DANS LA VILLE - ÉLODIE FIABANE
Hors maraude, je n’observe jamais la ville. Généralement, je vais du bureau au métro, du cinéma au bar, du supermarché à mon appart. Généralement je suis de passage. Le trottoir est transitoire, à peine un lieu, presque un moyen de transport. Alors je baisse les yeux, je marche vite, je choisis les voies les plues éclairées les plus fréquentées, j’écoute les pas qui me suivent pour identifier leur sexe et leurs intentions. Généralement je suis une femme.
Je verrais l’effet de structure qui l’oblige à accepter sa condition, à se raconter qu’il l’a choisie, à aimer la ville qui produit sa situation.
Nos métiers et nos chômages nous donnent le droit de consacrer un soir par semaine et certains samedis à l’Institution.
J’aurais cru que le bénévolat attirait des gens charitables, croyants ou avec un tropisme de gauche. Bien que sensible à la pauvreté, le bénévolat auquel je participe est aveugle au sacré et à la politique, il est une recherche d’intensité.
Et je me vois déçue, j’espérais les aider, les réchauffer, me réchauffer à leur intensité, aux épreuves qu’ils ont traversées, à leur vie d’autant plus éprouvée qu’elle est éprouvante. Et je me cogne au flegme.
Le corps s’habitue à moins, moins de nourriture, moins de chaleur, moins d’hygiène. Le corps se fait tout petit, se fait à tout, puis il meurt.