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Christian Bourgois Editeur [corriger]

Les éditions Christian Bourgois ont été fondées en 1966. Quelques grands succès comme Le Seigneur des Anneaux en 1972 ou les Versets sataniques en 1988 ont fait la réputation de cette maison. 50 titres sortent en moyenne chaque année. Il s`agit du plus grand éditeur français de littérature espagnole, et propose aussi de la littérature française, des essais, des documents, du théâtre et une spécialité musique.

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Fausse piste

Les éditions Gallmeister ont entrepris de retraduire et republier tous les romans – soit une dizaine – de James CRUMLEY (1939-2008) depuis déjà quelques années. Alors que vient de paraître « Folie douce », prenons un peu de temps pour rembobiner, avec cette première réédition de l’auteur chez Gallmeister en 2016.



CRUMLEY a créé deux héros récurrents pour deux courtes séries parallèles. Deux détectives privés : Milo Milodragovitch et Sughrue, deux types qui vont finir par se croiser au cours des deux séries, mais n’anticipons pas, car ici il s’agit d’une affaire où seul Milodragovitch intervient, et c’est donc sa toute première apparition pour un titre initialement paru en 1975. C’est aussi le premier roman de l’auteur.



Milo, ancien soldat de la guerre de Corée, est de ces détectives désabusés, qui aime jouer avec sa santé physique par l’abus d’alcools et de drogues diverses dans la petite ville de Meriwether (50000 habitants) du Montana. Spécialisé dans le divorce, il n’est plus appelé pour régler des contentieux, se sent partir sur la touche, quand une certaine Helen Duffy fait appel à lui pour un tout autre programme : son frère cadet, Raymond, a disparu depuis trois semaines. Bien vite, ce frangin est retrouvé mort.



Si l’intrigue peut paraître simple de prime abord, il n’en est rien au fur et à mesure du déroulé des événements. De nombreuses bouilles patibulaires vont venir le glacer, des alcoolos, des camés, des putes, bref tout ce qui représente les bas fonds d’une ville étasunienne des années 70, avec son quota de hippies plus ou moins louches.



C’est aussi l’occasion pour Milo de revenir sur sa vie, âpre elle aussi : parents alcooliques puis suicidés, errances diverses et ancien boulot chez les flics, mais Milo est devenu un privé. Privé d’avenir, d’amour, il « volue dans les bars les plus sombres de la ville, y croise les pochetrons les plus ténébreux, la mafia locale, les salauds. « Le bronzage artificiel ne parvenait pas à masquer totalement sa couperose, et la veste hors de prix taillée sur mesure ne parvenait pas non plus à masquer sa bedaine. Ses denses cheveux noirs ne grisonnaient nulle part, mais ils avaient l’air peints au-dessus de sa tête ronde ».



La force démoniaque de CRUMLEY réside dans son imagination et sa patte. Faisant la part belle aux dialogues crus et violents « à l’ancienne », il stupéfie par son humour caustique, noir lui aussi, le tout emballé dans une verve puissante et accrocheuse. Bien sûr, CRUMLEY se moque de la bien pensance, du politiquement correct, et tout le monde en prend pour son grade. Sous un fond noir foncé, il parvient à nous faire nous gausser presque de bout en bout. Un autre de ses talents dans l’écriture est celui d’enchaîner une scène sanguinolente et crade avec un petit moment de poésie, une prouesse où le rythme est brisé immédiatement, occasion pour le lectorat de reprendre son souffle avant une nouvelle immersion dans les rues poisseuses de Meriwether.



L’ambiance générale est ambivalente, entre froideur extrême du fond (personnages déglingués sans futur ni scrupules, relations humaines électriques, coups bas et surenchères permanentes à coup d’argent sale) et drôlerie, presque légèreté de la forme. Car CRUMLEY est un vrai conteur. Il déniche une anecdote pourrie qui désamorce le climat quasi nihiliste du roman. En le lisant, il est difficile de ne pas penser à Jim HARRISON. Deux écrivains de la même génération, tous deux attachés au Montana, et appartenant d’ailleurs à la fameuse école littéraire de cet Etat. Seulement, CRUMLEY possède encore moins de pudeur que HARRISON. Si ce dernier tombe parfois émerveillé devant certains de ses personnages et les « protège », CRUMLEY n’en a rien à foutre, il brandit le jusqu’au-boutisme en arme absolu. Son Milo est un pourri, comme ceux qu’il traque. Il picole jusqu’à s’écrouler et se réveille avec des cachets de speed. CRUMLEY est un peu une version polar halluciné de HARRISON.



Ami.es politiquement corrects, passez votre chemin sans attendre. Les situations, les mots, les relations des personnages de CRUMEY choquent. Il passe la démultipliée sans aucun répit ou presque. Il rend notre monde encore plus dégueulasse qu’il n’est. Seulement, voilà, il maîtrise son récit à la perfection. D’accord il use et abuse de mots grossiers, de cadavres jonchant son récit, tout comme dans les dialogues il use et abuse du mot « vieux ». Mais il nous prend à revers avec ces moments de pure poésie. Le rythme est fort soutenu, étouffant par les scènes, mais cet humour dévastateur vient tout rendre dérisoire, comme si rien n’était finalement important sur cette fichue terre. Par la causticité il fait passer la pilule (de speed), il désenclave une noirceur qui pourrait être totale. Dans une ville où l’on envoie les dégueulis d’ivrognes au labo pour expertise, tout est permis, et donc les voyous se permettent tout.



