolutif qui s'avère loin d'être linéaire et univoque dans d'autres contextes. En particulier, la plupart des analyses féministes ultérieures s'avère bien moins optimiste sur la tendance avérée à dépasser les inégalités de genre, ne serait-ce que formelles : inégalités de rémunération du travail, répartition des tâches ménagères, éducation non-patriarcale des enfants, mais aussi inclusion des hommes dans les luttes féministes... Dans ce contexte, le fait d'avoir intitulé le chapitre conclusif de l'essai « Aimer les hommes » relève d'excellentes intentions et d'une stratégie louable mais pour autant d'une certaine naïveté, surtout dans des contextes de forte prégnance des féminicides, d'impunité généralisée des violences sexuelles à l'encontre des femmes et de difficulté à simplement verbaliser celles dont sont victimes les enfants – ces aspects parmi les plus meurtriers du patriarcat n'étant pas du tout abordés dans l'ouvrage. (Cf. cit. d'excipit).
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A propos d'amour

J’ai dévoré le premier tiers du livre, surligné et annoté tellement de passages et de phrases impactantes et claires, qui mettent enfin des mots sur des ressentis qu’on a du mal à expliquer.

Par contre à partir du chapitre sur la spiritualité, l’écriture est devenu un peu trop perchée pour moi, j’avoue. Les nombreuses références à la religion et aux éléments de la vie de l’autrice m’ont aussi moins plu.

J’ai eu du mal à terminer pour cette raison.
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Ne suis-je pas une femme ? Femmes noires et..

Luttes pour l’égalité raciale et les droits des femmes



Dans sa préface, Lâche le micro ! 150 ans de luttes des femmes noires pour le droit à l’auto-détermination, Amandine Gay indique, entre autres, que bell hooks entend écrire « l’histoire des femmes noires, jusque-là systématiquement évacuées de l’Histoire ». Elle parle de réappropriation de la narration, d’« analyse théorique des interactions entre le racisme systémique, le patriarcat et le capitalisme », du sentiment de voir « ses propres expériences validées », de réalisation que « nous ne sommes pas seules »…



Mouvement pour l’abolition de l’esclavage, Sojourner Truth, un « refus de compartimenter les luttes et une réaffirmation de la singularité des femmes noires, qui appartiennent tant au monde des Noirs qu’au monde des femmes », Paulette Nardal, Claudia Jones, Ella Baker, les mouvements des droits civiques et de libération des femmes, l’inextricable liaison entre « oppression de race, de classe, de genre et d’orientation sexuelle », la Coordination des femmes noires (CFN), le Mouvement pour la défense des droits de la femme noire(MODEFEN), Awa Thiam, Affirmative Action…



« C’est donc dans la perspective de participer à la construction d’un mouvement afroféministe propre au contexte français que j’ai accepté avec empressement de rédiger cette préface ».



Amandine Gay parle de « la rhétorique universaliste qui invisibilise les différences de couleur et les hiérarchies qui y sont associées », de race comme construction sociale, des Blanc–he–s qui n’ont pas « pour habitude de penser qu’ils sont elles/eux aussi issu·e·s d’une construction sociale », du racisme qui est plus qu’une question de relations entre individus, d’auto-détermination et de lutte en non-mixité, de l’absence des afro-descendantes ou de leur enfermement dans « des représentations stéréotypiques », du film Ouvrir la Voix, du concept d’intersectionnalité, d’interaction et d’interdépendance des oppressions (ce qui ne me semble pas rendu en français lorsque l’on parle de femmes à l’intersection des discriminations raciales et de genre)…



Je trouve plus que discutable de parler de choix pour les rapports au sein des systèmes prostitutionnels (plus qu’une question de relations entre individus, pour reprendre une expression de l’auteure à propos du racisme).



Contrairement à ce qu’écrit la préfacière le matérialisme n’implique pas « la primauté des rapports de classe » même si le reproche vaut pour bien des écrits de chercheur-e-s se référent au(x) matérialisme(s), et à mes yeux, peu conséquent-e-s… Et si Amandine Gay critique à juste titre les accusations autour de l’« identitaire » et du « communautarisme », je reste dubitatif sur l’expression « nous sommes discriminé·e·s du fait de nos identités ».



La préfacière interroge : « comment se réapproprier la parole et les concepts afin de les rendre opérants dans l’espace francophone ? » et insiste sur la parole des concerné-e-s, la lutte contre la dépolitisation des revendications, l’émergence, par exemple, du collectif afroféministe Mwasi ou la web radio Cases Rebelles, « la non-mixité est assumée et revendiquée comme outil d’émancipation »



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Comme invitation à sa généralisation, je souligne la Note de traduction :



« L’idée que le masculin représenterait l’universel est vivement critiquée par les féministes. C’est une des formes de la domination patriarcale dans la langue française. L’anglais utilise le genre neutre pour les noms, les adjectifs et les participes passés, nous avons choisi de les traduire en adoptant des règles de féminisation. Nous utiliserons donc le point médian quand le terme se réfère aux hommes et aux femmes (opprimé·e·s), le pronom « iel », contraction de « il » et « elle », parfois au pluriel « iels ». Lorsque bell hooks se réfère explicitement aux hommes les expressions seront au masculin, et inversement lorsqu’elle se réfère uniquement aux femmes. Nous avons par ailleurs appliqué la « règle de proximité » selon laquelle l’accord de l’adjectif ou du participe passé se fait avec le nom le plus proche »



Sur ces sujets, :



L’Académie contre la langue française. Le dossier « féminisation ». Ouvrage publié sous la direction d’Eliane Viennot,

Eliane Viennot : non, le masculin ne l’emporte pas sur le féminin. petite histoire des résistance de la langue française

Appliquons la règle de proximité, pour que le masculin ne l’emporte plus sur le féminin !

Éliane Viennot : « Mme le président » : l’Académie persiste et signe… mollement

Katy Barasc, Michèle Causse : requiem pour il et elle



« Une socialisation raciste et sexiste nous avait conditionnées à dévaluer notre féminité et à considérer la race comme seul marquer pertinent d’identification »



Je prend le terme « féminité » (womanhood) dans son sens de construction sociale.



En introduction, bell hooks parle de « notre silence », de la peur de reconnaître le sexisme comme pouvant être tout aussi oppressant que le racisme. Elle revient sur les luttes du XIXe siècle aux Etats-Unis, « Ces femmes noires ont participé aussi bien à la lutte pour l’égalité raciale qu’au mouvement pour les droits des femmes », celles qui ont insisté « sur l’aspect « féminin » de leur être qui a rendu leur sort différent de celui de l’homme noir », les liens rompus avec des féministes blanches pour cause de racisme de celles-ci, la bataille sur le droit de vote qui ne fut pas majoritairement pour toutes et tous, l’étouffement de l’esprit révolutionnaire radical… L’auteure aborde le mouvement des droits civiques des années 1950, la répartition sexiste des rôles, la place du patriarcat noir, l’oppression spécifique, « Iels font semblant de ne pas voir qu’être forte face à l’oppression n’est pas la même chose qu’avoir vaincu l’oppression, cette endurance ne doit pas être confondue avec une quelconque transformation », les intérêts des femmes noires, la différentiation sexuée et raciale, « Personne n’ a pris la peine de parler de la façon dont le sexisme opère à la fois indépendamment du racisme et simultanément à celui-ci pour nous opprimer », l’impérialisme racial, la socialisation sexiste-raciste, des œuvres des écrivaines noires, l’entremêlement des luttes pour la fin du racisme et pour la fin du sexisme… A noter que les rapports sociaux de classe, qui seront parfois traités dans le livre, sont ici passé sous silence. « notre lutte pour la libération n’a de sens que si elle a lieu au sein d’un mouvement féministe qui a pour but fondamental la libération de toutes et tous »…



L’auteure explique pourquoi il est nécessaire d’examiner conjointement les politiques racistes et sexistes depuis une perspective féministe, « examen de l’impact du sexisme sur les femmes noires pendant l’esclavage, de la dévaluation de la féminité noire, du sexisme des hommes noirs, du racisme dans le mouvement féministe récent et de l’engagement des femmes noires dans le féminisme ».



Quelques éléments choisis subjectivement.



1 Sexisme et vécu des femmes noires esclaves



Les femmes esclaves, le viol comme mode de torture courant, la destruction de la dignité humaine lors de la traite…



« le présupposé sexiste que les expériences des hommes sont plus importantes que celles des femmes ». bell hooks rejette les théorisations sur « la destitution des hommes noirs de leur masculinité ».



Le travail des esclaves hommes et femmes, le travail aux champs pour tou-te-s et le travail domestique pour elles, les violences sexuelles et les viols des hommes blancs, le terrorisme institutionnalisé… Je souligne la qualité des paragraphes sur la haine des femmes et ses expressions dans la « sexualité ». La morale sexuelle hypocrite, le corps des femmes « comme égout séminal », les femmes noires mises à nu et fouettées publiquement, les viols des femmes noires par des hommes noirs, la « solidarité » des groupes d’hommes, et le partage d’une « définition patriarcale des rôles sexués », la reproduction forcée…