Rien qu’en lisant ce premier roman vous vient subitement une solide gueule de bois, comme un lendemain de mélange varié d’alcools frelatés et de baisers impudiques avec un cendrier plein de mégots jusqu’à la gueule. L’expérience est étonnante, presque extrême, et pourtant elle s’avère redoutable par son addiction, d’autant que le finale, exceptionnel, est dans ce polar mené de main de maître sans toutefois nous rabibocher complètement avec l’espèce humaine.



SI vous suivez régulièrement Gallmeister, le nom du traducteur, jacques MAILHOS, ne vous sera pas inconnu. Il a en effet traduit pour cet éditeur, entre autres, des auteurs tels que Edward ABBEY, Doug PEACOCK, TREVANIAN, James DICKEY, Henry-David THOREAU, Ross MACDONALD, Jim TENUTO, Barry LOPEZ et pas mal d’autres. « Fausse piste » est depuis sorti en version poche chez Gallmeister, mais si vous pouvez dégoter cette version grand format, faites-le, car elle est agrémentée de dessins somptueux en noir et blanc de CHABOUTÉ qui valent le déplacement et rendent encore plus vivant l’univers poisseux et enivrant – c’est le mot - de CRUMLEY. Pour votre anniversaire par exemple…



« Je taille la route, vieux, c’est tout. Je me tire de cet endroit malsain. Les mecs sont vraiment bizarres, ici, vieux. Ils marchent tous au speed et aux cachetons et à l’héro et à la putain de méchanceté pure. J’ai été dans des tas de coins, vieux, mais j’ai jamais vu un endroit comme ici. On trouve pas d’herbe en ville, sauf celle que les gars cultivent chez eux. L’acide est systématiquement coupé avec du speed. Et c’est la première fois que je vois autant de mecs accrocs à l’héro depuis que j’ai quitté la côte est ».



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Mon chien stupide

Ce livre m'avait été conseillé, et il ne correspond pas à ce que je m'imaginais! L'histoire ne tourne pas autour du chien, mais d'une famille qui part en vrille.

C'est enlevé, sans longueur, ma première lecture de cet auteur, je suis ravi de cette découverte.

Je vais ajouter d'autres titres de l'auteur dans ma liste
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Le Monde de la berge fleurie

Il est trompeur ce titre en français, sans doute beaucoup plus accrocheur que le titre original, mais beaucoup moins parlant. Initialement, ce roman nommé La guerre pour Gloria plante le décor d’une histoire construite autour de Gloria, et de son fils Corey.

Gloria habite la banlieue ouvrière de Boston ; elle travaille dur, et pourtant est à la limite de la pauvreté, comptant ses dépenses au cent près. Elle élève Corey, qu’elle a eu avec Leonard, royalement absent, plus encombrant qu’utile, profitant de temps à autre du gîte et du couvert. Même si elle mord chaque jour la poussière, Gloria se saigne aux quatre veines pour son fils, est là pour lui offrir un avenir meilleur, une vie plus aisée. L’équilibre si fragile va se briser le jour où l’on diagnostique à Gloria une maladie de Charcot ; sans doute le pire truc qu’il puisse arriver ; on en meurt à tous les coups, et de la plus odieuse des manières, à petit feu, en pleine conscience. Gloria et Corey sont conscients de tout. Corey se met au service de sa mère pour l’assister au jour le jour, du mieux qu’il peut. Voilà un garçon qui s’éloigne par devoir de sa vie d’adolescent, qui renonce à des études afin de venir en aide à sa mère. Tout cela sous l’œil pervers de son père surgissant de nulle part, et jouant l’incruste malveillante, autant pour l’une que pour l’autre.

Corey prend sur lui beaucoup de choses ; en tout cas beaucoup trop pour un garçon de son âge. Les amitiés sur son passage ne sont pas forcément toujours désintéressées. Mais il fait face, dans cet univers où il ne fait pas bon être pauvre et malade, où il faut sans cesse se battre contre les assurances pour assurer à sa mère les soins et les aides nécessaires.

Corey mène de front deux combats : celui pour sa mère, mais un combat plus personnel, celui de passer à l’âge adulte, de parvenir à se libérer les présences humaines toxiques, et de se réinventer un avenir.

Voilà un curieux roman à la fois plein de qualités, et de quelques petits moments de flottements. J’ai beaucoup aimé la force qui se dégage de cette histoire pleinement révélatrice de la réalité sociale américaine, la traduction magnifique de Céline Leroy, et ses personnages puissants. Néanmoins, j’émets quelques réserves sur les cent dernières pages que j’ai trouvées brouillonnes, parfois rocambolesques, pas forcément très utiles…


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