2 Dévalorisation perpétuelle de la féminité noire



La sous-estimation par les chercheurs/chercheuses des viols et de leurs impacts sur les femmes, la dévalorisation de la « féminité » noire, les différences d’appréciations sur les viols « inter-raciaux », « la femme noire était la cible privilégiée pour les violeurs blancs », le mythe de l’homme noir violeur, la dévalorisation comme « dispositif de contrôle social calculé », les suprématistes blanc-he-s, les lois anti-métissages, les modifications apportées par l’« intégration raciale à la fin du XXe siècle », la défense blanche de la « propriété féminine », l’oubli de l’exploitation sexuelle des femmes noires par des homme noirs, « le souci omniprésent que les personnes noires ont à propos du racisme leur permet d’ignorer de façon opportune la réalité de l’oppression sexiste », le contrôle de la sexualité des femmes noires, les sentiments sexistes envers toutes les femmes, la dégradation de « toutes les activités des femmes noires », le fantasme d’un matriarcat noir, la classe ouvrière noire, les femmes noires comme « voleuses » du travail des hommes noirs…



3 L’impérialisme du patriarcat



Le privilège de tous les hommes « sans considération pour leur classe ou leur race », le sexisme et la non-reconnaissance que « le racisme n’est pas la seule force oppressive qui régit nos vies », être à la fois victimes du racisme et oppresseurs sexistes, les travaux de service domestique comme simple extension du rôle « naturel » des femmes…



Je souligne les paragraphes sur les « leaders noires » et ceux sur les limites (sexistes) des dirigeants noirs masculins, les modifications sociales dans le cours du siècle.



« le racisme a toujours été une force de division séparant les hommes noirs et les hommes blancs, et le sexisme a été une force unissant ces deux groupes », les violences patriarcales, la critique du mouvement Black Muslin, l’aveuglement sur l’impact du sexisme « sur nos modes de relation », le racisme sexuel, « Lutter contre l’oppression sexiste est important pour la libération noire, car aussi longtemps que le sexisme divise les femmes et les hommes noir·e·s, nous ne pouvons allier nos forces pour lutter contre le racisme ». Ceci est par ailleurs vrai dans toutes les luttes contre les dominations et exploitation…



4 Racisme et féminisme, la question de la responsabilité



Le racisme comme outil politique du colonialisme et de l’impérialisme, la construction d’une histoire tronquée et mensongère, l’endoctrinement sexiste et raciste, des femmes considérées comme « Autres », la non confrontation à la réalité du racisme, l’impérialisme racial blanc, le racisme des femmes blanches, « un fait qui n’invalide en aucun cas le féminisme comme idéologie politique », l’assimilation injustifiée entre abolitionnisme et rejet du racisme, « ce que les femmes blanches ont appris à travers leur lutte pour libérer les esclaves, c’est que les hommes blancs consentaient à défendre les droits des Noir·e·s tout en refusant tout droit aux femmes », l’absence de solidarité politique de la majorité des réformatrices blanches lors des débats sur le droit de vote, les sentiments anti-Noirs d’associations de femmes blanches, le travail des femmes noires et la hiérarchie raciale sur le marché du travail, le mouvement de libération des femmes, le mouvement de libération noire, les expériences des femmes réduites à l’expérience de « la » femme blanche, « Dans une nation où règne l’impérialisme racial, comme c’est le cas dans la nôtre, c’est la race dominante qui se réserve le privilège d’être aveugle à l’identité raciale, tandis qu’on rappelle quotidiennement à la race opprimée son identité raciale spécifique. C’est la race dominante qui a le pouvoir de faire comme si son expérience était une expérience type » . Cela vaut aussi, me semble-t-il, pour l’ensemble des dominations, l’universel masculin et le soit-disant particularisme féminin, le communautarisme de la majorité et l’accusation de communautarisme des minorités, l’individu abstrait universel (de fait bourgeois mâle) et les particulier-e-s des autres classes ou autres groupes sociaux…



A très juste titre, l’auteure souligne que le terme générique « de femmes » nie les constructions sociales systémiques et hiérarchiques. Auto-organisation non mixte, « tentative de la part des personnes noires de construire des espaces de refuge politique, où nous pouvons échapper, ne serait-ce que pour un temps, à la domination blanche ». Intérêts et divisions, « une interprétation du féminisme qui ne faisait plus sens pour toutes les femmes » et absence de stratégie « dans laquelle nous pourrions nous unir ».



bell hooks parle de solidarité politique, de processus en devenir, « ce processus commence par la reconnaissance que les femmes états-uniennes, sans exception, sont conditionnées à être racistes, classistes et sexistes à différents degrés, et nous autoproclamer féministes ne nous exempte pas du travail qui consiste à se débarrasser de cet héritage de socialisation négative »



5 Femmes noires et féminisme



Sojourner Truth, la participation des femmes noires aux débats du mouvement états-unien pour les droits des femmes, Mary Church Terrell, National Conference of Colored Wowen, Anna Julia Cooper, Frances Ellen Watkins Harper, l’apartheid de Jim Crow, alliances raciales, égalité sociale, politiques sexuelles, l’antiféminisme de femmes noires, affaiblissement du potentiel révolutionnaire de l’idéologie féministe, l’hypocrisie de certaines féministes, auto-défense des femmes, « engagement à éradiquer l’idéologie de la domination qui imprègne la culture occidentale à différents niveaux – le sexe, la race et la classe pour ne nommer qu’eux… »



Que l’on partage ou non la totalité des formulations ou des analyses, un livre important enfin traduit en français, prélude peut-être à la mise à disposition dans cette langue des multiples travaux des Afro-américaines…




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All about love : New visions

Le livre du mois de mars a encore une fois été une excellente lecture pour moi. All About Love est un essai écrit par bell hooks et qui développe de manière très complète le thème de l’amour. Partant du constat que l’amour n’est plus au centre de nos sociétés mais a été remplacé par le pouvoir et la domination, elle propose de le remettre au cœur de nos vies pour régler les problèmes sociaux que l’on peut rencontrer aujourd’hui dans nos communautés (et notamment le sexisme). bell hooks aborde ainsi de nombreux thèmes et aspects relatifs à l’amour : la famille, le mensonge et l’honnêteté, la spiritualité, la honte, la mort… J’ai trouvé cet essai complet et déculpabilisant, et surtout très inspirant. C’est un livre plein d’espoir que j’ai déjà hâte de relire et auquel je reviendra sans aucun dans les prochaines années : c’est le livre que j’ai préféré de cette sélection !
Lien : http://ulostcontrol.com/our-..
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A propos d'amour

« A propos d’amour » mais qu’est ce que l’amour, comment y accéder, comment lui rendre sa place d’acteur principal sur la scène de nos quotidiens, comment l’amour peut être salvateur aujourd’hui?



Bell Hooks décortique l’amour dans sa notion la plus entière et globale. Qu’il s’agisse de sentiment amoureux dans un couple, de l’amour que l’on se porte a soi, de l’amour du vivant, Bell Hooks s’empare dans un premier temps de la définition de l’amour de Scott Peck « L'amour est la volonté de s'étendre soi-même dans le but de nourrir sa propre croissance spirituelle ou celle d'autrui. » A partir de ce postulat, elle déploie tout un procédé démontrant que l’amour est avant tout un acte, un choix, une disposition, elle évince la conviction que l’amour nous tombe dessus.



Selon elle, l’amour a été pollué et amoché par les médias et par une société patriarcale. Les médias nous font croire que cet acte sentimental est celui des femmes exclusivement, qui elles sont en capacité et pleinement disposées à prendre soin de l’autre, comme si seules les femmes avaient ce besoin d’aimer. “Les hommes théorisent l’amour, mais les femmes le pratiquent”

La société patriarcale quant à elle favorise nettement la consommation, l’accumulation des biens et l’attachement matériel aux sentiments amoureux. Cumuler plutôt qu’aimer, le premier comblerai le deuxième.



J’ai particulièrement apprécié le chapitre sur la nécessité d’être vrai, de se montrer en communauté sous son vrai jour, en toute honnêteté. Cela éviterait, selon elle, bien des déconvenues, des déceptions voire même favoriserait l’accès à l’amour simplement pour un monde meilleur. Elle met un bémol sur la notion de famille nucléaire et mise sur l’ouverture à la communauté pour susciter cette effervescence sincère ce qui provoquerait l’amour à l’état pur.



Avec une humilité sincère, Bell Hooks nous parle d’amour en mélangeant théorie et expérience, que ça fait du bien de se nourrir de cet essai.

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A propos d'amour

Très étonné de ne pas être en accord avec bell hooks cette fois.



Malgré quelques passages intéressants, cet essai ressemble à un roman de développement personnel très hétéronormé et ultra général qui tend un peu trop vers la religion à la fin.



Pas fan DU TOUT.
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Tout le monde peut être féministe

Après avoir découvert bell hooks avec « Ne suis-je pas une femme ? », que je vous conseille fortement, j'ai poursuivi mon apprentissage avec ce petit manifeste de 160 pages qui revient sur une question simple mais pourtant fondamentale : qu'est-ce que le féminisme ?



A travers une quinzaine de chapitres, bell hooks redéfinit ainsi le terme de féminisme, à quoi il sert, en quoi il est important pour tous. Pour cela, elle balaie un ensemble de thématiques qui démontre l'aspect fondamental du féminisme dans notre vie de tous les jours : éducation, droit reproductif, questions de race, de genre ou de classe, violences sexuelles, travail, parentalité... Il n'y a pas un milieu qui ne pourrait pas bénéficier du féminisme.



Mais au-delà de présenter l'importance du féminisme pour notre société, ce que j'ai vraiment apprécié c'est sa réflexion sur le mouvement féministe depuis les années 60. Elle nous parle de ses réussites, mais aussi de ses ratés, de ce qui a servi et desservi la cause. Elle rappelle notamment que pendant longtemps le féminisme n'était pas inclusif, et défendait surtout les femmes blanches, hétéros et riches. Il ne faut donc pas oublier tout ce qu'il s'est passé, mais justement apprendre de nos erreurs pour poursuivre le combat et l'amener encore plus loin.



Son but avec ce livre était d'offrir un texte facilement compréhensible par tous pour que chacun puisse comprendre que le féminisme, ce n'est pas la haine des hommes. C'est un mouvement qui lutte pour la liberté de tous, car le jour où la société patriarcale cessera, tout le monde en bénéficiera : femmes, hommes, non-binaires, enfants. Mais tant que ce ne sera pas le cas, même les droits que nous avons acquis pourront nous être retirés. La preuve est flagrante quand on voit aujourd'hui les mesures prises par le gouvernement contre l'avortement aux États-Unis...



Pour faire simple : lisez ce livre, prêtez-le à vos proches, enseignez ces principes aux enfants, car tout le monde peut être féministe. Tout le monde devrait l'être.
Lien : https://mangeonsleslivres.bl..
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Appendre à transgresser

Tenir la main de ma sœur…



Dans son introduction, bell hooks évoque, entre autres, la peur d’être titularisée dans un poste permanent à l’université, « J’avais peur d’être enfermée dans le monde universitaire pour toujours », le sud ségrégationniste des États-Unis, les trois choix de carrière des jeunes filles noires des milieux ouvriers, « Nous pouvions nous marier. Nous pouvions travailler comme domestiques. Nous pouvions devenir institutrices », son rêve de devenir autrice, l’écriture, l’éducation, l’enseignement, « un acte contre-hégémonique, une manière fondamentale de résister à toute stratégie de colonisation raciste blanche », les écoles ségrégées, la joie d’aller à l’école, la maison, « La maison était le lieu où je devais me conformer à l’image, définie par d’autres, de ce que j’étais censée être », les changements liés à l’intégration raciale, la perte de l’amour de l’école, les formes opposées d’éducation, « la différence entre une éducation comme pratique de la liberté et une éducation destinée seulement à renforcer un système de domination »…



L’autrice aborde l’enseignement, l’« absence de compétences basiques » des enseignant·es, le « système bancaire éducatif » – « basé sur l’hypothèse que mémoriser de l’information et la régurgiter revenait à gagner des connaissances qui pouvaient être stockées et réutilisées plus tard » -, les autres façons d’enseigner et d’apprendre, le travail du penseur brésilien Paulo Freire et ses paradigmes pédagogiques, les programmes Women’s Studies et Black Studies, la pédagogie en rapport avec « la pratique de le liberté », la classe comme « lieu passionnant », la valorisation de chacun·e, l’excitation et l’effort collectif, les questions de réciprocité, le jeu entre « les pédagogies anticoloniales, critiques et féministes »…



« Je souhaite que ces essais constituent une intervention – qu’ils fassent barrage à la dévaluation de l’enseignement, même lorsqu’ils se soucient d’un besoin urgent de changement dans les pratiques enseignantes » ; « Ces essais reflètent mon expérience de discussions critiques avec des enseignant·es, des étudiant·es et des personnes venues voir à quoi ressemblaient mes cours. Ces essais constituent un témoignage sur plusieurs plans de l’éducation comme pratique de la liberté ».



L’autrice termine son introduction sur la transgression, la pratique de la liberté. « je célèbre l’enseignement qui favorise la transgression – un mouvement contre et au-delà des limites. C’est un mouvement qui fait de l’éducation une pratique de la liberté ».







Table des matières



Introduction – Enseigner la transgression



Une pédagogie engagée



Une révolution de valeurs : la promesse d’un changement multiculturel



Accepter le changement : enseigner dans un monde multiculturel



Paulo Freire



La théorie comme pratique libératoire



Essentialisme et expérience



Tenir la main de ma sœur : solidarité féministe



Pensée féministe : dans la salle de classe, en ce moment même



Savoir féministe : les intellectuel.le.s noir.e.s



Construire une communauté enseignante : une conversation



Langage : enseigner de nouveaux mondes / nouveaux mots



Confronter la notion de classe, dans la salle de classe



Eros, érotisme et processus pédagogique



Extase : enseigner et apprendre sans limites



Je choisis subjectivement de ne souligner que certaines analyses de l’autrice. Celle-ci croise des éléments biographiques et des réflexions théoriques. bell hooks aborde, entre autres, la connaissance « comme un champ où nous travaillons toustes », l’enseignement « sans renforcer des systèmes de dominations existants », la désagrégation et l’égalité, la culture comme rapports de pouvoirs, les crispations identitaires, « la peur qu’un quelconque décentrement des civilisations occidentales, du canon blanc masculin, constitue en fait un génocide culturel », le monde multiculturel, « il faut construire une « communauté » afin de créer un climat d’ouverture et de rigueur intellectuelle », la « blanchité », l’expérience, « l’expérience ne donne pas l’expertise »…



Je souligne deux discussions. La première avec elle-même sur Paulo Freire, « Je suis allée vers Freire, assoiffée, mourant de soif (comme un sujet colonisé, marginalisé, incertain de la façon doit il doit briser son statu quo, qui veut le changement, peut mourir de soif », l’autrice parle, entre autres, de pédagogie mais aussi du sexisme de la langue, de paradigme de libération phallocentrique, de classe sociale et de la structure de « notre point de vue social sur la réalité », des difficultés à passer « d’objet à sujet », de la reconnaissance de la subjectivité des personnes exclues, « de ceusses qui ploient le plus sous l’oppression », d’éthique de la lutte, des contradictions parties intégrantes des processus d’apprentissage…



La seconde avec Ron Scapp, l’autrice aborde la conception romantique de l’enseignant·e, le corps et son effacement, la peur d’un enseignement renforçant les hiérarchies, les processus d’apprentissage, « Pour éduquer à la liberté, donc, nous devons défier et changer la manière dont tout le monde pense le processus pédagogique », le plaisir en classe, la dictature des enseignant·es, l’importance de la voix, l’écoute des autres, « apprendre aux étudiant·es à écouter, à s’entendre les un·es les autres », la communauté d’apprenant·es, le temps, l’auto-réalisation…



J’ai particulièrement apprécié le chapitre sur « La théorie comme pratique libératrice », la défiance envers le statu quo, l’acte privilégié de nommer les choses, la pratique féministe et sa dévalorisation dans les contextes universitaires, « l’importance du travail intellectuel, de la production théorique comme pratique sociale pouvant être libératrice », l’enracinement d’un engagement politique pour un féminisme de masse, la théorie comme « siège de douleur et de lutte »…



« Nous devons travailler activement à attirer l’attention sur l’importance de la création d’une théorie qui peut faire avancer le renouvellement des mouvements féministes, avec une insistance particulière sur une théorie cherchant à mettre en avant l’opposition féministe au sexisme, et à l’oppression sexiste ».



Un ensemble de textes plus qu’utiles en ces temps de fragmentation voire d’opposition entre les luttes.



Il reste beaucoup de livres de l’autrice à traduire en français. « Si nos voix ne figurent ni dans la littérature écrite ni dans les présentations orales, nos préoccupations ne seront jamais verbalisées ». Espérons que cette pensée émancipatrice soit enfin diffusée largement…
Lien : https://entreleslignesentrel..
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De la marge au centre : Théorie féministe

Bell Hooks n’est pas aussi connue qu’elle devrait l’être, particulièrement en France. Figure emblématique de l’Afro-féminisme aux Etats Unis elle publie différentes théories féministes se basant sur l’intersectionnalité et la convergence des luttes. Loin du féminisme blanc et petit bourgeois elle met en lumière les questions de racisme, d’orientation sexuelle et de classisme intrinsèquement liés à la domination masculine.

Son livre « De la marge au centre » est particulièrement intéressant car Bell Hooks tente de redéfinir ce qu’est la sororité. Elle étaye ses propos en s’appuyant à la fois sur des extraits publiés par d’autres essayistes féministes ainsi que sur ses expériences personnelles. Pour Bell Hooks et bien d’autres il ne s’agit pas simplement d’affirmer que nous sommes toutes des sœurs et qu’il est impossible d’être en désaccord avec l’une d’elles. Comme si le fait d’être victimes des mêmes oppressions était notre seul point commun alors que nous pouvons nous rassembler autour de convergences plus fortes et valorisantes. Elle écrit très justement : « Les femmes n’ont pas besoin d’éliminer leurs différences pour se sentir solidaires les unes aux autres. Nous n’avons pas besoin de partager une oppression commune pour toutes lutter contre l’oppression. Nous n’avons pas besoin de haïr le masculin pour nous rassembler et nous lier, tant les expériences, les idées et les cultures que nous avons à partager entre nous sont riches et vastes. Nous pouvons être des sœurs liées par des intérêts communs et des convictions partagées, unies dans notre appréciation de la diversité, unies dans notre lutte pour mettre fin à l’oppression sexiste, unies dans la solidarité politique. »

L’autrice développe l’idée qu’être féministe ce n’est pas uniquement combattre pour l’égalité sociale avec les hommes (irréalisable temps qu’il existera des dominations, quelles qu’elles soient) mais bien lutter contre l’oppression sexiste sous toutes ses formes.

Pour exemple Bell Hooks explique que bien que les premiers mouvements féministes visibles aux Etats-Unis aient été portés par des femmes blanches issues de classe moyenne ou supérieure, il ne faut jamais oublier qu’une femme blanche possède des moyens d’oppressions racistes au même titre qu’un homme noir pourra exercer sa domination sur une femme. Tandis que pour les femmes dites « racisées » le patriarcat ne prévoit aucun moyen de domination ou d’émancipation, elles sont donc en proie à toutes les formes d’oppressions (la classe s’y ajoutant souvent).

L’auteure aborde aussi la question du radicalisme et en quoi il est essentiel dans la lutte féministe car le but est bien révolutionnaire et non simplement réformiste. On verra d’ailleurs que certaines réformes qui avaient pour but l’émancipation des femmes finissent par servir le capitalisme et par conséquent desservir la cause (l‘exemple de la légalisation du divorce qui jeta les femmes sur le marché du travail créant ainsi une main d’œuvre précaire et docile est frappant). Nous préciserons bien sûr que ces réformes ont toujours fait progresser le niveau de vie des opressé.e.s mais sans jamais modifier fondamentalement la société et ses mœurs.

Dans cet ouvrage presque autant d’idées que de pages, de quoi faire trembler les lignes de nos esprits. L’écriture est humble, la lecture douce et agréable, c’est dorénavant l’un.e des auteur.e.s qui ne quittera plus mon chevet ni mon cœur. Mon exemplaire de « De la marge au centre », aujourd’hui marqué, plié, aux paragraphes soulignés et aux numéros de pages entourés sera mon ancre dans le tourbillon d’idées et de concepts auquel le monde actuel nous expose chaque jour un peu plus violemment. Alors qu’on a attendu trente années la traduction française de son œuvre (en écriture inclusive !), une chose est sûre c’est qu’il n’est jamais trop tard pour lire Bell Hooks.

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A propos d'amour

Lisez-le. Cet essai est une pépite d'intelligence, bell hooks percute avec chacune de ses phrases. J'ai lu chapitre par chapitre, pour laisser le temps d'infuser et de prendre conscience de chaque chose qu'elle écrit.



C'est vraiment un texte essentiel que tout le monde devrait lire, pour soi-même et entamer peut-être le chemin de la guérison, pour la société et les autres, pour avoir de l'espoir et des pistes pour ouvrir son cœur à l'amour, dans une perspective engagée et féministe.
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Ne suis-je pas une femme ? Femmes noires et..

bell hooks n’aura de cesse de mettre en lumière l’effacement, l’étouffement d’une identité féminine noire aux États-Unis – « aucun autre groupe n’a eu à se construire à travers une identité non existante, comme ce fut le cas pour les femmes noires ».
Lien : https://www.telerama.fr/livr..
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Tout le monde peut être féministe

L'un des meilleurs ouvrages de bell hooks en ce qu'il condense sa pensée et son œuvre. Chaque chapitre est concis, mais ne manque jamais de clarté ou de justesse. bell hooks est maîtresse dans l'art d'éveiller les consciences, et elle a une plume didactique, qui distrait en même temps qu'elle enseigne. Je crois que très peu de personnes ont ce don.



C'est un ouvrage à mettre entre toutes les mains pour que la société avance et comprenne que le féminisme (1) est essentiel, (2) ne peut se lire seul mais bien à l'intersection avec la classe, la race, l'orientation sexuelle, la santé physique et mentale etc. (3) est à la portée de tous dès l'instant où l'on accepte d'ouvrir ses oreilles, son esprit et son cœur.
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A propos d'amour

Terminer ce livre a été une torture.

Déjà c'est très vague Aucun exemple concret si ce n'est l'auteure qui donne à tout bout de champ des exemples sur elle même uniquement.

Ensuite sous couvert de parler d'amour ça ne parle pas d'amour mais de tout ce qu'il fait bien de critiquer de manière très très manichéenne et bien évidemment sans aucun chiffre : les stupéfiants, les riches et les pauvres, le consumérisme... Ensuite la religion et la spiritualité est omniprésente.

Vraiment un vrai calvaire, surtout que ses idées étaient peut-être nouvelles en l'an 2000 mais en 2023 c'est d'un cliché

Peut être à recommander à des étudiants en philosophie qui "découvrent" la vie?
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Ne suis-je pas une femme ? Femmes noires et..

Dans ce livre de bell hooks, on apprend la triste histoire de l'exclusion des femmes noires du féminisme blanc bourgeois au début du XXème siècle. Comment les femmes suffragettes blanches ont-elles pu empêcher les femmes noires de voter, alors même qu'elles se disaient favorables au droit de vote des femmes ? Le titre du livre est donc révélateur de son contenu. On voit que la superposition de plusieurs luttes chez les militantes était extrêmement difficile... En effet, si les femmes ont lutté aux États-Unis contre le sexisme, elles ne se liguaient pas contre le racisme. Longtemps tu, car le combat féministe est notoirement connu comme noble et courageux, on se rend compte ici que oui, être féministe et raciste est possible et qu'à son origine, dans les États-Unis des années 20, il n'était pas aussi pur qu'on pouvait le croire.



On lit cela, puis on lit aussi le statut de la femme noire à la période de l'esclavage, qui, décrite à tort par les historiens comme une prostituée, n'en était pas une puisqu'elle ne recevait pas d'argent pour ça et ne donnait pas son consentement pour aux activités sexuelles. Ainsi, la naissance de "mulâtres" est en fait le résultat de viols commis par milliers, centaines de milliers, par des "maîtres esclavagistes" blancs, mulâtres qui furent considérés comme des esclaves et travaillèrent leur vie durant, sans recevoir d'argent, pour des gens qui avaient le même patrimoine génétique qu'eux, à cinquante pour cent près. L'histoire des États-Unis est incroyablement odieuse, et il faut vraiment tout au long de la lecture se reprendre pour ne pas être désespéré. Un ouvrage essentiel en ce qu'il dévoile une page de l'Histoire demeurant une omerta pour beaucoup, en ce qu'elle remue de traumatisant, et de cruel.
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Tout le monde peut être féministe

Ce court livre est un essai publié en 2020, écrit par une féministe noire afro-américaine que j'aime décidément beaucoup.

Le but de l'ouvrage est selon moi un peu  manqué : faire un ouvrage accessible pour celles et ceux qui n'y connaissent rien au féminisme. Pour leur montrer que ça n'a pas forcément à voir avec l'image que véhiculent les médias et les clichés : les féministes seraient des femmes en colère qui voudraient ressembler aux hommes.

En réalité l'ouvrage, quoique concis et clair, entre beaucoup dans les détails historiques du féminisme américain. J'ai aimé le lire mais je ne le conseillerais pas en première lecture d'initiation au féminisme, il est pour moi assez pointu.

Les grands rappels sont néanmoins les bienvenus. Le féminisme c'est la lutte pour l'égalité des droits; c'est un mouvement qui veut mettre fin au sexisme.

Le  féminisme est négatif dans les représentations alors qu'il a permis de nombreuses avancées dans le monde : droit de vote, accès au travail, à la contraception, à l'avortement, etc.

La notion de sororité est précisée. Les femmes s'entraident au-delà des notions de race, de classe...qui les ont historiquement déjà divisées. Le féminisme "réformiste" a donné du pouvoir économique aux femmes blanches, mais le féminisme "révolutionnaire" va + loin et réclame encore l'abolition du patriarcat, il ne veut pas rester dans le confort de la suprématie blanche. C'est celui qu'on dirait intersectionnel aujourd'hui.

Le féminisme est un combat politique. Il ne peut pas être juste un style de vie, par exemple conservateur : on ne peut pas être féministe et vouloir empêcher l'avortement par exemple. Les droits reproductifs font partie des incontournables du féminisme. (Est-ce que ça contredit un peu le titre? Héhé)

On voit bien avec bell hooks que le féminisme est antisexiste, mais aussi anti-raciste, anti-classiste, anti-impéraliste.

Pour elle le féminisme doit se poursuivre. Elle souhaite des masculinités féministes (qui ne seraient pas fondées sur la domination pour se définir), un mouvement éducatif de masse.

Elle aborde la famille, le désir et le plaisir, explique a quel point le féminisme est redevable aux femmes lesbiennes qui ont été les plus révolutionnaires et ont su montrer que le regard masculin ou la présence masculine n'étaient pas ce qui donnait de la valeur, de la joie ou du plaisir à la vie d'une femme. bell hooks aborde aussi les spiritualités new age du féminisme; son balayage est donc assez vaste.

Elle finit par la conviction profonde que le féminisme ne se fera pas sans les hommes. Elle revendique la fin des dominations et une éthique de la mutualité et de l'interdépendance.

Beau programme...
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